Villepinte : une marche contre les « violences policières »

index Luc Bronner, 31/05/2008

A Villepinte, en Seine-Saint-Denis, dans le quartier de la Fontaine-Mallet, les murs délabrés témoignent de la permanence des tensions entre habitants et policiers. Des « nique la police » récents voisinent avec des tags similaires, à moitié effacés, issus des générations précédentes. Une colère qui a pris la forme d’une marche vers le commissariat de police, samedi 31 mai : soutenus par des associations locales et nationales, dont le MIB et les Indigènes de la République, plusieurs dizaines de jeunes de la cité ont manifesté pour réclamer l’arrêt des « brutalités policières”.
Un incident survenu le 8 mai est à l’origine de cette mobilisation. Lamba Soukouna, 29 ans, affirme que cette nuit-là des policiers l’ont frappé avec la crosse d’un flash-bail puis à coups de pieds, occasionnant six jours d’interruption temporaire de travail (ITT). Lejeune homme, décrit comme très calme » et « respecté » par le premier adjoint au maire (PS), Christophe Borgel, a déposé plainte devant l’inspection générale des services (IGS), la »police des polices ».

Selon ses déclarations, Lamba Soukouna, qui souffre de la drépanocytose, une maladie génétique grave, rentrait chez lui lorsque des policiers seraient arrivés en courant, dispersant le groupe de jeunes au pied de son immeuble – scène que confirment plusieurs témoins. « Dans le hall, ils m’ont attrapé par le bras et jeté contre le mur, raconte-t-il. Puis ils m’ont donné des coups de crosse sur la tête, et je suis tombé par terre. Ils ont continué avec des coups de pied. J’ai crié, mais ils m’ont dit « ferme ta gueule ». » Les policiers l’auraient ensuite laissé partir.

Le visage en sang, accompagné d’un proche, Lamba Soukouna se serait rendu à la gendarmerie pour déposer plainte. Sur la route, il aurait croisé les mêmes policiers, en intervention sur un accident, et se serait arrêté pour essayer de les identifier. Selon lui, ils l’auraient alors interpellé pour éviter le dépôt de plainte.

Cette version est contestée par la police. Selon le parquet de Bobigny, les policiers ont en effet expliqué avoir été pris à partie par Lamba Soukouna, qui aurait ensuite résisté à l’interpellation. Ses blessures, notamment une plaie au front, s’expliqueraient par le fait qu’il ait tenté de se débattre. Les policiers l’ont placé en garde à vue pour « outrages », « menaces » et « rébellion ».

La thèse est jugée peu crédible par l’avocat du plaignant, Me Stéphane Maugendre, qui insiste sur son état de santé précaire. Régulièrement hospitalisé – près d’une trentaine de fois sur les trois dernières années -, le jeune homme pèse moins de 50 kg pour 1,78 m. A cause d’opérations à la hanche, il ne peut pas courir et se déplace difficilement.

Le quartier de la Fontaine-Mallet est décrit comme « sensible » par les policiers. Le 24 avril, un véhicule de police avait été la cible d’une embuscade provoquée par une vingtaine de jeunes cagoulés. Des pavés avaient été jetés sur le pare-brise, blessant sérieusement au visage le conducteur. Selon une source policière, celui-ci s’est vu reconnaître quinze jours d’ITT.

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