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Identité nationale : refusons un débat posé en termes xénophobes !

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 Le lancement du débat sur l’identité nationale est-il un acte politique ou seulement politicien ? Dans le contexte de la campagne pour les élections régionales de 2010 et de l’accumulation de sondages d’opinion qui lui sont défavorables, chacun devine que le gouvernement cherche à exploiter les peurs des Français en reliant les thèmes de l’étranger et de la sécurité, de même que ceux du communautarisme et de la condition des femmes. Mais n’y aurait-il pas, par ailleurs, un débat politique de fond qu’on ne saurait refuser par principe ? Beaucoup le pensent. Toutefois ils risquent de le regretter quand ils découvriront la façon dont ce débat aura été organisé concrètement.
Pour le comprendre, il faut lire la circulaire envoyée aux préfets le 2 novembre par le ministre de l’immigration, de l’intégration et de l’identité nationale, Eric Besson, leur demandant « d’organiser et de présider » partout en France des débats locaux sur l’identité nationale, et dont la synthèse sera ensuite imposée par le gouvernement comme le résultat de cette vaste consultation des Français.
On y découvre une liste de préjugés et de fausses évidences définissant par avance l’identité nationale alors que l’on prétend la mettre en débat. Beaucoup de sujets sont abordés, mais le thème de « l’étranger » est en réalité central. Et certaines questions formulées à ce sujet sont orientées, choquantes et inacceptables. Détaillons celle-ci : « Comment éviter l’arrivée sur notre territoire d’étrangers en situation irrégulière, aux conditions de vie précaires génératrices de désordres divers (travail clandestin, délinquance) et entretenant, dans une partie de la population, la suspicion vis-à-vis de l’ensemble des étrangers ? »
On trouve ici, condensés dans une même phrase, tous les poncifs du discours xénophobe.

 

1 – Les sans-papiers seraient nécessairement arrivés irrégulièrement. En réalité, l’irrégularité du séjour ne suppose pas l’entrée illégale. Les dernières réformes ont précarisé le statut des étrangers résidant en France, les faisant basculer dans l’irrégularité pour des motifs de plus en plus nombreux (polygamie, séparation du couple, fin du contrat de travail, rejet de la demande d’asile, fin des études, etc.).

2 – Les sans-papiers auraient nécessairement des conditions de vie précaires. C’est la fameuse « misère du monde » et ce n’est pas totalement faux. Toutefois, en réalité, si leur situation administrative est nécessairement précaire, les sans-papiers peuvent aussi être qualifiés, intégrés, travailler, avoir un logement et payer des impôts.

3 – Cette précarité serait forcément source de travail clandestin. Ce n’est pas totalement faux. Toutefois, en réalité, nombre de sans-papiers travaillent avec un vrai contrat de travail et sont déclarés. Au demeurant, le « travail au noir » n’est pas réservé aux étrangers irréguliers. Il est au contraire assez répandu (garde d’enfants, cours du soir, ménage, couture, repassage, aide à domicile, etc.).

4 – Cette précarité serait forcément source de délinquance. C’est le vieux thème d’extrême droite, étranger = délinquance, dissimulé sous le masque de l’apitoiement sur la pauvreté. En réalité, les clandestins sont bien sûr tous délinquants au sens administratif (absence de papiers). Mais pour le reste, leur particularité est généralement d’être au contraire très respectueux de l’ordre public pour ne pas se faire remarquer.

5 – Cela entretient la suspicion de la population à l’égard de l’ensemble des étrangers. Cette idée que la lutte contre les immigrés clandestins permettrait aux immigrés légaux d’être acceptés et de s’intégrer est une idée fausse. D’abord le discours xénophobe, même limité aux clandestins, ne peut qu’alimenter une xénophobie plus générale (il n’est qu’à voir les discours sur la religion musulmane et ses « signes ostensibles »). Ensuite, les pratiques policières qui découlent de la lutte contre l’immigration clandestine touchent en réalité tous les Français dont la peau n’est pas blanche. L’exemple le plus évident est le contrôle d’identité sur la voie publique, autrement dit le contrôle au faciès.

Ainsi, ce débat sur « l’identité nationale » n’est pas seulement contestable sur le fond, il l’est aussi et d’abord sur la méthode. La lecture de la circulaire Besson montre que les conclusions sont largement écrites d’avance. Non seulement la circulaire formule les questions qui seront débattues, mais elle se termine de surcroît par une liste de quinze propositions précises qui, comme par hasard, concernent dans 11 cas sur 15 les étrangers (le reste consiste en cours d’instruction civique, en obligation pour les enfants de chanter régulièrement La Marseillaise et pour les bâtiments publics d’arborer le portrait de Marianne et le drapeau tricolore).

Cela indique bien le niveau réel du débat qui est proposé et le fond de la pensée de ceux qui l’ont conçu. Et qui pourrait élever ce débat, le sortir de ces cadres étriqués aux accents xénophobes ?

A aucun moment il n’est requis la présence des chercheurs spécialistes de la société française, capables d’aider à objectiver son histoire et sa composition actuelle, pas plus que la présence de représentants des divers partis politiques, syndicats professionnels, grandes associations nationales, institutions religieuses ainsi que les diverses « communautés » pourtant évoquées dans la circulaire.

Dans ces débats, il est seulement demandé aux intendants du prince de recueillir attentivement les peurs du « bon peuple » pour pouvoir ensuite le rassurer en lui parlant de la « fierté d’être français ». Non, décidément, les dés sont pipés, il s’agit une manipulation et nous appelons nos concitoyens à contester ces procédés politiciens rétrogrades qui menacent davantage qu’ils ne servent la cohésion sociale en réactualisant le bon vieux manichéisme opposant deux entités mythiques : la « communauté nationale » et les « corps étrangers » qui la menaceraient.


Christophe Daadouch, juriste ;
Laurent Mucchielli, sociologue ;
François Dubet, sociologue ;
Jean-Pierre Dubois, président de la LDH ;
François Geze, éditeur ;
Véronique Le Goaziou, sociologue ;
Claire Lévy-Vroeland, sociologue ;
Gérard Marle, prêtre ;
Stéphane Maugendre, président du GISTI ;
Antoine Math, économiste ;
Marwan Mohammed, sociologue ;
Richard Moyon, co-fondateur de RESF ;
Marie NDiaye, écrivain ;
Laurent Ott, éducateur ;
Pierre Piazza, politiste ;
Philippe Rigaut, sociologue ;
Serge Slama, juriste ;
Alexis Spire, sociologue ;
Jérémie Wainstain, chef d’entreprise ;
Vincent Tiberj, politiste ;
Pierre Tritz, prêtre.

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Les préfets pourront décréter la « fermeture administrative » des entreprises employant des sans-papiers

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Le ministre du travail, Xavier Darcos, annonce que les préfets pourront prononcer la « fermeture administrative » des entreprises employant des travailleurs sans papiers, dans un entretien au Parisien de dimanche.

« Les employeurs d’étrangers en situation irrégulière seront dans le collimateur des inspecteurs du travail » et « nous allons renforcer les contrôles et recourir à des sanctions qui touchent au porte-monnaie et à l’image de l’entreprise afin d’avoir un effet dissuasif », explique M. Darcos selon lequel le coût du travail illégal « est estimé à 4 % du PIB, soit 60 milliards d’euros, l’équivalent du budget de l’éducation nationale ».

« S’il est avéré que l’activité de l’entreprise est construite autour du travail illégal ou de l’emploi de travailleurs étrangers sans titre de travail, on pourra fermer administrativement cette entreprise », précise le ministre qui confiera ce « nouveau pouvoir » aux préfets. Concernant les salariés, « en cas de perte de leur emploi du fait de son caractère irrégulier, les indemnités dues seront néanmoins versées », ajoute-t-il.

Les « donneurs d’ordre » s’exposeront également à des sanctions : « le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2010 prévoit une extension de la suppression des exonérations de charges sociales aux donneurs d’ordre complices de sous-traitants qui n’ont pas déclaré leur activité ou qui ont eu recours à du travail dissimulé ».

IRRÉALISABLE

Les services de son ministère ont effectué 28 000 contrôles l’année dernière, dit-il. « Sur les 9 000 procès-verbaux dressés en 2008, 12,9 % concernent l’emploi d’étrangers sans titre de travail », soit 1 161 PV dressés l’année dernière pour l’emploi de sans-papiers. Xavier Darcos affirme qu’il va fixer jeudi prochain « des objectifs précis de progression, notamment en matière de contrôles ». Seraient visés par cette mesure les secteurs de la restauration, du bâtiment et du nettoyage où travaillent souvent les étrangers en situation irrégulière.

Dans la foulée, le ministre de l’immigration, Eric Besson, a indiqué sur France 5 qu’il déposerait prochainement un projet de loi en ce sens. Le texte comprendra, selon lui, un « arsenal complet de lutte contre les abus » et notamment la « fermeture administrative des établissements employant des étrangers en situation irrégulière ».

Pour Stéphane Maugendre, président du Gisti (Groupe d’information et de soutien aux immigrés), les mesures de Xavier Darcos sont  irréalisables. « Cela fait des années qu’on sait que des pans entiers de l’économie, la restauration, le textile, la construction, s’effondreraient du jour au lendemain si on fermait les entreprises employant des sans-papiers », explique-t-il à l’agence Reuters. Il s’agirait avant tout, selon M. Maugendre, de compenser par la fermeté les effets d’une régularisation que le gouvernement, selon lui, prépare.

Depuis le 12 octobre, plus de 5 000 travailleurs sans-papiers à travers toute la France et principalement en région parisienne se sont mis en grève pour réclamer la régularisation de leur situation, selon la CGT. Les organisations syndicales engagées dans ce mouvement doivent rencontrer Xavier Darcos le 26 novembre.

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Xavier Darcos menace les entreprises employant des sans-papiers

images 2 avec Reuters,

Le gouvernement français menace de fermer les entreprises employant des étrangers en situation irrégulière, dont l’opposition socialiste demande une large régularisation.

Cette mesure annoncée par le ministre du Travail, Xavier Darcos, fera l’objet d’un projet de loi présenté dans les prochaines semaines, a dit le ministre de l’Immigration, Eric Besson.

Elle viserait notamment les secteurs de la restauration, du bâtiment et du nettoyage où travaillent souvent les étrangers en situation irrégulière, au nombre de plusieurs centaines de milliers en France, selon des estimations officielles.

L’annonce intervient alors que se prolonge depuis plusieurs semaines une grève de travailleurs sans papiers qui demandent leur régularisation. Des négociations sont en cours entre les syndicats et le ministère de l’Immigration, et une régularisation est en vue, selon le Gisti (Groupe d’information et de soutien aux immigrés).

« S’il est avéré que l’activité de l’entreprise est construite autour du travail illégal ou de l’emploi de travailleurs étrangers sans titre de travail, on pourra fermer administrativement cette entreprise. Les préfets auront ce nouveau pouvoir », dit le ministre du Travail dans un entretien publié dimanche dans Le Parisien-Aujourd’hui en France.

Il ajoute que dans le cas d’une fermeture, les indemnités dues aux employés seront néanmoins versées, et assure même qu’elles le seraient aux travailleurs étrangers rapatriés.

Xavier Darcos annonce aussi des sanctions contre les donneurs d’ordre acceptant que certains de leurs sous-traitants travaillent avec des étrangers sans papiers. Il évoque la suppression des exonérations de charges sociales.

Le coût du travail illégal est évalué par le ministre à 4% du PIB, soit 60 milliards d’euros, mais Xavier Darcos ne définit pas précisément la notion.

AUBRY DEMANDE UNE LARGE RÉGULARISATION

Les dispositions évoquées par le ministre du Travail feront l’objet d’un projet de loi, a pour sa part annoncé Eric Besson, qui entend doter les autorités « d’un arsenal complet de lutte contre les abus en la matière ».

« Je vais proposer l’inéligibilité à tout appel d’offres privé ou public de toute entreprise qui aurait employé des étrangers en situation irrégulière. Je vais demander à ce que les amendes soient majorées et je vais demander le remboursement des aides publiques », a-t-il énuméré dans C Politique, sur France 5.

Face à ces développements, Martine Aubry a déclaré dimanche que le PS était favorable à une « large » régularisation des étrangers qui revendiquent actuellement des papiers.

« Les Français ont compris que ces milliers de sans-papiers qui sont aujourd’hui exploités dans les entreprises et qui font grève doivent avoir leurs papiers », a dit le Premier secrétaire du PS devant les jeunes socialistes réunis à Grenoble.

Interrogé par Reuters, Stéphane Maugendre, président du Gisti, a estimé que la déclaration de Xavier Darcos visait à donner une image de fermeté artificielle pour compenser l’effet d’une régularisation que le gouvernement, selon lui, prépare.

« Cela fait des années qu’on sait que des pans entiers de l’économie, la restauration, le textile, la construction, s’effondreraient du jour au lendemain si on fermait les entreprises employant des sans-papiers », a-t-il dit.

Le dossier est récurrent dans la société française depuis une vingtaine d’années, le travail des sans-papiers se généralisant dans les secteurs de main d’oeuvre à bas salaires.

Plusieurs faits divers ont illustré le phénomène, comme en 2007, lorsque la police a découvert des personnes dans cette situation sur le chantier de rénovation du Pavillon de la Lanterne, résidence de l’Etat utilisée par le président Nicolas Sarkozy.

Les gouvernements se sont toujours refusés à une régularisation globale demandée par les associations, mais acceptent des régularisations au cas par cas.

A l’automne 2008, le ministre de l’Immigration d’alors, Brice Hortefeux, y avait consenti après une grève de sans-papiers salariés dans la restauration parisienne, soutenue par le patronat.

Des organisations patronales avaient alors défendu leurs salariés en estimant que, vivant en France depuis très longtemps et payant pour certains des impôts sur le revenu, étant même déclarés par leurs employeurs, ils n’avaient pratiquement plus rien de clandestins.

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Les employeurs de sans papiers « touchés au porte-monnaie »

index 3 22/11/2009

Le gouvernement a annoncé dimanche que des fermetures administratives pourront être prononcées à l’encontre des entreprises employant des travailleurs sans papiers.

Les employeurs peu scrupuleux sont dans le collimateur des inspecteurs du travail. Le ministre du Travail Xavier Darcos annonce dimanche dans Le Parisien que les préfets vont disposer d’un « nouveau pouvoir » : ils pourront bientôt prononcer la « fermeture administrative » des entreprises employant des travailleurs sans papiers.

« Nous allons renforcer les contrôles et recourir à des sanctions qui touchent au porte-monnaie et à l’image de l’entreprise afin d’avoir un effet dissuasif« , explique Xavier Darcos selon lequel  le coût du travail illégal « est estimé à 4 % du PIB, soit 60 milliards d’euros,  l’équivalent du budget de l’Education nationale« . Concernant les salariés, « en cas de perte de leur emploi du fait de son caractère irrégulier, les indemnités dues seront néanmoins versées« ,  ajoute-t-il.

Les « donneurs d’ordre » s’exposeront également à des sanctions : « le projet  de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2010 prévoit une extension de  la suppression des exonérations de charges sociales aux donneurs d’ordre complices de sous-traitants qui n’ont pas déclaré leur activité ou qui ont eu  recours à du travail dissimulé« . Depuis le 12 octobre, plus de 5000 travailleurs sans-papiers à travers toute la France et principalement en région parisienne se sont mis en grève pour réclamer la régularisation de leur situation, selon la CGT. Les organisations syndicales engagées ans ce mouvement doivent rencontrer Xavier Darcos le 26 novembre.

Besson prend le relai

Le ministre de l’Immigration Eric Besson a à sont tour annoncé qu’il déposerait prochainement un projet de loi visant à durcir les mesures contre les entreprises qui emploient des travailleurs en situation irrégulière. Ce texte, a précisé Eric Besson sur France 5, sera un « arsenal complet de lutte contre les abus » comme la « fermeture administrative des établissements employant des étrangers en situation irrégulière » ou « l’inéligibilité à tout appel d’offres public ou privé de toute entreprise qui aurait employé » des sans-papiers. Le projet de loi comportera également une majoration des amendes à l’égard des entreprises fautives et le « remboursement des aides publiques« .

Le ministre de l’Immigration a assuré qu’il ne fallait « plus de  tartuferie en la matière« . « Si des étrangers en situation irrégulière sont exploités sur notre sol par des réseaux mafieux, c’est aussi parce qu’ils trouvent sur notre sol des employeurs et des exploiteurs qui abusent de leur situation« .

Aubry demande une large régularisation

L’annonce intervient alors que se prolonge depuis plusieurs semaines une grève de travailleurs sans papiers qui demandent leur régularisation. Des négociations sont en cours entre syndicats et ministère de l’Immigration et une régularisation est en vue, selon l’association Gisti (Groupe d’information et de soutien aux immigrés).

Dans un discours devant le Mouvement des jeunes socialistes à Grenoble, Martine Aubry a déclaré dimanche que le PS était favorable à une « large » régularisation des étrangers qui revendiquent actuellement des papiers. « Les Français ont compris que ces milliers de sans-papiers qui sont aujourd’hui exploités dans les entreprises et qui font grève doivent avoir leurs papiers« , a ajouté le Premier secrétaire du Parti socialiste.

Interrogé par Reuters, Stéphane Maugendre, président du Gisti, a estimé que la déclaration de Xavier Darcos visait à donner une image de fermeté artificielle pour compenser l’effet d’une régularisation que le gouvernement, selon lui, prépare. La mesure proposée par le ministre n’est pas réaliste, ajoute Stéphane Maugendre. « Cela fait des années qu’on sait que des pans entiers de l’économie, la restauration, le textile, la construction, s’effondreraient du jour au lendemain si on fermait les entreprises employant des sans-papiers« , a-t-il dit.

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Darcos promet de fermer les sociétés employant des sans-papiers

index capital Thierry Lévêque, 22/11/09

Le gouvernement français menace de fermer les entreprises employant des étrangers en situation irrégulière, alors que l’opposition socialiste a demandé une large régularisation.

Cette mesure, annoncée par le ministre du Travail Xavier Darcos, viserait notamment les secteurs de la restauration, du bâtiment et du nettoyage où travaillent souvent les étrangers en situation irrégulière, au nombre de plusieurs centaines de milliers en France, selon des estimations officielles.

L’annonce intervient alors que se prolonge depuis plusieurs semaines une grève de travailleurs sans papiers qui demandent leur régularisation. Des négociations sont en cours entre syndicats et ministère de l’Immigration et une régularisation est en vue, selon l’association Gisti (Groupe d’information et de soutien aux immigrés).

« S’il est avéré que l’activité de l’entreprise est construite autour du travail illégal ou de l’emploi de travailleurs étrangers sans titre de travail, on pourra fermer administrativement cette entreprise. Les préfets auront ce nouveau pouvoir », dit le ministre du Travail dans un entretien que publie dimanche Le Parisien-Aujourd’hui en France.

Il ajoute que dans le cas d’une fermeture, les indemnités dues aux employés seront néanmoins versées, et assure même qu’elles le seraient aux travailleurs étrangers rapatriés.

Xavier Darcos annonce aussi des sanctions contre les donneurs d’ordre acceptant que certains de leurs sous-traitants travaillent avec des étrangers sans papiers. Il évoque la suppression des exonérations de charges sociales.

Le coût du travail illégal est évalué par le ministre à 4% du PIB, soit 60 milliards d’euros, mais Xavier Darcos ne définit pas précisément la notion.

AUBRY DEMANDE UNE LARGE RÉGULARISATION

Dans un discours devant le Mouvement des jeunes socialistes à Grenoble, Martine Aubry a déclaré dimanche que le PS était favorable à une « large » régularisation des étrangers qui revendiquent actuellement des papiers.

« Les Français ont compris que ces milliers de sans-papiers qui sont aujourd’hui exploités dans les entreprises et qui font grève doivent avoir leurs papiers », a ajouté le premier secrétaire du Parti socialiste.

Interrogé par Reuters, Stéphane Maugendre, président du Gisti, a estimé que la déclaration de Xavier Darcos visait à donner une image de fermeté artificielle pour compenser l’effet d’une régularisation que le gouvernement, selon lui, prépare.

La mesure proposée par le ministre n’est pas réaliste, ajoute Stéphane Maugendre. « Cela fait des années qu’on sait que des pans entiers de l’économie, la restauration, le textile, la construction, s’effondreraient du jour au lendemain si on fermait les entreprises employant des sans-papiers », a-t-il dit.

Le dossier est récurrent dans la société française depuis une vingtaine d’années, le travail des sans-papiers se généralisant dans les secteurs de main d’oeuvre à bas salaires.

Plusieurs faits divers ont illustré le phénomène, comme en 2007, où la police à découvert des personnes dans cette situation travaillant sur le chantier de rénovation du pavillon de la Lanterne, résidence utilisée par le président Nicolas Sarkozy.

Les gouvernements successifs se sont toujours refusés à une régularisation globale demandée par les associations, mais ont toujours accepté des régularisations au cas par cas.

A l’automne 2008, le ministre de l’Immigration de l’époque, Brice Hortefeux, y avait ainsi consenti après une grève de sans-papiers salariés dans la restauration parisienne, soutenue par le patronat.

Des organisations patronales avaient alors défendu leurs salariés en estimant que, vivant en France depuis très longtemps et payant pour certains des impôts sur le revenu, étant même déclarés par leurs employeurs, ils n’avaient pratiquement plus rien de clandestins.

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Immigration choisie : des bâtons dans les roues de l’Etat

Une nouvelle épine dans le pied du ministère de l’Immigration et de l’Identité nationale. Le Conseil d’Etat a annulé, le 23 octobre, la circulaire précisant les conditions de régularisation par le travail. Autrement dit, l’un des textes qui encadrent l’immigration choisie.

Cette circulaire du 7 janvier 2008 prévoyait que pour pouvoir bénéficier d’une régularisation de son titre de séjour, l’étranger doit justifier d’une qualification ou d’une expérience dans l’une des 30 professions ouvertes aux ressortissants des pays non-membres de l’UE.

Pour le Gisti (Groupe d’information et de soutien des immigrés), qui avait saisi le Conseil d’Etat, ce texte était discriminatoire. Car ces trente métiers ouverts aux pays non membres de l’UE, et répartis sur le territoire par régions, sont pour la plupat des métiers qualifiés (informaticiens, géomètres, chefs de chantier…). Ce qui exclut les travailleurs sans-papiers des secteurs du bâtiment, nettoyage, sécurité, restauration… pour beaucoup venus de pays d’Afrique. Une autre liste, plus longue, non supprimée, et nationale celle-là, concerne 152 métiers ouverts aux ressortissants des pays nouvellement membres de l’UE et nécessitant moins de qualification.

«Motifs de forme»

«En clair, ce dispositif venait empêcher la régularisation par le travail des immigrés travaillant dans le bâtiment ou la restauration, c’est-à-dire ceux venus des pays du Sud», dénonce Stéphane Maugendre, le président du Gisti.

Le Conseil d’Etat, sans parler directement de discrimination, considère dans sa décision que le gouvernement ne peut, «sans méconnaître la loi, restreindre les conditions de délivrance» de la carte de séjour «en subordonnant (cette carte) à la présentation, par l’étranger, d’une promesse d’embauche dans l’un des métiers prévus par cette liste».

Pour le ministère de l’Immigration, l’annulation de la circulaire repose sur de purs «motifs de forme» et ne remet aucunement en cause le principe de la régularisation par le travail. Le Conseil d’Etat a seulement «censuré une rédaction imparfaite de la circulaire», considère-t-on au cabinet d’Eric Besson, qui planche déjà depuis deux semaines sur «un document de synthèse» destiné à remplacer la circulaire annulée.

«Une fenêtre qui s’ouvre»

Du côté du Gisti, l’interprétation est évidemment différente. «Ce que dit le Conseil d’Etat, c’est qu’on ne peut pas limiter la possibilité de régulariser les gens», réagit Stéphane Maugendre, se réjouissant de cette «large fenêtre qui s’ouvre», alors que plus de 4000 travailleurs sans-papiers grévistes occupent toujours une quarantaine de sites pour demander leur régularisation.

«Cette décision ne changera pas grand chose, puisque dans les faits la liste des 30 métiers est dépassée depuis longtemps», tempère la CGT, qui encadre bon nombre des mouvements de sans-papiers demandant leur régularisation. De fait, une clause de cette fameuse circulaire du 7 janvier 2008 prévoit qu’un étranger qui occuperait un emploi «en tension» ne figurant pas dans la liste des trente métiers pourrait tout de même voir sa demande examinée «à titre exceptionnel». Cette brèche a permis une première vague de régularisations débutée en 2008 par celles des cuisiniers du restaurant parisien la Grande Armée. 2800 étrangers ont été regularisés par le travail en 2008, selon le ministère.

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Le « délit de solidarité » : quels enjeux aujourd’hui ?

Compte-rendu du forum citoyen du 25 octobre 2009 Par Maud Amaudric

LE « DÉLIT DE SOLIDARITÉ »(1), C’EST LE FAIT DE « FACILITER OU TENTER DE FACILITER L’ENTRÉE, LA CIRCULATION OU LE SÉJOUR IRRÉGULIERS D’UN ÉTRANGER EN FRANCE», SELON L’ARTICLE 622-1 DU CÉSÉDA (2). POUR CETTE ACTION ILLÉGALE, ON RISQUE UNE PEINE « DE CINQ ANS D’EMPRISONNEMENT ET UNE AMENDE DE 30 000 EUROS ». AFRISCOPE A ORGANISÉ DIMANCHE 25 OCTOBRE DERNIER, EN COLLABORATION AVEC LE COLLECTIF DOCOMOTO, SON TROISIÈME FORUM CITOYEN SUR LE THÈME : « LE DÉLIT DE SOLIDARITÉ, UN ENJEU DE MOBILISATION AUTOUR DES SANS-PAPIERS» RETOUR SUR LES PRINCIPAUX POINTS SOULEVÉS

Le débat, introduit par Mohammed Ouaddane, de L’association Trajectoires, s’est ouvert sur cette observation : « On est passé en vingt ans de la criminalisation du sans-papiers à la criminalisation de celui qui laide.» Que signifie cette évolution selon les intervenants?

« Ce qui a changé, c’est le nombre… »

Stéphane Maugendre, président du Gisti (3), a commencé par un bref rappel sur l’histoire du délit de solidarité : « Avant de correspondre à l’article 622-1 du Céséda, le délit de solidarité existait déjà, sous le nom d’article 21 de l’ordonnance du 2 novembre 1945.» Le premier scandale autour de cet article a éclaté en 1996 autour du cas de Jacqueline Deltombe, Lilloise, poursuivie pour avoir hébergé un sans-papiers. Un groupe de réalisateurs a alors lancé une pétition de grande ampleur : « Le Monde et Libération publiaient des pages et des pages de noms demandant l’abrogation de l’ordonnance de 1945 », raconte Stéphane Maugendre. En 1998, au moment du vote de la loi Chevènement relative à l’entrée et au séjour des étrangers en France, des militants réclament de nouveau cette abrogation.

Le délit de solidarité existe donc depuis longtemps. Ce qui change aujourd’hui ? « C’est le nombre de militants qui se voient convoqués parla police, qui cherche à les intimider. Un certain nombre sont pour¬suivis, dont certains sont condamnés » explique Stéphane Maugendre. Le Gisti a fait un gros travail de recherche autour des décisions juridiques concernant l’article 622-1 (4). Pour la simple année 2008, six condamnations sur la base de cet article ont été recensées. Mais surtout, 4300 personnes ont été interpellées (5) et ont pu passer jusqu a 48 heures en garde à vue. Sans compter, comme l’a souligné Stéphane Maugendre, que ces chiffres ne prennent en compte que les personnes arrêtées sur la base de l’article 622-1. Alors que beaucoup d’aidants sont poursuivis sur d’autres fondements : diffamation, injures, rébellion, outrage et même « entrave à la circulation d’un aéronef » pour ceux qui se révoltent dans les charters contre les mauvais traitements les sans-papiers expulsés !

Pourquoi cette pression?

Ce sont en réalité les aidés – les sans- papiers – sur lesquels on cherche à faire pression à travers leurs soutiens. Dans quel but? D’après Emmanuel Terray, pas dans celui d’atteindre l’objectif officiel d’éradication de l’immigration illégale – objectif qu’il taxe de « pure hypocrisie ». Car « si le gouvernement parvenait à ses fins, toute une série de secteurs importants de l’économie française serait du même coup paralysée ». Des secteurs comme celui du bâtiment, de l’hôtellerie, de la confection, du nettoyage, du gardiennage, des services à la personne…

qui ont La caractéristique commune de ne pouvoir être délocalisés : « on ne peut pas construire un bâtiment ailleurs qu’à l’emplacement où il doit être construit, restaurer les gens de loin ni nettoyer une rue ailleurs que là où elle se trouve! » note Emmanuel Terray.
Sa conclusion est la suivante : « L’immigration illégale permet aux entreprises qui ne peuvent pas délocaliser de trouver quand même à leur porte une main d’œuvre qui se trouve dans les mêmes conditions que celle des pays du tiers-monde, où se font les délocalisations ordinaires : salaire dérisoire et aléatoire, pas de droits sociaux, pas de syndicat… une main d’œuvre docile. » Il parle de « délocalisation surplace ». Pour Emmanuel Terray, les chiffres officiels de l’immigration illégale ces 25 dernières années sont significatifs : ils stagnent autour de 400 000 personnes, alors que deux vagues de régularisations massives ont eu lieu – 150 000 personnes en 1981 et 90 000 personnes en 1997 – et qu’il y a de plus en plus d’expulsions. « Les « pertes » sont donc rééquilibrées par des entrées nouvelles, de manière à ce que le seuil de main d’œuvre exploitable reste identique. »

Pour que cette main d’œuvre exploitée continue d’être soumise, il faut maintenir une pression sur elle… ce qui fonctionne de moins en moins.

Des sans-papiers de plus en plus rebelles

Il devient de plus en plus difficile de contenir les revendications des sans- papiers, qui depuis l’occupation de l’église Saint-Bernard en 1996, se sont organisés. En témoigne l’action de la CSP75 (Coordination des sans-papiers de Paris), qui multiplie les occupations de lieux, les manifestations, les actions
de sensibilisation auprès du grand public. Anzoumane Sissoko, l’un de ses porte-parole, a insisté : « Les sans- papiers n’ont plus rien à perdre ! On peut même vous mettre en prison, cela vous fait des vacances ! » « C’est ce qui m’est arrivé en 2001, après sept ans de travail sans congés, à travailler 70 heures payées 39… Dans des conditions comme celles-ci, la prison est un soulagement ! » a-t-il lâché, provocateur.

C’est également depuis 1996 que la cause des sans-papiers a commencé à alerter l’opinion publique et à rallier des soutiens français. Depuis 2008, les syndicats acceptent de défendre les sans- papiers en tant que travailleurs, comme les autres, au lieu de les traiter comme une question à part : « les travailleurs sans-papiers – soit la quasi totalité des sans-papiers – ne sont pas du tout un phénomène marginal dans notre société ; c’est la pointe extrême de la précarité », a martelé Emmanuel Terray. C’est donc bien autour de la question de l’exploitation des travailleurs, et pas uniquement de celle de l’immigration, qu’ils luttent et obtiennent des soutiens.
Au final, c’est probablement parce que les soutiens sont de plus en plus nombreux qu’ils posent de plus en plus problème et sont de plus en plus poursuivis : intimider les soutiens, les faire renoncer à leurs actions, c’est avant tout isoler les sans-papiers et les affaiblir. À Lyon, cela a fonctionné, a raconté Stéphane Maugendre : les manifestations hebdomadaires devant le centre de rétention se sont arrêtées suite aux menaces subies par les militants…

Mohammed Ouaddane : fondateur et coordinateur de projet de l’association Trajec­toires, membre du collectif Docomoto.

Stéphane Maugendre : président du Gisti (Groupe d’information et de soutien des immigrés) depuis 2008.

Emmanuel Terray :anthropologue et militant de la LDH (Ligue des droits de l’homme) et grand connaisseur de la lutte des immigrés en France ces 25 dernières années.

Anzoumane Sissoko : porte-parole de la CSP75 (Coordination des sans-papiers de Paris), Anzou­mane Sissoko est lui-même resté sans-papiers pendant 13 ans. Afriscope lui a consacré sa Une du numéro de septembre-octobre 2009.

(1) L’expression a été inventée par le Gisti pour sensibiliser l'opinion publique à cette question.
 (2) Céséda : Code d'entrée et de séjour des étrangers et des demandeurs d'asile.
 (3) Gisti : Groupe d'information et de soutien des immigrés, né en 1972.
 (4) À deux reprises, dans une lettre ouverte adressée aux associations le 23 mars 2009, puis sur France Inter le 8 avril, M. Eric Besson, minis­tre de l’Immigration, a affirmé : « En 65 années d'application de cette loi, personne en France n’a jamais été condamné pour avoir seulement accueilli, accompagné ou hébergé un étranger en situation irrégulière ». Le Gisti a entamé ce travail de recherche, en remontant jusqu'à 1986, pour contrecarrer cette affirmation. Pourvoir cette liste :http://www.gisti.org/spip.php7article1399

(5) Extrait de la Lettre de mission adressée le 31 mars 2009 à M. Besson, par MM. Fillon et Sarkozy : « En 2008, 4300 personnes ont été interpellées pour des faits d'aide illicite à l'entrée et au séjour d'immigrés en situation irrégulière. Nous vous demandons de viser un objectif de 5000 pour l'année 2009. »Lettre disponible sur le site de l'Élysée : http://www.elysee.fr.

Afghans de France: le gouvernement dépense plus de 2.550 euros pour reconduire chaque migrant à Kaboul

© R. GACAD / AFP

 , Bérénice Dubuc, 

Plus de 2.553 euros. C’est ce qu’a coûté la reconduite de chacun des trois Afghans de France à Kaboul. Cependant, ce calcul ne comprend pas le prix des nuits d’hôtel. Eric Besson a en effet affirmé ce jeudi matin sur France Info que les trois migrants seraient logés dans un hôtel dans la capitale afghane «payé par la France pendant deux semaines».

Le ministre a expliqué qu’un vol groupé franco-britannique «spécialement affrété» avait décollé de Roissy vers minuit avec trois Afghans en situation irrégulière en France, dans la nuit de mardi à mercredi. L’avion, en provenance de Londres, a fait escale à Roissy pour embarquer les trois personnes, avant de repartir direction Kaboul, via Bakou en Azerbaïdjan. Selon les informations du Daily Mail, chaque place sur le vol a coûté 500 livres (553 euros) à la France.

Aide à la réinstallation

Eric Besson avait promis mercredi que ces trois migrants seraient «accueillis à Kaboul par un fonctionnaire français de l’immigration et de l’intégration», et recevraient un «accompagnement individualisé». Chose promise, chose due: ils ont chacun reçu une aide à la réinstallation de 2.000 euros. L’un des Afghans reconduits, contacté par L’Express, confirme avoir reçu l’aide de l’Etat français, une fois arrivé à l’ambassade de France en Afghanistan.

Ce qui est étonnant, c’est que l’aide à la réinstallation est normalement accordée uniquement aux candidats au retour volontaire, ce que ne sont pas ces trois Afghans, de l’aveu même du ministre de l’Immigration. Jean-Michel Centres, membre du Conseil d’administration du Mrap, chargé des questions d’immigration, dénonce un coup de communication: si l’argent a été donné à ces trois migrants, alors qu’ils n’étaient pas candidats au retour volontaire, «c’est pour faire taire les récriminations des associations».

«Faire passer la pilule»

«L’idée de Besson est de faire passer la pilule, de faire accepter ce départ afin d’habituer l’opinion publique à ces charters», indique Jean-Michel Centres. Stéphane Maugendre, président du Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti), abonde dans ce sens. Pour lui, «Faire passer un charter pour quelque chose d’humain, c’est le summum du cynisme. On essaye de faire passer l’expulsion de ces trois personnes pour un voyage de loisirs.» Le ministère n’a pu être joint pour commenter ces informations.

Selon un rapport du Sénat rédigé par la commission des Finances, le coût total des reconduites forcées est estimé à 415,2 millions d’euros pour l’année 2009. Cette somme comprend notamment les «frais de billetterie» (le coût des billets d’avion pour le migrant et son escorte policière), soit 1.800 euros par personne reconduite.

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Charters, le cynisme de Besson

Accueil  Emilie Rive, 21/10/2009

AFP/Philippe Huguen
AFP/Philippe Huguen

Mercredi 21 octobre, le ministère a finalement déclaré avoir bel et bien renvoyé trois Afghans par avion. Hier, déjà des sources policières confirmaient l’imminence d’un charter franco- britannique pour Kaboul. Stéphane Maugendre, du Gisti, fustige ces retours forcés, à la fois inhumains et inutiles.

Comme d’habitude, la transparence n’est pas de mise au ministère de l’Immigration. Des sources policières de plus en plus concordantes ont affirmé, hier, qu’un charter franco-britannique, partant d’Angleterre, atterrirait à l’aéroport de Lille Lesquin dans la soirée pour embarquer une dizaine d’Afghans encore en rétention au centre de Coquelles, puis ferait escale à Roissy vers 23 heures afin de récupérer « seize autres Afghans » en provenance des centres d’Ile-de France et encadrés eux « par huit policiers français ». Ils sont une cinquantaine retenus en France à Palaiseau, Coquelles, Lille, au Mesnil-Amelot, à Paris-Vincennes et à Nice. Le ministre a, dans un premier temps démenti, puis jeté l’éponge en rappelant qu’il y aurait des renvois…

Des rassemblements étaient de toute façon annoncés à Lille et à Roissy hier soir. Car l’opération ne passe toujours pas. L’appel européen contre les retours forcés lancé par une trentaine d’associations il y a quinze jours a déjà reçu plus de 10000 signatures (lire ce texte en pages «Tribunes»). Stéphane Maugendre, président du Groupe d’Information et de Soutien des Immigrés, précise les raisons de s’opposer aux renvois groupés.

Pourquoi vous oposez-vous à ces expulsions collectives ?

STÉPHANE MAUGENDRE. « Parce que nous avons eu des retours d’informations de la part de personnes qui ont eu à subir ces renvois par charter. Or, les problèmes d’hygiène, de sécurité, les risques de mauvais traitements sont légion… Ce n’est pas pour rien que ce genre d’opération est menée dans le plus grand des secrets. Ainsi, nous n’avons aucune garantie sur la façon dont sont traités les gens à l’intérieur des avions. Ils risquent d’être entravés, bâillonnés, et on peut facilement imaginer qu’ils sont plus mal traités que dans les avions de ligne où le regard des passagers exerce un certain contrôle. »

Ces procédures sont-elles légales ?

STÉPHANE MAUGENDRE. « Sur les 150 Afghans raflés d’un seul coup à Calais, les juges ont constaté qu’il y avait de nombreuses illégalités et ont libéré la grande majorité. On court donc le risque que ces expulsions collectives se fassent elles aussi avec des irrégularités, entre le moment où le juge a statué et celui où les gens vont être mis dans l’avion. Il y a de graves risques d’atteinte aux droits fondamentaux. Enfin, sans vouloir faire le parallèle avec une période sombre de notre histoire, la rationalisation de l’expulsion, en tant que principe de société, fait froid dans le dos. On rafle, on fiche à outrance, on fait passer des mineurs pour des majeurs… Rappelez-vous: au procès Papon, on lui avait demandé pourquoi il changeait les dates de naissance. Bien sûr, ce n’est pas la même chose, mais ces méthodes me terrifient.

Ces charters sont-ils «efficaces», du point de vue du gouvernement ?

STÉPHANE MAUGENDRE Un exemple: les Anglais ont tenté de reconduire récemment une cinquantaine d’Irakiens à Bagdad. Seuls dix d’entre eux ont finalement été laissés sur place, avec 100 dollars chacun. Les autres sont rentrés à Londres par le même avion, les autorités irakiennes leur ayant demandé s’ils voulaient descendre ou non. Cette opération a coûté, selon le New York Times de dimanche, 450 000 dollars pour l’aller-retour. En France, on évalue à sept millions d’euros par an le coût des arrestations-rétentions-expulsions. Cette affaire illustre bien l’inanité de la politique européenne de l’immigration : on ne se préoccupe pas de savoir ce que pensent les autres, on est sûr d’avoir raison, et donc, on est prêt à traiter les gens comme du bétail… Je ne parle même pas de l’image de la France après cela. Notre gouvernement renvoie des gens qui cherchent refuge chez nous, alors que nos soldats se font tuer chez eux au nom de nos valeurs démocratiques… Tout cela pour démontrer à une partie de l’opinion qu’on est capable d’agir. On est dans le cynisme le plus total.

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Calais : des associations dénoncent «l’illégalité» de l’opération Besson

logo_3714 01/10/2009

Plusieurs associations de défense du droit des étrangers ont dénoncé jeudi «l’illégalité» et «l’inanité» de l’opération de démantèlement de la «jungle» à Calais en se félicitant que les magistrats aient sanctionné «les irrégularités de procédure commises par le ministère de l’Immigration».

« Beaucoup de bruit pour rien! », a lancé Stéphane Maugendre, président du Gisti, lors d’une conférence de presse sur l’évacuation très médiatisée de la « jungle » de Calais et alors que la quasi-totalité des migrants placés en rétention ont été libérés.

L’Association pour la défense des droits des étrangers (ADDE) a fait état du dernier bilan des « 140 personnes » placées en rétention, quasiment toutes des Afghans, sur les 276 interpellées dans la « jungle » le 22 septembre. Cent trente-deux personnes, a précisé Vanina Rochiccioli de l’ADDE, ont été libérées dont 66 à la suite d’annulations par des juges administratifs de décisions de reconduites à la frontière. « Ces 66 annulations, a renchéri Jean-Louis Borie du Syndicat des avocats de France (Saf), ont été prononcées car les juges ont estimé que le droit d’asile avait été bafoué ».

Les tribunaux administratifs ont en effet constaté que les ressortissants afghans « n’avaient pas eu véritablement l’occasion de déposer leurs demandes d’asile, malgré la présence d’une antenne du HCR dépêchée sur le site une semaine auparavant », a expliqué M. Borie. Mis à part ces 66 annulations, les juges des libertés et de la détention (JLD) ainsi que ceux des cours d’appel ont invoqué deux grands arguments pour libérer les « retenus ».

D’abord, l’âge des personnes, souvent mineures : « Dans certains cas, les juges ont estimé que l’administration n’avait rien fait pour s’assurer que les personnes arrêtées n’étaient pas mineures », a expliqué la Cimade.

Second argument, « l’impossibilité pour les personnes d’exercer leurs droits », en raison notamment de la longueur des transfèrements vers les neuf centres de rétention administratifs (CRA) dispersés à travers la France, certains trajets en autobus ayant duré 20 heures.

Avocats ou magistrats présents ont dénoncé « la volonté du gouvernement d’éclater la défense » des étrangers en les dispersant dans neuf CRA (Marseille, Toulouse, Lyon, Metz, Nîmes, Rouen, Rennes, Paris, Melun) alors que les centres de Coquelles et de Lesquin, près de Lille où les étrangers avaient été placés en garde à vue, « avaient des places disponibles ». « On a voulu éclater les gens pour les éloigner de leurs droits », a déclaré Stéphane Maugendre remarquant que « c’est aussi ce que veut faire le gouvernement avec la réforme des CRA. Avec l’éclatement en lots, il y aura impossibilité de centraliser les informations et les étrangers seront dans l’impossibilité d’accéder à leurs droits ».

Le ministre de l’Immigration Eric Besson a, à plusieurs reprises, justifié l’opération de Calais en arguant du fait qu’elle « n’avait pas pour objectif d’interpeller le maximum de migrants ». Pour lui, « l’objectif, qui était de détruire un campement insalubre et une plaque tournante des filières clandestines à destination de l’Angleterre, est atteint ».

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Avocat