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Le gouvernement en difficulté après la libération de réfugiés

images 2 , Thierry Lévêque, 25/01/2010

La remise en liberté des 123 immigrés clandestins se disant Kurdes de Syrie et arrivés en Corse à la fin de la semaine dernière met à l’épreuve la politique d’immigration du gouvernement français.

Après des décisions semblables à Nîmes et Rennes dimanche, des juges des libertés de Lyon, Marseille et Toulouse ont jugé irrégulier lundi le placement dans des centres de rétention de ces personnes découvertes vendredi sur une plage du sud de la Corse et transférées ensuite sur le continent.

Le ministre de l’Immigration, Eric Besson, critiqué pour avoir pris d’emblée samedi des arrêtés de reconduite à la frontière, ne parle plus de les expulser. Sur 81 adultes, 61 ont officiellement demandé l’asile politique, dit son ministère.

Dans un communiqué, il justifie le recours au placement en rétention, qui était selon lui la seule manière de procéder en raison des contraintes matérielles.

Ceux qui n’obtiendront pas l’asile et refuseront une aide au retour volontaire seront reconduits dans leur pays, précise-t-il. Il y aura une nouvelle loi pour mieux gérer ces situations à l’avenir, annonce-t-il enfin.

« Les règles du placement en rétention en vigueur sont mal adaptées à ces situations d’urgence impliquant de très nombreuses personnes. (…) C’est pourquoi le prochain projet de loi sur l’immigration comportera un assouplissement des ces règles », explique Eric Besson.

La gauche et les associations de défense des droits de l’homme estiment que les réfugiés, parmi lesquels 38 enfants dont neuf nourrissons, cinq femmes enceintes et une handicapée, ont été traités durement et illégalement au plan procédural.

ATTAQUES DE LA GAUCHE ET DE L’EXTRÊME DROITE

Les magistrats qui ont statué jusqu’ici estiment que les règles prévoyant l’accès des réfugiés à divers droits n’ont pas été respectées. Ils ont mis en cause les mesures coercitives, les arrestations, le transfert forcé sous garde armée, la dispersion et l’emprisonnement d’enfants en rétention.

L’Elysée et Eric Besson affichent des objectifs chiffrés d’expulsion et une fermeté censée dissuader les candidats à l’immigration illégale, tout en réaffirmant qu’ils souhaitent conserver la tradition française d’asile politique.

Le président du Groupement d’information et de soutien aux immigrés, Stéphane Maugendre, conteste l’idée qu’un accueil ponctuel de réfugiés en fait forcément venir d’autres.

« C’est ridicule, l’appel d’air n’existe pas, c’est pour faire peur aux gens. La population qui fuit les atrocités, la guerre, les régimes politiques viendra toujours chercher refuge. S’ils ne passent pas par (la Corse-NDLR), ils passeront ailleurs », a-t-il dit à Reuters.

Le Parti socialiste accuse Eric Besson d’avoir « bafoué les règles du droit d’asile. » « Le Haut commissariat aux réfugiés, comme la justice ont appelé le gouvernement au respect du droit et des conventions internationales qui protègent les réfugiés », se félicite-t-il dans un communiqué.

Le président du Front national, Jean-Marie Le Pen, estime que le dossier démontre que la France est incapable de surveiller ses frontières. « Il est clair que le pouvoir est le complice quand il n’est pas l’organisateur de l’immigration-invasion », dit-il dans un communiqué. Sa fille Marine Le Pen demande la démission d’Eric Besson.

Selon Le Figaro, une panne technique d’un radar militaire aurait permis le débarquement sur une plage de Corse de ces immigrés clandestins par un navire toujours non identifié.

Le parti majoritaire UMP se prononce pour l’expulsion, car la France ne peut « accueillir toute la misère du monde », a dit son porte-parole Frédéric Lefebvre lors d’un point de presse.

Eric Besson a exprimé le même point de vue sur Europe 1, en disant qu’il ne voulait pas voir apparaître en Corse un « nouveau Sangatte », en référence au centre d’accueil de la Croix-Rouge pour réfugiés afghans, près de Calais, fermé en 2003.

⇒ Voir l’article

La libération de réfugiés clandestins met Paris en difficulté

index capitalThierry Lévêque, 25/01/10

La remise en liberté de la plupart des 123 réfugiés se disant Kurdes de Syrie et arrivés en Corse à la fin de la semaine dernière met à l’épreuve la politique d’immigration du gouvernement.

Après des décisions semblable à Nîmes et Rennes dimanche, des juges de Lyon et Marseille ont jugé irrégulier lundi le placement dans des centres de rétention de ces personnes découvertes vendredi sur une plage du sud de la Corse et transférées ensuite sur le continent.

Une dernière décision était attendue dans la journée à Toulouse concernant les cas de 19 personnes, dont six enfants.

Le ministre de l’Immigration Eric Besson, critiqué pour avoir pris d’emblée samedi des arrêtés de reconduite à la frontière, ne parle plus de les expulser. Beaucoup ont officiellement demandé l’asile politique, a-t-il dit sur Europe 1.

« L’Ofpra (Office français de protection des réfugiés et apatrides- NDLR) s’en occupe. C’est un organisme indépendant qui va étudier au cas par cas chacun des dossiers », a-t-il dit.

« C’est à la personne de faire la preuve qu’elle est persécutée ou qu’elle est en situation de danger et d’expliquer pourquoi elle demande le statut de réfugié », a-t-il précisé.

En acceptant cette procédure, le ministre accepte aussi implicitement la délivrance de titres provisoires de séjour.

Les préfets ne feront pas appel des remises en liberté et les réfugiés seront hébergés à l’hôtel par l’Etat, a précisé Eric Besson.

La gauche et les associations de défense des droits de l’homme estiment que les réfugiés, parmi lesquels 38 enfants dont neuf nourrissons, cinq femmes enceintes et une handicapée, ont été traités durement et illégalement au plan procédural.

UNE PANNE DE RADAR ?

On a confondu un dossier de demande d’asile politique avec la problématique de l’immigration illégale, estiment-ils.

Les magistrats qui ont statué jusqu’ici estiment que les procédures n’ont pas été respectées et mettent en cause les mesures coercitives, arrestation, transfert forcé sous garde armée, dispersion et emprisonnement d’enfants en rétention.

« Quand on fait le choix de recourir à l’expulsion d’étrangers en situation irrégulière, il faut en prendre les moyens procéduraux », a déclaré le juge des libertés et de la détention de Lyon, Jean-Daniel Piffaut.

L’opposition et les associations de défense des droits de l’homme estiment que l’affaire met en lumière les failles de la politique d’immigration du gouvernement.

L’Elysée et Eric Besson affichent des objectifs chiffrés d’expulsion et une fermeté censée dissuader les candidats à l’immigration illégale, tout en réaffirmant qu’ils souhaitent conserver la tradition française d’asile politique.

Le président du Groupement d’information et de soutien aux immigrés, Stéphane Maugendre, dit contester l’idée qu’un accueil ponctuel de réfugiés en faisait forcément venir d’autres.

« C’est ridicule, l’appel d’air n’existe pas, c’est pour faire peur aux gens. La population qui fuit les atrocités, la guerre, les régimes politiques viendra toujours chercher refuge. S’ils ne passent pas par (la Corse- NDLR), ils passeront ailleurs », a-t-il dit à Reuters.

A l’extrême droite, Jean-Marie Le Pen, président du Front national a estimé dans un communiqué que le dossier démontrait que la France était incapable de surveiller ses frontières.

« Il est clair que le pouvoir est le complice quand il n’est pas l’organisateur de l’immigration-invasion », dit-il.

Selon le Figaro, c’est une panne technique d’un radar militaire qui aurait permis le débarquement sur une plage de Corse des réfugiés par un navire toujours non identifié.

Le parti majoritaire UMP se prononce pour l’expulsion.

« La majorité des gens qui sont venus sur notre sol par la Corse a vocation à retourner dans son pays d’origine parce que nous ne pouvons pas accueillir toute la misère du monde », a dit son porte-parole Frédéric Lefebvre lors d’un point de presse.

Eric Besson a exprimé le même point de vue sur Europe 1, en expliquant qu’il ne voulait pas voir apparaître en Corse un « nouveau Sangatte », en référence au centre d’accueil de la Croix rouge pour réfugiés afghans, près de Calais, fermé en 2003.

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Le collectif de soutien aux sans-papiers en appel pour diffamation

logo-liberation-311x113 Pierre-Henri Allain,15/01/2010

Trois membres du collectif rennais de soutien aux sans-papiers ont comparu vendredi matin devant la cour d’appel de Rennes pour « diffamation et injures publiques envers un corps constitué », en l’occurrence la police aux frontières (PAF). En première instance, en décembre 2008, les trois prévenus, qui avaient reçu le soutien de nombreux élus et d’associations, avaient été relaxés. Le parquet avait fait appel de ce jugement. Il est reproché aux trois membres du collectif, les expressions utilisés dans des tracts distribués lors d’une manifestation devant les locaux de la PAF à Rennes en avril 2008.

Sur un mode satirique, ces tracts dénonçaient les pratiques utilisées dans l’interpellation et la reconduite aux frontières des étrangers sans papiers. « Tu t’ennuies dans la vie? Tu veux soutenir notre Président dans sa pêche aux voix du front national? Tu veux un métier où plus t’obtiens des résultats, plus tu gagnes du fric? Alors la police de l’immigration est faite pour toi », commençait l’un des tracts incriminés. Michèle Alliot-Marie, alors Ministre de l’intérieur, à l’origine de la procédure, avait pointé les passages jugés plus particulièrement injurieux et diffamatoires évoquant « des comportements brutaux et contraires à la déontologie ». Tels « tu peux organiser des contrôles au faciès », « tu peux menotter les sans-papiers à chaque fois que tu les déplace », « notre métier autorise l’enfermement des enfants » ou encore, « ses agents », désignant les fonctionnaires de la PAF sont « souvent familiers des idées racistes ». Devant la cour d’appel, dont le président s’est demandé si cette dernière phrase n’allait pas bien au delà de la critique d’une politique, les trois prévenus ont réaffirmé que ces tracts ne visaient pas des individus mais « des pratiques racistes qui nous semblent odieuses ». Un des nombreux membres du collectif présents dans la salle a défendu à la barre « la liberté d’expression et d’opinion ». Dans son réquisitoire, l’avocat général a quant à lui rejeté « l’exception de bonne foi » retenue par le tribunal en première instance pour justifier la relaxe. Il a notamment relevé que ce même tribunal avait reconnu que les termes des tracts « portaient atteinte à l’honneur et à la considération de la police aux frontières », ajoutant que « l’intention de provocation était contradictoire avec la bonne foi ».

« La liberté d’expression n’est pas sans limite », a t-il fait valoir, soulignant qu’à travers ces tracts, on prêtait aux agents de la PAF « un comportement qui n’a rien à voir avec la déontologie policière ». Dénonçant enfin « un discours manichéen et simpliste » qui « généralise à partir de certaines situations », l’avocat général a requis 750 euros d’amende pour chacun des prévenus. Les deux avocats de la défense se sont pour leur part attachés à démontrer la réalité des accusations proférés par le collectif. « Le délit de faciès est une réalité et une conséquence induite par la politique du chiffre, l’obligation de résultats qui amène les agents à contrôler les gens sur leur couleur de peau », ont insisté Malanie Le Verger et Stéphane Maugendre. Ce dernier a également cité plusieurs exemples de « brutalités policières » et un rapport établissant que 230 mineurs avaient été enfermés dans des centres de rétention en 2008. L’avocat s’est également étonné de la démarche initiale du ministère de l’intérieur. « Dès que la critique est trop forte, trop entendable, on vient faire feu de tout bois », a t- il lancé. « Les membres du collectif n’ont fait que soutenir les sans-papiers mais ce fait est insupportable pour le gouvernement et la politique qu’il a choisie ». La décision de la cour sera rendue le 2 mars prochain.

Le 26 000 ème expulsé ?

images Agathe Logeart, 24/12/2009

Il est malien. En France depuis huit ans. Il a un emploi stable, une famille, deux enfants nés ici. Et risque à chaque instant d’être arrêté et renvoyé en Afrique. Derrière la « politique du chiffre » menée par Brice Hortefeux, dont l’objectif est d’atteindre 26 000 reconduites à la frontière d’ici au 31 décembre, il y a des gens ordinaires. Des vies précaires. A travers l’histoire d’Amadou, Agathe Logeart raconte l’existence à la fois banale et singulière de ceux que nous croisons sans les voir : les clandestins

La nuit est tombée. Seul, le grand écran du télé-viseur allumé en permanence éclaire le salon. Diaraba (1) donne le sein au tout petit Issa, qui vient d’avoir 1 mois. Ismail, 2 ans, grimpé sur la table basse, fait le pitre en grignotant un gâteau. Les quatre aînés, deux filles et deux garçons, assis sur des fauteuils juponnés d’un tissu bleu fané, ont l’air d’attendre un signal. Sur le papier peint déchiré où brillent encore quelques paillettes, un cafard cavale en solitaire. L’odeur du ragoût qui bouillonne dans la cuisine a envahi l’appartement. Quand ils entendent le bruit de la clé dans la serrure, quand ils le voient entrer, si carré dans son blouson beige, les bras chargés de sacs de courses, ils ont tous le même sourire léger, pudique. Quelque part, dans cette cité sans histoires d’une banlieue parisienne, une nouvelle fois, une fois encore, « Tonton », comme disent les grands, est bien rentré à la maison.

Amadou D. est un clandestin, un travailleur sans papiers. « Le premier jour du quatrième mois de 2001 », il est arrivé de Bamako, au Mali, à l’aéroport « de Charles de Gaulle », en costume et pardessus, avec une paire de chaussures de rechange, deux jeans et quelques chemises dans un petit sac. La police de l’air et des frontières n’a rien trouvé à redire à son « visa d’homme d’affaires » qui précisait qu’il souhaitait se rendre en Espagne. «J’ai vu qu’il y avait écrit “Sortie” et je suis sorti. » Paris est là, froid, inconnu, si étrange… Un cou¬sin qui travaille chez Citroën le conduit dans un foyer de travailleurs immigrés, où il peut dormir gratuitement sous le lit d’un autre, comme tous ceux qui n’ont pas encore de travail. Deux jours plus tard, il prend le train gare d’Austerlitz pour le sud de l’Espagne, direction Alméria, où il a entendu dire que les autorités fer-ment les yeux sur ces milliers de clandestins venus cueillir ces tomates trop vertes qui poussent en cage sous des kilomètres carrés de serres en plastique. Faute d’argent, il n’a pas dépassé la Galice, et a dû rebrousser chemin.

Au Mali, Amadou, qui ne parlait alors que le bambara, avait suivi les cours du soir de la mission catholique. Appris l’arithmétique, l’algèbre, la chimie, le français. Il avait passé avec succès le concours de gendarme. Mais son père, marchand de kola, cette noix au goût âpre qui sait si bien repousser la faim, trouvait que gendarmerie et islam ne faisaient pas bon ménage. Alors Amadou était devenu négociant en métaux. Il prenait l’avion pour le Nigeria, achetait le nickel et l’aluminium à la tonne. « Mais je n’avais pas assez de capital pour développer ce commerce. » Retourner à la terre ? « Impossible, je ne suis pas d’une famille de cultivateurs. » Amadou s’est dit qu’il n’avait plus d’avenir au Mali. «J’avais 45 ans. J’étais divorcé, je n’avais pas eu d’enfants. Rien ne me retenait. J’ai décidé qu’il fallait attacher ma ceinture et m’accrocher. Partir pour trouver un travail pénible qui ne serait pas convoité par d’autres. Je voulais une place pour tenir debout, et ne pas être un homme couché. C’était cela mon totem. »

Depuis 2001, il a toujours travaillé. Ce n’est pas si compliqué de gruger quand tout le monde y trouve son compte. D’abord, le copain en règle prête, ou plutôt loue, ses papiers et prélève une dîme de 150 euros par mois sur un salaire de 1 500.

Parfois, dit Amadou, « trois ou quatre personnes travaillent sur un seul papier en règle.

L’État encaisse les cotisations, les impôts pour chacun de ceux qui travaillent. C’est rentable, non ? ». Les boîtes d’intérim, censées s’assurer de la validité des cartes de séjour, ferment les yeux : « Elles disent aux patrons : on a du boulot, on le donne. On n’est là pour faire le travail des préfectures et vérifier les papiers. » Les critères d’embauche ? « Si ta tête plaît, on te demande ce que tu sais faire et si tu as mal au dos. Si tu dis que tu n’as pas mal au dos, on te répond qu’on va t’appeler. Tu donnes le numéro de portable de quelqu’un que tu connais et qui est dans une meilleure situation que toi, et tu es sûr que ça va sonner. » Parfois, l’Inspection du Travail découvre la supercherie. «Alors le chef de chantier te dit de ne pas venir le lendemain. Et puis il te rappelle à la rescousse, parce que sinon il ne trouve pas d’ouvrier. » Pour le salaire, on s’arrange : « Ils savent bien que tu travailles avec les papiers de quelqu’un d’autre : ils voient les photos quand même, et les âges, qui ne correspondent pas. Ils te paient comme ils veulent, parce que tu ne peux pas protester. Ils font les chèques sans le nom, et on les met sur le compte de quelqu’un qui prend son pourcentage aussi quand tu veux toucher tes sous. Ce n’est pas un cadeau du ciel, juste pour être gentil. »

Amadou est payé comme manœuvre. Mais il est aussi carreleur, maçon, électricien. Il travaille bien et ne coûte pas cher. Il se cache au fond des camion¬nettes qui le conduisent sur les chantiers, et ne fait
jamais parler de lui. Quand il faut travailler le dimanche ou les jours fériés, dépasser les horaires ou rendre des services, il dit toujours oui, alors c’est bien commode. Au foyer où il a habité pendant plus de quatre ans, il a aussi vite appris les règles. Dans une chambre de quatre, on met trois matelas par terre. Et on verse un loyer au « propriétaire du lit » – qui sou¬vent n’habite plus là depuis des années – jusqu’à 230 euros par mois. Longtemps, le week-end, pour ne pas devenir fou (il dit : « pour refroidir l’esprit »), Amadou s’est rendu chez un cousin éloigné, qu’il appelait «petit frère », avant de retourner sur ses chantiers, dans l’aube des petits matins. Cela aurait pu durer ainsi toute une vie, qui n’aurait pas été la vie. Et puis Amadou, un jour, a rencontré Diaraba.

Diaraba est une très grande et très belle femme peule. Quand elle met du fard sur ses lèvres, sa bouche est une fraise que l’on aimerait croquer. Quand elle rit, c’est tout le bonheur du monde qui chasse les tristesses et les peurs. Elle a l’autorité des femmes qui se sont beaucoup battues pour ne rien devoir à personne. D’abord, elle s’est méfiée d’Amadou le clan¬destin. Il y a tant de sans-papiers qui recherchent une femme en situation régulière. .. Diaraba est née dans un bourg du Sénégal oriental. Elle n’a presque jamais vécu avec son père, parti en France faire le cheminot, avant de perdre deux doigts dans un accident du travail et de finir sa vie professionnelle chez un constructeur automobile. Il a toujours habité dans un foyer de la région parisienne et ne revenait au village que pour faire un enfant, pendant les congés du mois d’août. Quand on l’a mariée, à 16 ans, elle pensait qu’elle resterait au Sénégal, comme sa mère. Son mari, qui travaillait en France, serait un parent lointain, et viendrait de temps en temps arrondir son ventre. Mais, d’une génération l’autre, les mœurs avaient changé et le regroupement familial s’était mis à exister.

C’est comme ça, à 18 ans, qu’elle s’est un jour retrouvée dans un petit deux-pièces du 19ème arrondissement de Paris, ne parlant pas un mot de français. « Pour aller à la boulangerie, j’ai appris par cœur : “Bonjour madame, je voudrais une demi-baguette de pain!’C’était mes premiers mots de français. » Elle ne savait pas qu’il y avait « des médicaments pour ne pas avoir d’enfant. » Quatre sont nés, en rafale. Français, parce que nés en France, comme le permettait alors la loi. Tout allait presque bien. «En ce temps-là, dans le métro, les gens t’arrêtaient pour te complimenter sur ton joli boubou. On ne sentait pas le racisme, les mauvais regards. » Elle a appris le français. Obtenu sans difficulté sa carte de séjour de dix ans, aisément renouvelable. Trouvé du travail dans une grande entreprise, où elle dirige une équipe de nettoyage. Elle est même devenue déléguée syndicale. Son mari était gentil, les enfants allaient bien. Au quatrième, il y a vingt ans, toute la famille est allée s’installer en banlieue, dans ce quatre-pièces qui lui paraissait alors immense et où elle vit toujours. Et puis elle a appris ce que son mari faisait de leurs économies : l’argent mis de côté pour bâtir un jour une grande maison en dur au pays, il l’avait donné en cachette à une femme qu’il avait épousée au Sénégal, sans la prévenir.

Être une coépouse ? Pas question. Diaraba met le bail de l’appartement à son nom. Clôture le compte joint. Se fait verser les allocations familiales. Demande et obtient le divorce pour faute. Jamais elle ne touchera la pension alimentaire que son ex-mari est condamné à lui verser. Tant pis. Elle s’en sort, sans homme. Et les enfants marchent droit. Aïssata, 24 ans, l’aînée, a milité dans le comité local de soutien à Barak Obama et soutenu le candidat socialiste aux dernières municipales. Elle rêve de devenir hôtesse d’accueil et enchaîne les boulots les plus durs pour aider sa mère.

Ramata, 22 ans, est animatrice dans une école et veut passer le concours d’éducatrice spécialisée. Saïdou, 21 ans, rêve d’être chef d’entreprise. Pour le moment, on lui propose des formations de cariste ou de manutentionnaire. Ibrahim, 19 ans, galère un peu en bac pro de travaux publics.

Quand leur mère leur a présenté Amadou, tous les quatre, ils l’ont bien regardé. « On n’a pas vu un bandit, mais un homme travailleur, très gentil avec maman, qui était restée seule pour nous élever pendant dix ans. Quand il est entré dans notre vie, on l’a tout de suite accepté parce que c’est quelqu’un de bon, de bosseur. Il a pris la place de notre père, qui était parti », dit Aïssata. « Le neuvième jour du onzième mois de 2005 », Amadou est venu vivre avec eux. Ismail est né un an plus tard. Et toute la famille a décidé qu’il fallait régulariser la situation d’Amadou, ce « tonton » respecté qui apportait le bonheur dans la maison. Tous les papiers précieux ont été rangés dans un gros classeur : convocations à la préfecture, au tribunal, fiches de paie, quittances de loyer, carnet de santé des enfants, badges trafiqués des entreprises d’intérim, cartes de CMU, coupons demi-tarif de solidarité des trans¬ports. Tout prouve qu’il n’a jamais quitté le territoire français et qu’il a toujours travaillé. Les enfants ont écrit de belles lettres pour dire aux juges qu’ils vou¬laient qu’Amadou remplace le père qu’ils n’ont pas eu. Ramata dit qu’elle est, comme Sarkozy, «pour l’immigration choisie ». Mais elle aimerait bien que la France choisisse Amadou. « Mon père était en règle, et ça a servi à quoi ?

Le 22 mai 2007, la direction des étrangers de Seine-Saint-Denis a envoyé une lettre pour annoncer qu’« après un examen individuel approfondi de la situation » elle refusait d’accorder un titre de séjour « vie privée, vie familiale », car Amadou, « vivant en concubinage avec une ressortissante étrangère en situation régulière ne justifie pas d’une communauté de vie suffisante et peut poursuivre une vie familiale normale dans son pays d’origine, de sorte que la présente décision ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ». La décision est accompagnée d’une obligation de quitter le territoire français dans le délai d’un mois, au bout duquel il « pourra être reconduit d’office », c’est-à-dire expulsé. Le 16 octobre suivant, Diaraba a mis un joli tailleur brun chatoyant, tressé ses plus belles nattes, et a pris le chemin du tribunal administratif de Cergy-Pontoise, avec son bébé, son compagnon et sa fille aînée. «Il y avait une vingtaine de dossiers. Ça n’a pas duré plus de dix minutes. Le juge a dit qu’Amadou s’était accroché à moi pour les papiers. Qu’il n’était pas ici pour l’amour, pour la vie. Il a mis tous les immigrés dans le même linge sale. Je n’ai rien eu le droit de dire. Alors j’ai failli péter les plombs. » Une nouvelle fois, la demande a été rejetée. Et bien sûr la famille a fait appel…

En attendant, comme un talisman, Amadou garde précieusement au fond de sa poche une feuille de papier écorné à force d’avoir été plié et replié. C’est une lettre de la cour administrative d’appel de Versailles qui confirme à son avocat que l’affaire est pendante devant l’une de ses chambres. Si des policiers l’interpellent, au hasard d’un contrôle, Amadou espère qu’ils comprendront que tout n’est pas tout à fait fini, et qu’ils n’auront pas besoin de le placer en centre de rétention et de le renvoyer vers le Mali, « où, dit-il, je n’ai plus rien ni personne pour m’aider. Ici, tout le monde est content que je construise des murs. Mais je n’ai pas le droit de construire ma vie ».
Pour son avocat, Me Stéphane Maugendre, l’immigration par le travail (trop restrictive) ne pourrait s’appliquer à son cas. Quant au regroupement familial, Amadou serait obligé de se marier, de retourner au Mali, d’y séjourner dix-huit mois avant d’avoir une réponse : « Évidemment, la procédure n’a aucune chance d’aboutir puis qu’Amadou ne pourrait prouver qu’il dispose de ressources en France – il travaille sous une fausse identité – ni de conditions d’habitabilité suffisantes. Au fond, la seule chose qu’on lui propose, c’est le néant. Un statut de mort-vivant. » Brice Hortefeux, le ministre de l’Immigration, a annoncé qu’il espérait atteindre le chiffre de 26 000 clandestins expulsés avant la fin de l’année 2008. L’affaire paraît en bonne voie. 26 000 : Amadou, Diaraba et les grands enfants connaissent ce chiffre par cœur. Amadou pourrait-il être ce 26 000e expulsé, qui ferait un si joli cadeau de Noël au ministre ?

Il y a un mois, Issa est né. C’est un bébé très sage qui sourit tout le temps et sent bon l’huile d’amande douce. Son frère Ismail, insouciant, le couvre de bai-sers. Bientôt, eux aussi, ils apprendront à guetter le bruit de la clé dans la serrure.

OQTF : des ordonnances de tri en appel ?

Actuel Avocat, 16/12/2009

La réforme du code de justice administrative prévoit d’étendre les ordonnances de rejet des présidents de CAA aux litiges en matière d’obligation de quitter le territoire (OQTF). Une disposition qui servira à « désengorger les CAA au mépris du principe du contradictoire » selon les avocats.

La pratique des ordonnances de tri en OQTF…

Les dispositions de l’article R.222-1, alinéa 7 du code de justice administrative (CJA) permettent à certains magistrats administratifs de rejeter, par simple ordonnance, les requêtes qui comportent des moyens infondés, irrecevables et inopérants ou qui ne sont étayés d’aucun fait pertinent. Cette pratique, très utilisée dans les contentieux de masse, notamment dans le contentieux concernant les refus de séjour assortis d’une obligation de quitter le territoire (OQTF), est aussi connue sous le nom d’ « ordonnance de tri », très pratiquée à Paris. Les avocats spécialisés dans la défense des droits des étrangers déplorent que ces ordonnances de tri, qui servaient à l’origine à écarter des requêtes entachées d’irrecevabilité manifeste, soient devenues de véritables outils de gestion des dossiers.

« Certains dossiers de confrères très sérieux, très charpentés, étayés de nombreux arguments et de nombreuses pièces, sont écartés par le tribunal sans aucun débat, et c’est scandaleux. Une importante proportion de ces ordonnances de rejet est d’ailleurs annulée par la cour administrative d’appel », indique Vanina Rochiccioli, présidente de l’association des Avocats pour la défense des droits des étrangers.

étendue aux CAA

Le projet de décret portant réforme du code de justice administrative contient une disposition créant un nouvel article R. 222-34 du CJA qui permettra désormais aux présidents des cours administratives d’appel (CAA) de rejeter, par voie d’ordonnance, « les requêtes qui ne sont manifestement pas susceptibles d’entraîner l’infirmation de la décision attaquée ». Cette faculté, déjà offerte de manière générale aux présidents de CAA par l’article R. 222-33, est ici expressément étendue aux litiges portant sur une décision prise en application du I de l’article L. 511 -1 du CESEDA, soit les OQTF. « C’est une catastrophe! », estime Vanina Rochiccioli. « C’est l’extension des ordonnances de tri en appel. Les étrangers qui auront vu leur dossier rejeté par ordonnance devant le tribunal pourront voir leur dossier rejeté par ordonnance en appel également ».

Réactions défavorables

« Ordonnance de tri sur ordonnance de tri ne vaudra pas, ne peut pas valoir », s’insurge Stéphane Maugendre, président du Groupe d’information et de soutien des immigrés (GISTI). « L’objectif de cette réforme est de désengorger les CAA à moindres frais, au mépris du principe du contradictoire » analyse l’avocat. « Cette pratique des ordonnances de tri, si elle est étendue en appel, sera contraire à tous les principes d’accès à la justice, aux dispositions de la convention européenne des droits de l’homme », insiste la présidente de l’ADDE.
« Le droit des étrangers a toujours été un terrain d’expérimentation des réformes visant à restreindre les droits du justiciables, qui sont ensuite étendues à tout le contentieux des précaires », déplore Stéphane Maugendre.

L’Union syndicale des magistrats administratifs (USMA, minoritaire) s’est prononcée contre l’adoption de cette disposition. « Nous sommes résolument opposés à cette mesure » indique Axel Barlerin, président du syndicat. « Il s’agit clairement de mettre en place un dispositif d’admission de l’appel qui sera tranché par un juge unique et permettra au contentieux des OQTF d’échapper à la collégialité ».

Hommage au voyant tué à Livry-Gargan

12/12/2009

Deux cents personnes se sont rassemblées, hier, huit jours après la mort de M’Bemba, 56 ans, assassiné en pleine rue de deux balles d’un fusil de chasse.

Près de deux cents personnes ont participé, hier matin à Livry-Gargan, à un hommage rendu sous forme de marche silencieuse à M’Bemba G., 56 ans, assassiné jeudi 3 décembre en pleine rue. Le cortège est parti de l’endroit où la victime a été abattue par deux balles tirées d’un fusil habituellement utilisé pour la chasse aux sangliers.

Sa famille et ses proches cherchent maintenant à comprendre pourquoi un tel drame a pu se produire.

« Dieu punira les assassins de mon père »

Salim, l’un des fils de la victime, est à l’origine de cette marche. « Mon père était un voyant médium qui travaillait depuis trente ans et qui n’a connu qu’un seul litige, il y a très longtemps, lâche-t-il. Il était arrivé en France il y a vingt-trois ans et regardez aujourd’hui : plus de 200 personnes sont venues lui rendre hommage alors qu’il ne connaissait personne. Ça prouve qu’il avait un vrai pouvoir. » Le jeune homme ne parvient toujours pas à expliquer ce qui s’est passé. « J’étais dans la maison au moment où il a été tué, se souvient-il. J’ai entendu un ou deux coups de feu. J’ai descendu les escaliers et j’ai vu ma mère hurler dans la rue, à coté du corps de mon père. Mes frères et sœurs étaient là aussi. J’ai fait rentrer tout le monde et on a appelé les pompiers. Je suis anéanti et je crois que je ne réalise toujours pas ce qui s’est passé. »

Pour autant, Salim laisse la justice travailler. « La vengeance n’est pas une solution, assure-t-il. Mon père et moi sommes très croyants. Dieu punira ses assassins. » Une attitude confirmée par le conseil de la famille, Stéphane Maugendre. « Le fait d’avoir décidé d’engager un avocat prouve que la famille a confiance dans la procédure judiciaire et ne cherchera pas à faire justice elle-même », insiste-t-il.

L’enquête s’annonce difficile car l’homme était particulièrement discret. M’Bemba avait installé son cabinet de voyance à Bondy. Dans l’immeuble, peu de gens connaissaient son métier. « Il n’y avait pas de panneau annonçant son activité, ni dehors ni sur la porte », détaille une voisine. Même topo au bar situé au pied de l’immeuble. « Il nous faisait un signe de la main en arrivant et en repartant mais il n’est jamais rentré », témoigne le gérant. Côté enquête, la procédure ne fait que débuter. Jeudi, une information judiciaire a été ouverte pour assassinat et un juge d’instruction nommé. La famille du défunt est en train de se constituer partie civile. Lors de l’autopsie, deux plaies ont été découvertes, dont l’une à bout touchant, c’est à dire que l’arme était directement appuyée sur la victime.

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Abrogation sinon rien

logo-of-274x120 Pierre-Marie Lemaire, novembre 2009

Pour Stéphane Maugendre, président du Gisti, la circulaire adressée aux préfets et aux procureurs ne résout rien.

« Toute personne qui aura, par aide directe ou indirecte, facilité ou tenté de faciliter l’entrée, la circulation ou le séjour irréguliers d’un étranger en France sera punie d’une peine d’emprisonnement de cinq ans et d’une amende de 30 000 euros. » Cet article L622-1 du Ceseda (Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile) a été rebaptisé « délit de solidarité » par les as¬sociations de soutien aux étrangers qui en demandent l’abrogation. Le ministre de l’Immigration, Éric Besson, s’y refuse, affirmant qu’il s’agit là d’un élément essentiel de la lutte contre les filières d’immigration clandestine.

Mais il est prêt à élargir la portée de l’article L622-4 qui prévoit une immunité humanitaire pour les bénévoles des associations lorsque l’aide apportée aux sans-papiers est justifiée par « un danger imminent ou actuel » ou une menace sur sa vie ou son intégrité physique. C’est le sens d’une circulaire adressée aux préfets (la même a été envoyée aux parquets par la ministre de la justice) qui leur demande d’« interpréter largement » cette notion de danger en l’étendant aux actions qui n’ont « d’autre objectif que d’assurer des conditions de vie dignes et décentes à l’étranger en situation irrégulière ».

Stéphane Maugendre, président du Gisti (Groupe d’information et de soutien des immigrés) donne son point de vue.

« Sud Ouest ». Cette circulaire marque-t-elle une avancée ?

Stéphane Maugendre. Absolument pas, elle ne changera rien. Ce que les associations réclament, c’est l’abrogation pure et simple de l’article L622-1qui sert toujours à inter-peller, placer en garde à vue, pour-suivre et condamner des bénévoles. La semaine dernière encore, une infirmière du Pas-de-Calais a été arrêtée avec sa fille et un ami parce qu’elle hébergeait un jeune Afghan qu’elle considère un peu comme son fils. L’immunité humanitaire n’existe pas. Le seul fait d’aider des étrangers en situation irrégulière nous met hors la loi. La CNCDH (Commission nationale consultative des droits de l’homme) s’est prononcée pour l’inversion du processus légal : l’immunité doit être la règle et les poursuites l’exception.

La circulaire alerte également préfets et procureurs sur le « caractère inopportun » des contrôles de police là où les associations humanitaires interviennent…

Il est de tradition républicaine et judéo-chrétienne que la police n’intervienne pas dans les lieux d’asile. Mais ce n’est plus le cas aujourd’hui. Comme il faut remplir les quotas d’expulsion, on va chercher les sans-papiers là où ils sont. C’est quand même un peu fou : on crée le problème puis on vient dire « Voyez comme on est gentils, on ne le fera plus!».

Avec le débat sur l’identité nationale, les questions sur l’immigration refont surface…

Je trouve l’ambiance extrêmement inquiétante. Comme les élections approchent, on remet l’immigration en avant pendant que Sarkozy va dans le « 9-3 » parler de sécurité. L’affichage électoraliste ne trompe personne.

Un débat sur l’identité nationale ne me choque pas, à condition qu’il ne soit pas tronqué. Là, on le fait tourner autour de la communauté nationale menacée par des corps étrangers. J’ai cosigné une tribune libre dans « Le Monde » qui dénonce la démagogie xénophobe qui le sous-tend.

« Le gouvernement compte sur la délation pour empêcher le travail des sans-papiers »

Propos recueillis par Julie de la Brosse ,

Alors que l’opposition exige la régularisation massive des sans-papiers, le gouvernement continue de durcir sa politique. Xavier Darcos, vient d’annoncer une série de mesures pour limiter le travail illégal. La réaction de Stéphane Maugendre, le président de GISTI.

Que pensez-vous de la fermeté affichée dimanche par Xavier Darcos à l’encontre des employeurs de sans-papiers ?

Il s’agit d’un effet d’annonce censé légitimer la politique de l’immigration du gouvernement. Depuis quelques mois, ce dernier, par des propositions de lois, a fait naître l’espoir d’une régularisation chez les travailleurs sans-papiers mais sans concrétisation, ce qui a provoqué les grèves de ces dernières semaines. Parallèlement à ça, le ministre du travail, Xavier Darcos a donc fait une grande annonce pour démontrer sa fermeté à l’égard des méchants employeurs de sans-papiers… Cela tombe à pic, puisque dans quelques semaines Eric Besson annoncera la régularisation de quelques-uns de ces travailleurs. Fermeté d’un côté, humanité de l’autre, cet affichage permet surtout d’éviter la question de la régularisation massive…

Est-ce vraiment la solution la plus adaptée ?

C’est la seule manière de lutter efficacement contre les employeurs indélicats et d’empêcher qu’ils détournent la loi. Le problème c’est que personne n’a intérêt à cette régularisation. Ni le gouvernement puisque une grande partie de ces personnes sont déclarées, ont des fiches de paye, cotisent et ne toucheront jamais rien notamment de la sécurité sociale. Ni les entreprises, parfois parmi les plus grosses françaises, qui se servent de ces personnes corvéables à merci, généralement moins bien payées et qui ne font jamais valoir leur droits.

Les entreprises sont vraiment des « exploiteurs » comme le dit Xavier Darcos ?

Peut-être pour certaines, mais là n’est pas vraiment la question. En effet, il y a très peu d’entreprises qui n’emploient que des sans-papiers. La plupart d’entre elles emploient en grande majorité des gens en situation régulière. Tout le monde sait que des sans papiers ont participé à la construction du pont de l’île de Ré ou que deux Maliens ont été employés dans la résidence secondaire de la présidence française de la république. L’hypocrisie va encore plus loin puisque si ces personnes viennent travailler en France c’est parce qu’il y a du travail pour elles. En effet les postes qu’elles occupent sont dans une grande majorité des métiers délaissés par la population française.

Si jamais une réglementation voyait le jour, et que le gouvernement décidait de fermer toutes les entreprises employant des sans-papiers, lesquelles seraient les plus touchées ?

Les petites entreprises de quelques salariés. Et pour cause, on ne fermera jamais une entreprise de 400 personnes qui emploie 2 ou 3 clandestins. Politiquement c’est impossible, surtout quand dans le même temps on ne parvient pas à limiter les plans sociaux et les licenciements massifs.

Comment les entreprises peuvent-elles savoir qu’elles emploient des travailleurs sans papiers?

Dans la législation actuelle, lorsqu’on engage un étranger, l’employeur doit envoyer son titre de séjour à la préfecture pour un contrôle de validité. Le problème c’est que les préfecture n’ont pas les moyens financiers ou humaines de contrôler tout ces titres de séjour. La stratégie du gouvernement est donc de faire peser sur les épaules de l’employeur la charge du contrôle de ses salariés. Les annonce de Xavier Darcos et d’Eric Besson ont donc vocation à organiser un véritable système d’autocontrôle proche de la délation. C’est d’ailleurs toute la politique de l’immigration qui est fondée aujourd’hui sur la dénonciation permanente. La preuve en est, il y a quelques mois, Eric Besson a fait passer une loi selon laquelle il serait accordée des titres de séjour aux personnes qui dénoncent leurs employeurs. Est-ce ça une bonne politique d’immigration ?

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Seuls 38% des Français revendiquent spontanément leur identité nationale

AFP, 23/11/2009

Seuls 38% des Français revendiquent spontanément leur identité nationale, tandis que 45% évoquent avant tout une appartenance locale, comme la ville, le quartier ou la région, selon un sondage TNS-Sofres à paraître mardi dans le quotidien La Croix.

Invitées à dire quelle appartenance elles revendiquent « avant tout”, les personnes interrogées sont 38% â évoquer la nationalité Française.

Une majorité des autres sondés se définissent davantage à l’échelle d’un territoire: ils disent se sentir « avant tout’ habitant de leur ville à 21%, de leur quartier à 14%, de leur région à 6% et de leur département à 4%.

Un total de 11% dit se sentir « avant tout » « citoyen du monde » et 6% « Européen ».

Invités ensuite à donner trois réponses parmi ces choix, 68% des sondés disent avoir le sentiment d’être Français. Les autres (32%) ne placent pas la nationalité dans ces trois premiers sentiments.

Les sondés sont par ailleurs 41% à estimer que c’est le « milieu social » qui « rapproche le plus les gens entre eux », 34% « le lieu de résidence (même quartier ou même commune) » et 33% « la culture ».

La langue (27%), la nationalité (10%) et la religion (6%) viennent ensuite. L’âge recueille 28% des opinions.

Interrogés sur les éléments constitutifs de l’identité française les plus importants, les Français placent au premier rang les droits de l’Homme (96%, dont 71% pour qui ils sont « très importants” et 25% « plutôt importants »), devant la langue française (95%), le système de protection sociale (94%) et « la culture, le patrimoine » (92%).

Viennent ensuite la laïcité (80%), « la capacité d’intégration des diversités culturelles et ethniques » (81%) et « l’héritage chrétien » (41%)

Sondage réalisé selon la méthode des quotas les 17 et 18 novembre auprès d’un échantillon de 1.000 personnes représentatif de la population âgée d’au moins 18 ans, interrogées en face-à- face à leur domicile.

Par ailleurs, une vingtaine de personnalités, dont le président de la Ligue des droits de l’Homme Jean-Pierre Dubois ou l’écrivain Marte NDiaye, Prix Concourt 2009, appellent dans une tribune que publie Le Monde à refuser le débat sur l’identité nationale, « posé en termes xénophobes », selon elles.

Evoquant la circulaire envoyée aux préfets par le ministre de l’Immigration, Eric Besson, qui a ouvert le débat le 2 novembre, ces personnalités dont plusieurs sociologues et juristes, estiment qu!,!on y découvre une liste de préjugés et de fausses évidences définissant par avance l’identité nationale alors que l’on prétend la mettre en débat », avec un thème central « l’étranger ».

« Refusons un débat posé en termes xénophobes », déclarent les signataires de l’appel au boycottage du débat, affirmant découvrir dans cette circulaire « tous les poncifs du discours xénophobe », condensés selon eux dans ia question suivante: « Comment éviter l’arrivée sur notre territoire d’étrangers en situation irrégulière, aux conditions de vie précaires génératrices de désordres divers (travail clandestin, délinquance) et entretenant dans une partie de la population la suspicion vis-à-vis de l’ensemble des étrangers? »

« Cette précarité serait forcément source de délinquance. C’est le vieux thème d’extrême droite, étranger = délinquance, dissimulé sous le masque de l’apitoiement sur la pauvreté », affirment les signataires

« Décidément les dès sont pipés, poursuivent-ils. H s’agit d’une manipulation et nous appelons nos concitoyens à contester ces procédés politiciens rétrogrades qui menacent davantage qu’ils ne servent la cohésion sociale en réactualisant le bon vieux manichéisme opposant deux entités mythiques: ia communauté nationale et les corps étrangers qui la menaceraient ».

Parmi les signataires de l’appel, figurent encore Stéphane Maugendre, président du Gisti (Groupe d’information et de soutien des immigrés), les sociologues Laurent Mucchielli, François Dubet, Marwan Mohammed, Véronique Le Goaziou, Claire Lévy-Vroeland, ou encore l’éditeur François Geze.

« Le gouvernement compte sur la délation pour empêcher le travail des sans- papiers »…

Soir Algérie, 23/11/2009

Alors que l’opposition exige la régularisation massive des sans-papiers, le gouvernement continue de durcir sa politique. Xavier Darcos, vient d’annoncer une série de mesures pour limiter le travail illégal. La réaction de Stéphane Maugendre, le président de GISTI.

Que pensez-vous de la fermeté affichée dimanche par Xavier Darcos à l’encontre des employeurs de sans- papiers ?

Il s’agit d’un effet d’annonce censé légitimer la politique de l’immigration du gouvernement. Depuis quelques mois, ce dernier, par des propositions de lois, a fait naître l’espoir d’une régularisation chez les travailleurs sans-papiers mais sans concrétisation, ce qui a provoqué les grèves de ces dernières semaines. Parallèlement à ça, le ministre du travail, Xavier Darcos a donc fait une grande annonce pour démontrer sa fermeté à l’égard des méchants employeurs de sans-papiers… Cela tombe à pic, puisque dans quelques semaines Eric Besson annoncera la régularisation de quelques-uns de ces travailleurs. Fermeté d’un côté, humanité de r autre, cet affichage permet surtout d’éviter la question de la régularisation massive…

Est-ce vraiment la solution la plus adaptée ?

C’est la seule manière de lutter efficacement contre les employeurs
indélicats et d’empêcher qu’ils détournent la loi. Le problème c’est que personne n’a intérêt à cette régularisation. Ni le gouvernement puisque une grande partie de ces personnes sont déclarées, ont des fiches de paye, cotisent et ne toucheront jamais rien notamment de la sécurité sociale. Ni les entreprises, parfois parmi les plus grosses françaises, qui se servent de ces personnes corvéables à merci, généralement moins bien payées et qui ne font jamais valoir leur droits.

Les entreprises sont vraiment des « exploiteurs » comme le dit Xavier Darcos ?

Peut-être pour certaines, mais là n’est pas vraiment la question. En effet, il y a très peu d’entreprises qui n’emploient que des sans-papiers. La plupart d’entre elles emploient en grande majorité des gens en situation régulière. Tout le monde sait que des sans papiers ont participé à la construction du pont de l’île de Ré ou que deux Maliens ont été employés dans la résidence secondaire de la présidence française de la république. L’hypocrisie va encore plus loin puisque si ces personnes viennent travailler en France c’est parce qu’il y a du travail pour elles. En effet les postes qu’elles occupent sont dans une grande majorité des métiers délaissés par la population française.

Si jamais une réglementation voyait le jour, et que le gouvernement décidait de fermer toutes les entreprises employant des sans-papiers, lesquelles seraient les plus touchées ?

Les petites entreprises de quelques salariés. Et pour cause, on ne fermera jamais une entreprise de 400 personnes qui emploie 2 ou 3 clandestins. Politiquement c’est impossible, surtout quand dans le même temps on ne parvient pas à limiter les plans sociaux et les licenciements massifs.

Comment les entreprises peuvent-elles savoir qu’elles emploient des travailleurs sans papiers?

Dans la législation actuelle, lorsqu’on engage un étranger, l’employeur doit envoyer son titre de séjour à la préfecture pour un contrôle de validité. Le problème c’est que les préfecture n’ont pas les moyens financiers ou humaines de contrôler tout ces titres de séjour. La stratégie du gouvernement est donc de faire peser sur les épaules de l’employeur la charge du contrôle de ses salariés. Les annonce de Xavier Darcos et d’Eric Besson ont donc vocation à organiser un véritable système d’autocontrôle proche de la délation. C’est d’ailleurs toute la politique de l’immigration qui est fondée aujourd’hui sur la dénonciation permanente. La preuve en est, II y a quelques mois, Eric Besson a fait passer une loi selon laquelle il serait accordée des titres de séjour aux personnes qui dénoncent leurs employeurs. Est-ce ça une bonne politique d’immigration ?
NOUS VOILÀ REVENU AUX HEURES LES PLUS DRAMATIQUES DE LA COLLABO.