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Le Fas ? Ce « grand machin »

logo express 01/12/1989

Le Fas? Ce « grand machin » de l’intégration, financé par les cotisations sociales des immigrés, n’a manifestement pas de politique globale : « On distribue, note un observateur averti, 1,3 milliard par chèques de 20 000 francs à gauche et à droite. » Et plus du tiers du budget sert à entretenir des foyers.

« Dans celui de Saint-Denis, même les cafards ont du mal à respirer », dit l’avocat Stéphane Maugendre, Avocat spécialisé dans le droit de l’immigration. Pourtant, 140 000 personnes vivent encore, dans notre pays, dans des foyers. En Ile-de-France, 46 % des résidents y sont en attente depuis plus de cinq ans, et 5% se, révèlent être, eh oui, des retraités ! « Pas de doute, la structure du Fas est marginalisante, note Patrick Mony, du Gisti [Groupe d’information et de soutien des travailleurs immigrés], Il faut rompre avec ! tout ce qui a été fait auparavant. Pourquoi pas un institut, comme en Suède, chargé d’évaluer en toute indépendance le travail de cette foultitude d’organismes? » Sous réserve d’inventaire : on en compte 2 133 subventionnés par le Fas !

Patent, aussi, le parasitage politique. Pas à droite, où l’on semble chercher encore ses marques sur le sujet. Mais au PS, où chaque courant dispose, en vue du congrès, d’une sorte de « bureau des affaires indigènes », chargé de pousser une association très médiatique, forte d’un nombre symbolique d’adhérents. Qu’importe : en 1988, 80 % des Français d’origine maghrébine ont voté Mitterrand et il faut ramasser les miettes. Les fabiusiens jouent donc SOS-Racisme, les rocardiens France Plus, et les jospinistes viennent de créer le Club Emergence à l’intérieur du PS. « De l’électoralisme clientélaire à l’état pur ! » soupire Nordine Cherif, président de Génération heur, oublié dans la distribution des subsides, alors qu’il fut le premier à interpeller, avec 30 propositions, le gouvernement sur l’islam.

Les politiques, qui ne fréquentent guère les chercheurs, n’ont plus, A l’exception des Renseignements généraux, beaucoup d’interlocuteurs en prise directe avec les communautés immigrées. A tel point que Maurice Benasayag, délégué aux Rapatriés, vient de créer ex nihilo un Comité consultatif des jeunes. Histoire de renouer avec une base qui, bien qu’elle vote, connait de graves difficultés. Et Benassayag d’inciter les 12 principales associations de Français musulmans à se fédérer pour y voir plus clair.

La prostituée voulait faire justice…elle se retrouve dans le box

300px-JournalDetective Georges Martin, 22/06/1989

_DSC0016Ils sont quatre dans le box des assises de Bobigny, en ce lundi 12 juin 1989. Ils sont assis côte à côte, bien sagement.

Patricia Israël, 32 ans, la seule femme du lot, est une blonde frisée, avec un visage rond et inquiet qui émerge d’un corsage blanc; c’est une prostituée. Elle est aussi la tendre amie d’un des inculpés, Jean Lafontaine, 43 ans. un grand gaillard brun. Les deux autres accusés s’appellent Laurent Debeauvais et Jean Marie. Ils sont respectivement âgés de 26 et 49 ans.

Que viennent-ils faire là, ces personnages en quête de leur destin ?
Quel crime ont-ils perpétré en commun pour être ainsi réunis devant les assises de la Seine-Saint-Denis ? Tous quatre doivent répondre de la même inculpation de vols avec violences, extorsion de signatures et destructions volontaires d’objets mobiliers ou immobiliers; Jean Lafontaine est en outre poursuivi pour proxénétisme. Une bien curieuse histoire que la leur, en vérité.

Mais avant d’aborder le détail des faits, le président Le Gall procède, selon l’usage, à l’interrogatoire de personnalité des accusés .

De Jean Marie, l’ainé du quatuor, on apprend d’abord qu’il n’a jamais connu ses parents. L’orphelinat, puis, de 13 à 17 ans, les enfants de troupe, puis l’armée… Quand il en sort, il a le grade de sergent-chef. il va alors exercer, pendant vingt ans le métier de serveur dans divers bars et restaurants. C’est un employé modèle, probe et sérieux, et sur le compte duquel on n’a obtenu que d’excellents renseignements. Coté cœur : la solitude. Oh, Jean Marie a bien vécu avec une jeune personne pendant quelques années, mais est décédée d’un cancer, a 26 ans.

Lors de son arrestation, il avait sur lui la carte d’identité de cette pauvre fille, son grand amour perdu, et il en pleure à l’audience lorsque le président signale la chose.

Un incident dans le « salon spécial» d’une boîte de Pigalle

Quant à Laurent Debeauvais. il a beaucoup souffert d’avoir perdu son père, en 1972, alors qu’il n’avait que 9 ans. A Amiens, sa ville natale, il poursuit sa scolarité jusqu ‘à l’âge de 16 ans. Ensuite, il mène une vie de déraciné : des petits boulots et, surtout, la drogue. En 1963,  Debeauvais a été condamné à deux années d’emprisonnement, dont une avec sursis, pour usage et trafic de stupéfiants.

Jean Lafontaine, lui, est né au Vietnam en janvier 46. Élevè près de Clamart par une mère restauratrice, marié, divorcé, ancien gérant de discothèque, il est aujourd’hui propriétaire d’un pavillon fort cossu à Noisiel, en Seine-et-Marne. Joueur forcené, il est même allé jusqu’à perdre en une seule soirée l’équivalent du prix d’un très bel appartement ! Puis, il est passé de l’autre côté de la barrière, pour devenir croupier dans plusieurs cercles de jeux parisiens.

C’est en juin 1962 que Lafontaine a fait la connaissance de Patricia Israël et qu’ils se sont mis tous les deux en ménage. Encore un drôle de cas social que cette Patricia, elle aussi mariée et divorcée. Ballottée dès son plus jeune âge de nourrice en nourrice, de foyer en foyer, elle est allée d’un homme à l’autre, au gré des rencontres. Elle a également fait, assez souvent, des séjours en hôpital psychiatrique. Les médecins qui font examinée ont diagnostiqué chez elle «une carence affective majeure» et une nette «tendance à la dépression». Notons au passage que les mêmes experts ont estimé que Jean Marie serait «faible et incapable de se prendre en charge» et que Laurent Debeauvais présenterait «une personnalité déséquilibrée et un caractère impulsif». Seul Jean Lafontaine a été jugé «exempt de toute anomalie mentale»…

Revenons d’ailleurs un peu à cet intéressant personnage. C’est le 29 juillet 1983 qu’il devient l’heureux papa d’une petite Priscilla, première et seule enfant de Patricia. Trois ans plus tard, la jeune femme fait ses débuts d’«hôtesse dans un établissement de Pigalle, Le Calcutta.

— En quoi consistait votre travail ? s’enquiert le président.
— Mon rôle était de faire boire les clients, répond l’intéressée d’une petite voix timide, presque enfantine. Sur une bouteille de champagne à 800 francs, j’en touchais 20…

— Vous ne faisiez pas que pousser ces messieurs à boire, n’est-ce pas ?
— Non. Il y avait des enragés qui voulaient nous emmener dans un salon spécial. Pour passer un moment ensemble, c’était 700 francs…

— En d’autres termes, vous acceptiez de vous prostituer. Pourquoi ?
— On voulait s’acheter une maison au bord de la mer, Monsieur…

La réponse, faite sur un ton tellement ingénu, suscite quelques rires dans la salle.

Le président en vient aux faits. Le 30 septembre 1986, deux «enragés», comme dit l’accusée, se présentent au Calcutta. Ce sont deux copains, deux célibataires en goguette, qui partagent provisoirement le môme pavillon, à La Courneuve, au 38 de la rue Jean-Verrat, et qui pour l’heure ont décidé de s’amuser. L’un se nomme XX, l’autre Roger Sylvain-Leprince. Et c’est ce dernier qui entraîne bientôt Patricia dans le salon spécial de la boîte, pour une brève étreinte.

Mais, une fois l’acte consommé, Patricia est absolument furieuse quand elle s’aperçoit que son partenaire a subrepticement retiré son préservatif avant de la pénétrer…

Expédition nocturne et punitive vers une maison de banlieue

— Je le lui ai reproché, explique-t-elle à la cour, mais il s’est contenté de sourire. Moi, j’avais très peur d’avoir attrapé le sida. Le lendemain, je suis allée faire les examens, mais il fallait attendre quinze jours pour avoir les résultats ! Alors, le soir, quand Jean m’a emmenée en discothèque, à La Scala, je n’avais pas le moral. C’est vrai, d’habitude, je me déchaîne, mais là, ça n’allait pas…

Le suite, on la devine. Lafontaine et Patricia rencontrent Marie et Debeauvais dans le night-club, et ils racontent l’affaire. Tout ce petit monde se monte la tête en buvant du whisky, et l’on décide à l’unanimité de monter une expédition punitive. L’adresse des coupables ? On l’a : elle est inscrite sur le chèque avec lequel les deux joyeux fêtards ont réglé leur addition. Et voilà comment, le 2 octobre 1986, vers 3 heures du matin, le quatuor débarque à La Courneuve, devant le domicile d’XX. et de Sylvain-Leprince…

C’est Patricia qui réussit à se faire ouvrir la porte, en appelant de la rue les deux hommes et en se montrant seule. Mais à peine le battant est-il entrouvert que tout le groupe s’engouffre en force dans la maison. XX. est copieusement frappé, insulté, et même blessé d’un coup de couteau au visage par Debeauvais. Mais c’est surtout à Sylvain-Leprince qu’on en veut. Lafontaine gronde qu’on va lui crever les yeux à l’aide de bâtons brisés… La jeune femme, elle, le gifle, lui tire les cheveux, puis elle lui arrache son slip – c’est dans cette tenue légère que le malheureux était en train de dormir. Ensuite, elle menace de lui couper le sexe avec un gros couteau trouvé dans la cuisine. Elle finira d’ailleurs hauteur des omoplates, et par lui en¬tailler sérieusement la peau…

Ces préliminaires accomplis, la bande se met à saccager les lieux, à briser tout le mobilier qui lui tombe sous la main. Sous la contrainte, les quatre sinistres personnages obligent XX. à leur signer un chèque de 5 000 francs, et Sylvain-Leprince deux chèques de 10 000 francs chacun. Enfin, la fine équipe s’esquive dans la Mercedes de Lafontaine, en emportant les montres des deux victimes et des papiers d’identité, une carte bleue, une alliance en or, une somme de 400 francs, un trousseau de clés du pavillon, et même le magnétoscope !

Bien qu’en piteux état et sévèrement choqués – chacun d’eux se verra reconnaître une incapacité de travail de huit jours -, les deux malheureux copains agressés vont porter plainte. Et comme on sait où trouver Patricia, les «justiciers» au grand complet ne tardent pas à être arrêtés. Ils font des aveux complets…

A l’audience, XX. et Roger Sylvain-Leprince sont appelés à la barre. Ce sont deux garçons blonds, frisant la quarantaine. Ils n’ont pas l’air très à l’aise et ils n’ont pas non plus grand-chose à raconter.

— Nous avons eu très peur, dit l’un. On a frôlé la catastrophe.
— Notre petite fête, ajoute l’autre, on l’a payée très cher…

Sur ces passionnantes dépositions, la séance est levée.

« Unis dans la nuit de terreur, unis dans la punition… »

Le lendemain matin, mardi 13 juin, c ‘est le ministère public qui intervient le premier, en la personne de M. l’avocat général Madranges.
— Équipée sauvage, lance-t-il, actes de torture, brutalités odieuses infligées à deux innocents par quatre malfrats qui voulaient faire leur justice eux- mêmes Voilà en résumé l’affaire qui noua est soumise aujourd’hui. Alors, bien sûr. on dira qu’il n’y a pas eu mort d’homme. C’est vrai. Mais gardons- nous pourtant d’une sanction trop faible, qui ne pourrait qu’inciter les accusés à la récidive, Il faut tes punir, oui. mais U faut surtout les dissuader de recommencer. Et comme ils étaient unis dans cette nuit de teneur qu’ils ont toit vivre à leurs victimes, je croîs qu’ils doivent rester unis dans la sanction. Je réclama pour eux quatre le même peine de cinq années d’emprisonnement. assortie du sursis, mais aussi d’une mise à l’épreuve de cinq autres années…

C’est maintenant aux quatre avocats de la défense de prendre tour à tour la parole, en premier lieu à Me Jean-Yves Leborgne, du barreau de Paris, qui plaide de sa voix puissante pour Laurent Debeauvais.

— Nos deux fêtards n’ont-ils pas leur part de responsabilité dans ce qui s’est passé ? demande-t-il. Parce qu’on est en goguette, parce qu’on bai du champagne, on se croit tout permis et l’on ne respecte plus rien, et surtout pas les filles, naturellement. Quant à mon client, on vous l’a dit il est déséquilibre, impulsif, il a suivi ses copains comme ça, simplement pour leur faire plaisir…

— Qui est Jean Marie ? s’interroge ensuite Me Maugendre, avocat au barreau Bobigny. En quelques mots, je dirais que c’est une personne sans origines sans descendance, sans biens. N’oubliez pas : quand on l’a arrête, il avait sur lui. dans sa poche, la carte d’identité de la femme aimée, cette femme morte depuis si longtemps. Alors, je me dis, et vous vous direz aussi, que quand on est capable de nourrir une telle passion, on ne peut pas être en fièrement mauvais…

Me Humbert se lève maintenant pour défendre Patricia Israël
— Par ma voix, dit-il ma cliente demande pardon aux victimes pour le mal qui a été commis. Il faut avant de la juger, se souvenir de l’enfance sans amour qu’elle a vécue et de ses troubles nerveux. Elle a une peur phobique de la maladie. alors, le sida. n’est pas, c était trop d’angoisse, trop de colère…

— Jean Lafontaine a toujours travaillé, affirme enfin Me Madec. Il êtes joueur ? Ce n’est pas un délit et d’ailleurs, il ne l’est plus. Alors, au nom la petite qu’il a eue avec Patricia souvenez-vous qu’il est déjà reste vingt et un mois sous les verrous et que l ’ordre public, bien souvent passe par la clémence.

Trois longues heures de délibérations, et les jurés reviennent avec leur verdict ; trois ans de prison pour Laurent Debeauvais, trente mois pour Jean Lalontaine. pour qui on a pas retenu l’inculpation de proxénétisme; trente mois dont douze avec sursis pour Patricia Isreal; Enfin, deux ans dont un avec sures pour Jean Marie.

Turquie : toujours la torture

Accueil,  24/10/88

La torture continue d’être pratique courante en Turquie et les atteintes aux droits de l’homme y sont toujours aussi préoccupantes : c’est la conclusion tirée vendredi, lors d’une conférence de presse à Paris, par deux personnalités françaises qui se sont récemment rendues sur place, à l’invitation de l’Association des droits de l’homme de Turquie.

Le docteur François Martin, médecin à Dreux où il a depuis plusieurs années l’occasion de constater des traces de sévices chez des immigrés et réfugiés turcs et kurdes.et Me Stéphane Maugendre ont notamment assisté à une audience du procès de Dev-Yol, dans le camp militaire de Mamak, près d’Ankara.

Sept cent vingt trois accusés y sont jugés dans un procès qui dure depuis 1982 et la plupart des « preuves retenues contre eux ont été obtenues sous la torture ».

La délégation a également rencontré les avocats, les familles de prisonniers et des médecins de l’Association médicale. Ces derniers leur ont confirmé qu’ils continuaient à traiter quotidiennement dans un service spécialisé d’un hôpital d’Ankara, des prisonniers victimes de toutes sortes de sévices (alors que la Turquie a signé la convention européenne contre la torture en avril).

On confirme également le procès intenté il y a quelques jours par les autorités d’Ankara contre l’Association des droits de l’homme : sa dissolution a été demandée par le procureur ainsi que des peines de prison pour ses dix principaux dirigeants, pour avoir lancé, il y a plusieurs mois déjà, une campagne contre la peine de mort et pour une amnistie générale en Turquie.

⇒ Voir l’article

Mission en Turquie

280px-Echo-2011 Francoise Guignard, 11/10/1988

_DSC0011Me Stéphane Maugendre, avocat au barreau de Bobigny, le docteur Françoîs Martin, médecin hospitalier à Dreux, accompagnés de Mme Magalie Molinié, journaliste, reviennent de Turquie, où ils ont enquêté sur la situation des droits de l’homme. Ils étalent invités à Ankara par l’association des droits de l’homme de cette ville : « insan Haklari Denergi» et mandatés par la fédération d’Eure-et-Loir du M.R.A.P.

Hier, ces trois témoins étaient à Dreux, à l’invitation de l’association des travailleurs turcs (A.T.T)

« Ce n’est pas par hasard qu’un médecin drouais a fait partie de cette mission », explique le docteur Martin, pneumologue au centre hospitalier : « A Dreux, vit une forte communauté turque, principalement kurde. Professionnellement, je rencontre des patients disant avoir été victimes de sévices et présentant une pathologie particulière, par exemple des tuberculoses ».

La docteur Martin était allé en Turquie en 1984. Pour le compte de la Fédération internationale des droits de l’homme, il avait essayé d’enquêter sur les conditions de détention de grévistes de la faim détenus à Ankara.

Si, en 1984, le médecin drouais s’était fait raccompagner par la* police, cette nouvelle mission, qui s’est déroulée an septembre der¬nier, a pu es dérouler normalement, Il faut dire qu’elle s’est jointe h un groupe de parlementaires allemands de la S.P.D. et des Verts.

En cinq jours, les trois français ont assisté à une des audiences publiques (seulement trois matinées par semaine) du célèbre procès de Dev Yol, qui dure depuis huit ans. Ils ont rencontré le directeur du cabinet du ministre de la Justice pendant une heure et demie, « entrevue décevante ». Ils ont vu des familles de prisonniers : « Leur détermination et leur dénuement m’ont frappée », dit notre consœur Magall Molinié. Ils ont eu contact avec l’association des’ médecins turcs, qui ne peut intervenir que dans les prisons civiles, des avocats dont deux s’occupent des procès de Dev Yol d’une part, et du P.K.T. d’autre part, ainsi qu’avec des anciens dirigeants de la principale association d’enseignants.

Un hangar pour prétoire

L’avocat français a eu du mal à reconnaître la justice tant au procès se déroulant dans un hangar, entouré de militaires en armes, qu’à travers les dossiers qui lui ont y été traduits :  « Plusieurs personnes s’accusant du même crime alors que certaines sont en prison, que d’autres se trouvaient à des centaines de kilomètres. »  Les conditions de la défense, l’indépendance de la magistrature, le contenu 1 de certains articles du Code pénal, tout lui parait loin des principes de la démocratie. Les trois chargés de mission français sont unanimes pour ne pas croire à la démocratie an Turquie, pays qui a ratifié la Convention européenne des droits de l’homme dés 1864 et la Convention Internationale de l’ONU en 1988.

Trois Français ont assisté à un procès en Turquie

280px-Echo-2011 11/10/1988

_DSC0010Trois français, dont François Martin, médecin à l’hôpital de Dreux,ont passé quelques Jours en Turquie, en septembre dernier. A l’invitation de l’Association des Droits de l’Homme, cette délégation s’est rendu à Ankara pour y enquêter sur la situation des Droits de l’Homme. La délégation, mandatés également par le MRAP d’Eure et-Loir, a pu assister aux premières audiences de la défense dans le procès de 723 membres présumés de l’organisation interdite Dev-Yol. est Français sont revenus avec des images chocs et des témoignages intéressants.

Une vingtaine de Turcs, résidant à Dreux, se sont retrouvés hier pour entendre les témoignages de François Martin, médecin à Dreux ; Stéphane Maugendre, avocat parisien, et de Magalie Molinier, journaliste, qui se sont rendus en Turquie pour enquêter sur les Droits de l’Homme.

A l’invitation de l’Association des travailleurs Turcs de Dreux, les trois français qui ont séjourné à Ankara dernièrement ont été écoutés avec intérêt par un auditoire, certes maigre, mais particulièrement intéressé.

François Martin devait rappeler avant d’entrer dans le vif du sujet : « Il s’agissait pour nous d’assister aux premières audiences de la défense dans le procès de 723 membres présumés de l’organisation interdite Dev-Yol auquel 74 condamnations à mort ont été requises en août 88. Notre délégation a pu s’enquérir de la manière dont sont respectées la Convention européenne des Droits de l’Homme, ratifiée en 1954 et la Convention internationale de l’ONU contre la torture, ratifiée également par la Turquie. Le 5 septembre, notre délégation a assisté à une audience du procès au camp militaire de Mamak ».

François Martin a été interpellé au cours de ce procès par plusieurs points : « 40 inculpés étaient présents dans un hangar où siégeaient on procureur, un général, quatre juges civils et deux avocats. Les deux avocats ont précisé comment quatre inculpés avaient signé des aveux préparés à l’avance. Ils ont aussi donné les noms des policiers tortionnaires ».

Le travail difficile de la défense

Le lendemain, les français faisaient le point de ce procès avec les avocats: «Il nous a été dit que parmi les 824 motifs d’inculpation de l’acte d’accusation, 823 résultent de déclarations faites sous la torture ». La délégation a également rencontré des familles de détenus, tous condamnés à mort: « Les compagnes ou épouses des condamnés nous ont précisé les sévices dont elles avaient été victimes pendant les jours de détention an centre de garde i vue avant la prison. Ces familles éprouvent actuellement de grandes difficultés à trouver un emploi, un logement et les moyens financiers pour « adoucir  » les conditions de vie des détenus en prison, oh le trafic est la règle ». François Martin a également été marqué par le com¬portement de ces ramilles au cours des procès.

Le 7 septembre, les Français rencontraient le chef de cabinet du ministre de la Justice. Lors de cette réunion, la délégation a posé plusieurs questions sur la torture en Turquie : « Aucune reconnaissance de fait de torture en Turquie n’a été reconnue par M.Turcmen. Quant à la persistance d’une juridiction militaire, elle se trouverait justifiée à ses dires, par les actes d’accusation basés sur sur des faits antérieurs à septembre 1980».

La situation des Kurdes

An siège de l’association des Droits de l’Homme, la délégation française a donné mie conférence de presse : « Nos interventions avec la presse turque ont porté sur le respect des conventions internationales contre la torture, l’indépendance de la justice, le droit d’association pour les fonctionnaires ». Les Français ont également abordé la situation des kurdes : « Ceux d’origine turque ne peuvent vivre en Turquie et sont obligés de demander l’asile politique à la France on à l’Allemagne. Aucune déclaration faite par la délégation n’a été publiée dans la presse turque ».

Stéphane Maugendre, avocat, soulignait les points qui l’ont choqué : « Et notamment le déroulement d’un procès dans un hangar avec des militaires armés jusqu’aux dents, qui passent sans cesse…, sans les interdictions durant le procès. L’indépendance des magistrats m’a également surpris.

Des assises contre l’expulsion

La_République_du_Centre_Logo,15/03/1988

Le M.R.A.P. a permis à de multiples associations de se rassembler pour une large concertation. Des témoignages vécus en présence d’un public nombreux.

CHARTRES. — Les première « assises départementales » organisées par le M.R.A.P. (mouvement contre le racisme et pour l’amitié des peuples) se tenaient samedi dernier au Forum de la Madeleine, en présence d’un auditoire composé d’associations et de représentants de divers organismes, ainsi que d’individuels, dont certains étaient venus directement témoigner de leur cas.

La thème abordé tout au long de cet après-midi devant la menace d’expulsion, quels sont les droits des étrangers en France ? aura permis aux parties prenantes de confronter expérience et témoignages tout en répondant en direct aux questions du public grâce aux juristes présents pour la circonstance. (La loi Pasqua s’est trouvée très souvent au cœur des problèmes).

Patrice Alliot, président de la fédération du M.R.A.P. d’Eure- et-Loir, avait réuni autour de lui Stéphane Meyer, avocat et membre du secrétariat national du M.R.A.P. ; Fadila Amrani, membre du secrétariat national Terre d’asile ; Abderazah Bouazizi, avocat et membre du C.A.I.F. ; Stéphane Maugendre, avocat et membre du G.I.S.T.I., ainsi que Jean-Marie Boutiflat, membre du collectif A leurs côtés, diverses associations (association des travailleurs turcs. Ligue des droits de l’homme, représentants du syndicat de la magistrature ; l’évéque de Dreux, les prêtres de Rechèvre étaient venues entendre ou témoigner de la situation actuelle en France en matière d’expulsions ou reconductions a la frontière.

Car la notion de situation régulière couvre des réalités bien différentes. Comme le montre le cas de Nzolani N’ Dofunsu, étudiant zaïrois, menacé d’expulsion pour le 24 mars prochain. Son changement d’adresse ne lui a pas permis de recevoir la copie du jugement de l’O.F.P.R.A, (Office français de protection des réfugiés et apatride qui est chargé d’instruire les dossiers de demande d’asile et d’y répondre.

Nzolani est en France depuis6 ans comme étudiant et ce statut ne lui permet pas de terminer sa dernière d’étude ni d’obtenir le statut de réfugié politique. En opposition avec la politique actuelle du Zaïre, quelle liberté de choix lui reste-t-il ? M. Charleston est Haïtien d’origine et s’est enfui des prisons des tontons Macoutes. En France, il rencontre une femme, ils ont un enfant et il trouve du travail. Sa demande d’asile est rejeté, ainsi que sa demande de recours. Il n’a plus de papiers donc plus de travail bien que son avis d’expulsion n’ait pas été prononcé.

Autant de témoignages qui ont par la suite débouché sur un projet de concertation communal et la mise en place dans le département d’un collectif qui recenserait toutes les personnes, pouvant Intervenir rapidement! dès qu’un cas d’expulsion ou de| menace expulsion est signalé.

Les juristes, à ce titre, seront un atout très précieux au côté de tous tes bénévoles qui consacrent la majeure partie de leur temps à défendre «l’indéfendable». A suivre donc…

Assises départementales du MRAP Vers la création d’un réseau d’alerte en cas d’expulsions

280px-Echo-201114/03/1988

Inquiétudes au MRAP. La multiplication des expulsions d’étrangers et les nombreuses reconduites à la frontière ont poussé les responsables du mouvement à créer une nouvelle structure de riposte.

« NOUS souhaitons mettre sur pieds un réseau d’alerte et de solidarité. Notamment au départ des aéroports. Il faut que nous puissions agir rapidement et secourir les gens qui fuit l’objet d’une expulsion. Il y a toujours des brèches… Il faut s’y engouffrer ». Pour Me Stéphane Meyer, dirigeant national du MRAP, cette priorité était à l’ordre du jour samedi au forum de la Madeleine à Chartres où se tenaient les assises départementales du MRAP contre les expulsions. Plusieurs intervenants (MRAP. G.I.S.T.I, France Terre d’Asile, Cimade. C.A.I.F, F.A.S.TI et A.S.T.I) ont animé cette journée d’études et le début suivi par un bon nombre d’associations de défense des droits, des syndicats, des représentants de partis politique. Mgr Gaillot, évêque de d’Evreux, avait tenu a faire le déplacement et a assisté à une partie de ses assises.

Un point de départ sous forme de constat d abord : la multiplication rapide des expulsions et des reconduites à la frontière «visant notamment de nombreux jeunes » . Une mise en cause ensuite par les intervenants de la loi du 9 septembre 1986, dite loi Pasqua-Pandraud. Un texte dont les termes ont été décortiqués samedi, les conséquences analysées. Les intervenants ont critiqué le fait qu’en matière de reconduite à la frontière, la loi ait donné  tout pouvoir aux préfets et non plus aux «seuls tribunaux judiciaires». Une donnée lourde de conséquence en matière de garantie de procédure.

Exemples à l’appui, les participants n’ont pas manqué non plus de mettre en avant la présence de plus en plus importante de vices de procédure.
Voilà pour le constat. Reste que ces assises avaient aussi une finalité : celle d’élaborer, voire préciser des ripostes possibles. L’une d’elle a fait l’unanimité : il s’agit de constituer un «réseau d’information et de solidarité ayant pour but de résister aux expulsions d’immigrés». La “création » d’un réseau d’hébergement a également été abordée. Cette hypothèse a fait l’objet de discussions : en offrant leur toit, en abritant un étranger faisant l’objet d’une mesure d’expulsion, les personnes agiraient illégalement Un point qui n’a pas manqué de diviser les participants.

Stéphane MAUGENDRE (avocat)

Stéphane MAUGENDRE est né en 1961, il est avocat depuis 1988.

Il a fait ses premières armes auprès de Madeleine TERRASSON et Henri LECLERC, Avocats au barreau de Paris, au cabinet Ornano.

Il a créé son cabinet en 1989 en Seine Saint Denis et est aujourd’hui associé au sein de la SELARL MINIER MAUGENDRE ET ASSOCIEES

Il est ancien membre du conseil de l’ordre des avocats du Barreau de Bobigny. Il a été enseignant (Droit Pénal, Procédure Pénale et Droit des étrangers) à l’école de Formation des Barreaux du ressort de la Cour d’Appel de Paris, juré d’examen de déontologie du CAPA (Certificat d’Aptitude à la Profession d’Avocat) et intervenant à l’Ecole Nationale de la Magistrature. Il a été président de la Commission Nationale de Droit Pénal du Syndicat des Avocats de France (SAF) et Membre du Bureau de la FIDH. (fédération internationale des droits de l’homme). Il est membre, depuis sa création, de l’association ADDE (Avocats pour la Défense des Droits des Etrangers).

En octobre 1989, il est Observateur à Ankara (Turquie) lors du procès d’une centaine de membres de l’organisation kurde Dev Yol (page 44 du bulletin de liaison et d’information de l’Institut Kurde de Paris oct-nov-dec 1989).

En 1993, il est, pour la FIDH, observateur en Tunisie lors du procès d’un des responsable de l’Union Générale des Etudiants Tunisiens.

De 1994 à 1996, il est rédacteur pour les Editions du Dictionnaire permanent.

En 1989, il devient pendant quelques temps l’avocat Cheb Khaled mais, surtout pendant une quinzaine d’années et jusqu’à son décès celui de Cheikha Rimitti (Cheikha Rimitti, chanteuse algérienne, Le Monde, Véronique Mortaigne, 16.05.2006).

De janvier 2014 à avril 2015, il est coordinateur référent pour la défense pénale d’urgence du Barreau de la Seine Saint Denis

A partir de 2008, Stéphane MAUGENDRE est président du GISTI (Groupe d’Information et de Soutien des Immigré.e.s), dont il est membre depuis 1985. Il aime à rappeler : «Je suis entré au Gisti pour devenir avocat et je suis devenu avocat parce que j’étais au Gisti..» (Gisti, ils restent, Libération, Anne DIATKINE, 5 août 2008)

Il est impliqué dans la défense pénale et du droit des étrangers.