Archives de catégorie : droit des étrangers

Comment perdre sa nationalité

default Benjamin Seze, 29/04/2010

1766-ART_300200_-L1-1036-L2-1036-281_0C’est la question qui agite, depuis le 24 avril, la scène médiatique autour du cas personnel de Lies Hebbadj, dans la région de Nantes. Selon deux avocats spécialistes du droit de la nationalité, cette affaire traduit un contexte plus profond. Ils évoquent une tendance à la hausse, depuis quelques années, des procédures visant le retrait du décret de naturalisation.

« Cette affaire n’est pas tout à fait un pavé dans la mare », estime Maître Hakima Slimane. L’avocate parisienne, spécialiste en droit de la nationalité, commente l’évocation, le 24 avril, par le ministre de l’Intérieur Brice Hortefeux, de déchoir de sa nationalité française Lies Hebbadj, un Franco-algérien soupçonné de polygamie et de fraude aux aides sociales.

Selon elle, si les cas de déchéance de la nationalité française restent très rares, notamment du fait de leur encadrement strict par l’article 25-1 du code civil, l’utilisation de la procédure de retrait du décret de naturalisation, qui aboutit également à une perte de la nationalité française, l’est beaucoup moins.

« Je n’ai jamais eu autant d’affaires de ce type que depuis deux ans , affirme la juriste, qui exerce depuis 10 ans. Mais on en parle moins. Sans doute parceque ce sont des gens qui font un peu moins de bruit, qui sont un peu moins barbus et un peu moins voilés. »

 Cette procédure est utilisée lorsque la personne naturalisée est soupçonnée d’avoir menti ou fraudé sur les conditions d’obtention de la nationalité française. Notamment dans le cadre d’un mariage. « Pour que le conjoint étranger puisse acquérir la nationalité française, il faut que les époux justifient, durant les quatre ans suivant le mariage, d’une communauté de vie tant matérielle qu’affective, explique Maître Slimane. Aujourd’hui, un divorce ou la naissance d’un enfant adultérin dans les quelques mois ou années suivant l’acquisition de la nationalité française sont autant d’éléments de soupçon sur le bien-fondé du mariage et donc sur les conditions d’obtention de la nationalité. »

L’avocate évoque une affaire en cours: « J’ai un client dont la nationalité française est remise en cause par le procureur de la République, représentant du ministère de la Justice. Il a eu une aventure hors mariage avec une jeune femme en France. Un enfant est né de cette relation, peu de temps après sa naturalisation. Mon client est franco-algérien, donc, au vu du ministère, susceptible d’être musulman, donc soupçonné d’être bigame.»

 « On voit de plus en plus d’enquêtes de suspicion autour des mariages mixtes, confirme Maître Stéphane Maugendre, avocat au barreau de Seine-Saint-Denis et président du GISTI (Groupe d’information et de soutien des immigrés). Des enquêtes parfois ouvertes, selon l’avocat, sur dénonciation du conjoint qui, « suite à un divorce, va écrire une lettre à la préfecture pour se venger. C’est difficile à chiffrer, mais c’est une tendance que l’on ressent effectivement depuis quelques années.»

 » La plupart du temps, on gagne, affirme Maître Hakima Slimane. Car il y a souvent prescription ». Dans de nombreuses affaires, selon l’avocate, le délai de deux ans pour agir suivant la découverte de l’élément suspicieux, comme par exemple l’enregistrement du jugement de divorce, est dépassé.  » Il n’y a donc aucune chance que ces dossiers aboutissent, mais le ministère tente quand même.»

Une tendance à ressortir les vieux dossiers qui traduit bien, selon elle, le climat de suspicion actuel.  » Il y a sans doute aussi la volonté d’un effet dissuasif. Ils savent qu’au sein des communautés étrangères la rumeur va très vite. C’est un moyen de faire pression. »

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Agitation autour d’un musulman français taxé de polygamie

images 2 Clément Guillou, avec Guillaume Frouin,

Le gouvernement français et l’opposition se sont écharpés tout le week-end sur un dossier juridique délicat, le premier souhaitant déchoir de sa nationalité un homme accusé de polygamie, la seconde dénonçant une récupération politicienne.

En plein débat sur le voile intégral, le ministre de l’Intérieur, Brice Hortefeux, a émis des soupçons sur le compagnon d’une femme verbalisée pour avoir conduit en niqab, envisageant qu’il soit déchu de sa nationalité.

Le Parti socialiste a critiqué l’instrumentalisation d’un fait divers et les fondements juridiques de cette requête.

Le ministre de l’Immigration, à qui Brice Hortefeux a transmis le dossier, s’est cependant montré très prudent sur le devenir de l’affaire dimanche.

Selon Brice Hortefeux, Liès Hebbadj, né à Alger, aurait quatre femmes et chacune bénéficierait de l’allocation de parent isolé – des délits qui méritent selon lui la déchéance de la nationalité qu’il a obtenue par mariage en 1999.

« J’imagine que ça veut dire que Brice Hortefeux a sur son bureau un dossier suffisamment conséquent et solide », a dit Eric Besson sur TV5-Monde et RFI, récusant l’idée d’un « cadeau empoisonné ».

« Brice Hortefeux me demande d’étudier la possibilité et l’opportunité » mais « la procédure de déchéance éventuelle ne pourrait l’être qu’après une condamnation par la justice », a-t-il fait valoir, reconnaissant qu’il serait « probablement » difficile de prouver le délit de polygamie.

LA DÉCHÉANCE, PROCÉDURE RARE ET ENCADRÉE

L’homme peut vivre avec plusieurs femmes, les avoir « épousées » devant un imam et ne s’être marié qu’une seule fois civilement: il ne serait alors pas condamnable par la loi.

Le procureur de la République de Nantes, Xavier Ronsin, a dit au Parisien n’avoir « reçu aucune plainte des services sociaux ».

De plus, aucun des deux délits évoqués par Brice Hortefeux ne peut provoquer la déchéance de nationalité, une procédure rare et très encadrée.

L’annulation de sa naturalisation peut être obtenue sur avis conforme du Conseil d’État s’il est prouvé que l’homme était déjà marié civilement au moment du mariage de 1999 et a donc obtenu sa naturalisation « par mensonge ou par fraude ».

Liès Hebbadj, qui n’est pas décrit par les pouvoirs locaux comme un extrémiste, tient une boucherie hallal dans le sud de Nantes. Il préside une association culturelle musulmane à Rezé, en Loire-Atlantique et souhaite y construire une mosquée.

« HISTOIRES CLÉS EN MAIN »

L’enquête est en cours et la gauche déplore un coup médiatique de la part de la droite.

« Ce sont de très bons communicants pour monter des scénarios », a dit Julien Dray sur Radio J. « Ils sont capables de vendre des histoires clés en main auxquelles tout le monde adhère », a ajouté le député socialiste de l’Essonne.

Pour la gauche, le gouvernement se sert de cette affaire pour promouvoir sa future loi sur l’interdiction du port du voile intégral.

Un sondage TNS Sofres paru samedi suggère que ce n’est pas une priorité des Français et qu’un tiers seulement des personnes interrogées se disent favorables à une interdiction totale.

La lettre de Brice Hortefeux à Eric Besson a été transmise à la presse et le conseiller en communication de Nicolas Sarkozy, Franck Louvrier, l’évoquait dès vendredi soir sur son blog.

« Brice Hortefeux a tout à fait raison de mettre les pieds dans le plat », a dit le président du groupe UMP à l’Assemblée Jean-François Copé sur Radio J.

« Je crois que le ministre de l’Intérieur a voulu faire de la polémique », a indirectement répondu François Hollande sur France 5. « S’il doit y avoir une procédure, elle se fait par la justice, pas par un autre membre du gouvernement », a-t-il souligné l’ancien premier secrétaire du Parti socialiste.

Pour Stéphane Maugendre (avocat), président du Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti), le raisonnement que la droite va tenir « est simple: qui dit voile intégral dit nécessairement polygamie, appartenance à une mouvance islamiste, fraude aux allocations familiales (…) donc personnes dangereuses pour la France. »

⇒ Voir l’article

L’affaire de la conductrice voilée devient politique

la-croix-logo Marine Lamoureux, 25/4/10

Les réactions se sont multipliées, dimanche 25 avril, alors que le gouvernement a évoqué l’hypothèse d’une déchéance de la nationalité française de son mari

«Une opération politicienne », selon Marie-George Buffet, la secrétaire nationale du Parti communiste ; une « stigmatisation systématique », selon les Mosquées de Nantes qui ont protesté à l’unisson, dimanche 25 avril.

Au contraire, « une nécessaire fermeté », aux yeux du porte-parole de l’UMP, Frédéric Lefebvre. Tout le week-end, les réactions se sont multipliées, donnant à « l’affaire » de la conductrice voilée un tour politique sur fond de débat sur l’interdiction de la burqa en France.

Tout commence par un simple PV

Rappel des faits. Jeudi 22 avril, on apprend que, début avril, une femme de 31 ans portant le voile intégral a été verbalisée à Nantes pour « circulation dans des conditions non aisées », le policier estimant son champ de vision réduit. La conductrice décide alors de contester l’amende de 22 euros et d’en informer la presse. La réaction des pouvoirs publics ne se fait pas attendre.

Dès le lendemain, Brice Hortefeux, le ministre de l’intérieur, écrit à son collègue en charge de l’immigration, Éric Besson, pour qu’il se penche sur la situation du mari de la conductrice. Cet homme de 35 ans, « né à Alger et ayant acquis la nationalité française par mariage en 1999, appartiendrait à la mouvance radicale du « Tabligh » et vivrait en situation de polygamie avec quatre femmes dont il aurait douze enfants ».

Le courrier ajoute que ces femmes « bénéficieraient de l’allocation de parent isolé (et) porteraient le voile intégral », et lui demande, enfin, « de bien vouloir étudier les conditions dans lesquelles, si ces faits étaient confirmés, l’intéressé pourrait être déchu de la nationalité française ».

Prudence

Alors que Jean-François Copé, le patron des députés UMP, estime que Brice Hortefeux « a eu raison de mettre les pieds dans le plat », Éric Besson, lui, s’est montré plus prudent dans Le Parisien de dimanche, jugeant que «si ces faits (étaient) avérés, la justice (devrait) être saisie».

Manière de rappeler qu’il faut des preuves et que rien ne peut se faire sans passer par la case judiciaire. « Si une condamnation intervient, des sanctions pénales seront prononcées et j’étudierai alors (…) l’éventuelle déchéance de nationalité », a ajouté le ministre de l’immigration.

Une prudence de mise car la déchéance de nationalité est strictement encadrée (lire l’article 25 du Code civil qui énonce les conditions de déchéance de la nationalité française). Comme le rappelle l’avocat Stéphane Maugendre (avocat), président du Gisti (groupe d’information et de soutien des immigrés), ni la polygamie, ni la fraude aux allocations, si tant est qu’elles soient prouvées, « ne suffisent en droit pour déchoir une personne de sa nationalité ». Le mari de la conductrice pourrait perdre sa nationalité si l’on prouve qu’il était déjà marié civilement avant son mariage de 1999.

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Déchéance de nationalité, polygamie : ce que dit la loi

  25/04/2010,

Dans la lettre qu’il adresse à son collègue de l’Immigration, le ministre de l’Intérieur Brice Hortefeux demande que le conjoint de la conductrice soit éventuellement déchu de sa nationalité française. Le motif invoqué : sa polygamie.

Deux affirmations qui nécessitent des explications.

Qui peut-être déchu de sa nationalité ?

La procédure est extrêmement rare et ne peut être menée qu’au cas par cas. D’après l’article 25 du Code civil, « l’individu qui a acquis la qualité de Français peut, par décret pris après avis conforme du Conseil d’Etat, être déchu de la nationalité française, s’il est condamné pour un acte qualifié de crime ou délit constituant une atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation ou (…) un acte de terrorisme ». L’article 25 évoque ensuite d’autres motifs : une « atteinte à l’administration publique commise par des personnes exerçant une fonction publique », le non-respect du service national, des actes « préjudiciables aux intérêts de la France » ou « qualifiés de crime » entraînant au moins cinq ans de prison par la loi française. Ni le délit de polygamie ni la fraude aux allocations n’entrent dans cette catégorie.

De quoi est punie la polygamie ?

D’un point de vue pénal, être marié ou pacsé avec plusieurs personnes est un délit passible d’un an d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende. « Mais si un homme veut vivre avec plusieurs femmes, ou vice versa, sans être marié civilement, cela relève de leur vie privée, commente Stéphane Maugendre, avocat spécialisé dans le droit des étrangers. Ils ne peuvent pas pour autant être inquiétés par la justice. »

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Burqa: La gauche à l’assaut

G.V.,  25/04/2010

Droite et gauche se sont écharpées tout le week-end sur le délicat dossier de Liès Hebbadj, dont Brice Hortefeux veut déchoir la nationalité française. Le débat politique sur le voile intégral s’est invité dans tous les talk-shows dominicaux.

En plein débat sur le voile intégral, le ministre de l’Intérieur Brice Hortefeux a émis des soupçons sur Liès Hebbadj, mari d’une femme verbalisée pour avoir conduit en niqab, envisageant qu’il soit déchu de sa nationalité (lire: Lies Hebbadj, cible de Brice Hortefeux). Depuis cette proposition, le débat, sensible, sur le voile intégral en France s’est enflammé, chaque politique y allant de sa petite phrase.

Le PS a dégainé en premier, critiquant l’instrumentalisation d’un fait divers et les fondements juridiques de cette requête. Ceux qui évoquent une déchéance de nationalité sont « de très bons communicants pour monter des scénarios« , a déploré dimanche Julien Dray sur Radio J. « Ils sont capables de vendre des histoires clés en main auxquelles tout le monde adhère« , a ajouté le député socialiste de l’Essonne. « S’il doit y avoir une procédure, elle se fait par la justice, pas par un autre membre du gouvernement« , a souligné pour sa part François Hollande sur France 5.

Du danger de la stigmatisation

Pour Stéphane Maugendre (avocat), président du Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti), le raisonnement que la droite va tenir « est simple: qui dit voile intégral dit nécessairement polygamie, appartenance à une mouvance islamiste, fraude aux allocations familiales (…) donc personnes dangereuses pour la France« . Et dans la ligne de mire de son communiqué, la future loi sur l’interdiction du port du voile intégral, que le gouvernement peine à mettre sur pied depuis six mois.

L’islamologue Tariq Ramadan, qui s’exprimait dimanche lors d’une conférence prévue depuis un mois à la mosquée Arrahma de Nantes, s’est montré – comme prévu – plus sévère: « Avec des politiques de cette nature, ce sont les valeurs de la France qu’on trahit. Brice Hortefeux, c’est vous qui trahissez les valeurs de la France!« , a-t-il martelé. Devant la presse, il a ensuite développé: « On a fait d’une histoire de PV à 22 euros une controverse nationale, on est dans l’instrumentalisation, dans la surenchère. (…) C’est finalement le Front National qui fait son beurre.« 

Le FN se positionne

Jean-Marie Le Pen, justement, a profité d’être l’invité du Grand jury RTL-LCI-Le Figaro pour rebondir sur la polémique. Pour lui, « le plus important » n’est pas que les conjointes de cet homme « portent le voile intégral« , mais « qu’elles bénéficient de l’allocation de parent isolé« . Et renouant avec sa verve habituelle: « On est condamné à garder chez nous la racaille que nous avons fait condamner devant nos tribunaux correctionnels ou devant nos assises.« 

Côté UMP, on se montre discret. Seul Jean-François Copé, fervent défenseur d’une loi sur le voile intégral, est monté au créneau: « Brice Hortefeux a tout à fait raison de mettre les pieds dans le plat« , a déclaré le patron des députés UMP sur Radio J.

Un dossier bancal confié à Eric Besson

Face à ces réactions, le ministre de l’immigration Eric Besson, qui a récupéré le dossier « Lies Hebbadj », s’est montré très prudent. « J’imagine que ça veut dire que Brice Hortefeux a sur son bureau un dossier suffisamment conséquent et solide« , a-t-il dit dimanche sur TV5-Monde et RFI, tout en récusant l’idée d’un « cadeau empoisonné« .

« Brice Hortefeux me demande d’étudier la possibilité et l’opportunité d’une procédure de déchéance » mais celle-ci « ne pourrait l’être qu’après une condamnation par la justice« , a-t-il fait valoir. Condamnation très hypothétique, a reconnu le ministre, qui a évoqué la difficulté de prouver un délit de polygamie.

L’homme peut vivre avec plusieurs femmes, les avoir « épousées » religieusement devant un imam et ne s’être marié qu’une seule fois civilement: il ne serait alors pas condamnable par la loi. De plus, le délit de polygamie ne peut provoquer la déchéance de nationalité. L’annulation de sa naturalisation peut être obtenue sur avis conforme du Conseil d’État s’il est prouvé que l’homme était déjà marié civilement au moment du mariage de 1999 et a donc obtenu sa naturalisation « par mensonge ou par fraude ».

⇒ Voir l’article

Niqab au volant: quatre questions sur la polygamie et la déchéance de nationalité

Agitation autour d’un musulman français taxé de polygamie

index capitalClément Guillou, avec Guillaume Frouin, 25/04/10

Le gouvernement français et l’opposition se sont écharpés tout le week-end sur un dossier juridique délicat, le premier souhaitant déchoir de sa nationalité un homme accusé de polygamie, la seconde dénonçant une récupération politicienne.

En plein débat sur le voile intégral, le ministre de l’Intérieur, Brice Hortefeux, a émis des soupçons sur le compagnon d’une femme verbalisée pour avoir conduit en niqab, envisageant qu’il soit déchu de sa nationalité.

Le Parti socialiste a critiqué l’instrumentalisation d’un fait divers et les fondements juridiques de cette requête.

Le ministre de l’Immigration, à qui Brice Hortefeux a transmis le dossier, s’est cependant montré très prudent sur le devenir de l’affaire dimanche.

Selon Brice Hortefeux, Liès Hebbadj, né à Alger, aurait quatre femmes et chacune bénéficierait de l’allocation de parent isolé- des délits qui méritent selon lui la déchéance de la nationalité qu’il a obtenue par mariage en 1999.

« J’imagine que ça veut dire que Brice Hortefeux a sur son bureau un dossier suffisamment conséquent et solide », a dit Eric Besson sur TV5-Monde et RFI, récusant l’idée d’un « cadeau empoisonné ».

« Brice Hortefeux me demande d’étudier la possibilité et l’opportunité » mais « la procédure de déchéance éventuelle ne pourrait l’être qu’après une condamnation par la justice », a-t-il fait valoir, reconnaissant qu’il serait « probablement » difficile de prouver le délit de polygamie.

LA DÉCHÉANCE, PROCÉDURE RARE ET ENCADRÉE

L’homme peut vivre avec plusieurs femmes, les avoir « épousées » devant un imam et ne s’être marié qu’une seule fois civilement: il ne serait alors pas condamnable par la loi.

Le procureur de la République de Nantes, Xavier Ronsin, a dit au Parisien n’avoir « reçu aucune plainte des services sociaux ».

De plus, aucun des deux délits évoqués par Brice Hortefeux ne peut provoquer la déchéance de nationalité, une procédure rare et très encadrée.

L’annulation de sa naturalisation peut être obtenue sur avis conforme du Conseil d’Etat s’il est prouvé que l’homme était déjà marié civilement au moment du mariage de 1999 et a donc obtenu sa naturalisation « par mensonge ou par fraude ».

Liès Hebbadj, qui n’est pas décrit par les pouvoirs locaux comme un extrémiste, tient une boucherie hallal dans le sud de Nantes. Il préside une association culturelle musulmane à Rezé, en Loire-Atlantique et souhaite y construire une mosquée.

« HISTOIRES CLÉS EN MAIN »

L’enquête est en cours et la gauche déplore un coup médiatique de la part de la droite.

« Ce sont de très bons communicants pour monter des scénarios », a dit Julien Dray sur Radio J. « Ils sont capables de vendre des histoires clés en main auxquelles tout le monde adhère », a ajouté le député socialiste de l’Essonne.

Pour la gauche, le gouvernement se sert de cette affaire pour promouvoir sa future loi sur l’interdiction du port du voile intégral.

Un sondage TNS Sofres paru samedi suggère que ce n’est pas une priorité des Français et qu’un tiers seulement des personnes interrogées se disent favorables à une interdiction totale.

La lettre de Brice Hortefeux à Eric Besson a été transmise à la presse et le conseiller en communication de Nicolas Sarkozy, Franck Louvrier, l’évoquait dès vendredi soir sur son blog.

« Brice Hortefeux a tout à fait raison de mettre les pieds dans le plat », a dit le président du groupe UMP à l’Assemblée Jean-François Copé sur Radio J.

« Je crois que le ministre de l’Intérieur a voulu faire de la polémique », a indirectement répondu François Hollande sur France 5. « S’il doit y avoir une procédure, elle se fait par la justice, pas par un autre membre du gouvernement », a-t-il souligné l’ancien premier secrétaire du Parti socialiste.

Pour Stéphane Maugendre (avocat), président du Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti), le raisonnement que la droite va tenir « est simple: qui dit voile intégral dit nécessairement polygamie, appartenance à une mouvance islamiste, fraude aux allocations familiales (…) donc personnes dangereuses pour la France. »

⇒ Voir l’article

Agitation autour d’un musulman français taxé de polygamie

index capital Clément Guillou et Guillaume Frouin, 25/04/10

Le gouvernement français et l’opposition se sont écharpés tout le week-end sur un dossier juridique délicat, le premier souhaitant déchoir de sa nationalité un homme accusé de polygamie, la seconde dénonçant une récupération politicienne.

En plein débat sur le voile intégral, le ministre de l’Intérieur, Brice Hortefeux, a émis des soupçons sur le compagnon d’une femme verbalisée pour avoir conduit en niqab, envisageant qu’il soit déchu de sa nationalité.

Le Parti socialiste a critiqué l’instrumentalisation d’un fait divers et les fondements juridiques de cette requête.

Le ministre de l’Immigration, à qui Brice Hortefeux a transmis le dossier, s’est cependant montré très prudent sur le devenir de l’affaire dimanche.

Selon Brice Hortefeux, Liès Hebbadj, né à Alger, aurait quatre femmes et chacune bénéficierait de l’allocation de parent isolé- des délits qui méritent selon lui la déchéance de la nationalité qu’il a obtenue par mariage en 1999.

« J’imagine que ça veut dire que Brice Hortefeux a sur son bureau un dossier suffisamment conséquent et solide », a dit Eric Besson sur TV5-Monde et RFI, récusant l’idée d’un « cadeau empoisonné ».

« Brice Hortefeux me demande d’étudier la possibilité et l’opportunité » mais « la procédure de déchéance éventuelle ne pourrait l’être qu’après une condamnation par la justice », a-t-il fait valoir, reconnaissant qu’il serait « probablement » difficile de prouver le délit de polygamie.

LA DÉCHÉANCE, PROCÉDURE RARE ET ENCADRÉE

L’homme peut vivre avec plusieurs femmes, les avoir « épousées » devant un imam et ne s’être marié qu’une seule fois civilement: il ne serait alors pas condamnable par la loi.

Le procureur de la République de Nantes, Xavier Ronsin, a dit au Parisien n’avoir « reçu aucune plainte des services sociaux ».

De plus, aucun des deux délits évoqués par Brice Hortefeux ne peut provoquer la déchéance de nationalité, une procédure rare et très encadrée.

L’annulation de sa naturalisation peut être obtenue sur avis conforme du Conseil d’Etat s’il est prouvé que l’homme était déjà marié civilement au moment du mariage de 1999 et a donc obtenu sa naturalisation « par mensonge ou par fraude ».

Liès Hebbadj, qui n’est pas décrit par les pouvoirs locaux comme un extrémiste, tient une boucherie hallal dans le sud de Nantes. Il préside une association culturelle musulmane à Rezé, en Loire-Atlantique et souhaite y construire une mosquée.

« HISTOIRES CLÉS EN MAIN »

L’enquête est en cours et la gauche déplore un coup médiatique de la part de la droite.

« Ce sont de très bons communicants pour monter des scénarios », a dit Julien Dray sur Radio J. « Ils sont capables de vendre des histoires clés en main auxquelles tout le monde adhère », a ajouté le député socialiste de l’Essonne.

Pour la gauche, le gouvernement se sert de cette affaire pour promouvoir sa future loi sur l’interdiction du port du voile intégral.

Un sondage TNS Sofres paru samedi suggère que ce n’est pas une priorité des Français et qu’un tiers seulement des personnes interrogées se disent favorables à une interdiction totale.

La lettre de Brice Hortefeux à Eric Besson a été transmise à la presse et le conseiller en communication de Nicolas Sarkozy, Franck Louvrier, l’évoquait dès vendredi soir sur son blog.

« Brice Hortefeux a tout à fait raison de mettre les pieds dans le plat », a dit le président du groupe UMP à l’Assemblée Jean-François Copé sur Radio J.

« Je crois que le ministre de l’Intérieur a voulu faire de la polémique », a indirectement répondu François Hollande sur France 5. « S’il doit y avoir une procédure, elle se fait par la justice, pas par un autre membre du gouvernement », a-t-il souligné l’ancien premier secrétaire du Parti socialiste.

Pour Stéphane Maugendre, président du Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti), le raisonnement que la droite va tenir « est simple: qui dit voile intégral dit nécessairement polygamie, appartenance à une mouvance islamiste, fraude aux allocations familiales (…) donc personnes dangereuses pour la France. »

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Le débat sur le voile intégral, singulier rebondissement

RFI  Brice Barrillon,

image-pretexte-emission-360x203Le code de la route a d’abord fait irruption dans le débat de façon déjà plutôt inattendue. A Nantes dans l’ouest de la France, une femme de 31 ans a été verbalisée parce qu’elle conduisait avec un voile intégral : 22 euros d’amende.

La Charente Libre estime que « l’affaire aurait pu s’arrêter là. » « Mais l’intéressée a convoqué une conférence de presse pour dénoncer un acte de discrimination. » La réunion avec les journalistes s’est tenue « dans une épicerie » précise Libération qui titre : « Niqab au volant, police au tournant »
« En situation de polygamie »
Selon le journal, « le ministre de l’Intérieur a fait de la surenchère », en découvrant que « le conjoint de la dame vit en situation de polygamie avec quatre femmes bénéficiant de l’allocation de parent isolé et dont il aurait eu douze enfants». Alors il réclame « des sanctions », par écrit, la déchéance de sa nationalité française.
« On ne peut pas légiférer après un tel ramdam »
Ce rebondissement est diversement apprécié par les journaux. Le Parisien estime que c’est « un cadeau pour l’Elysée », du pain béni « pour les partisans de l’interdiction générale », en plein débat.
Le journal cite un avocat, Maître Stéphane Maugendre, pour lequel : « l’utilisation politique d’un cas particulier reste scandaleuse » et « on ne peut pas légiférer ainsi dans l’urgence et après un tel ramdam. »
Cette affaire, La Charente Libre la raconte de la façon suivante : « Le ministre a mis ses fins limiers en chasse. Pour découvrir et annoncer urbi et orbi que la contrevenante était mariée à un islamiste radical, polygame notoire, auquel il serait urgent de retirer la nationalité française. »
Pour ce quotidien régional, attention virage dangereux : « A ce niveau de médiatisation et de dramatisation, la question légitime de l’interdiction du port du voile est dévoyée. C’est un matraquage politico-policier, un attrape-gogos sur fonds électoraliste et communautarisme. »
Même tonalité dans La Nouvelle République du Centre Ouest où Hervé Cannet écrit que « Brice Hortefeux déplace le curseur » : « en jouant sur du velours : un musulman de tendance radicale (peut-être), polygame et bénéficiaire de l’argent de la Sécurité sociale ! » Une réaction ministérielle qui démontre en tous cas, selon le journal, « la volonté gouvernementale d’aller vite et fort en la matière »….

Affaire de la conductrice voilée : « On ne peut légiférer dans ces conditions »

24/04/2010

Stéphane Maugendre, 49 ans, est avocat au barreau de Seine-Saint-Denis. Il est le président du groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti) depuis 2008.

Pensez-vous que cette affaire éclate par hasard ?

STÉPHANE MAUGENDRE. Non, elle est même presque trop belle pour le gouvernement en ces temps de débat sur l’interdiction du voile intégral ! Impossible de dire pour le moment si le ministère de l’Intérieur a mené l’enquête en un temps record ou s’il disposait d’éléments sur cette famille avant que cette femme ne porte plainte pour avoir été verbalisée avec un niqab au volant. Ce qui est sûr, c’est que, grâce à cette histoire, le gouvernement peut espérer un soutien inattendu à sa loi. Et un tassement des voix qui s’élevaient contre. Car le raisonnement qu’ils vont tenir est simple : qui dit voile intégral dit nécessairement polygamie, appartenance à une mouvance islamiste, fraude aux allocations familiales… donc personnes dangereuses pour la France. Mais on ne déchoit pas quelqu’un de sa nationalité française facilement.

Quelles sont les conditions pour mener la procédure de déchéance de nationalité ?

Apparemment, d’après la lettre de Brice Hortefeux, cet homme a obtenu la nationalité française par mariage en 1999. Pour éventuellement le déchoir de sa nationalité, il faut prouver qu’il était déjà marié civilement avec une autre femme avant cette date. Dans ce cas, le mariage contracté en 1999 sera considéré comme nul, et une procédure en extranéité (retrait de la nationalité) pourra être lancée. Peu importe depuis combien de temps cette personne réside sur le territoire français. Mais s’il vit avec plusieurs femmes sans être marié avec elles, sa conduite n’est pas répréhensible judiciairement.

Et que pensez-vous de la loi sur le voile ?

Le Gisti ne prend pas position sur cette question. Mais l’utilisation politique d’un cas particulier et extrême comme celui-ci reste de toute façon scandaleuse. On ne peut légiférer dans ces conditions, dans l’urgence, et après un tel ramdam.

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