Archives de catégorie : Avocat

l’Electricien s’attaquait aux fillettes des beaux quartiers

logoParisien-292x75 28/09/2015

Ce septuagénaire a sévi à Paris entre 1990 et 2003. Trahi par son ADN en 2012, le prédateur aux 18 victimes a été renvoyé aux assises. A retrouver aujourd’hui dans « l’Heure du crime », sur RTL.

Elles sont aujourd’hui actrices, profs d’université, travaillent dans le secteur bancaire ou la production télé. Elles ont, pour la plupart d’entre elles, une vie stable et épanouie, à Paris, aux Etats-Unis ou au Liban. Elles ne se connaissent pas, mais un même drame de l’enfance les lie. Avec 33 victimes recensées, des fillettes âgées de 7 à 13 ans, Giovanni C.est l’un des violeurs en série pédophiles présumés les plus terrifiants que la France ait connus. Arrêté en 2012 après vingt-deux ans de traque et grâce aux progrès de l’ADN, celui que la brigade de protection des mineurs (BPM) avait surnommé l’Electricien a récemment été renvoyé devant la cour d’assises de Paris pour 18 viols et agressions sexuelles sur mineurs, en raison des règles de prescription.

Les premiers faits remontent à 1990. Ce 14 février, Marion*, 12 ans, rentre du collège vers 18 heures lorsqu’elle est abordée par un inconnu dans l’escalier de son immeuble du XVIe arrondissement. « L’homme lui demandait de l’aider à dévisser une vis au-dessus d’un compteur, déroule le juge d’instruction dans son ordonnance de mise en accusation. Il la prenait par les hanches pour la soulever. Puis il lui demandait de se décontracter et lui enlevait son pull, sa chemise, son tricot de corps. » Le pervers procède alors à des attouchements, avant qu’elle ne parvienne à s’échapper. Elle donne aux policiers une description physique sommaire : le suspect est d’aspect européen, bedonnant, avec un accent et des cheveux grisonnants.

Son ADN ne parlera qu’en 2010

Les agressions suivantes révèlent un mode opératoire identique. L’homme agit toujours dans des immeubles des quartiers chics des XVIe, VIIIe ou VIIe arrondissements de la capitale, et se présente comme un électricien ayant besoin d’un coup de main pour atteindre un boîtier, une ampoule. Il propose parfois une pièce de 10 F pour appâter les enfants, qu’il emmène dans un endroit isolé, au dernier étage ou à la cave. Il n’hésite pas à gifler celles qui tentent de résister, répétant au passage qu’il ne faut « rien dire » à leurs parents. Parfois, un bruit dans l’immeuble ou l’irruption d’un voisin met fin aux supplices des petites victimes, dont le nombre grandissant permet au fil du temps de compléter le portrait du violeur : son accent est « latin », il porte un vieux béret et son âge oscille entre 50 et 60 ans.

Les différentes enquêtes, confiées à la BPM, se heurtent à cette description trop vague. Seul indice : un ADN masculin de mauvaise qualité, retrouvé sur les vêtements de quatre plaignantes agressées en 1990, 1991 et 1994. Mais il faudra attendre 2001 et les progrès de la science pour déterminer qu’il s’agit là d’un seul et même suspect, puis 2010 pour parvenir à isoler un réel profil ADN, inscrit dans la foulée au Fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG). Dès lors, les policiers sont certains qu’ils ont bien affaire à un pédophile en série. Et qu’ils pourront le confondre dès son prochain méfait.

Il nie, évoquant un complot

Mais, entre-temps, l’Electricien s’est fait oublier : aucune plainte susceptible de correspondre à lui n’a été enregistrée depuis 2003. C’est finalement une banale altercation qui va faire basculer l’enquête. Le 16 avril 2012, la police du XVIe arrondissement est appelée pour une bagarre entre voisins rue Lesueur. L’homme qui a porté les coups s’appelle Giovanni C. Déjà condamné et incarcéré pour de nombreux cambriolages, ce marginal italien de 74 ans est placé en garde à vue, où son ADN est prélevé et envoyé au FNAEG. Il est condamné dans la foulée à un mois de prison avec sursis et ressort libre. Quelques semaines plus tard, le FNAEG livre son verdict : le voisin violent de la rue Lesueur et l’Electricien ne font qu’un.

Ce coup de chance se double d’un ultime coup du sort : SDF, Giovanni C. était hébergé gracieusement au moment de la querelle de voisinage. Son logeur n’a plus de nouvelles de lui, mais il connaît ses habitudes de marginal. Le 29 octobre 2012, le suspect est enfin arrêté dans un square du IXe. Placé en garde à vue puis incarcéré, il balaye toute accusation de pédophilie, évoquant un complot impliquant une mystérieuse « policière italienne ». Les investigations montrent pourtant qu’aucune agression n’est survenue pendant ses périodes d’emprisonnement. Et Giovanni C. indique aux policiers que pour commettre ses cambriolages il se fait ouvrir l’accès aux immeubles visés en se présentant… comme un électricien.

Réentendues par la police l’an passé, la totalité des victimes n’avaient rien oublié de leur agression. Si beaucoup ont surmonté le traumatisme, certaines décrivent une anxiété diffuse, une peur des hommes, voire des épisodes dépressifs. A ce jour, seules huit d’entre elles ont souhaité se constituer partie civile afin de faire reconnaître leur statut de victime. Parmi celles qui ont préféré définitivement tourner la page, Loubna*, 7 ans à l’époque de son agression en 1991, a néanmoins répondu à la demande d’audition des policiers, et fait face à son bourreau, comme le souligne la juge d’instruction dans son ordonnance : « Présenté dans un groupe et derrière une glace sans tain, Loubna reconnaissait formellement Giovanni C., dont elle avait en mémoire le regard. »

* Les prénoms ont été changés.

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il avait agressé une fillette avec une feuille de boucher

logoParisien-292x75 Carole Sterlé, 25/09/2015

Une petite fille avec un tutu jaune pâle entre dans la salle d’audience de Bobigny, agrippée à sa maman. Ses tresses laissent apparaître de grands yeux curieux. Sa maman la serre contre elle et s’avance vers les juges, accompagnée d’un interprète en langue chinoise.

(LP/N.P.)
(LP/N.P.)

Le président de la 14e chambre correctionnelle s’interrompt : « Dites-lui que ce n’est pas la place d’un enfant d’être là. » La petite ressort avec son père et joue derrière la porte vitrée, tandis qu’à l’intérieur, on évoque ce terrible vendredi 14 mars 2014, dans un immeuble rue du Chemin-Vert à Bobigny, lorsqu’elle a été frappée à la tête par un voisin armé d’une feuille de boucher. La fillette avait 4 ans et demi. Dans le box, Chun Sam, Nord-Coréen de 27 ans, garde la tête baissée, et dit qu’il ne se souvient de rien.

«Elle s’est fait frapper, j’ai vu le sang couler»

« Ce jour-là il faisait beau, raconte la maman de la fillette à la barre. Après l’école, on avait nourri les pigeons. Il y avait mon père et les trois enfants (de 2, 3 et 4 ans, NDLR). Ma fille aînée était devant la porte, elle a voulu ouvrir, je lui ai donné la clé, elle s’est fait frapper. J’ai vu le sang couler. » Les caméras de l’immeuble ont tout filmé. Chun Sam venait du premier étage, avec à la main une lame de 19 cm sur 10 qui d’ordinaire sert aux bouchers. Il a frappé l’enfant à la tête, deux fois, puis son grand-père qui tentait de s’interposer, à la tête également. Les plaies atteignaient 8 cm. Le grand-père se souvient que l’agresseur a crié quelque chose, mais « dans la panique », il n’a pas compris. Chun Sam a été arrêté par la police dehors. L’enfant et son grand-père s’en sont sortis avec un mois d’incapacité totale de travail, des nuits de cauchemars et des séquelles. « Pendant six mois, l’enfant ne voulait plus sortir », insiste l’avocat de la famille, Me Eric Agami qui aurait préféré un procès aux assises. Mais les juges ont requalifié les faits en violences aggravées.

Chun San avait bu et ne souvient de rien

Chez le juge, Chun Sam a demandé si la petite avait été blessée, preuve selon son avocat, Me Stéphane Maugendre, qu’il ne se souvenait pas. L’expert psychiatre a admis une altération du discernement mais pas d’irresponsabilité pénale. Dix-huit mois de détention plus tard, Chun Sam n’a pas retrouvé la mémoire. Il sait qu’il avait bu beaucoup de bière avec son logeur, au premier étage. « Ce jour-là, j’avais obtenu un titre d’asile pour un mois, j’étais vraiment content », marmonne-t-il. C’était un récépissé pour se faire soigner d’une tuberculose. C’était aussi le jour de l’anniversaire de sa mère, dont il reste sans nouvelle depuis qu’il a quitté la Chine, en 2013. Une vie d’exils que son avocat s’est employé à rappeler. « Son père mort quand il avait treize ans, il fuit clandestinement la Corée du Nord, échoue en Chine avec sa mère, où il est traité comme sous-esclave, puis part en France seul », résume l’avocat, qui, à défaut d’explications, « propose des pistes ». Derrière lui, Chun Sam pleure. Le procureur avait réclamé quatre ans de prison dont un avec sursis. Le tribunal a prononcé cinq ans de prison dont un avec sursis mise à l’épreuve, dont l’obligation de soin et l’interdiction d’entrer en contact avec les victimes et d’approcher de leur domicile. Une provision de 5 000 € a été consentie aux deux victimes.

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Difficile réforme de l’aide juridictionnelle

index  Bertrand Bissuel, 15/09/2015

Les nouvelles propositions de Christiane Taubira sont critiquées par les avocats

DAMIEN MEYER / AFP

Christiane Taubira parviendra-t-elle à réformer l’aide juridictionnelle ? La garde des sceaux vient de mettre sur la table de nouvelles propositions pour améliorer le fonctionnement de ce dispositif, dont le but est de permettre aux plus démunis d’accéder à la justice. Elles ne sont pas « acceptables » en l’état, a indiqué, samedi 12 septembre, le Conseil national des barreaux (CNB), l’une des instances qui représentent les avocats. Pas question, pour autant, de lancer un appel à la grève, comme en 2014 : le dialogue entre la profession et la chancellerie se poursuit et pourrait déboucher sur des mesures inscrites dans le projet de loi de finances pour 2016.

L’aide juridictionnelle fait l’objet, depuis des années, de nombreuses critiques. Du point de vue du justiciable, elle « ne remplit plus sa mission », écrivent les sénateurs Sophie Joissains (UDI-UC, Bouches-du-Rhône) et Jacques Mézard (RDSE, Cantal), dans un rapport d’information remis en 2014 : le niveau de ressources pour en bénéficier est « trop bas », les démarches sont complexes, etc.

Les avocats, de leur côté, jugent la rétribution insuffisante. Et l’Etat, quant à lui, déplore que le système soit porté à bout de bras par un petit nombre de professionnels : 7 % des avocats réalisent 57 % des missions de ce type, ce qui met en évidence de profondes disparités dans la prise en charge des procédures entre cabinets.

Missions supplémentaires

Pour redresser ce dispositif à bout de souffle, Mme Taubira a, un temps, envisagé d’instaurer une « contribution de solidarité » sur le chiffre d’affaires des avocats. Refus unanime des intéressés. Depuis, la ministre a fait de nouvelles propositions. La réforme qu’elle porte se veut ambitieuse en revisitant toutes les dimensions de l’aide juridictionnelle (simplification des formulaires, développement de la médiation, rénovation du barème et des modalités d’indemnisation fondées sur des unités de valeur…). Le niveau de revenus pour être éligible à cette assistance devrait être relevé et se situer au-dessus du seuil de pauvreté, ce qui augmenterait le nombre de bénéficiaires potentiels.

Enfin, les moyens alloués par l’État devraient être revus à la hausse, pour passer de 318 millions d’euros en 2013 à 401 en 2016. Mais la garde des sceaux souhaite que les avocats apportent, eux aussi, leur écot. « Si les pouvoirs publics demandent à notre profession de payer pour des prestations dans lesquelles les avocats travaillent à perte, nous leur disons non », réagit Me Pierre-Olivier Sur, bâtonnier de l’ordre de Paris. « Chacun doit prendre ses responsabilités, renchérit Me Marc Bollet, président de la Conférence des bâtonniers. L’État doit tenir ses engagements et financer l’aide juridictionnelle. »

L’une des pistes étudiées par la ministre consisterait à demander à la profession de financer de nouvelles technologies susceptibles de faciliter la mise en œuvre de la réforme. Est notamment visé le développement de Portalis, un portail Internet qui permettra, à terme, aux avocats comme aux justiciables de suivre leurs procédures. « Nous ne sommes pas opposés au principe d’une contribution de la profession au financement de la modernisation de ses outils numériques mais qu’attend-on de nous précisément ? », s’interroge Me Pascal Eydoux, président du CNB.

Le fait de relever le plafond de ressources qui conditionne le droit à l’aide juridictionnelle constitue « une chose positive », ajoute Me Stéphane Maugendre, avocat au barreau de Bobigny. Mais l’indemnisation de la profession, elle, risque de décroître, d’après lui, car les moyens budgétaires accrus ne compenseront pas les missions supplémentaires. Mme Taubira va devoir encore parlementer si elle souhaite lever les inquiétudes que sa réforme inspire.

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24.000 nouveaux réfugiés en France, c’est trop ou c’est trop peu ?

logo metro, Gilles Daniel, 07/09/2015

C’est le chiffre du jour : François Hollande a annoncé lundi lors de sa conférence de presse que l’Hexagone accueillerait 24.000 nouveaux réfugiés en deux ans pour faire face à la crise migratoire à laquelle est confrontée l’Europe. « La France est disposée à prendre sa part », a-t-il souligné. Mais est-elle à la hauteur des enjeux ? La classe politique comme les associations sont divisées.

« C’est le devoir de la France, où le droit d’asile fait partie intégrante de son âme, de sa chair », a déclaré François Hollande en annonçant lors de sa conférence de presse que le pays accueillerait 24.000 nouveaux réfugiés sur deux ans.

« C’est le devoir de la France, où le droit d’asile fait partie intégrante de son âme, de sa chair », a déclaré François Hollande en annonçant lors de sa conférence de presse que le pays accueillerait 24.000 nouveaux réfugiés sur deux ans.

« Modéré et acceptable ». C’est la manière dont Alain Juppé a qualifié mardi le chiffre de 24.000 nouveaux réfugiés sur deux ans annoncé par François Hollande. Si le maire de Bordeaux a donné un satisfecit à François Hollande sur cette annonce, celle-ci a donné lieu à des réactions opposées : plus à droite, Nicolas Dupont-Aignan a par exemple fustigé un chef de l’Etat qui « persiste à prendre les Français pour des imbéciles », « une majorité » d’entre eux se disant « opposée à l’accueil des migrants ». Du coté des communistes, Pierre Laurent a jugé ces 24.000 réfugiés « pas du tout à la hauteur et loin des capacités d’accueil de la France ».

Dans la même veine sur Twitter, beaucoup n’ont pas manqué de souligner, à l’instar de la sénatrice EELV Esther Benbassa ou du sociologue Eric Fassin, combien ce chiffre était dérisoire comparé aux milliers de réfugiés arrivés ce week-end dans une Allemagne prête à accueillir 800.000 demandeurs d’asile cette année, ou rapporté à la population française et au nombre total de Syriens ayant fui leur pays pour rejoindre les pays voisins (plus de 4 millions en majorité en Turquie et au Liban selon l’Agence des Nations unies pour les réfugiés).

Au Parti de gauche, Alexis Corbière a de son côté mis en parallèle ce chiffre avec celui des 14.859 demandes d’asile acceptées en France l’an dernier. Il se demande même s’il ne s’agit pas d’un « recul ». Avec mauvaise foi, puisque les 24.000 réfugiés sur deux ans devraient être accueillis en plus des acceptations annuelles de demandes d’asile.

Jointes par metronews, les associations de soutien aux réfugiés jugent elles aussi qu’on est loin du compte. « C’est honteux ! », s’offusque même Stéphane Maugendre, président du Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti), qui dénonce « la frilosité des gouvernants actuels face au FN » et considère que l’annonce de François Hollande « n’est pas à la hauteur de ce que la République française a fait dans l’Histoire ». « C’est tout sauf un effort important de la part de la France », nous assure également Laurent Giovanonni, responsable du département étranger du Secours Catholique. Pour lui, c’est d’abord le plan de la Commission européenne, qui prévoit de répartir un total de 120 000 personnes ayant fui les zones de guerre entre pays – et auquel François Hollande se conforme en prenant cette « part » de 24.000 réfugiés -, qui est largement insuffisant. « 120.000, c’est relativement dérisoire par rapport aux centaines de milliers de personnes en quête de protection et surtout par rapport au nombre de personnes déjà réfugiées dans les pays limitrophes de la Syrie », souligne notre interlocuteur.

Le président de France Terre d’Asile, Pierre Henri, est en revanche beaucoup plus mesuré, se contentant de remarquer que « la France répond présent aux propositions de la Commission européenne », et que le chiffre devra « à l’évidence être réexaminé si le conflit syrien perdure ». Mais, souligne-t-il, l’accueil de ces réfugiés supplémentaires représente déjà un défi pour le pays : « Il faut que nous nous mettions en ligne pour accueillir ces 24.000 personnes, et pour l’instant nous ne le sommes pas. Pour intégrer ces réfugiés, il faut une simplification des procédures administratives afin de créer des structures ad hoc sur l’ensemble du territoire, une coordination des moyens et une volonté politique ». Des impératifs auxquels Bernard Cazeneuve, qui recevra samedi les maires volontaires pour accueillir des réfugiés dans leur commune, a commencé à répondre en annonçant lundi après-midi, après la conférence de presse présidentielle, la nomination d’un « coordinateur national » chargé d’organiser l’accueil des migrants par ces villes.

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Plaidoirie pour Valérie LOWE

Monsieur le Président, Mesdames du Tribunal, je suis le Conseil de Mademoiselle Valérie LOWE, pour laquelle j’interviens au titre de la commission d’office.

Valerie Lowe en 1922.Police and Justice Museum Sydney
Valerie Lowe en 1922.Police and Justice Museum Sydney

Une remarque préalable. Je tiens à m’inscrire en faux contre les insinuations selon lesquelles, Valérie serait une prostituée.

En effet, nous n’avons, au dossier, aucun élément qui permet de confirmer cela. Et ce n’est pas parce que Monsieur Joseph MESSENGER, qui a été arrêté avec elle dans la présente affaire, est un homme connu pour appartenir à la pègre de Sydney et fréquenter des prostituées, qu’ipso facto Valérie est une prostituée.

Regardez-la, puisque nous sommes dans les apparences !

Est-elle vêtue comme une prostituée ou comme une enfant avec une robe à carreaux, bordée de dentelle d’adolescente, qui ne découvre que ses bras menus et aucunement le haut de son corps ?

La détermination de son regard surmonté d’une crinière en bataille vous suffit-il pour confirmer sa, soi-disant, profession ?

Non, visez la position de ses mains cachées, comme si elle cachait la honte de se retrouver en garde-à-vue au commissariat de Sydney !

Non, observez comme elle est recroquevillée sur elle-même et dans un coin de l’image comme un chien battu craignant la correction comme elle craint votre jugement !

Est-ce là l’attitude d’une prostituée ?

Et puis, une prostituée s’aventurerait elle à commettre des cambriolages ? D’abord, l’année dernière, en 1921, toujours avec Monsieur Joseph MESSENGER, en volant dans un entrepôt de l’armée des bottes et des marteaux pour la malheureuse somme de 293 shillings et aujourd’hui pour une tentative de vol avec effraction, sur laquelle nous reviendrons.

Or, à l’instant, dans son réquisitoire, Madame le Procureur de la République est venue vous affirmer que justement, puisque ce couple n’en était pas à son coup d’essai et que Joseph fréquentait les prostituées, Valérie se prostituerait pour lui. Joseph étant une sorte de julot-casse-croute.

Pure déduction illogique. D’une part, nous n’avons aucun élément prouvant qu’ils sont en couple, d’autre part, il ne semble pas que Monsieur Joseph MESSENGER soit poursuivi pour proxénétisme et, enfin, il me semble difficilement croyable qu’un jeune, à peine majeur, soit le proxénète d’une fille qui est son ainée d’à peine plus d’un an que lui.

Et puis quoi, enfin, la prostitution n’est pas un délit à ce que je sache.

Venons-en à la personnalité de Valérie.

Elle est née trois ans après l’indépendance de notre pays et a donc vécu le marasme économique qui s’en est suivi.
Fille de bushrangers, elle n’a jamais fréquenté un établissement scolaire.

En 1917, déjà orpheline de mère, elle perd son père engagé dans l’armée australienne dans le conflit de la guerre en Europe. Elle a, à peine 14 ans.

Depuis, cet âge elle vie dans les rues de Sydney, travaillant à droite à gauche, mais aussi, nous l’avons vu au regard d’une précédente condamnation l’année dernière, de petits cambriolages.

Doit-on en déduire que Valérie est véritablement ancrée dans la délinquance. Non, rien n’apparait à son casier judiciaire qui prouve qu’elle ait commis des actes délictueux durant sa minorité. Bien plus, il n’y a aucune mention au fichier Stic la concernant.

De l’ensemble de ces observations, je ne pourrais que solliciter une peine de sursis avec mise à l’épreuve.

Toutefois, vous n’aurez pas à vous attarder sur la peine à prononcer, puisque que je sollicite la relaxe de Mademoiselle Valérie LOWE.

En effet, celle-ci est poursuivie de tentative de vol par effraction.

Joseph Messenger, le 15 février 1922. Police and Justice Museum Sydney
Joseph Messenger, le 15 février 1922. Police and Justice Museum Sydney

Or, les circonstances l’espèce, c-à-d le fait que la jeune Valérie LOWE soit à l’extérieur de l’habitation au moment où les services de police interviennent, n’en fait pas d’elle un auteur ou un co-auteur, mais plutôt une complice. En effet, d’une part, elle n’est pas poursuivie pour une tentative de vol en réunion et d’autre part, il n’y a aucun élément objectif qui permet d’affirmer qu’elle a participé, directement, à l’effraction.

A ce stade, je me permets de vous rappellerez l’article 121-7 du Code pénal qui dispose :
« Est complice d’un crime ou d’un délit la personne qui sciemment, par aide ou assistance, en a facilité la préparation ou la consommation.

Est également complice la personne qui par don, promesse, menace, ordre, abus d’autorité ou de pouvoir aura provoqué à une infraction ou donné des instructions pour la commettre ».

Où trouvons-nous des preuves d’une aide ou d’une assistance ?
Nul part !

Nous ne trouvons, dans ce dossier, que des bribes d’indices permettant de penser, d’avoir l’intime conviction que Mademoiselle Valérie LOWE a tenté d’aider ou d’assister Monsieur Joseph MESSENGER.

Or vous le savez, la tentative de complicité n’est pas condamnable.
Vous relaxerez donc la prévenue.

Migrants abandonnés en mer. Qui est responsable ?

frnce inter Lorélie Carrive, 10/08/2015

© MaxPPP/ZumaPress.com/Ropi – 2015

Une ONG française a obtienu l’ouverture d’une enquête sur un bateau français de l’OTAN qui aurait laissé mourir des migrants au large de la Libye en 2011.

La semaine dernière encore, 200 personnes sont mortes noyées au large de la Libye. Des ONG et associations se battent pour que soit reconnue la responsabilité des États dans ces drames de l’immigration.

C’est le cas du GISTI. Le Groupe d’information et de soutien des immigrés demande à ce que la lumière soit faite sur la mort, il y a quatre ans, de 63 migrants.

Si le Gisti a choisi ce naufrage en particulier, c’est parce qu’il y a eu des témoins, affirme l’association, qui n’ont rien fait. Le  zodiac qui transportait des migrants va rester à la dérive, sans recevoir aucun secours. Seuls neuf des 72 passagers ont survécu. La chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris a jugé recevable une plainte contre X

Les explications de Lorélie Carrive

 Selon un dernier bilan du Haut-commissariat de l’ONU pour les réfugiés (HCR), quelque 224.000 migrants sont arrivés en Europe par la Méditerranée depuis le début de l’année – 98.000 en Italie et 124.000 en Grèce – et plus de 2.100 autres ont trouvé la mort en tentant la traversée.

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Cachez cet étranger

Cachez cet étranger (et les violences qui lui sont faites) que je ne saurais voir

À mon père, Dominique.

Il est toujours plus facile de ne pas voir les violences infligées à celles et ceux qui sont supposés responsables de tous les maux de la société (chômage, délinquance et aujourd’hui terrorisme). D’évidence ce propos ne s’adresse pas aux lectrices ou lecteurs, du présent article, que l’on ne peut affubler de cécité (intellectuelle) totale.

Il n’en reste pas moins que les violences faites aux étrangers sont plus ou moins visibles à celui ou celle qui sait, ou veut bien, regarder ou chercher. C’est alors souvent pour le public non averti à l’occasion d’un « buzz » qu’on les découvre. Prenons quelques exemples :

Les étrangers coincés dans la zone internationale de Roissy

Il aura fallu la condamnation de l’État français, par le Tribunal de Grande Instance de Paris en 1992 pour découvrir les voies de fait commises par le ministère de l’Intérieur et la Police de l’Air et des Frontières à l’aéroport de Roissy, à l’égard des étrangers désirant entrer sur le territoire français.

Or, depuis des années des avocats assignaient ce même ministère devant les tribunaux français et les associations condamnaient les atteintes portées au droit d’asile (puisque les étrangers étaient interditsde rentrer en France pour faire une demande d’asile) et à la liberté d’aller et venir sans base légale (puisque les étrangers interdits d’entrer étaient coincés dans la zone aéroportuaire internationale entre les magasins duty-free).

Les Jungles de Calais

Il n’y a qu’en 2009, suite à une rafle de cent cinquante Afghans, dans la banlieue de Calais, pour être « chartérisés » par le ministère de l’Intérieur, que l’on découvre les « jungles » de Calais, alors que depuis la fermeture du camp de Sangatte, sept années avant, les associations dénonçaient non seulement les conditions de vie de ces réfugiés mais aussi les exactions de la police à leur encontre.

Les Roms

Il n’y a que lors du scandale international de la circulaire dite « Roms » du mois d’août 2010 que l’on a vu les mauvais traitements infligés aux gens du voyage. [Quoique depuis, ils ont disparu de notre champ de vision comme nous le rappelle le commissaire aux Droits de l’homme du Conseil de l’Europe dans son rapport du 17 février dernier(1)].

La pénalisation du séjour irrégulier

Il faudra l’avis de la chambre criminelle de la cour de Cassation du 5 juin 2012 pour comprendre qu’être en situation irrégulière était, jusqu’alors, un délit permettant à la police de mettre un étranger, pour cette seule raison, jusqu’à 48 heures en garde-à-vue, et à la Justice de le condamner jusqu’à une année de prison ferme et trois années d’interdiction du territoire français.

Alors qu’avant et suite à un arrêt El Dridi contre Italie du 28 avril 2011 de la Cour de Justice de l’Union Européenne (qui condamnait l’Italie et indiquait qu’en Europe les étrangers en situation irrégulière ne pouvaient plus ni être placés en garde-à-vue ni être condamnés) les associations dénonçaient la législation française en ce qu’elle faisait passer l’étranger sans-papiers d’un statut administratif à un statut pénal, c’est-à-dire dans le camp des délinquants.

Les morts en mer Méditerranée

Il aura fallu la venue du Pape sur l’Île de Lampedusa en juillet 2013, non pas pour voir ces migrants d’Afrique enfermés dans un camp, mais découvrir que l’on mourrait en Méditerranée pour sauver sa vie.

Or, depuis sa création l’association Migreurop dénonce non seulement les camps à l’extérieur des frontières de la forteresse Europe mais aussi les milliers de noyés depuis quelques dizaines d’années dans la traversée de ce nouveau cimetière.

Or, ni les révélations par The Guardian, le 8 mai 2011 (2), du décès entre les mois de mars et avril de 63 personnes (hommes, femmes et deux bébés) alors qu’une coalition internationale et les forces de l’OTAN intervenaient en Libye et surveillaient le moindre mouvement sur cette mer grâce à un matériel militaire jamais déployé dans cette zone (awacs, drones, avions, hélicoptères, radars et bâtiments de guerre), ni la campagne de plaintes lancée par le Gisti suite à ces révélations, ne les avaient rendu visibles.

Être privé de ses droits d’aller et venir sur simple décision d’un policier sans ordre ou autorisation de la Loi et sans contrôle d’un juge ; en être réduit à dormir dans des sous-bois entre des planches de bois et des bâches de plastique et faire l’objet de violences policières ; être l’objet d’évacuation et de destruction de son lieu de vie à raison d’une seule appartenance à une ethnie supposée ; être pénalement catalogué délinquant pour ne pas avoir de pièce d’identité ; ne pas être secouru en mer, et parfois mourir, seulement parce que l’on se précipite dans les mains de passeurs pour traverser la méditerranée pour fuir les atrocités, politiques, économiques ou climatiques de son pays de naissance… sont, sans conteste, des violences.

Et, nous venons de le voir, elles n’ont été visibles qu’après qu’un événement « révélateur » fasse image à nos yeux. Mais, il y a aussi le buzz qui rend invisible les violences voire provoque la cécité totale.

La double peine

Alors que François Mitterrand avait promis son abolition suite à la grève de la faim de Jean Costil (Pasteur), Christian Delorme (Prêtre) et Hamid Boukhrouma (Double peine) aux Minguettes, démarrée début avril 1981 ; alors qu’entre fin 2001 et fin 2003, les associations ont mené une très longue et intense campagne contre la double peine, le Ministre de la place Beauvau s’emparait de cette question et, dès l’écriture de l’avant-projet de Loi, affirmait que la double-peine était abolie.

La réussite politique du ministre de l’Intérieur a été jusqu’à, non seulement, obtenir de l’Assemblée Nationale un vote à l’unanimité sur les dispositions concernant la double peine, mais à faire affirmer à un ancien ministre de la Culture de « gauche », prétendu abolitionniste de cette double peine, sa satisfaction de ce que la droite l’ait abolie et même à un très sérieux journaliste politique dans les colonnes d’un quotidien du soir d’illustrer le dépassement à gauche du PS par la droite parlementaire par cette réforme.

On croise même dans les milieux judiciaires, militants ou humanitaires, des personnes qui estiment ce combat, d’arrière-garde.

Depuis lors, il est impossible d’aborder le sujet tant il est ancré dans l’inconscient collectif qu’il n’y a plus de double peine. Et le monde associatif, partie prenante dans la campagne contre la double peine, a commis un véritable acte manqué politique et n’a pas encore pris conscience de sa responsabilité d’avoir participé à ce que la violence, que constitue la double peine à l’égard des étrangers, soit redevenue invisible pour de nombreuses années.

En effet, la loi du 26 novembre 2003 laisse entière la double peine (L’ITF peut toujours être prononcée pour environ 270 crimes et délits. Quant à l’expulsion, elle peut toujours : être décidée par l’administration, quelle que soit la situation privée ou familiale de l’étranger ; être prononcée par l’administration, sans débat préalable devant une commission, en cas d’urgence absolue, alors même que cette urgence a parfois été provoquée par la négligence des services concernés ; enfin et surtout, être la conséquence directe d’une condamnation pénale).

Le délit de solidarité : un même tour de passe-passe

La condamnation de Madame Deltombe par le Tribunal Correctionnel de Lille, le 4 février 1997 (3), pour avoir prêté les clefs de son appartement en son absence à un étranger en situation irrégulière, a déclenché, à l’initiative des gens du cinéma, une vague de signatures par dizaines de milliers d’une pétition pour l’abrogation du délit de solidarité (4).

Régulièrement des gens (directrice d’école, membres de collectif… frères, soeurs époux…) apportant leur soutien à des étrangers en situation irrégulière sont inquiétés par la police ou la justice. Face aux attaques d’un ministre de l’Immigration qui affirmait, le 7 avril 2009, que « Toute personne, particulier, bénévole, association, qui s’est limitée à accueillir, accompagner, héberger des clandestins en situation de détresse, n’est donc pas concernée par ce délit. Et j’observe qu’en 65 années d’application de cette loi, personne en France n’a jamais été condamné pour avoir seulement accueilli, accompagné ou hébergé un étranger en situation irrégulière » (5), le Gisti avait dressé une liste de condamnations prononcées depuis 1986 contre des personnes ayant apporté une aide à des étrangers sans papiers. Récemment, le Ministre de l’Intérieur a annoncé, à grand renfort des médias, que, par la loi dite « Valls » du 31 décembre 2012, le délit de solidarité est abrogé. Et tout le monde en est, aujourd’hui, persuadé.

Or, tel n’est pas le cas puisque l’article L 622-1 du Code de l’Entrée et du Séjour des Étrangers et du Droit d’Asile (CESEDA) est toujours applicable et permet encore de poursuivre les aidants aux sans-papiers (6).

La double peine et le délit de solidarité sont bien des violences (même si elles sont légales) mais, alors qu’elles étaient visibles et connues, de véritables plans média politico-mensongers les trempent dans un filtre magique d’invisibilité alors qu’elles existent encore.

La précarisation du droit au séjour des étrangers en France

Le 15 octobre 1983 partait de Marseille la Marche pour l’égalité et contre le racisme, dite « la Marche des beurs », pour s’achever par un défilé de plus de 100 000 personnes à Paris le 3 décembre. Une délégation rencontre François Mitterrand qui promet l’instauration d’une carte de séjour et de travail valable pour dix ans, ancienne revendication des organisations de défense des droits des immigrés.

Le 17 juillet 1984 était promulguée la loi sur la carte de résident, titre unique de séjour et de travail, valable dix ans et renouvelable automatiquement. Il est important de souligner que cette loi avait été votée à l’unanimité par l’Assemblée nationale. « Cette loi avait une portée majeure, à la fois pratique, symbolique et politique, et faisait date dans l’histoire du droit de l’immigration.
– Une portée pratique car elle supprimait les multiples obstacles administratifs qui existaient jusqu’alors pour l’obtention ou le renouvellement des titres de séjour de un an, trois ans, puis dix ans, qui devaient être accompagnés d’une carte de travail valable un an, trois ans ou dix ans… La délivrance de la carte de résident, valant autorisation de séjour et de travail, renouvelée automatiquement, libérait des multiples rendez-vous en préfecture et préservait par la même occasion des interruptions temporaires de droits et de l’insécurité qu’elles engendraient.
– Une portée symbolique aussi car, délivrée « de plein droit » à tous ceux et celles ayant des attaches en France (liens familiaux ou ancienneté de séjour), elle traduisait en actes le message que le gouvernement voulait adresser à l’opinion comme à la population étrangère : les personnes immigrées venues en France pour travailler ne pouvaient plus être reléguées au rang de supplétifs ; avec leurs familles, elles faisaient partie intégrante de la société française. Elles pouvaient, sans crainte d’une décision arbitraire de l’administration, construire leur avenir en France. Sécurité et stabilité formaient le socle qui devait leur permettre de s’insérer et de vivre comme tout un chacun.
– Une portée politique enfin car, en instaurant un titre de dix ans renouvelable de plein droit, le législateur réalisait un pas en avant vers l’égalité des droits avec les nationaux. Face aux discours d’exclusion semés par l’extrême droite, la loi du 17 juillet 1984 entendait en finir avec la suspicion permanente et le contrôle tatillon dont les personnes étrangères étaient précédemment les otages. La réforme était un message clair opposé au populisme et à la xénophobie. »  (7)

Sauf que depuis trente années toutes les lois sur l’immigration ont petit à petit réduit à quasi néant ce dispositif puisque la carte de séjour temporaire d’une année est devenue la norme. Mais de quelle violence s’agit-il ? et en quoi est-elle invisible ? Elle est invisible car elle ne semble être que tracasserie administrative, que de demander à l’étranger de renouveler son titre de séjour tous les ans. En pratique ce sont 2, 3 voire 4 rendez-vous en préfecture car il manque toujours un document pour compléter le dossier, donc 2, 3 voire 4 jours d’absence au travail (8). En pratique, ce sont des rendez-vous qui obligent à être présent devant la préfecture longtemps avant le lever du soleil. En pratique ce sont des cartes de séjour qui empêchent embauche à durée indéterminée, obtention d’un crédit, signature d’un bail locatif ou accès à de nombreux droits sociaux et donc précarisent la vie professionnelle, sociale et économique. En pratique ce sont des parents au séjour, à la vie professionnelle, sociale et économique précaire, alors que leurs enfants ont vocation à devenir français ou sont français et ont, donc, des rapports parentaux faussés. En pratique, ces précarités plongent les étrangers dans l’incertitude quant à leur avenir, les empêchent de participer à la vie sociale, politique, économique et culturelle, bref de se comporter en citoyens. Ainsi derrière cette carte de séjour se cachent nombre de violences à nos yeux invisibles. Le rapport Fekl remis au gouvernement en mai 2013 (9) faisait ce même constat. Aujourd’hui, le même tour de passe-passe que celui dont ont été victimes la double peine et le délit de solidarité se prépare, puisque un projet de loi sur l’immigration, présenté comme un texte visant à stabiliser le séjour des étrangers en France, prévoit la création d’un titre pluriannuel d’une durée maximum de quatre ans (10).

Or, ce texte non seulement conserve la logique de désintégration amorcée depuis 30 ans par les textes successifs mais crée une véritable « usine à gaz » pour l’obtention de ces titres de séjour pluriannuels et dont la délivrance peut être remise en cause ou le retrait peut être décidé, à tout moment (11). Que le bruit médiatique que ne manquera pas de faire le gouvernement autour de ce texte en affirmant qu’il est «humain mais ferme» (comme ceux d’avant 2012 qui affirmaient être «ferme mais humain») ne nous aveugle pas.

 

1. Voir Dossier du Gisti « Les Roms ».
2. « Aircraft carrier left us to die, say migrants », Jack Shenker, 8 May 2011.
3. Voir l’arrêt confirmatif de la Cour d’appel de Douai en date du 17 décembre 1997.
4. Voir notamment « Contre la loi Debré », Libération, 19 février 1997.
5. Voir la lettre en date du 7 avril 2009 de Monsieur Besson adressée à toutes les organisations de la campagne pour l’abolition du délit de solidarité.
6. « Sans-papiers : la solidarité n’est plus un délit », Le Nouvel Obs, 02 janvier 2013 ; « Sans-papiers : le délit de solidarité supprimé », RFI, 3 janvier 2013 ; « Sans-papiers : La fin du délit de solidarité », 20 Minutes, 29 janv. 2014 ; « Droit en France : suppression du ‘délit de solidarité’», Wikinews.
7. Histoire de la carte de résident sur le site « rendez-nous la carte de résident ».
8. « Surveiller et punir plutôt qu’accueillir », L’Humanité, Émilien Urbach, Mercredi, 23 juillet, 2014 ; « Immigration : ‘Ça ne change pas. L’étranger est toujours suspect », Le Nouvel Obs, Céline Rastello Publié le 23-07-2014.
9. Sécurisation des parcours des ressortissants étrangers en France, rapport au premier ministre par Matthias Fekl, parlementaire en mission auprès du ministre de l’intérieur.
10. Voir le dossier du Gisti « Projet de réforme du droit des étrangers en France ».

Cachez cet étranger (et les violences qui lui sont faites) que je ne saurais voir

Merci à Jean Claude POLACK, ami de mon père, d’écrire 28 années après lui pour Chimères[1]

Il est toujours plus facile de ne pas voir les violences infligées à celles et ceux qui sont supposés responsables de tous les maux de la société (chômage, délinquance et aujourd’hui terrorisme). D’évidence ce propos ne s’adresse pas aux lectrices ou lecteurs, du présent article, que l’on ne peut affubler de cécité (intellectuelle) totale.

Il n’en reste pas moins que les violences faites aux étrangers sont plus ou moins visibles à celui ou celle qui sait, ou veut bien, regarder ou chercher.

C’est alors souvent pour le public non averti à l’occasion d’un « buzz » qu’on les découvre.

Prenons quelques exemples :

Les étrangers coincés dans la zone internationale de Roissy.

Il aura fallu la condamnation de l’Etat français, par le Tribunal de Grande Instance de Paris en 1992 pour découvrir les voies de fait commises, par le ministère de l’intérieur et la Police de l’air et des frontières à l’aéroport de Roissy, à l’égard des étrangers désirant entrer sur le territoire français[2]

Or, depuis des années des avocats assignaient ce même ministère devant les tribunaux français et les associations condamnaient les atteintes portées au droit d’asile (puisque les étrangers étaient interdits de rentrer en France pour faire une demande d’asile) et à la liberté d’aller et venir sans base légale (puisque les étrangers interdits d’entrer étaient coincés dans la zone aéroportuaire internationale entre les magasins duty-free).

Les Jungles de Calais

Il n’y a qu’en 2009, suite à une rafle de 150 Afghans, dans la banlieue de Calais, pour être « chartérisés » par le ministère de l’intérieur[3] que l’on découvre les « jungles » de Calais, alors que depuis la fermeture du camp de Sangatte, 7 années avant, les associations dénonçaient non seulement les conditions de vie de ces réfugiés mais aussi les exactions de la police à leur encontre[4].

Les Roms.

Il n’y a que lors du scandale international de la circulaire dite « Roms » du mois d’aout 2010 que l’on a vu les mauvais traitements infligés aux gens du voyage[5]. (Quoique depuis, ils ont disparu de notre champs de vision comme nous le rappelle le commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe dans son rapport du 17 février dernier[6]).

La pénalisation du séjour irrégulier

Il faudra l’avis de la chambre criminelle de la cour de Cassation du 5 juin 2012 [7] pour comprendre qu’être en situation irrégulière était, jusqu’alors, un délit permettant à la police de mettre un étranger, pour cette seule raison, jusqu’à 48 h en garde-à-vue et à la Justice de le condamner jusqu’à une année de prison ferme et trois années d’interdiction du territoire français.[8]

Alors qu’avant et suite à un arrêt El Dridi contre Italie du 28 avril 2011[9] de la Cour de Justice de l’Union Européenne (qui condamnait l’Italie et indiquait qu’en Europe les étrangers en situation irrégulière ne pouvaient plus ni être placés en garde-à-vue ni être condamnés) les associations dénonçaient la législation française en ce qu’elle faisait passer l’étranger sans-papier, d’un statut administratif à un statut pénal, c’est-à-dire dans le camp des délinquants. [10]

Les morts en mer méditerranée.

Il aura fallu la venue du Pape sur l’Ile de Lampedusa en juillet 2013, non pas pour voir ces migrants d’Afrique enfermés dans un camp, mais découvrir que l’on mourrait en méditerranée pour sauver sa vie.

Or, depuis sa création l’association Migreurop dénonce non seulement les camps à l’extérieur des frontières de la forteresse Europe mais aussi les milliers de noyés depuis quelques dizaines d’années dans la traversée de ce nouveau cimetière.

Or, ni les révélations par « The Guardian », le 8 mai 2011 [11], du décès entre les mois de mars et avril de 63 personnes (hommes, femmes et deux bébés) alors qu’une coalition internationale et les forces de l’OTAN intervenaient en Libye et surveillaient le moindre mouvement sur cette mer grâce à un matériel militaire jamais déployé dans cette zone (awacs, drones, avions, hélicoptères, radars et bâtiments de guerre), ni la campagne de plaintes lancée par le Gisti suite à ces révélations[12], ne les avaient rendu visibles.

Être privé de ses droits d’aller et venir sur simple décision d’un policier sans ordre ou autorisation de la Loi et sans contrôle d’un juge ;

En être réduit à dormir dans des sous-bois entre des planches de bois et des bâches de plastique et faire l’objet de violences policières ;

Être l’objet d’évacuation et de destruction de son lieu de vie à raison d’une seule appartenance à une ethnie supposée ;

Être pénalement catalogué délinquant pour ne pas avoir de pièce d’identité ;

Ne pas être secouru en mer, et parfois mourir, seulement parce que l’on se précipite dans les mains de passeurs pour traverser la méditerranée pour fuir les atrocités, politiques, économiques ou climatiques de son pays de naissance ;

Sont, sans conteste, des violences.

Et, nous venons de le voir, elles n’ont été visibles qu’après qu’un évènement « révélateur » fasse image à nos yeux.

Mais, il y a aussi le buzz qui rend invisible les violences voir provoque la cécité totale.

La double peine

Alors que François Mitterrand avait promis son abolition suite à la grève de la faim de Jean Costil (Pasteur), Christian Delorme (Prêtre) et Hamid Boukhrouma (Double peine) aux Minguettes, démarrée début avril 1981 [13] ;

Alors qu’entre fin 2001 et fin 2003, les associations ont mené une très longue et intense campagne contre la double peine [14] ;

Le Ministre de la place Beauvau s’emparait de cette question et, dès l’écriture de l’avant-projet de Loi, affirmait que la double-peine était abolie.

La réussite politique du ministre de l’Intérieur a été jusqu’à, non seulement, obtenir de l’Assemblée Nationale un vote à l’unanimité sur les dispositions concernant la double peine, mais à faire affirmer à un ancien ministre de la culture de « gauche », prétendu abolitionniste de cette double peine, sa satisfaction de ce que la droite l’ait abolie et même à un très sérieux journaliste politique dans les colonnes d’un quotidien du soir d’illustrer le dépassement à gauche du PS par la droite parlementaire par cette réforme.

On croise même dans les milieux judiciaire, militant ou humanitaire, des personnes qui estiment ce combat, d’arrière-garde.

Depuis lors, il est impossible d’aborder le sujet tant il est ancré dans l’inconscient collectif qu’il n’y a plus de double peine. Et le monde associatif, partie prenante dans la campagne contre la double peine, a commis un véritable acte manqué politique et n’a pas encore pris conscience de sa responsabilité d’avoir participé à ce que la violence, que constitue la double peine à l’égard des étrangers, soit redevenue invisible pour de nombreuses années.

En effet, la loi du 26 novembre 2003 laisse entière la double peine (L’ITF peut toujours être prononcée pour environ 270 crimes et délits. Quant à l’expulsion, elle peut toujours : être décidée par l’administration, quelle que soit la situation privée ou familiale de l’étranger ; être prononcée par l’administration, sans débat préalable devant une commission, en cas d’urgence absolue, alors même que cette urgence a parfois été provoquée par la négligence des services concernés, enfin et surtout, être la conséquence directe d’une condamnation pénale). [15]

Le délit de solidarité (Même tour de passe-passe).

Alors que suite à la condamnation de Madame Deltombe par le Tribunal Correctionnel de Lille, le 4 février 1997[16], pour avoir prêté les clefs de son appartement en son absence à un étranger en situation irrégulière a déclenché, à l’initiative des gens du cinéma, une vague de signatures par dizaines de milliers d’une pétition pour l’abrogation du délit de solidarité [17] ;

Alors que régulièrement des gens (Directrice d’école, membres de collectif…frères, sœurs époux…) apportant leur soutien à des étrangers en situation irrégulière sont inquiétés par la police ou la justice [18] ;

Alors que face aux attaques d’un ministre de l’Immigration qui affirmait, le 7 avril 2009, que « Toute personne, particulier, bénévole, association, qui s’est limitée à accueillir, accompagner, héberger des clandestins en situation de détresse, n’est donc pas concernée par ce délit. Et j’observe qu’en 65 années d’application de cette loi, personne en France n’a jamais été condamné pour avoir seulement accueilli, accompagné ou hébergé un étranger en situation irrégulière » [19], le Gisti avait dressé une liste de condamnations prononcées depuis 1986 contre des personnes ayant apporté une aide à des étrangers sans papiers[20] ;

Le Ministre de l’intérieur annonce, à grand renfort des médias, que, par la loi dite « Valls » du 31 décembre 2012, le délit de solidarité est abrogé.

Et tout le monde en est, aujourd’hui, persuadé.

Or, tel n’est pas le cas puisque l’article L 622-1 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile (CESEDA) [21] est toujours applicable et permet encore de poursuivre les aidants aux sans-papiers [22]

La double peine et le délit de solidarité sont bien des violences (même si elles sont légales) mais, alors qu’elles étaient visibles et connues, de véritables plans média politico-mensonger les trempent dans un filtre magique d’invisibilité alors qu’elles existent encore.

La précarisation du droit au séjour des étrangers en France.

Le 15 octobre 1983 partait de Marseille la Marche pour l’égalité et contre le racisme dite « la Marche des beurs », pour s’achever par un défilé de plus de 100 000 personnes à Paris le 3 décembre. Une délégation rencontre François Mitterrand qui promet l’instauration d’une carte de séjour et de travail valable pour dix ans, ancienne revendication des organisations de défense des droits des immigrés.

Le 17 juillet 1984 était promulguée la loi sur la carte de résident, titre unique de séjour et de travail, valable dix ans et renouvelable automatiquement. Il est important de souligner que cette loi avait été votée à l’unanimité par l’Assemblée nationale.

« Cette loi avait une portée majeure, à la fois pratique, symbolique et politique, et faisait date dans l’histoire du droit de l’immigration.

– Une portée pratique car elle supprimait les multiples obstacles administratifs qui existaient jusqu’alors pour l’obtention ou le renouvellement des titres de séjour de un an, trois ans, puis dix ans, qui devaient être accompagnés d’une carte de travail valable un an, trois ans ou dix ans… La délivrance de la carte de résident, valant autorisation de séjour et de travail, renouvelée automatiquement, libérait des multiples rendez-vous en préfecture et préservait par la même occasion des interruptions temporaires de droits et de l’insécurité qu’elles engendraient.

– Une portée symbolique aussi car, délivrée « de plein droit » à tous ceux et celles ayant des attaches en France (liens familiaux ou ancienneté de séjour), elle traduisait en actes le message que le gouvernement voulait adresser à l’opinion comme à la population étrangère : les personnes immigrées venues en France pour travailler ne pouvaient plus être reléguées au rang de supplétifs ; avec leurs familles, elles faisaient partie intégrante de la société française. Elles pouvaient, sans crainte d’une décision arbitraire de l’administration, construire leur avenir en France. Sécurité et stabilité formaient le socle qui devait leur permettre de s’insérer et de vivre comme tout un chacun.

– Une portée politique enfin car, en instaurant un titre de dix ans renouvelable de plein droit, le législateur réalisait un pas en avant vers l’égalité des droits avec les nationaux. Face aux discours d’exclusion semés par l’extrême droite, la loi du 17 juillet 1984 entendait en finir avec la suspicion permanente et le contrôle tatillon dont les personnes étrangères étaient précédemment les otages. La réforme était un message clair opposé au populisme et à la xénophobie. » [23]

Sauf que depuis trente années toutes les lois sur l’immigration ont petit à petit réduit à quasi néant ce dispositif puisque la carte de séjour temporaire d’une année est devenue la norme.

Mais de quelle violence s’agit-il ? et en quoi est-elle invisible ?

Elle est invisible car elle ne semble être que tracasserie administrative que de demander à l’étranger de renouveler son titre de séjour tous les ans.

En pratique ce sont 2, 3 voir 4 rendez-vous en préfecture car il manque toujours un document pour compléter le dossier, donc 2, 3 voir 4 jours d’absence au travail [24].

En pratique, ce sont des rendez-vous qui obligent à être présent devant la préfecture longtemps avant le lever du soleil [25].

En pratique ce sont des cartes de séjour qui empêchent embauche à durée indéterminée, obtention d’un crédit, signature d’un bail locatif ou accès à de nombreux droits sociaux et donc précarisent la vie professionnelle, sociale et économique.

En pratique ce sont des parents au séjour, à la vie professionnelle, sociale et économique précaire alors que leurs enfants ont vocation à devenir français ou sont français et ont, donc, des rapports parentaux faussés.

En pratique, ces précarités plongent les étrangers dans l’incertitude quant à leur avenir, les empêchent de participer à la vie sociale, politique, économique et culturelle, bref de se comporter en citoyens.

Ainsi derrière cette carte de séjour se cachent nombre de violences à nos yeux invisibles.

Le rapport Fekl remis au gouvernement en mai 2013[26] faisait ce même constat.

Aujourd’hui, le même tour de passe-passe que celui dont ont été victimes la double peine et le délit de solidarité se prépare, puisque un projet de loi sur l’immigration, présenté comme un texte visant à stabiliser le séjour des étrangers en France, prévoit la création d’un titre pluriannuel d’une durée maximum de quatre ans[27].

Or, ce texte non seulement conserve la logique de désintégration amorcée depuis 30 ans par les textes successifs mais crée une véritable « usine à gaz » pour l’obtention de ces titres de séjour pluriannuels et dont la délivrance peut être remise en cause ou le retrait peut être décidé, à tout moment[28].

Que le bruit médiatique que ne manquera pas de faire le gouvernement autour de ce texte en affirmant qu’il est « humain mais ferme » (comme ceux d’avant 2012 qui affirmaient être « ferme mais humain ») ne nous aveugle pas.

[1] Création extemporanée ou instantanée, Dominique Maugendre, 27.01.1987, Les séminaires de Félix Guattari

[2] L' » amendement Marchand  » à nouveau devant les parlementaires. Des demandeurs d’asile contestent la  » zone internationale  » prévue par le ministère de l’intérieur, Le Monde, Philippe Bernard, 21 Janvier 1992 ; La  » zone de transit  » devant le tribunal de grande instance de Paris L’Etat est condamné pour voie de fait sur des étrangers, Le Monde, Philippe Bernard, 27 mars 1992 ; Zone d’attente « Frontières du droit, Frontières des Droits, L’introuvable statut de la « zone internationale, Préface de François Julien-Laferrière L’Harmattan 1993.

[3] Charters, le cynisme de Besson, L’Humanité, entretien réalisé par Emile Rive, 21 Octobre, 2009 ; Afghans de France: le gouvernement dépense plus de 2.550 euros , 20 minutes, 22/10/2009 ; Revue de presse éradication jungle Calais / charters afghanistan sept-oct. 2009, Gisti.

[4]Voir le dossier du Gisti Jungles et exilé·e·s

[5] Premières reconductions de Roms en Roumanie depuis le discours de Sarkozy, Le Parisien, 17.08.2010 ; Les associations dénoncent « des charters déguisés » pour les Roms, Le Nouvel Obs, 18-08-2010, Besson s’arme pour ficher les Roms expulsés, L’Humanité, Anne Roy, 3 Septembre 2010 ; La circulaire visant les Roms est « très probablement illégale », Le Monde avec AFP, 12.09.2010, Circulaire sur les Roms: Besson «pas au courant», Bertrand «assume tout à fait», Libération, 12 septembre 2010 ; Roms: une association prévoit un recours, Le Figaro, 12/09/2010, Roms : une circulaire d’Hortefeux montrée du doigt, Le Nouvel Obs, 12-09-2010 ; Roms : la circulaire qui provoque l’indignation, Le Parisien, 12.09.2010, Circulaire sur les Roms: illégale, immorale ou normale?, L’Express, Catherine Gouëset, 13/09/2010 ; Circulaire sur les Roms : Bertrand assume, Besson un peu moins, Le Nouvel Obs, 13-09-2010 ; Cacophonie à droite à propos de la circulaire visant les Roms, Le Monde avec AFP, 13.09.2010 ; France’s deportation of Roma, The Guardian, Kim Willsher, 13 September 2010, Orders to police on Roma expulsions from France, The Guardian, Kim Willsher, 13 September 2010, Indignación en las filas de la oposición, El Mundo, 13/09/2010, France: une centaine de Roms reconduits mardi en Roumanie, La Libre Belgique, 13 septembre 2010; E.U. Calls France’s Roma Expulsions a ‘Disgrace’, The New York Times‎, Katrin Bennhold and Stephen Castle, 14 September 2010, France May Face Legal Action Over Expulsions of Roma, The New York Times‎, Katrin Bennhold and Stephen Castle, 15 September 2010 ; Roms : volte-face gouvernementale sur une circulaire, Le Monde, Elise Vincent avec Arnaud Le Parmentier et Philippe Ricard, 15 Septembre 2010 ; Circulaire sur les Roms: Hortefeux pris à son propre piège, Médiapart, Carine Fouteau, 28/01/2011

[6] voir Dossier du gisti « Les Roms »

[7] avis de la chambre criminelle de la cour de Cassation du 5 juin 2012

[8] Pour la Cour de cassation, le séjour irrégulier ne justifie pas la garde à vue, Libération, 6 juin 2012 ; Etrangers : la garde à vue en situation irrégulière, Libération, Sonya Faure, 6 juin 2012 ; Cour de cassation : un séjour irrégulier ne justifie pas la garde à vue, Le Parisien, 06.06.2012 ; Garde à vue pour séjour irrégulier, premier veto de la Cour …, Le Nouvel Obs, 6 juin 2012 ; Garde à vue pour séjour irrégulier, premier veto de la Cour de  ; Sans-papiers : les policiers face à un nouveau casse-tête, Le Figaro, Charette, Laurence, 07/06/2012 ; Ce qui devrait changer avec la fin des gardes à vue des sans papiers, Le Monde, Angela Bolis, 07.06.2012 ; La Cour de cassation dit stop aux gardes à vue des sans-papiers, Médiapart, Carine Fouteau, 07/06/2012 ; Séjour irrégulier et garde à vue : «la fin du dévoiement de la politique pénale», Libération, Sylvain Mouillard, 5 juillet 2012 ; Sans-papiers : le séjour irrégulier ne justifie pas la garde à vue, Le Parisien, 05.07.2012 ; Fin des gardes à vue pour les sans-papiers : « Ça va être compliqué », Le Nouvel Obs, Céline Rastello, 06-07-2012

[9] El Dridi contre Italie du 28 avril 2011

[10] Plus de prison pour les sans-papiers pour le seul refus d’être expulsés, Libération, 12 mai 2011 ; Plus de prison pour les sans-papiers pour le seul refus d’être expulsés, Le Parisien, 12.05.2011 ; Pas de prison pour les sans-papiers qui refusent d’être expulsés, Le Progrès, 12/05/2011 ; Plus de prison pour les sans-papiers pour le seul refus d’être expulsés, Le Point et AFP, 12/05/2011 ; Plus de prison pour les sans-papiers pour le seul refus d’être expulsés, La Dépêche, 12/05/2011

[11] Aircraft carrier left us to die, say migrants, Jack Shenker, 8 May 2011

[12] L’Otan mise en cause après la mort de 63 migrants, La Libre Belgique, 29 mars 2012 ; Migrant boat tragedy: UK crew may have seen doomed vessel , The Guardian, Jack Shenker and Kim Willsher, Apr 11, 2012 ; La marine française a-t-elle ignoré les appels à l’aide de naufragés libyens ?, Libération, 11 avril 2012 ; La marine française mise en cause après la mort de migrants en Méditerranée, 11/04/2012 Le Point ; Des migrants abandonnés à en mourir en Méditerranée, L’Humanité, Marie Barbier, 12 avr. 2012 ; La marine mise en cause après la mort de migrants, Le Parisien, 12.04.2012 ; Se l’Italia non sono anche loro, La Repubblica, 02 luglio 2012 ; «On a vu plusieurs bateaux, mais ils ne nous ont pas aidés», Libération, Sylvain Mouillard, 18 juin 2013 ; L’armée française visée par une plainte après la mort de migrants de Libye en 2011, La Croix, Rémy Pigaglio, 18/6/13 ; Naufrage en Méditerranée: nouvelle plainte contre l’«omerta», Médiapart, Carine Fouteau, 19/06/2013 ; 63 morts en Méditerranée, une tragédie évitable , L’Humanité, Paolo Stuppia, 19 Juin, 2013 ; Immigration clandestine: enquête sur une odyssée tragique, L’Express, Inès Mendret, 23/06/2013 ; Muerte en el Mediterráneo, Proceso, 21 juil. 2013 ; Naufrage au large de la Libye : les pays de la coalition accusés d’avoir tourné le dos, Libération, Willy Le Devin, 26 juin 2014 ; Non-assistance à un bateau de migrants : l’armée est-elle coupable ?, Libération, Willy Le Devin, 26 juin 2014 ; Enquête sur un naufrage en Méditerranée, Le Figaro, 27/06/2014 ; Morts de migrants en 2011 : la marine française devra s’expliquer, Le Parisien, Carole Sterlé, 26.06.2014

[13] Les Minguettes, avril 1981 : grève de la faim contre la double peine Catherine Panassier, Octobre 2008 ; Les grèves de la faim lyonnaises contre la double peine : opportunités militantes et opportunités politiques, par Lilian Mathieu « L’Homme et la société » 2006/2-3 (n° 160-161) Éditeur : L’Harmattan

[14] une peine ./ (Une peine point barre ; Des associations partent en campagne contre la double peine, Le Monde, Sylvia Zappi, 21.11.2001 ; Le rap soutient Bouda, danseur et «double-peine», Libération, Charlotte Rotman, 23 janvier 2002 ; Lionel Jospin a déçu la gauche associative, Le Monde, Sylvia Zappi, 02 Avril 2002 ; Les associations en attendent davantage sur la double peine, Le Monde, Sylvia Zappi, 11.04.2002 ; La gauche doublée par la droite., Libération, Charlotte Rotman, 28 novembre 2002 ; Les associations veulent retirer aux juges un pouvoir « exorbitant », Le Monde, Sylvia Zappi, 29 Novembre 2002 ; Le sourire retrouvé, Libération, Charlotte Rotman, 3 février 2003 ; La double peine à la peau dure, Libération, Charlotte Rotman, 5 avril 2003.

[15] Les associations dénoncent une réforme de la double peine « en trompe l’oeil », Le Monde, Sylvia Zappi, 05 Avril 2003 ; Un concert contre la double peine a attiré près de 15 000 personnes à Paris, Le Monde, Sylvia Zappi, 13 Mai 2003 ; Appel à désobéir à la loi Sarkozy sur l’immigration, Le Monde, Sylvia Zappi, 08 Juin 2003 ; Fayçal, 36 ans, menacé d’expulsion, rêve de « sortir du pétrin » grâce au nouveau texte, Le Monde, Raphaëlle Besse Desmoulière, 11 Juillet 2003 ; La double-peine loin d’être abolie , Le Nouvel Obs, le 08-10-2003 ; La République contre la double peine, Intervention lors du concert du samedi 10 mai 2003 (place de la République, Paris, Double peine : une réforme de dupes, Revue Plein droit n° 59-60, mars 2004, Gisti ; La double peine est morte. Vive la double peine !, Revue Mouvements n°35, septembre2004 ; Un projet de loi pour faciliter les expulsions, Le Parisien , Pascale Égré, le 17.06.2004 ; La réforme de la double peine mal appliquée, Le Parisien, Pascale Égré, le 16.09.2004 ; La réforme de la double peine peine à s’imposer, Libération, Charlotte Rotman, 17 septembre 2004 ; Les oubliés de la réforme, Le Parisine,P.E., 29.11.2004 ; Les associations dressent un bilan « décevant » de la réforme de la double peine adoptée en 2003, Le Monde, Sylvia Zappi, le 22 Janvier 2005 ; Sarkozy refuse de rouvrir le débat sur la double peine , le Figaro, Christophe Cornevin et Serge Pueyo, 31/08/2006 ; « La réforme de la double peine n’a rien changé », L’Express, Laura Béheulière, 28/05/2010, Un détenu en grève de la faim contre la « double peine », Médiapart, Ellen Salvi, 31/05/2012

[16] Voir l’arrêt confirmatif de la Cour d’appel de Douai en date du 17/12/1997

[17] Voir notamment Contre la loi Debré, Libération, 19 février 1997

[18] Mis en examen pour compassion, L’Express, Audrey Dupont, 19/06/2003 ; M. Hortefeux s’en prend aux soutiens des sans-papiers, Le Monde, Luc Bronner, 07 Août 2008 ; Enseignants, protestants, avocats… : la galaxie hétéroclite des soutiens, Le Monde, Luc Bronner et Michel Delberghe, 07 Août 2008 ; Haro sur les empêcheurs d’expulser en rond, L’Humanité, Marie Barbier, 9 Octobre, 2008 ; Sans-papiers: «Welcome» revisite le «délit de solidarité», Médiapart, Carine Fouteau, 11/03/2009

[19] Voir la lettre en date du 7 avril 2009 de Monsieur Besson adressée à toutes les organisations de la campagne pour l’abolition du délit de solidarité

[20] Voir le dossier du Gisti sur les délits de solidarité et Du délit de solidarité et du mensonge des politiques, Journal d’un avocat, Eolas, 13 avril 2009 ; Le délit de solidarité aux sans-papiers existe-t-il ?, Le Monde, Jean-Baptiste Chastand, 08.04.2009 ; Délinquants de la solidarité : les condamnations désavouant Eric Besson, Serge Slama, CPDH, 21 avril 2009 ; Le mythe qui existait, Journal d’un avocat, Eolas, 21 avril 2009 ; Loi sur les « aidants »: Besson s’en prend violemment au Gisti, L’Humanité, Lionel, 22 Avril, 2009 ; Aide aux sans-papiers: Besson remet en cause des affirmations du groupe de soutien Gisti, Le Point et AFP, 22/04/2009 ; Le GISTI dénonce la mauvaise foi d’Éric Besson, L’Humanité, Emile Rive, 23 Avril, 2009 ; « Délit de solidarité » : le Gisti contredit Eric Besson, L’Obs, 23-04-2009 ; Pour le Gisti, Eric Besson « ajoute la mauvaise foi au mensonge », Le nouvel Obs, 23-04-2009 ; Eric Besson « criminalise » les amours des sans-papiers, Le nouvel Obs, 28-04-2009 ; Dénonciation de la « criminalisation de la vie amoureuse » de sans-papiers, Le Point et AFP, 28/04/2009 Ce combat gagne les rangs de l’assemblée nationale (Le débat français sur le « délit de solidarité » gagne l’Assemblée …, Capital, 29 avr. 2009 ; Les mensonges de Besson ne passent pas, L’Humanité, Marie Barbier, 29 Avril, 2009 ; Pour le Gisti, Eric Besson « ne répond pas sur le fond », Le nouvel Obs, 30-04-2009 ; Le débat français sur le « délit de solidarité » gagne l’Assemblée, Le Point et Reuters Actualité, 30/04/2009 ; Le « délit de solidarité » en débat à l’Assemblée, Le nouvel Obs, 30-04-2009 ; Accusée d’avoir aidé un sans-papiers, Le Parisien, 11.05.2009 ; Délit de solidarité : les associations écrivent à Besson, Le nouvel Obs, 02-06-2009)

[21] http://www.gisti.org/IMG/pdf/ceseda.pdf

[22] Sans-papiers : la solidarité n’est plus un délit, Le Nouvel Obs, 02-01-2013 ; Sans-papiers: le délit de solidarité supprimé, RFI, 03/01/2013 ; Sans-papiers : La fin du délit de solidarité, 20 Minutes, 29 janv. 2014 ; Droit en France : suppression du « délit de solidarité », Wikinews

[23] Histoire de la carte de résident sur le site « rendez-nous la carte de résident »

[24] Surveiller et punir plutôt qu’accueillir, L’Humanité, Émilien Urbach, Mercredi, 23 Juillet, 2014 ; Immigration : « Ça ne change pas. L’étranger est toujours suspect », Le Nouvel Obs, Céline Rastello Publié le 23-07-2014

[25] Bobigny : la préfecture maltraite ses employés et ses immigrés, Rue 89, Camille Garcia, 24/09/2010 ; Un livre noir sur l’accueil des étrangers en préfecture, Le Parisien, 21.09.2010 ; Accueil des étrangers, les préfectures sur la sellette, La Croix, Jean-Baptiste François, Florence Quille et Bénévent Tosseri, 27/9/10 ; Etrangers: pourquoi les files d’attente s’allongent devant les préfectures, Libération, Marie Piquemal, 30 novembre 2011 ; L’accueil des étrangers en préfecture de Bobigny encore épinglé, Le Parisien, Nathalie Perrier, 26 juin 2014)

[26] Sécurisation des parcours des ressortissants étrangers en France, rapport au premier ministre par Matthias Fekl, parlementaire en mission auprès du ministre de l’intérieur.

[27] Voir le dossier du Gisti « Projet de réforme du droit des étrangers en France »

[28] La carte de résident, un droit oublié des politiques d’immigration, Politis, Lena Bjurström – 24 juin 2014 ; Des associations s’inquiètent de la création de titres de séjour pluriannuels pour les étrangers, Le Monde, Marguerite Salles, 25.06.2014 ; Manifeste pour un titre de séjour unique, valable 10 ans, délivré de plein droit

Migrants : ces très contestés « tests osseux » qu’Eric Ciotti veut systématiser

Des migrants à la frontière franco-italienne, près de Menton, le 15 juin dernier.ZOOM – Le député de droite, président du Conseil départemental des Alpes-Maritimes, préconise de systématiser l’emploi de tests osseux pour déterminer si certains migrants interpellés à la frontière franco-italienne sont majeurs ou mineurs. Une méthode polémique, toujours légale mais dont la fiabilité est très largement mise en doute.

« De jeunes adultes peuvent aisément se faire passer pour des mineurs et ainsi usurper le système », a expliqué Eric Ciotti à Nice Matin pour appuyer son discours en faveur des « test osseux sur les migrants dont l’âge serait sujet à débat ». Un discours entendu puisque selon France Bleu Azur, la préfecture des Alpes-maritimes est d’accord pour systématiser « dans les prochains jours » cette méthode à la frontière franco-italienne. Les migrants qui seraient ainsi reconnus comme majeurs pourraient alors faire l’objet d’une expulsion du territoire, seuls les mineurs étant pris en charge par l’Aide sociale à l’enfance, organisée par le département. La pratique, « tout à fait légale », comme l’a souligné Eric Ciotti, est pourtant sujette à caution depuis plusieurs années.

Quel est le procédé ?
Ce test, inventé dans les années 1950 aux Etats-Unis, repose sur une radio du poignet et de la main : il s’agit d’évaluer l’état des cartilages de croissance des jeunes étrangers, pour ainsi déduire leur âge. Plus il reste de cartilage, plus il y a de chances que la personne ait moins de 18 ans. A contrario, si les os sont soudés, on peut en déduire qu’elle est majeure. Pour affiner l’analyse, les clichés sont comparés à d’autres planches de radio issues de l’atlas de référence, élaboré par les Américains Greulich et Pyle grâce à des données recueillies… dans les années 1930.

Ces tests sont-ils fiables ?
La marge d’erreur est grande : de dix-huit mois au moins. Eric Ciotti l’a d’ailleurs pris en compte dans son argumentaire puisqu’il parle de « vérifier si la personne a plus de 21 ans », et non 18 comme l’âge de la majorité en France. Une précaution qui ne change rien pour les nombreux détracteurs de cette pratique. Le Conseil national d’éthique, la Commission nationale consultative des droits de l’homme, l’Ordre des médecins, le Conseil de l’Europe… Tous ont pris position contre. « Cela relève du Moyen Âge de la science. On détermine l’âge de la personne au doigt mouillé ! », s’offusque auprès de metronews l’avocat Stéphane Maugendre, président du Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti). Cet avocat spécialiste du droit des étrangers ne voit « pas comment la justice peut encore considérer cette méthode comme une preuve » : « On sait très bien que selon les régions, on grandit de façon différente »…

Mais l’Etat continue bien de la justifier. « Si elle ne permet pas toujours une distinction nette entre 16 et 18 ans, l’expertise osseuse ne doit pas pour autant être écartée car l’Académie de médecine a noté que sont relativement rares les situations où âge de développement et âge réel comportent des dissociations, la plupart d’entre elles conduisant à une sous-estimation de l’âge réel », expliquait ainsi en 2014 le ministère de l’Intérieur, interrogé sur le sujet par une sénatrice.

► Y a-t-on souvent recours ?
Pas suffisamment au goût d’Eric Ciotti, même si la justice continue d’utiliser largement ces tests lorsqu’il y a doute sur l’âge d’un migrant. « C’est courant », confirme Stéphane Maugendre. En 2013, année où 1347 examens de ce type avaient été réalisés selon les chiffres du ministère de la Justice, Christiane Taubira avait publié une circulaire pour rappeler que l’examen osseux réalisé sur les mineurs isolés étrangers doit intervenir en dernier recours. Et en mai dernier, les députés ont adopté un amendement visant à « limiter au minimum » ces tests. Mais ceux-ci restent bien d’actualité.

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La scolarisation des Roms devant la justice

index, Julia Pascual, 

La maire de Sucy-en-Brie comparaissait mercredi pour n’avoir pas inscrit cinq enfants à l’école

Tout au long de l’audience, qui aura duré près de huit heures, Marie-Carole Ciuntu sera restée de marbre. La maire Les Républicains de Sucy-en-Brie (Val-de-Marne) comparaissait mercredi 1er  juillet devant le tribunal correctionnel de Créteil pour avoir discriminé cinq enfants roms en refusant de les scolariser dans sa commune. Son regard impassible tout au long des débats laissait croire qu’elle n’avait jamais envisagé la condamnation.

C’est l’une des premières fois qu’un maire comparaissait pour refus de scolarisation. La décision a été mise en délibéré au 2 septembre, mais le parquet a requis la relaxe au bénéfice du doute.

Le père d’un des cinq enfants roms, Tanase Sorin, a expliqué avoir déposé plainte pour  » éviter que ça continue « .La scolarisation de son fils aîné, Vasile, lui avait déjà été refusée dans une autre commune, à Montgeron (Essonne), au motif que  » mon installation était illégale « . Tanase Sorin a débarqué à Sucy-en-Brie en juin  2014, sur un terrain de Réseau ferré de France, avec 70 autres personnes.  » Quelqu’un de la mairie et des policiers municipaux sont venus dans le camp et m’ont dit que ce n’était pas la peine d’inscrire les enfants parce qu’on allait partir. « 

Au président de la chambre, M.  Philippe Michel, qui ne comprend pas pourquoi les familles ont attendu le 30  septembre pour lancer des démarches, M.  Tanase répète qu’on l’en a d’abord dissuadé. Son avocat précise que les enfants n’ont été à jour de leurs vaccinations que le 25 septembre, condition légale préalable.

 » Discrimination raciale « 

Le 30  septembre donc, une militante de Romeurope 94 habituée à scolariser des enfants dans le département, Aline Poupel, se présente à la mairie avec cinq dossiers. Elle raconte :  » L’agent d’accueil du service de scolarité m’a dit qu’elle ne pouvait pas prendre l’inscription, que c’était une décision catégorique du cabinet.  » Mme Poupel adresse un courrier à la maire le jour-même, lui demandant de revenir sur sa décision. S’en suivent plusieurs courriers de mise en demeure, adressés par l’association Romeurope et le MRAP (Mouvement contre le racisme). La mairie reste silencieuse. Le 10  novembre, une citation directe pour  » discrimination raciale  » est déposée contre Mme Ciuntu. Quelques jours plus tard, le camp de roms est démantelé.

Sur l’enchaînement des faits, les versions divergent à la barre. La maire jure que  » la commune scolarise tous les enfants  » et explique ne pas avoir donné suite aux courriers parce qu’il  » fallait que je prenne le temps de réfléchir « .  » C’est une affaire montée de toutes pièces, un procès politique qui m’est fait « , a répété l’édile, pointant du doigt l’avocat de Romeurope, Me  Jérôme Karsenti, ancien élu de l’opposition de Sucy-en-Brie. Mme Ciuntu a également voulu souligner  » l’exaspération de la population  » devant l’installation régulière de campements roms dans sa commune.

Lus par le président du tribunal, les témoignages écrits de l’agent d’accueil de la mairie et de la chef du service de scolarisation ont laissé entendre que l’inscription des cinq enfants avait été refusée au motif que leurs dossiers étaient incomplets, faute de justificatif de domicile. Le tribunal s’est longuement attardé sur cette pièce. L’avocat du Défenseur des droits, autorité indépendante saisie de l’affaire et qui présentait mercredi ses observations, a tenu à recadrer les débats en rappelant que le document en question n’était pas obligatoire :  » Même si la famille ne peut pas présenter certains documents, l’élève doit bénéficier d’une inscription provisoire. C’est la loi de la République, a insisté Me Nicolas Demard. L’intention discriminatoire apparaît caractérisée. « 

Au cours de leurs plaidoiries, les parties civiles, le Groupe d’information et de soutien des immigrés, Romeurope, La Voix des Rroms et le MRAP ont voulu donner au procès une  » valeur d’exemple « .  » Nous ne sommes pas devant un tribunal d’opinion  » a, au contraire, estimé le substitut du procureur, Jérôme Piques. Il a porté un regard compréhensif sur le silence de la maire  » à partir du moment où les personnes vont être expulsées et que le dossier d’inscription ne justifie pas du domicile « .

En France, plus de la moitié des enfants roms vivant dans les bidonvilles ne seraient pas scolarisés. Au-delà de la responsabilité de certaines familles, les associations dénoncent les expulsions à répétition et les refus opposés par les mairies pour expliquer ces absences de scolarisation.

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Avocat