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La directive de la honte

newlogohumanitefr-20140407-434 Annie Demont, 17/06/2008

Une délégation du RESF se rendra au parlement européen de Strasbourg à l’invitation du député André Laignel à l’occasion du scrutin sur la directive européenne dite du Retour.

Ce texte, s’il est adopté, risque d’aggraver considérablement les conditions d’arrestation, d’emprisonnement et d’expulsion des étrangers sans papiers en Europe sous prétexte de les harmoniser.

Cette délégation, composée de militants d’Ile de France et strasbourgeois sera reçue par M. André Laignel avant d’assister au vote afin de montrer symboliquement à l’ensemble des députés que des membres de la société les regardent et attendent d’eux qu’ils votent des textes respectueux des droits de l’homme et de ceux des enfants. Ce qui n’est en aucune façon le cas du texte soumis demain au parlement européen. L’ensemble des députés européens ont reçu par mail le texte de la tribune signée de Gérard Aschiéri, secrétaure général de la FSU, Francine Blanche, secrétaire confédérale de la CGT, Laurent Cantet, cinéaste, Marc Peschanski, Directeur de recherche INSERM et Aminata Traore, Écrivain et ancien ministre du Mali.

Ces personnalités condamnaient le projet de directive Retour. Elles ont été depuis lors rejointes par plusieurs dizaines de personnalités parmi lesquelles Danièle Mitterrand, Jorge Semprun, Josiane Balasko, Ariane Mnouchkine, Nancy Houston, Olivier Lecour Grand Maison, Cali.

Sans-papiers : la responsabilité de l’Europe _ Le projet de directive européenne  » retour  » qui se prépare est scandaleux}2}|] _ _ Mercredi 18 juin sera soumis à l’approbation du Parlement européen le projet de directive dite  » retour  » visant à harmoniser les conditions dans lesquelles les migrants irréguliers sur le territoire de l’Union européenne doivent être détenus et  » reconduits « . _ _ Il apparaît avant toute chose nécessaire de rappeler la réalité que recouvre l’expression pudique de  » retour « . L’expulsion est une violence qui multiplie les uns par les autres les traumatismes de l’arrestation inopinée, de l’emprisonnement, de la perte de son logement, d’une perte d’emploi, de la spoliation de la totalité de ses biens, parfois de la séparation brutale de son conjoint et de ses enfants, de la dislocation de tout lien avec son milieu et d’une reconduite contrainte, éventuellement assortie de violences. _ _ C’est une humiliation dont on ne se remet pas. Le pays dans lequel on avait placé l’espoir d’une existence nouvelle, qu’on avait parfois bataillé des années pour rejoindre, vous rejette, vous expulse et vous dépose sans bagage sur un Tarmac où personne ne vous attend. _ _ Même quand les expulsés ont des proches au pays, la honte les empêche parfois de les rejoindre : celui qui faisait vivre toute une famille est devenu une charge. Nombre d’expulsés finissent désespérés, désocialisés, à la rue… Il faut que ceux qui votent la loi le sachent. _ _ Le projet de directive européenne soumis aux parlementaires reflète en partie la brutalité du sort réservé aux sans-papiers : jusqu’à dix-huit mois d’internement pour le seul fait d’avoir franchi des frontières et de vouloir vivre en Europe ; rétention et expulsion de mineurs et de personnes vulnérables (femmes enceintes, personnes âgées, victimes de torture…) ; possibilité d’expulser des personnes vers un pays de transit, même en l’absence de lien avec ce pays ; interdiction de retour sur le territoire européen pour une durée de cinq ans de ceux ayant été expulsés ; absence d’obligation de fournir un titre de séjour aux étrangers souffrant de maladies graves ; application aux mineurs isolés de l’ensemble de ces mesures. _ _ {{UN RÉGIME D’EXCEPTION}} _ _ Officiellement, le projet de directive  » retour  » vise à encadrer les conditions de rétention et à en limiter la durée dans ceux des pays européens dont la législation tolère un internement théoriquement indéfini. Nous craignons qu’elle devienne la norme européenne sur laquelle vont être tentés de s’aligner tous les pays de l’Union. Pour preuve, l’Espagne vient d’annoncer le passage de sa durée maximale de rétention de trente à quarante jours et l’Italie de deux à dix-huit mois ! Si elles étaient adoptées, les dispositions du projet de directive  » retour  » placeraient les étrangers en situation irrégulière, même mineurs, sous un régime d’exception : internement à la discrétion du pouvoir, faiblesse des droits de la défense, bannissement. Comment concevoir qu’une institution censée incarner la démocratie à l’échelle de l’Union européenne envisage d’infliger un tel traitement à une fraction de sa population ? _ _ Davantage encore que chacun des Parlements nationaux des Etats de l’Union, le Parlement européen a une responsabilité devant l’histoire. Du fait de son existence récente, il n’a pas été mêlé aux déchirements et aux tyrannies du passé européen. Il incarne au contraire un certain idéal, en rupture avec les conflits et les dictatures qui ont trop souvent marqué l’Europe. Sous peine de disqualifier son institution, le Parlement ne doit pas adopter ce projet de directive.

Le travail social et les délits d’aide au séjour irrégulier

Par Stéphane MAUGENDRE, 28/05/2008, journée de réflexion de l’Anas, le Gisti et le Journal du droit des jeunes sur le thème :  « Travail social et contrôle de l’immigration ».

I) Les textes applicables :

  • Les articles L. 622-1 à L 622-7 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA)
  • La directive n° 2002/90/CE du Conseil de l’Union européenne du 28 novembre 2002 définissant l’aide à l’entrée, au transit et au séjour irrégulier (Journal Officiel des communautés européennes 5 Décembre 2002),
  • La décision-cadre n° 2002/946/JAI du Conseil de l’Union européenne du 28 novembre 2002 visant à renforcer le cadre pénal pour la répression de l’aide à l’entrée, au transit et au séjour irréguliers (Journal Officiel des communautés européennes 5 Décembre 2002),
  • Le Protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer, additionnel à la Convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée, adopté à New York le 15 novembre 2000 et signé par la France le 12 décembre 2000 (publié D. n° 2004-446, 19 mai 2004 : Journal Officiel 27 Mai 2004).

II) Bref historique

L’article L. 622-1 du CESEDA reprend les termes de l’article 21 de l’ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers en France.

Les textes relatifs aux délits d’aide à l’entrée, à la circulation et au séjour de l’étranger en situation irrégulière avaient déjà modifiés auparavant à de nombreuses reprises, dans le sens d’une répression de plus en plus sévère, au prétexte de l’impérieuse nécessité de lutter contre les filières d’immigration clandestine.

Depuis le début des années 2000, notre droit national commence à intégrer le droit européen et international.

L’évolution a aussi conduit à l’autonomisation des délits d’aide à l’entrée, à la circulation et au séjour irrégulier. En effet, en droit pénal français, l’aide apportée à la commission d’un délit est répréhensible et punissable par le biais de la complicité (articles 121-6 et 121-7 du Code Pénal). Toutefois la répression de la complicité nécessite l’existence de certains éléments constitutifs (exemple l’existence d’une infraction principale punissable), ce qui limite les possibilités de poursuite et de répression. C’est pourquoi le législateur, sous l’impulsion du pouvoir exécutif, a « autonomisé » les délits d’aide à l’entrée, à la circulation ou au séjour irréguliers. Ceci permet de poursuivre la complicité indirecte, la tentative de complicité, la tentative de complicité indirecte, en bref, toute personne en relation avec un sans papier.

Dernier aspect de l’évolution  : la sévérité croissante de peines sanctionnant ces délits.

III) EN QUOI CONSISTE CE DÉLIT ?

L’article L. 622-1 du CESEDA dispose :

Sera puni des mêmes peines celui qui, quelle que soit sa nationalité, aura commis le délit défini au premier alinéa du présent article alors qu’il se trouvait sur le territoire d’un État partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 autre que la France.

Sera puni des mêmes peines celui qui aura facilité ou tenté de faciliter l’entrée, la circulation ou le séjour irrégulier d’un étranger sur le territoire d’un autre État partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990.

Sera puni de mêmes peines celui qui aura facilité ou tenté de faciliter l’entrée, la circulation ou le séjour irréguliers d’un étranger sur le territoire d’un État partie au protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer, additionnel à la convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée, signée à Palerme le 12 décembre 2000.

Les dispositions du précédent alinéa sont applicables en France à compter de la date de publication au Journal officiel de la République française de ce protocole. »

  • Il s’agit d’abord d’une aide apportée à l’entrée, à la circulation et au séjour irrégulier.

L’entrée correspond au passage de la frontière, au fait de pénétrer sur le territoire d’un Etat.

La circulation et le séjour correspondent à des notions particulièrement larges qui vont d’un simple passage sur le territoire à une résidence habituelle.

Cette entrée, cette circulation ou ce séjour doit être irrégulier.

  • Il s’agit ensuite d’une aide

On peut aider de différentes façons.

  1. L’aide active

C’est le cas lorsque l’on fournit à l’étranger en situation irrégulière des moyens pour circuler ou séjourner sur le territoire.

Quelques exemples :

  • servir de prête-nom,
  • fournir un hébergement ou un logement,
  • fournir des documents administratifs falsifiés,
  • rétention de documents

L’aide par omission

Les seuls exemples de condamnations connus concernent des personnes qui se sont abstenues de fournir les documents ou les renseignements afin qu’une personne puisse obtenir sa régularisation. Il n’existe pas de cas de condamnation pour des comportements purement passifs.

L’aide « morale »

La question s’est posée de savoir si la signature d’une pétition de soutien aux étrangers en situation irrégulière entrait dans le champ répressif de l’article L. 622-1 du CESEDA.

Le ministère de l’Intérieur à une question écrite à l’Assemblée Nationale a répondu que « la signature de pétitions, manifestation de la liberté d’expression, ne saurait être assimilée à une aide directe, voire matérielle, à l’entrée ou au séjour irréguliers de ressortissants étrangers » (Rép. min. n° 38181 : JOAN Q, 16 sept. 1996, p. 4946).

Où doit-on aider pour être poursuivi?

Pour mémoire, il convient de rappeler que le fait d’aider en France l’entrée, la circulation ou le séjour irrégulier d’un étranger en France, sur le territoire d’un autre État partie, soit à la Convention de Schengen (signée à Schengen le 19 juin 1990), soit au Protocole additionnel à la Convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée, est passible des poursuites pénales de l’article L. 622-1 du CESEDA.

L’aide doit être intentionnelle

La personne poursuivie doit avoir aidé en connaissance de cause, elle doit avoir agit sciemment. C’est-à-dire que la personne sache qu’il est interdit d’aider un étranger en situation irrégulière à entrer, circuler ou séjourner en France et que cette aide doit être volontaire.

Il s’agit là de l’application d’un principe général du droit pénal français (il n’y a point de délit sans intention de le commettre, article 121-7 du Code Pénal) repris par le premier article de la directive du Conseil de l’Union européenne du 28 novembre 2002.

L’aide doit-elle être nécessairement lucrative ?

En droit on appelle cela l’animus lucri.

A la lecture de l’alinéa 1er de l’article L. 622-1 du CESEDA, il semble que la simple aide directe ou indirecte pour faciliter ou tenter de faciliter l’entrée, la circulation ou le séjour irréguliers d’un étranger suffise à la poursuite et à la condamnation.

Le CESEDA exclut donc des éléments constitutifs de cette infraction le caractère lucratif ou gratuit de l’aide.

Toutefois le droit européen (Convention de Schengen du 19 juin 1990 et directive n° 2002/90/CE du Conseil de l’Union européenne du 28 novembre 2002) invitent les États partis à la Convention ou les États membres de l’UE à instaurer des sanctions appropriées à l’encontre de quiconque aide ou tente d’aider, « à des fins lucratives » ou « dans un but lucratif », un étranger à pénétrer ou à séjourner sur le territoire d’une Partie contractante en violation de la législation de cette Partie contractante.

Ainsi, a contrario, il ne devrait pas y avoir de sanction pour l’aide à des fins non lucratives.

L’exclusion de cet élément constitutif de l’infraction et la non transposition dans le droit français de cette notion de droit européen trouvent leur fallacieux prétexte dans le fait que cela empêcherait de « poursuivre des agissements qui relèveraient par exemple de l’infiltration en France d’éléments appartenant à des réseaux d’islamistes, terroristes ou d’espionnage » et que toute « exception … risquerait d’en atténuer la portée ou d’en restreindre l’efficacité » (Th. Mariani),

L’absence de cet élément dans le droit français rend donc possible la poursuite du délit à l’aide apportée à des fins humanitaires.

IV) EXISTE-T-IL DES IMMUNITES ?

L’article L. 622-4 du CESEDA dispose :

Sans préjudice des articles L. 621-1, L. 621-2, L. 623-1, L. 623-2 et L. 623-3, ne peut donner lieu à des poursuites pénales sur le fondement des articles L. 622-1 à L. 622-3 l’aide au séjour irrégulier d’un étranger lorsqu’elle est le fait :

1° Des ascendants ou descendants de l’étranger, de leur conjoint, des frères et soeurs de l’étranger ou de leur conjoint, sauf si les époux sont séparés de corps, ont un domicile distinct ou ont été autorisés à résider séparément;

2° Du conjoint de l’étranger, sauf si les époux sont séparés de corps, ont été autorisés à résider séparément ou si la communauté de vie a cessé, ou de la personne qui vit notoirement en situation maritale avec lui ;

3° De toute personne physique ou morale, lorsque l’acte reproché était, face à un danger actuel ou imminent, nécessaire à la sauvegarde de la vie ou de l’intégrité physique de l’étranger, sauf s’il y a disproportion entre les moyens employés et la gravité de la menace ou s’il a donné lieu à une contrepartie directe ou indirecte.

La question des immunités familiales (1° et 2°) n’entre pas vraiment dans le champ de cette étude.

On peut rappeler que lors du vote de la Loi Chevènement (1998) un amendement de dernière minute avait été introduit dans le projet de loi créant une immunité pour les associations à but non lucratif à vocation humanitaire, dont la liste devait être fixée par arrêté du ministre de l’Intérieur, et aux fondations, lorsqu’elles apportaient, conformément à leur objet, aide et assistance à un étranger séjournant irrégulièrement en France. Les associations de défense des étrangers s’étaient unanimement opposées à cet amendement et, à juste titre, le Conseil Constitutionnel par une décision en date du 5 mai 1998 avait censuré cette disposition qui conférait au ministre de l’intérieur un pouvoir exorbitant.

Les dispositions du 3°, qui nous concernent plus directement, ont pour but d’édicter une immunité à l’égard des personnes qui portent secours ou assistent un étranger en situation irrégulière dont l’intégrité physique ou morale est menacée.

Mais pour bénéficier de cette immunité, il faut

que le danger :

  • menace la vie ou l’intégrité physique de l’étranger en situation irrégulière.
  • soit réel ou vraisemblable,
  • soit injuste, c’est-à-dire contraire aux règles de droit, à la loi.

et que l’aide soit :

  • nécessaire à la sauvegarde de la vie ou de l’intégrité physique de l’étranger,
  • proportionnée à la gravité de la menace,

Ainsi, l’absence dans le droit français de l’animus lucri qui rend possible la poursuite du délit à l’aide apportée à des fins humanitaires et les difficultés à remplir les conditions des immunités ne sont pas très encourageantes pour le travail social. Toutefois, il convient de rappeler quelques éléments de droit qui permettent d’affirmer que toute poursuite devra être écartée à l’égard des travailleurs sociaux.

1) Premièrement, il existe l’article 122-7 du Code pénal, sur l’état de nécessité.

2) Deuxièmement, à propos du délit d’aide au séjour irrégulier d’un étranger en France commis en bande organisée le Conseil Constitutionnel a affirmé qu’il ne saurait concerner les organismes humanitaires d’aide aux étrangers (Décision du 2 mars 2004). Ce raisonnement doit s’appliquer aussi aux travailleurs sociaux.

3) Troisièmement, à propos des immunités visées à l’article L. 622-4 du CESEDA le Conseil Constitutionnel a affirmé que cette immunité jouerait lorsque « lorsque la personne morale en cause est une association à but non lucratif et à vocation humanitaire ou une fondation apportant, conformément à leur objet, aide et assistance aux étrangers » (Décision du 5 mai 1998). Ce raisonnement doit s’appliquer aussi aux travailleurs sociaux.

4) Quatrièmement, dans cette même décision du 5 mai 1998, le Conseil Constitutionnel a rappelé, quant à l’application du principe de l’interprétation stricte du droit pénal, que lorsque  » l’aide à l’entrée ou au séjour irrégulier a été apportée par une personne morale, et plus particulièrement par une association ou une fondation, si celle-ci a agi dans un but désintéressé, … elle doit bénéficier de l’immunité pénale (…) » (F. Julien-Laferrière). Ce raisonnement doit s’appliquer aussi aux travailleurs sociaux.

5) Enfin, il faut affirmer haut et fort que :

  • l’article 1er, paragraphe 2, de la directive n° 2002/90/CE du Conseil de l’Union européenne du 28 novembre 2002 autorise les États membres à ne pas édicter de sanction au titre de l’aide à l’entrée et au transit « dans le cas où ce comportement a pour but d’apporter une aide humanitaire à la personne concernée » incitant ainsi à une véritable immunité,
  • l’article 1er, b) de cette même directive invite les États membres de l’UE à adopter des sanctions appropriées « à l’encontre de quiconque aide sciemment, dans un but lucratif, une personne non ressortissante d’un État membre à séjourner sur le territoire d’un État membre en violation de la législation de cet État relative au séjour des étrangers », excluant ainsi toute sanction pour l’aide à des fins non lucratives.
  • l’article 27, paragraphe 1, de la Convention de Schengen du 19 juin 1990 prévoit que « Les parties contractantes s’engagent à instaurer des sanctions appropriées à l’encontre de quiconque aide ou tente d’aider, à des fins lucratives, un étranger à pénétrer ou à séjourner sur le territoire d’une Partie contractante en violation de la législation de cette Partie contractante relative à l’entrée et au séjour des étrangers » excluant ainsi toute sanction pour l’aide à des fins non lucratives,

V) Quelles sont les peines encourues ?

 Les peines encourues par les personnes physiques sont :

A titre principal, cinq années d’emprisonnement et 30 000 € d’amende et de dix années et 750 000 € d’amende à en cas de circonstance aggravante (voir l’article L. 622-5 du CESEDA)

A titre complémentaire, (voir l’article L. 622-3 du CESEDA) :

  • l’interdiction de séjour pour une durée de cinq ans au plus,
  • la suspension, pour une durée de cinq ans au plus, du permis de conduire,
  • le retrait temporaire ou définitif de l’autorisation administrative d’exploiter soit des services occasionnels à la place ou collectifs, soit un service régulier, ou un service de navettes de transports internationaux,
  • la confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l’infraction, notamment tout moyen de transport ou équipement terrestre, fluvial, maritime ou aérien, ou de la chose qui en est le produit,
  • l’interdiction, pour une durée de cinq ans au plus, d’exercer l’activité professionnelle ou sociale à l’occasion de laquelle l’infraction a été commise,
  • l’interdiction du territoire français pour une durée de dix ans au plus dans les conditions prévues par les articles 131-30 à 131-30-2 du Code pénal.

Et en cas de circonstance aggravante (Voir les articles L. 622-6 et L 622-7 du CESEDA) les Peines complémentaires supplémentaires sont les suivantes :

  • La confiscation de tout ou partie des biens du condamné, quelle qu’en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis,
  • l’interdiction définitive du territoire français, dans les conditions prévues par les articles 131-30 à 131-30-2 du Code pénal.
Pour aller plus loin
Délit d'humanité : Plein droit 1995, n° 27
Juris Classeur Pénal Annexes fascicule N° 40
Dictionnaire permanent Droit des étrangers, fascicule Infractions à la législation des étrangers.
Mercuzot, L'article 21 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 : un défi aux fondements du droit : D. 1995, chron. p. 249 ; 
Julien-Laferrière Les dispositions répressives de la loi du 26 novembre 2003 : AJP 2004, n° 3, p. 96
Lochak La loi sur la maîtrise de l'immigration : analyse critique, in Immigration, intégration : Regard sur l'actualité 2004, n° 299, p. 18

« Il y a beaucoup de M. Abidar en France »

rue89-logo Anne Diatkine , 14/05/2008

Selon Stéphane Maugendre, avocat spécialisé dans le droit des étrangers, « la situation de Monsieur Abidar est kafkaïenne, mais courante ».

« Il a participé à la reconstruction de la France, il a passé beaucoup plus de temps en France que dans son pays, et pourtant il n’a aucun autre statut que la carte de résident de dix ans.

“Parmi ses enfants, on trouve un expulsé, une expulsable, une promise à la résidence si la loi ne change pas. Et son épouse n’obtient pas de visa. Il y a beaucoup de Monsieur Abidar en France.

‘On est dans la logique folle où plus monsieur Abidar s’installe en France, plus ça devient difficile de faire venir femme et enfants.

A chaque nouvelle naissance, les critères de refus sont multipliés : il faut toujours plus de mètres carrés et de revenus. Lorsqu’il vivait dans un studio, il aurait sans doute obtenu le regroupement familial. Mais on ne peut pas lui reprocher de ne pas l’avoir tenté, par souci de dignité pour sa famille, lorsqu’il jugeait son salaire et ses conditions de vie insuffisants.

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Sans-papiers : le fiasco des régularisations par le travail

Carine Fouteau

Extrait : Les salariés sans papiers poursuivent leur grève «illimitée» en Ile-de-France. Malgré l’ampleur du mouvement, leur demande de régularisation collective adressée au ministre du Travail, Xavier Bertrand, reste sans réponse. La CGT menace d’élargir la grève à d’autres régions. Du côté des préfectures, chargées d’instruire les dossiers, on observe un certain cafouillage. Seules quelques dizaines de personnes munies d’un contrat de travail ont obtenu un titre de séjour depuis le début de l’année.

Couvertures, sandwiches et sonos: les quelque 300 salariés sans papiers d’Ile-de-France en «grève illimitée» se préparaient, ce mercredi dans la soirée, à une deuxième nuit d’occupation de leurs entreprises. Malgré le rassemblement organisé dans l’après-midi rue de Grenelle à Paris, le ministre du Travail ne les a pas reçus. C’est en effet Xavier Bertrand que les grévistes ont choisi d’interpeller pour demander leur régularisation, plutôt que le ministre de l’Immigration, Brice Hortefeux, car ils se considèrent avant tout comme des salariés dont les droits ne sont pas respectés.

A Villejuif, dans le Val-de-Marne, la centaine d’Africains occupant la Maison du nettoyage ont été rejoints par des femmes, notamment des Moldaves, …

⇒ Voir l’article

Des patrons en lutte

rue89-logo Chloé Leprince 17/04/2008

En pleine grève des sans-papiers, un chef d’entreprise veut fédérer les patrons pour faire régulariser leurs salariés.

Johann Le Goff a 32 ans et pas la moindre carte d’électeur. Même si « ça commence à le titiller ». Pourtant, en moins de 24 heures, ce patron d’une PME de câblage informatique a débarqué dans l’actualité comme une icône chez les patrons citoyens.

Depuis un mois, il tentait de fédérer des chefs d’entreprise pour réclamer d’une même voix la régularisation de leurs salariés sans-papiers, dans des secteurs où ils affirment peiner à trouver de la main-d’œuvre.

La grève de plusieurs centaines de travailleurs sans papiers, qui a démarré hier en Ile-de-France sous les hospices de la CGT et de l’association « Droits devant ! “ lui offre une tribune toute trouvée.

Difficile de recruter depuis le durcissement de la loi

En quelques semaines, Johann Le Goff a réussi à mobiliser une trentaine d’entreprises qui sont dans son cas. Depuis qu’il a lancé sa première société, il y a sept ans, le patron de Seine-Saint-Denis affirme en effet avoir ‘de plus en plus de mal à recruter des employés’, sachant qu’il tourne avec ‘une dizaine de salariés par an’.

La première fois que ce ‘non militant’ s’est posé cette question, c’était il y a quatre ans, avec un premier salarié sans papiers. Depuis, Konex, l’entreprise de Johann Le Goff, a eu recours à de nombreux intérimaires. Le jeune patron de PME n’exclue pas que certains d’entre eux aient pu travailler sous une fausse identité.

Mais la loi s’est durcie, en juillet 2007, et les entreprises sont désormais obligées d’apporter la preuve que leurs salariés sont en règle. A l’automne, Johann Le Goff a proposé à plusieurs reprises à l’un de ses hommes, un Algérien, de le titulariser. Impossible : son salarié n’avait pas de papiers.

Pour pouvoir embaucher dans les règles cet employé, le patron de Konex est allé jusqu’à prendre un avocat qu’il paye de sa poche pour faire les démarches. Son témoignage illustre l’impasse actuelle de la régularisation par le travail, pourtant vantée par le gouvernement.

Il y a quelques mois, le câbleur informatique a contacté Jean-Claude Amara et son association ‘Droits devant ! . Alors que ce dernier manifestait sous les fenêtres du ministère du Travail ce mercredi après-midi pour médiatiser la grève de travailleurs sans-papiers, il soutient l’initiative du patron de PME. Mais garde ses distances : pour lui, c’est maintenant aux patrons de prendre leurs responsabilités’ pour obtenir que le gouvernement change de braquet :

S’il ne réclame pas qu’on régularise tout le monde, Johann Le Goff, lui, souligne que la main-d’œuvre sans papiers est souvent formée et efficace. Il dit volontiers qu’il joue sur deux tableaux :

‘Il y a la question des droits de l’homme, de la dignité de nos employés ; et puis le problème économique à une époque où nous n’arrivons plus à embaucher. Les hommes politiques ne se rendent pas compte du manque à gagner que ça représente pour nous. On est dans la vraie vie.’

‘Ca n’avance plus sur les chantiers !

A ses côtés, Djamila Sarrar rebondit. Johann Le Goff ne la connaissait pas avant de lui proposer de rejoindre le réseau Patrons solidaires’ mais la jeune femme, à la tête d’une entreprise familiale de nettoyage de façades, dresse le même constat :

‘On a perdu 40% de notre chiffre d’affaires depuis décembre, parce que ça n’avance plus sur les chantiers. Depuis la nouvelle loi, trois de nos salariés ont disparu du jour au lendemain. Pour le quatrième, nous avons découvert après avoir envoyé son dossier en préfecture qu’il n’était pas du tout en règle. Nous avons été obligés de le licencier.’

La jeune patronne et sa mère soulignent que, faute de main-d’œuvre, elles assurent elles-mêmes le nettoyage sur le chantier ‘alors que c’est un métier d’homme, en hauteur, et que nous sommes censées chercher des clients, plutôt’.

Djamila Sarrar confie qu’elle rejoint le réseau parce qu’elle en a ‘ras le bol’ :

La patronne de Netexpress, l’entreprise de nettoyage, n’a pas coupé les ponts avec le salarié qu’elle a dû licencier ‘alors qu’il payait ses impôts comme tout le monde’. Ce mercredi après-midi, il est présent dans les locaux de l’entreprise familiale, à Montreuil (Seine-Saint-Denis). Il veut bien parler si on l’appelle Bouba. Il a 33 ans, était cultivateur dans son pays d’origine, la Guinée-Conakry, avant de gagner la France en 2001.

Ayant perdu deux ans plus tard son statut de réfugié, il a travaillé quatre ans chez Netexpress avec de faux papiers, ‘sans avoir prévenu ses patronnes’. Depuis son licenciement, il ne travaille plus :

‘Même le travail, tu ne peux plus trouver. Avant, c’était plus simple. Aujourd’hui, c’est devenu très difficile. Beaucoup de salariés sont licenciés. Mais, si je ne travaille pas, qu’est ce que je vais faire ? Il faut payer le loyer, manger… Il faut qu’on travaille… Sinon, on va où ?

Chez les sans-papiers, le bouche à oreille va bon train : dans certains quartiers, des sociétés d’interim se seraient spécialisées dans le placement de travailleurs sans-papiers. Par exemple, dit-on, des enseignes qui ont pignon sur rue à Paris, aux abords de la gare de l’Est ou de la gare du Nord. Maryline et Djamila Sarrar ont même entendu parler d’un tarif hors compétition, à 3,80 euros de l’heure.

Vers un nouvel esclavage’

Au Gisti, Me Stéphane Maugendre confirme qu’un des effets pervers de la nouvelle législation aura été de laisser des patrons peu scrupuleux seuls employeurs de main-d’œuvre sans papiers. L’avocat y voit carrément l’émergence d’un ‘nouvel esclavage’ :

Chez Netexpress, on termine la journée de mercredi en espérant que la médiatisation permettra de ‘faire bouger les dossiers’, à commencer par celui de Bouba. Même si Maryline s’étonne, d’un sourire ironique :

‘TF1 devait passer faire un reportage. Ils ont annulé parce qu’on ne les intéressait pas : on n’emploie plus de sans papiers. Il faut savoir ce qu’on veut ! Nous, on respecte la loi, mais on ne demande pas mieux !

Double langage et espoirs déçus

DNA_Logo 15/04/2008

Les possibilités de régularisation par le travail mises en avant par le gouvernement ont suscité chez de nombreux travailleurs sans papiers des espoirs souvent déçus, dénoncent des associations de défense des étrangers.

La loi du 20 novembre 2007 permet des régularisations sur présentation d’un contrat de travail, à condition que le recrutement se fasse dans un des « métiers en tension » dont les listes diffèrent pour les ressortissants des 10 pays nouveaux membres de l’Union européenne et pour ceux des pays tiers. Deux mois et demi après l’entrée en vigueur de ces mesures, le ministère de l’immigration a affirmé ne pas tenir à ce stade de comptabilité nationale et n’a pas souhaité faire de commentaire. « Il est impensable que les chiffres ne soient pas connus par le ministère », assure Stéphane Maugendre, avocat du Gisti, « puisque l’un des buts des mesures de régularisation annoncées est de faire sortir les sans-papiers de l’ombre pour les ficher et éventuellement les expulser comme cela a déjà été pratiqué avec la circulaire Sarkozy » de juin 2006 sur les parents d’enfants scolarisés (moins de 7 000 régularisations sur 30 000 dossiers déposés).

«Arrêté au guichet»

« Des travailleurs sans papiers se précipitent dans mon cabinet tous les jours et veulent aller à la préfecture pour se faire régulariser, nous les mettons en garde », poursuit Me Maugendre, « en leur disant qu’ils peuvent même se faire arrêter au guichet ». C’est ce qui est arrivé le 14 mars à la préfecture de Meaux (Seine-et-Marne), à un travailleur turc venu déposer une demande de régularisation, soutenu par son employeur et par un avis favorable de la Direction départementale du travail. Placé en rétention, ce sans-papiers a finalement été élargi par un juge des Libertés.

Pour Didier Inowlocki, intervenant au centre de rétention de Bobigny (Seine-Saint-Denis) pour la Cimade, cette affaire est « révélatrice du double langage du gouvernement et de la dimension de piège de ces mesures. On fait venir des dizaines de milliers de gens en préfecture mais le nombre de dossiers acceptés est dérisoire ». Dans sa circulaire du 7 janvier, le ministre de l’immigration, Brice Hortefeux, demandait aux préfets une « diligence particulière » pour les demandes de régularisation déposées par un employeur dans des secteurs « tendus » tout en écrivant que « ce dispositif couvre par définition un nombre très limité de bénéficiaires », les sans-papiers ayant, selon lui, « vocation à regagner leur pays d’origine ». La préfecture de Seine-Saint-Denis a communiqué le bilan des deux premiers mois d’application :  sur 1 600 demandes de régularisation déposées depuis janvier, pour les ressortissants européens, 285 contrats de travail sont considérés comme entrant dans le champ des dernières mesures et 257 ont été acceptés. Pour les étrangers des pays tiers, 16 contrats de travail ont été enregistrés et seuls quatre ont abouti à la délivrance de cartes de séjour d’un an.

Les régularisations par le travail suscitent des espoirs souvent déçus, selon des associations

AFP, Isabelle Ligner, 04/04/2008

Les possibilités de régularisation par le travail mises en avant par le gouvernement ont suscité chez de nombreux travailleurs sans papiers des espoirs souvent déçus, dénoncent des associations de défense des étrangers et des employeurs, parlant de « double langage » voire de « piège ».

La loi du 20 novembre 2007 permet des régularisations sur présentation d’un contrat de travail, à condition que le recrutement se fasse dans un des « métiers en tension » dont les listes diffèrent pour les ressortissants des 10 pays nouveaux membres de l’Union européenne et pour ceux des pays tiers (listes déclinées par région).

Deux mois et demi après l’entrée en vigueur de ces mesures, le ministère de l’immigration, questionné jeudi à la mi-journée par l’AFP sur un premier bilan de cette loi, a affirmé ne pas tenir à ce stade de comptabilité nationale et n’a pas souhaité faire de commentaire.

« Il est impensable que les chiffres ne soient pas connus par le ministère », assure Stéphane Maugendre, avocat du Gisti, « puisque l’un des buts des mesures de régularisation annoncées est de faire sortir les sans-papiers de l’ombre pour les ficher et éventuellement les expulser comme cela a déjà été pratiqué avec la circulaire Sarkozy » de juin 2006 sur les parents d’enfants scolarisés (moins de 7.000 régularisations sur 30.000 dossiers déposés).

« Des travailleurs sans papiers se précipitent dans mon cabinet tous les jours et veulent aller à la préfecture pour se faire régulariser, nous les mettons en garde », poursuit Me Maugendre, « en leur disant qu’ils peuvent même se faire arrêter au guichet ».

C’est ce qui est arrivé le 14 mars à la préfecture de Meaux (Seine-et-Marne), à un travailleur turc venu déposer une demande de régularisation, soutenu par son employeur et par un avis favorable de la Direction départementale du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle (DDTEFP). Placé en rétention, ce sans-papiers avait été libéré par un juge des Libertés.

Mais pour Didier Inowlocki, intervenant au centre de rétention de Bobigny (Seine-Saint-Denis) pour la Cimade, cette affaire est « révélatrice du double langage du gouvernement et de la dimension de piège de ces mesures ». « On fait venir des dizaines de milliers de gens en préfecture mais le nombre de dossiers acceptés est dérisoire », assure-t-il.

Dans sa circulaire du 7 janvier, le ministre de l’immigration, Brice Hortefeux, demandait aux préfets une « diligence particulière » pour les demandes de régularisation déposées par un employeur dans des secteurs « tendus » tout en écrivant que « ce dispositif couvre par définition un nombre très limité de bénéficiaires », les sans-papiers ayant selon lui « vocation à regagner leur pays d’origine ».

La préfecture de Seine-Saint-Denis a communiqué à l’AFP le bilan des deux premiers mois d’application: sur 1.600 demandes de régularisation déposées depuis janvier, pour les ressortissants européens, 285 contrats de travail sont considérés comme entrant dans le champ des dernières mesures et 257 ont été acceptés. Pour les étrangers des pays tiers, 16 contrats de travail ont été enregistrés et seuls quatre ont abouti à la délivrance de cartes de séjour d’un an.

« Le gouvernement ne semble pas se soucier de la survie des PME ou de la croissance puisque depuis deux mois, on oblige au contraire à licencier dans des secteurs comme le BTP où la main-d’oeuvre est déjà très difficile à trouver et nos demandes de régularisation pour des ouvriers bosniaques par exemple, sont délivrés au compte-goutte au gré des pulsions politiques », témoigne sous couvert d’anonymat un recruteur pour un groupement d’employeurs du bâtiment.

«Si un gars travaille bien, peu importe qu’il soit noir, blanc ou jaune»

 N.P., 27/03/2008

«LA CIRCULAIRE du 7 janvier ? Connaît pas. Les patrons sont perdus face à cette avalanche de textes. Par contre, dans le BTP, il y a un problème de recrutement. Alors, quand j’ai un gars qui travaille bien, peu m’importe qu’il soit noir, blanc ou jaune. Je veux juste qu’il soit compétent.»

Pour ce patron d’une entreprise du bâtiment, la législation relative à l’immigration choisie relève du casse-tête chinois. Confrontée à une demande croissante des chefs d’entreprise, la société Migration Conseil, installée à Montreuil depuis un an, organise aujourd’hui un séminaire à leur intention sur l’emploi des ressortissants étrangers. Objectif : informer les patrons des législations en cours.
Depuis juillet, les dirigeants sont tenus de vérifier l’authenticité du titre de séjour de leurs employés. Parallèlement, l’inspection du travail a renforcé ses contrôles et la menace de sanctions pénales pèse sur les contrevenants. « Un jour, la police m’a appelé sur mon portable en me disant : Vous avez un salarié clandestin caché sur le toit d’un de vos chantiers . Le ciel m’est tombé sur la tête. Pour moi, ce gars avait des papiers ! Je ne savais pas qu’il me fallait les vérifier en préfecture. J’avais le choix entre le licencier ou risquer la prison. Je m’en suis séparé. C’était pourtant un mec sympa qui bossait bien », témoigne ce patron. Depuis la circulaire du 7 janvier 2008 qui permet aux patrons de faire une demande de régularisation pour leurs employés, les demandes affluent sur les bureaux des avocats. « Beaucoup sont prêts à garder leurs employés. Mais ils ne savent pas comment s’y prendre », témoigne l’avocat Stéphane Maugendre. Reste que les chances de régularisation sont minces. Pour les recalés de la circulaire et tous ceux qui ont été licenciés, la clandestinité est souvent au bout du chemin. « Chez moi, ce gars avait des feuilles de paie. Il cotisait à la retraite, avait la Sécurité sociale, poursuit ce patron. Je l’ai croisé il y a quelque temps chez un fournisseur. Il bossait au black, sans feuille de paie, sans rien. »

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Les salariés sans papiers affluent à la préfecture

Nathalie Perrier, 27/03/2008

De nombreux étrangers ayant un emploi espèrent être régularisés. Mais bien peu pourront profiter de la nouvelle loi qui privilégie les Européens.

DES PAPIERS contre une promesse d’embauche ou un CDI. La proposition a de quoi faire rêver les milliers de sans-papiers qui travaillent en Seine-Saint-Denis, parfois avec de vraies feuilles de paie. Depuis la publication de la circulaire du 7 janvier 2008 sur la régularisation des salariés sans papiers, les demandes affluent à la préfecture de Seine-Saint-Denis.

Chaque jour, une quarantaine de dossiers sont déposés à la direction des étrangers de la préfecture de Bobigny et au bureau des étrangers de la sous-préfecture du Raincy, comme autant de bouteilles à la mer. Avec quel résultat ? Sur les 1 600 demandes effectuées, moins de 300 entrent dans le cadre de la nouvelle disposition législative.

 

Des associations s’alarment

« Deux cent cinquante-sept titres de séjour ont été accordés à des ressortissants des nouveaux Etats membres de l’Union européenne ; 4 cartes de séjour d’un an, comprenant la mention « travailleur salarié », à des salariés de pays tiers. Les 1 300 autres demandes feront l’objet d’un examen au cas par cas », précise la préfecture.

En clair, mieux vaut être « néo-européen » qu’africain… Les non-Européens ne peuvent en effet espérer être régularisés que s’ils exercent l’un des 29 métiers répertoriés dans la circulaire du 20 décembre .

Autrement dit, il leur faut être géomètre, chef de chantier, dessinateur en électricité et électronique ou encore informaticien expert. Les métiers du BTP, de la restauration, de l’hôtellerie sont par contre réservés aux Roumains, Bulgares, Polonais, Slovènes, etc.

« Ces listes sont irréalistes ! Les métiers accessibles aux salariés non européens sont des métiers qualifiés qui ne correspondent nullement aux postes non qualifiés qu’ils occupent dans la réalité. On remplace une main-d’oeuvre par une autre, en fonction de son origine », résume Violène Carrère, du Gisti (Groupement d’information et de soutien des immigrés).

Dès la promulgation de ce texte, des associations avaient mis en garde les salariés en situation irrégulière, tentés de se ruer vers les préfectures. « Nous soupçonnions un piège et nous avions raison, dénonce Stéphane Maugendre, avocat et vice-président du Gisti. Les sans-papiers qui se sont précipités en préfecture ne seront, pour la plupart, pas régularisés parce qu’ils ne rentrent pas dans la bonne case. Par contre, ils sont désormais fichés. » Une situation qui rappelle celle des milliers de familles déboutées dans le cadre de la circulaire de juin 2006 sur les parents d’enfants scolarisés.

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Police-state measures against immigrants provoke resistance

title A.Prakash and A.Lerougetel, 16/01/2008

French government measures to recruit networks of informers in the public services to aid the police hounding of illegal immigrants, or sans papiers, and which oblige staff to become “police auxiliaries,” are creating alarm and resistance among these workers. Simultaneously, the criminalization of those giving aid and assistance to sans papiers is advancing rapidly.

The French state stepped up its attack on immigrants after the minister of immigration and national identity, Brice Hortefeux, fell behind on the target for deportations. By the end of November 2007, “only” 18,600 people had been deported, falling behind on the goal of 25,000 for the year. The final total for 2007 is officially 23,186 expulsions, and the target of 25,000 has again been set for 2008.

An earlier decree on May 11, 2007, applying an immigration law passed in July 2006, requires staff working for the ANPE national employment agency and the UNIDIC national unemployment benefit organisation to systematically send, every day, copies of immigrant job and benefit applicants’ residence permits to the local préfecture (national law enforcement agency).

Previously, it was the task of employers, not ANPE staff, to verify the legal status of employees. Now, benefit office staff cannot give allowances due to unemployed immigrant workers without the authorisation of the préfecture.

Requiring the staff who process job applications to carry out discriminatory practices, such as setting up special files for foreign workers and making copies of their ID documents, contravenes Convention 97 of the International Labour Organisation (ILO).

Unions representing the work inspectorate have made an indefinite strike call to staff working for “the work inspection services in all the departments of France and its overseas territories as soon as they are requested to participate in actions involving the monitoring of foreigners’ illegal work.” The purpose of the action would be to protest against tasks imposed on them by the government for the purpose of deporting sans papiers.

However, the trade unions in France have shown themselves unable to defend the interests of any French workers. In November, the unions played a critical role in the betrayal of the French rail strike, which was quickly followed by a revolt of immigrants in the Parisian suburbs. The French unions made no attempt to come to the defence of the immigrant youth, who rioted following the deaths of two teenage boys in a collision with a police car.

The revolt of immigrant youth was followed by a wave of repression and arrests. The only response of the French state to the poor social conditions faced by immigrant workers is the stepped-up use of the police, and it is within this context that the new repressive measures must be seen.

The lack of any determined or concerted action by the unions, none of which support the right of all immigrants to enjoy full citizenship in France, against the increasingly restrictive and discriminatory immigration policies of successive French governments (of both the right and the “left”) since the war, rules out any credence in the effectiveness of their protests. None of them have exposed or mobilised against the anti-immigrant policies of the Socialist Party and the Plural Left Government of Lionel Jospin (1997-2002), a coalition of the Socialist Party, the Communist Party and the Greens.

Anti-immigrant surveillance networks

One of the more sinister elements of the new anti-immigrant measures is the setting up of groupes de référents (referral groups) answering to the PAF (Border Patrol Police) in public and social service departments. These referral groups will effectively involve the covert surveillance of immigrants, public service workers and humanitarian support groups and, by extension, the whole population. There is also a draft bill enabling the police to introduce spyware into computers used by sans papiers aid organisations.

Last year, the Haute-Garonne department in southwest France set up a referral group on identity fraud for its staff and in the social services. Staff at several agencies, including those that administer social security and health benefits, are expected “to participate in training organised by the PAF frontier police,” according to a memo from the local government.

An extension into state enterprises and public services (education, health, municipal government) is also planned. An Haute-Garonne préfecture memo makes clear that the aim is to set up a network on the pretext of a “struggle against fraud committed by foreign nationals.”

Government employees, who never saw their job as assisting in the police surveillance and repression of foreigners, are expected to aid in the identification of undocumented immigrants. Targeted immigrants include those under an expulsion order, those suspected of housing fraud, and those engaged in the “cover-up” of illegal situations.

The “struggle against fraud” in Haute-Garonne is a pretext for covert surveillance that breaks the rules of confidentiality. It sets up a system for the exchange of information between all the administrative services. The police will receive information from the whole of the staff of government and public services in the department.

A memo, dated October 10, 2007, circulated by the state Direction de la réglementation et des liberté publiques (Administration of Regulation and Public Freedoms), on the pretext of efficiency, seeks the extension of the files to a national level.

A petition circulated by the staff unions in the social and municipal services notes that the procedure “flouts … the obligation of professional secrecy on government workers, which protects the clients of the public services from the passing on of confidential information.”

These developments come after a series of legislative measures that massively increase the repressive powers of the state: the Perben II law, the anti-terror law and the law on the prevention of delinquency, the Equal Opportunities law and several immigration laws, all of which give increasingly vast powers and duties of surveillance to municipal and local officials over their populations.

An article posted December 22 on the Rue89 site gives an account of a bill to be placed before parliament in January giving greatly enhanced powers of electronic surveillance to the police: the Law of Orientation and Programming of Internal Security.

Contacted by journalists, the Ministry of the Interior was tight-lipped on details. However, some information has been leaked revealing that “the police would be authorised to use ‘connection keys’ in computers, not only against the criminal underworld, but also against those helping an undocumented immigrant to get into the country and to stay,” Rue89 reported. These electronic spies can monitor emails and Skype conversations and other computer communications.

The article warns that the legislation is not just directed at “people smugglers” but threatens “associations like RESF [Education Without Borders Network], which help and sometimes hide the undocumented parents of schoolchildren.”

The vice-president of the Group for Information and Support for Immigrants, Stephane Maugendre, points out, “There is a tendency towards the general criminalisation of support for sans papiers.” He adds: “This measure would be one more step. Now, the law on helping illegal immigrants to stay is so vast that it involves as much the uncle who has his nephew to stay for a few days, the little people smuggler, and the voluntary associations which aid the sans papiers as it does the big traffickers in immigrants.”

He stressed that if, up to now, no parent associated with RESF has yet been prosecuted, the pressure is mounting.

The aim of this obsessive offensive against immigrants is to create a climate of terror that will dissuade all but the “chosen” immigrants—whose qualifications will be useful to French capitalism—from trying to get to France. It also creates a layer of second-class citizens with precarious residence rights who can be used as a scapegoat for the social problems created by the right-wing policies of President Nicolas Sarkozy.

What emerges most clearly is that any attack on the most vulnerable sections of the working class and the youth undermines the rights of all and should be opposed by the entire working class.

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