Un avocat militant aux côtés des gardés à vue

, Denis Peiron, 11/01/11
Me Stéphane Maugendre, avocat et président du Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti).
« Quand la justice dérape, c’est la démocratie qui se trouve bafouée. » Armé de cette conviction, Me Stéphane Maugendre mène bataille de longue date contre « la culture de l’aveu » qui, selon lui, prévaut trop souvent lors des gardes à vue, en nombre exponentiel (près d’un million chaque année). Ex-responsable national du Syndicat des avocats de France, il dénonçait déjà il y a une quinzaine d’années l’incompatibilité du système à la française avec la Convention européenne des droits de l’homme.

C’est en s’appuyant sur cette dernière qu’il a obtenu tout récemment, avec deux de ses confrères commis d’office, l’annulation de cinq procédures lors d’une audience de comparutions immédiates au tribunal de Bobigny. Motif : lors de leur garde à vue, les prévenus ne s’étaient pas vu notifier par les policiers leur droit de garder le silence. Le parquet a fait appel. « Depuis plusieurs semaines, les avocats de permanence déposaient dans leurs dossiers des conclusions de nullité en mettant en avant cet argument. En vain, jusqu’à une audience de la fin décembre », raconte cet homme de 49 ans, père de deux enfants.

« La Convention européenne des droits de l’homme est un texte d’application interne. Autrement dit, la notification du droit au silence s’impose avant même qu’elle ne soit inscrite dans le projet de loi de réforme de la garde à vue qui doit être examiné à l’Assemblée nationale à partir du 18 janvier », fait-il valoir. Il réclame aussi pour les avocats un accès au dossier dès l’arrivée sur les lieux de la garde à vue et la possibilité d’être présents au moment des interrogatoires.

Pour ce fils de médecins qui, enfant, a vu défiler à la maison les principales figures de l’extrême gauche, être avocat, c’est être militant. La « vocation », il l’a eue au cours de ses années de lycée, lors d’un voyage au Portugal où il était allé parfaire ses connais san ces linguistiques et apporter son soutien à des détenus politiques. Mais c’est surtout en défendant les droits des étrangers qu’il s’est fait connaître, dans les prétoires comme au sein du Gisti, association d’aide juridique aux migrants qu’il préside depuis deux ans. « L’étranger, estime-t-il, sert de cobaye à tous ceux qui rêvent de restreindre les droits. »

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