Darcos promet de fermer les sociétés employant des sans-papiers

index capital Thierry Lévêque, 22/11/09

Le gouvernement français menace de fermer les entreprises employant des étrangers en situation irrégulière, alors que l’opposition socialiste a demandé une large régularisation.

Cette mesure, annoncée par le ministre du Travail Xavier Darcos, viserait notamment les secteurs de la restauration, du bâtiment et du nettoyage où travaillent souvent les étrangers en situation irrégulière, au nombre de plusieurs centaines de milliers en France, selon des estimations officielles.

L’annonce intervient alors que se prolonge depuis plusieurs semaines une grève de travailleurs sans papiers qui demandent leur régularisation. Des négociations sont en cours entre syndicats et ministère de l’Immigration et une régularisation est en vue, selon l’association Gisti (Groupe d’information et de soutien aux immigrés).

« S’il est avéré que l’activité de l’entreprise est construite autour du travail illégal ou de l’emploi de travailleurs étrangers sans titre de travail, on pourra fermer administrativement cette entreprise. Les préfets auront ce nouveau pouvoir », dit le ministre du Travail dans un entretien que publie dimanche Le Parisien-Aujourd’hui en France.

Il ajoute que dans le cas d’une fermeture, les indemnités dues aux employés seront néanmoins versées, et assure même qu’elles le seraient aux travailleurs étrangers rapatriés.

Xavier Darcos annonce aussi des sanctions contre les donneurs d’ordre acceptant que certains de leurs sous-traitants travaillent avec des étrangers sans papiers. Il évoque la suppression des exonérations de charges sociales.

Le coût du travail illégal est évalué par le ministre à 4% du PIB, soit 60 milliards d’euros, mais Xavier Darcos ne définit pas précisément la notion.

AUBRY DEMANDE UNE LARGE RÉGULARISATION

Dans un discours devant le Mouvement des jeunes socialistes à Grenoble, Martine Aubry a déclaré dimanche que le PS était favorable à une « large » régularisation des étrangers qui revendiquent actuellement des papiers.

« Les Français ont compris que ces milliers de sans-papiers qui sont aujourd’hui exploités dans les entreprises et qui font grève doivent avoir leurs papiers », a ajouté le premier secrétaire du Parti socialiste.

Interrogé par Reuters, Stéphane Maugendre, président du Gisti, a estimé que la déclaration de Xavier Darcos visait à donner une image de fermeté artificielle pour compenser l’effet d’une régularisation que le gouvernement, selon lui, prépare.

La mesure proposée par le ministre n’est pas réaliste, ajoute Stéphane Maugendre. « Cela fait des années qu’on sait que des pans entiers de l’économie, la restauration, le textile, la construction, s’effondreraient du jour au lendemain si on fermait les entreprises employant des sans-papiers », a-t-il dit.

Le dossier est récurrent dans la société française depuis une vingtaine d’années, le travail des sans-papiers se généralisant dans les secteurs de main d’oeuvre à bas salaires.

Plusieurs faits divers ont illustré le phénomène, comme en 2007, où la police à découvert des personnes dans cette situation travaillant sur le chantier de rénovation du pavillon de la Lanterne, résidence utilisée par le président Nicolas Sarkozy.

Les gouvernements successifs se sont toujours refusés à une régularisation globale demandée par les associations, mais ont toujours accepté des régularisations au cas par cas.

A l’automne 2008, le ministre de l’Immigration de l’époque, Brice Hortefeux, y avait ainsi consenti après une grève de sans-papiers salariés dans la restauration parisienne, soutenue par le patronat.

Des organisations patronales avaient alors défendu leurs salariés en estimant que, vivant en France depuis très longtemps et payant pour certains des impôts sur le revenu, étant même déclarés par leurs employeurs, ils n’avaient pratiquement plus rien de clandestins.

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