Archives de catégorie : garde à vue

L’heure de la réforme a sonné pour la garde à vue

Corine Chabaud, 20/01/2011

Le Parlement examine jusqu’au 27 janvier un nouveau projet de loi portant réforme de la garde à vue. Une procédure qu’il est urgent d’améliorer.

Les exemples foisonnent, choquants. Ce sont dix Bordelais placés une nuit en garde à vue (gav), car contrôlés positifs à l’alcool… sur une bicyclette ! Ce sont trois collégiennes appréhendées dans leur établissement ou chez elles, dans le XXe arrondissement de Paris, et retenues pendant 10 heures au commissariat, un temps menottées. C’est une militante de Resf (Réseau éducation sans frontières) enfermée 13 heures au Quai des Orfèvres, à Paris, interrogée sur ses « idées politiques de gauche » et forcée à un prélèvement salivaire.

Fouilles aux corps, mises à nu, insultes ou passages à tabac :
les cas de garde à vue abusive, accompagnée de violences, sont légion en France. Parfois même dénoncés par des personnalités qui s’y sont frottées. Comme l’ancien haut-commissaire aux soli­darités actives, Martin Hirsch : trois heures en garde à vue, sans lacets ni cravate, quand il a soulevé un cas de dysfonctionnement dans la pharmacie centrale des hôpitaux. Ou comme l’écrivain Frédéric Beigbeder : deux nuits au poste, une mésaventure racontée en 2009 dans son livre Un roman français. Il y a même eu récemment des policiers pour contester une procédure trop systématique et humiliante. Tel Philippe Venère, commissaire divisionnaire à la retraite et auteur de Les flics sont-ils devenus incompétents ? chez Max Milo, qui compte à son actif « 40 000 gardes à vue » : selon lui, un « indicateur de performance » pour le pouvoir !

En France, l’heure de la réforme de la garde à vue a sonné. En dix ans, le nombre de gav, une procédure créée en 1959 et facilitée depuis 1993, a explosé : avec les délits routiers, on en compte 900 000 par an (contre 335 000 en 2001). Depuis le 18 janvier, un nouveau projet de loi est discuté à l’Assemblée nationale. Car, à l’été 2010, le Conseil constitutionnel a invalidé la loi sur la garde à vue, jugeant ses modalités non conformes. De même, la Cour européenne des droits de l’homme (Cedh) et la Cour de cassation ont sanctionné un système trop coercitif et traumatisant. Jusqu’ici, un avocat ne pouvait intervenir qu’une demi-heure au cours des 24 heures de gav (prolongeables jusqu’à 96 heures, dans les dossiers de terrorisme) et n’avait pas accès au dossier.

À présent, sur le conseil des Sages, un avocat devrait intervenir dès le début de la garde à vue et demeurer auprès de son client. De quoi freiner les déclarations sous pression. « Il faut en finir avec la culture des aveux. Les policiers devront chercher des preuves objectives », applaudit Me Stéphane Maugendre. L’ avocat vient d’obtenir une jolie victoire : l’annulation de cinq procédures par le tribunal de Bobigny (93), au motif que les policiers n’avaient pas signifié à ses clients leur droit de garder le silence pendant la garde à vue. Une obligation réaffirmée par la Cedh.

Devant le Parlement, les débats promettent d’être âpres
. Mais les droits de la défense devraient en sortir renforcés. La garde à vue devrait se limiter aux infractions les plus graves. Et il ne sera plus question d’« audition libre », procédure moins protectrice des droits (la commission des lois l’a supprimée en décembre). De quoi arc-bouter les policiers, dont les syndicats sont déjà vent debout contre la réforme.

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Un avocat militant aux côtés des gardés à vue

, Denis Peiron, 11/01/11
Me Stéphane Maugendre, avocat et président du Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti).
« Quand la justice dérape, c’est la démocratie qui se trouve bafouée. » Armé de cette conviction, Me Stéphane Maugendre mène bataille de longue date contre « la culture de l’aveu » qui, selon lui, prévaut trop souvent lors des gardes à vue, en nombre exponentiel (près d’un million chaque année). Ex-responsable national du Syndicat des avocats de France, il dénonçait déjà il y a une quinzaine d’années l’incompatibilité du système à la française avec la Convention européenne des droits de l’homme.

C’est en s’appuyant sur cette dernière qu’il a obtenu tout récemment, avec deux de ses confrères commis d’office, l’annulation de cinq procédures lors d’une audience de comparutions immédiates au tribunal de Bobigny. Motif : lors de leur garde à vue, les prévenus ne s’étaient pas vu notifier par les policiers leur droit de garder le silence. Le parquet a fait appel. « Depuis plusieurs semaines, les avocats de permanence déposaient dans leurs dossiers des conclusions de nullité en mettant en avant cet argument. En vain, jusqu’à une audience de la fin décembre », raconte cet homme de 49 ans, père de deux enfants.

« La Convention européenne des droits de l’homme est un texte d’application interne. Autrement dit, la notification du droit au silence s’impose avant même qu’elle ne soit inscrite dans le projet de loi de réforme de la garde à vue qui doit être examiné à l’Assemblée nationale à partir du 18 janvier », fait-il valoir. Il réclame aussi pour les avocats un accès au dossier dès l’arrivée sur les lieux de la garde à vue et la possibilité d’être présents au moment des interrogatoires.

Pour ce fils de médecins qui, enfant, a vu défiler à la maison les principales figures de l’extrême gauche, être avocat, c’est être militant. La « vocation », il l’a eue au cours de ses années de lycée, lors d’un voyage au Portugal où il était allé parfaire ses connais san ces linguistiques et apporter son soutien à des détenus politiques. Mais c’est surtout en défendant les droits des étrangers qu’il s’est fait connaître, dans les prétoires comme au sein du Gisti, association d’aide juridique aux migrants qu’il préside depuis deux ans. « L’étranger, estime-t-il, sert de cobaye à tous ceux qui rêvent de restreindre les droits. »

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Des juges devancent la réforme de la garde à vue

 , 23/12/2010

Des magistrats de Créteil (Val-de-Marne) et de Bobigny (Seine-Saint-Denis) ont demandé aux policiers de rappeler aux gardés à vue leur droit au silence.

Des magistrats de Créteil (Val-de-Marne) ont décidé d’anticiper la réforme de la garde à vue (GAV) que le gouvernement doit rendre conforme à la Constitution et au droit européen avant le 1er juillet 2011. Dans un courrier du 6 décembre, les onze juges de Créteil demandent aux directions de la police, de la gendarmerie et des douanes de faire respecter, dès le 3 janvier, deux principes dans le cadre de leurs instructions : informer la personne en GAV de son droit à garder le silence, ce qui n’est actuellement pas obligatoire, et assurer la présence d’un avocat dès la première heure dans tous les types d’affaires, sauf décision contraire motivée du juge.

Magistrats et policiers en désaccord

La 17e chambre correctionnelle de Bobigny (Seine-Saint-Denis) a devancé elle aussi la réforme mardi soir en annulant les poursuites visant cinq personnes qui devaient être jugées en comparution immédiate. Motif : le droit au silence ne leur avait pas été notifié au cours de leur GAV.

Les trois juges de la 17e ont estimé que cette notification ne nécessite pas d’organisation particulière et peut être effective tout de suite. Les cinq prévenus ont été relâchés, mais le parquet de Bobigny a fait appel, estimant que « ni la loi ni la jurisprudence n’impose cela avant le 1er juillet ». « Soit c’est conforme, soit ça ne l’est pas, oppose Stéphane Maugendre, avocat qui a plaidé mardi avec succès à Bobigny cette nullité. Ce rappel au droit de se taire n’est pas anodin. C’est important de donner la possibilité à quelqu’un en situation de vulnérabilité de ne pas céder à une éventuelle pression psychologique. »
« Rappeler à un gardé à vue son droit au silence ne nous pose aucun souci », relève Michel-Antoine Thiers, responsable national du Snop, premier syndicat d’officiers de police. En revanche, il s’élève contre « l’injonction » des magistrats de Créteil au sujet de la présence d’un avocat dès la première heure, qui n’est aujourd’hui pas prévue par la loi dans les dossiers de trafic de stupéfiants ou de criminalité organisée par exemple. « Ces juges anticipent la loi future sans savoir ce qu’elle sera précisément. Nous, on respecte le droit tel qu’il est écrit aujourd’hui », explique Michel- Antoine Thiers, qui invite les officiers à demander à être dessaisis d’un dossier si les juges leur imposent une telle instruction.
A la chancellerie, on ne commente pas la décision de Bobigny ou l’initiative de Créteil. On rappelle simplement que les services du garde des Sceaux travaillent à la mise en conformité du régime de GAV dans les délais imposés. Cette année, ce régime a été sévèrement sanctionné par le Conseil constitutionnel, la Cour de cassation et la Cour européenne des droits de l’homme. Un dossier majeur, puisque au moins 800 000 personnes ont été placées en garde à vue l’an dernier.

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Réforme de la garde à vue : cinq procédures annulées par le tribunal de Bobigny

  Le Journal de Saône et Loire 22/12/2010

Cinq procédures ont été annulées par le tribunal de Bobigny, au motif que le droit de garder le silence n’avait pas été notifié par les policiers aux gardés à vue, a-t-on appris mercredi de sources concordantes.
Le parquet a fait appel dans les cinq dossiers, a-t-il indiqué.
«Depuis 15 jours, les avocats déposent des conclusions de nullité par rapport à la garde à vue dans les dossiers dans lesquels ils sont de permanence», a expliqué Me Stéphane Maugendre (avocat)à l’AFP.
«Elles étaient jusqu’ici rejetées, mais mardi, le tribunal a annulé cinq procédures sur le motif que le droit de garder le silence n’avait pas été notifié par les policiers aux gardés à vue», a poursuivi l’avocat, chargé de deux des cinq dossiers.
Il s’agissait d’affaires de vol, de violences légères ou de menaces, a indiqué Me Maugendre.
«Les plus hautes juridictions sont venues nous dire que le droit français était illégal, donc nous n’attendons pas la loi» pour demander que le droit de garder le silence soit notifié, a-t-il poursuivi.
Le projet de réforme de la garde à vue doit être examiné à l’Assemblée nationale à partir du 18 janvier.
Le 19 octobre, la Cour de Cassation, la plus haute juridiction judiciaire française, avait déclaré la garde à vue non conforme au droit européen, invoquant le «droit au silence» de la personne interpellée et la nécessaire «présence de l’avocat», y compris pour les infractions les plus graves, sauf «raisons impérieuses».
Elle a donné au gouvernement jusqu’au 1er juillet 2011 pour que de nouvelles règles entrent en vigueur, s’alignant sur le délai accordé par le Conseil constitutionnel, qui avait censuré cet été le régime de garde à vue de droit commun.

Garde à vue : 5 procédures annulées

Cinq procédures ont été annulées par le tribunal de Bobigny, au motif que le droit de garder le silence n’avait pas été notifié par les policiers aux gardés à vue.

Le parquet a fait appel dans les cinq dossiers, a-t-il indiqué. »Depuis 15 jours, les avocats déposent des conclusions de nullité par rapport à la garde à vue dans les dossiers dans lesquels ils sont de permanence », a expliqué Me Stéphane Maugendre.

« Elles étaient jusqu’ici rejetées, mais mardi, le tribunal a annulé cinq procédures sur le motif que le droit de garder le silence n’avait pas été notifié par les policiers aux gardés à vue », a poursuivi l’avocat, chargé de deux des cinq dossiers. Il s’agissait d’affaires de vol, de violences légères ou de menaces, a indiqué Me Maugendre.

« Les plus hautes juridictions sont venues nous dire que le droit français était illégal, donc nous n’attendons pas la loi » pour demander que le droit de garder le silence soit notifié, a-t-il poursuivi. Le projet de réforme de la garde à vue doit être examiné à l’Assemblée nationale à partir du 18 janvier.

Le 19 octobre, la Cour de Cassation, la plus haute juridiction judiciaire française, avait déclaré la garde à vue non conforme au droit européen, invoquant le « droit au silence » de la personne interpellée et la nécessaire « présence de l’avocat », y compris pour les infractions les plus graves, sauf « raisons impérieuses ».

Elle a donné au gouvernement jusqu’au 1er juillet 2011 pour que de nouvelles règles entrent en vigueur, s’alignant sur le délai accordé par le Conseil constitutionnel, qui avait censuré cet été le régime de garde à vue de droit commun.

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Réforme de la garde à vue : cinq procédures annulées par le tribunal de Bobigny

 Accueil, 22/12/2010

Cinq procédures ont été annulées par le tribunal de Bobigny, au motif que le droit de garder le silence n’avait pas été notifié par les policiers aux gardés à vue, a-t-on appris mercredi de sources concordantes. Le parquet a fait appel dans les cinq dossiers, a-t-il indiqué. « Depuis 15 jours, les avocats déposent des conclusions de nullité par rapport à la garde à vue dans les dossiers dans lesquels ils sont de permanence », a expliqué Me Stéphane Maugendre (avocat). « Elles étaient jusqu’ici rejetées, mais mardi, le tribunal a annulé cinq procédures sur le motif que le droit de garder le silence n’avait pas été notifié par les policiers aux gardés à vue », a poursuivi l’avocat, chargé de deux des cinq dossiers. Il s’agissait d’affaires de vol, de violences légères ou de menaces, a indiqué Me Maugendre. « Les plus hautes juridictions sont venues nous dire que le droit français était illégal, donc nous n’attendons pas la loi » pour demander que le droit de garder le silence soit notifié, a-t-il poursuivi. Le projet de réforme de la garde à vue doit être examiné à l’Assemblée nationale à partir du 18 janvier. Le 19 octobre, la Cour de Cassation, la plus haute juridiction judiciaire française, avait déclaré la garde à vue non conforme au droit européen, invoquant le « droit au silence » de la personne interpellée et la nécessaire « présence de l’avocat », y compris pour les infractions les plus graves, sauf « raisons impérieuses ». Elle a donné au gouvernement jusqu’au 1er juillet 2011 pour que de nouvelles règles entrent en vigueur, s’alignant sur le délai accordé par le Conseil constitutionnel, qui avait censuré cet été le régime de garde à vue de droit commun.

Argenteuil: soupçon de bavure policière

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Un rapport de la commission nationale de déontologie de la sécurité relance la thèse de la bavure policière après la mort d’Ali Ziri en juin 2009, révèle France Info.

L’homme, âgé de 69 ans, avait été arrêté avec son ami Arezki Kerfali, 61 ans, le 9 juin à bord de leur véhicule, à Argenteuil. Selon le collectif de soutien « Vérité et justice », les deux hommes auraient subi des coups de la part des policiers. Ils avaient ensuite été transportés à l’hôpital d’Argenteuil, où M. Ziri était décédé. Vingt-sept hématomes avaient été relevés sur son corps, le plus long mesurait 17 centimètres.

Une première autopsie conclut à une crise cardiaque due à un fort taux d’alcoolémie, une conclusion que contredit un nouveau rapport de la commission nationale de déontologie de sécurité. Le traitement reçu par Ali Ziri après son arrestation a été particulièrement violent, rapporte le rapport, qui s’appuie sur des images de vidéo surveillance. On y voit en effet Ali Ziri être expulsé du véhicule de police, jeté au sol, menotté, allongé par terre la tête dans le vomi.

La commission de déontologie réclame des sanctions à l’encontre des policiers visibles sur les vidéos. Arezki Kerfali doit quant à lui comparaître devant le tribunal en 2011 pour outrage à agent.

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Soupçon de bavure policière au commissariat d’Argenteuil

  Pauline Fréour, 25/06/2010

Un sexagénaire, couvert d’hématomes, était mort deux jours après son arrestation en juin 2009. La commission nationale de déontologie de la sécurité réclame des sanctions contre les policiers présents ce soir-là.

Les images tournées par la caméra de surveillance de la cour du commissariat d’Argenteuil (Val d’Oise), visionnées par la commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS), montrent Ali Ziri se faire jeter à terre, menotté. Il serait ensuite resté une heure allongé par terre dans le commissariat, la tête dans son vomi, avant d’être conduit à l’hôpital. Cet homme de 69 ans, arrêté le 9 juin 2009 pour un contrôle routier en compagnie d’un ami, est mort deux jours plus tard. Sur son corps, 27 hématomes ont été relevés, dont un long de 17 cm.

La première autopsie conduite en juin après le décès avait écarté la possibilité qu’un traumatisme ait entraîné la mort. Mais un mois plus tard, un juge d’instruction est saisi de l’affaire et une seconde autopsie relève un plus grand nombre d’hématomes. Les conclusions évoquent «la mort par anoxie, c’est-à-dire manque d’oxygène», expliquait alors Me Sami Skander, l’avocat de la famille Ziri.

«La responsabilité d’un policier»

Près d’un an après les faits, la CNDS, autorité administrative indépendante chargée de veiller au respect de la déontologie des policiers et gendarmes, publie un rapport «accablant» sur le déroulement du drame, rapporte France Info, qui a pris connaissance du document. Au point de réclamer des sanctions contre les policiers visibles sur les vidéos et les agents présents au commissariat.

«C’est une bavure policière, affirme Me Stéphane Maugendre, avocat de la famille Ziri, au micro de la radio. Je pense très sincèrement qu’ils n’ont pas voulu la mort de monsieur Ali Ziri, mais je pense que l’ensemble des hématomes et le décès qui s’en est suivi est de la responsabilité des policiers ou d’un policier, et que c’est donc une bavure».

Une interpellation «un peu musclée»

Secrétaire du syndicat Alliance-police nationale du Val d’Oise, Ludovic Collignon rappelle de son côté qu’Ali Ziri «était très saoul» lors de son arrestation et qu’il a fallu le sortir du véhicule de force. «Ca a été un peu musclé. L’interpellation, déjà, ne s’est pas passée dans la douceur, puis, au commissariat, ils ont dû s’y mettre à plusieurs pour l’extraire du véhicule, explique-t-il au figaro.fr. Vous savez, quand vous tenez quelqu’un par le bras de manière un peu ferme, sa peau marque, ça fait un hématome. Mais mes collègues nient formellement avoir porté des coups à M. Ziri, et les vidéos ne montrent par qu’il a été frappé ! Quant à sa position allongée au sol, c’était pour éviter qu’il ne s’étouffe dans son vomi car il était trop saoul pour tenir sur une chaise». Ludovic Collignon souligne également que l’interpellé «était conscient quand il a été conduit à l’hôpital» où «l’infirmière n’a même pas jugé utile qu’il soit vu par un médecin tout de suite».

Samedi soir, une centaine de personnes se sont réunies à Argenteuil à l’initiative du collectif Vérité et justice en mémoire du défunt, rapporte Le Parisien daté du 21 juin. Arezki Kerfali, l’ami d’Ali Ziri arrêté en même temps que lui, doit quant à lui comparaître devant le tribunal en 2011 pour outrage à agent.

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Décès suspect d’un Algérien de 69 ans

Un juge d’instruction a été saisi début juillet et une nouvelle autopsie réalisée dans l’affaire du décès le 9 juin d’un Algérien de 69 ans qui avait été arrêté par la police à Argenteuil, a-t-on appris de source judiciaire.

Après le décès d’Ali Ziri, une enquête avait été confiée au commissariat d’Argenteuil, où exercent les policiers mis en cause par les proches de la victime. Une première autopsie écartait tout décès consécutif à un traumatisme.

Mais l’affaire a été relancée début juillet. « Un juge d’instruction a été saisi durant la première semaine du mois de juillet. Une seconde autopsie a été réalisée. Les experts ont relevé des traces d’hématomes plus nombreuses que lors de la première autopsie. Les conclusions définitives seront connues dans quelques semaines », a précisé à l’AFP le parquet de Pontoise.

Ali Ziri, 69 ans, et Arezki Kerfali, 61 ans, avaient été arrêtés le 9 juin à bord de leur véhicule, à Argenteuil. Selon le collectif de soutien « Vérité et justice », les deux hommes auraient subi des coups de la part des policiers. Ils avaient ensuite été transportés à l’hôpital d’Argenteuil, où M. Ziri était décédé.

« La seconde autopsie évoque une mort par anoxie, c’est-à-dire manque d’oxygène », a détaillé Me Sami Skander, l’avocat de la famille d’Ali Ziri.

« Vingt-sept hématomes ont été relevés, le plus long mesure 17 centimètres », a souligné mercredi soir lors d’un rassemblement d’une soixantaine de personnes, Omar Slaouti, du Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA).

« Nous demandons que les trois policiers impliqués soient suspendus, ne serait-ce que le temps de l’enquête », a expliqué Arezki Semache, un proche d’Ali Ziri.

Une information judiciaire visant l’hôpital d’Argenteuil a été ouverte pour « homicide involontaire », a ajouté Me Skander: « M. Ziri, mourant, y a été examiné après quarante minutes d’attente », a-t-il affirmé.

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interdit d’acheter du maïs

Accueil Laurent Mouloud, 8/12/2008

Bavure . Accusée d’avoir acheté du maïs à des vendeurs à la sauvette, une quinquagénaire sans histoire a été violemment interpellée par trois policiers. Ils la poursuivent aujourd’hui pour « outrage » !
Expérience oblige, l’avocat Stéphane Maugendre n’est pas du genre à s’enflammer à la moindre annonce de bavure. Mais là, dit-il, « les policiers ont dépassé les bornes ! ». En effet. Car, voyez-vous, sa cliente, Augusta Marchand, quinquagénaire sans histoire, a eu le tort de posséder dans son sac à main… un épi de maïs. Un fait qui lui a valu une interpellation musclée, une nuit à l’hôpital et une convocation, aujourd’hui, devant la 28e chambre du tribunal correctionnel de Paris, où elle devra répondre d’« outrage » envers deux brillants pandores.
L’affaire remonte au dimanche 28 septembre. Nous sommes à Paris, en fin de matinée. Française originaire du Nigeria, Augusta n’a pu assister à la messe de 11 heures. Aussi décide-t-elle d’aller faire quelques courses. Elle passe dans un KFC, achète deux morceaux de poulet épicés et une « cobette » de maïs emballée dans un sachet. En attendant midi (diabétique, Augusta doit manger à heure fixe), elle range le tout dans son sac et reprend le métro. À la sortie de la station Château-Rouge, deux jeunes filles vendent du maïs à la sauvette. Augusta regarde dans son sac pour « comparer » avec celui qu’elle vient d’acheter, relève la tête. Les deux vendeuses s’enfuient, tandis que trois policiers approchent.
« Je n’ai pas couru, explique-t-elle. J’étais sûr de mon bon droit. » Les trois agents – deux hommes et une femme – lui demandent de montrer ses papiers et le contenu de son sac. Augusta s’exécute. « Vous savez qu’il est interdit d’acheter du maïs, c’est un délit », enchaîne un des policiers. « Mais je ne l’ai pas acheté là », répond Augusta. La policière : « Vous êtes en état d’arrestation. » Effarée, la femme proteste. Le ton monte. Des gens s’attroupent et les noms d’oiseaux volent. Un des policiers tente de menotter Augusta. Elle résiste. « Il m’a pris le bras et, sans prévenir, j’ai reçu deux coups de bottes dans les jambes », assure-t-elle. La voilà ventre à terre, un genou appuyé dans le dos, son pagne remonté, la laissant à demi-nue. C’est la confusion. Des gaz lacrymogènes sont lancés pour disperser la foule.
Évidemment, la version policière est bien différente. Eux parlent d’une femme « franchement hostile », qui aurait tenté de « liguer la foule » contre eux et se serait écriée : « J’en ai rien à foutre de votre contrôle ! Je vous emmerde ! » Un récit, selon Me Maugendre, en complet décalage avec le profil de cette catholique pratiquante, mariée à un ingénieur et mère de deux enfants en études supérieures. « Les policiers voudraient aussi nous faire croire que cette femme de cinquante-trois ans, qui se déplace difficilement, les auraient bousculés pour tenter de s’enfuir en courant ! C’est ubuesque. »
Augusta Marchand se retrouve finalement au commissariat du 18e arrondissement. Elle décrit des auditions tendues et une attitude provocante des policiers. Ces derniers auraient refusé, notamment, de lui rendre son sac à main alors qu’elle avait besoin de prendre du sucre. Augusta devra aussi patienter plusieurs heures en cellule avant d’être emmenée – menottée ! – à l’hôpital. Sur place, le médecin décide de la garder pour la nuit. Sitôt dehors, elle file à l’Hôtel-Dieu. Verdict : « douleurs multiples » au poignet droit, à l’épaule gauche, au genou droit et au tibia, ainsi qu’une « ecchymose » d’une dizaine de centimètres à la cheville gauche. Augusta Marchand a porté plainte pour « violences » auprès du procureur de la République, déclenchant une enquête de l’inspection générale des services (IGS). Alertée, la sénatrice communiste Nicole Borvo Cohen-Seat a aussi saisi la Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS) sur cette affaire.
De leur côté, seulement deux des trois policiers impliqués ont porté plainte pour « outrage ». Une prudence suspecte. Tout comme est énigmatique la signature d’Augusta Marchand figurant au bas du PV de notification de garde à vue. Un document que la femme assure n’avoir jamais signé. « On m’y attribuait des phrases insultantes prononcées par des jeunes pendant l’attroupement, s’indigne-t-elle. Des mots que je n’ai jamais utilisés en vingt ans de présence en France ! » Me Maugendre a agrandi la fameuse signature. « Il s’agit d’un faux, cela ne fait guère de doute. » Quant à la « cobette » de maïs ? Augusta ne l’a pas mangée. Elle l’a conservée soigneusement dans son congélateur. Comme pièce à conviction.