«Toute personne qui aura, par aide directe ou indirecte, facilité ou tenté de faciliter l’entrée, la circulation ou le séjour irréguliers, d’un étranger en France sera punie d’un emprisonnement de cinq ans et d’une amende de 30.000 euros» stipulait jusqu’à présent la loi française sur l’entrée et le séjour des étrangers.
Les choses vont probablement changer, a indiqué le 8 octobre le magazine web Youphil, depuis que le ministre français de l’Intérieur Manuel Valls a prévu de supprimer le «délit de solidarité».
Jusqu’à présent, «aider un sans-papiers en lui permettant simplement de recharger son téléphone ou en lui donnant à manger» était parfaitement proscrit, a ajouté Youphil.
Le nouveau projet de loi de Manuel Valls sur l’immigration, qui devrait être votée avant la fin de l’année, aura vocation à «élargir les exceptions» de cas tolérés par la justice selon Youphil. «Toute personne physique ou morale sans but lucratif qui porte assistance à un étranger lorsque cette aide (et qui) n’a d’autre objectif que d’assurer des conditions de vie digne à l’étranger» ne sera donc plus considérée comme coupable.
Le président d’Emmaüs France Christophe Deltombe, a reçu la nouvelle comme étant «un signe trèspositif». Le magazine web rappelle que les locaux marseillais de l’association avaient été perquisitionnés par la police, et qu’un sans papier y avait été arrêté.
A l’inverse, Stéphane Maugendre, le président du Gisti (Groupe d’information et de soutien des immigrés) a lui estimé que tout cela ne constituait «une réformette cosmétique pour faire plaisir aux associations», qui «essaye de noyer le poisson par la formulation», et que finalement, «le délit de solidarité ne sera pas abrogé».
Une ordonnance de non-lieu a été rendue dans l’affaire Ali Ziri, retraité algérien de 69 ans mort en juin 2009 après un contrôle de police à Argenteuil (Val-d’Oise). Dans son ordonnance datée du 15 octobre, le juge qui enquêtait sur les circonstances de la mort du retraité « n’a établi aucun acte de violence volontaire qui aurait été la cause directe ou indirecte du décès », a précisé cette source, confirmant une information du Parisien. Dans son réquisitoire daté du 14 décembre 2011, le parquet avait également estimé que les policiers à l’origine de l’interpellation ne pouvaient pas être poursuivis.
Interpellé le soir du 9 juin 2009, fortement alcoolisé, et placé en garde à vue au commissariat d’Argenteuil, Ali Ziri, tombé dans le coma, était mort deux jours plus tard. Une première autopsie avait conclu que des problèmes cardiaques et l’alcoolémie étaient les causes du décès. Mais une contre-expertise avait révélé la présence d’une vingtaine d’hématomes dont certains larges de 17 cm. Un rapport de la Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS) avait alors mis en cause la sincérité des déclarations des policiers estimant que ces derniers avaient fait un usage disproportionné de la force. Pour l’avocat de la famille d’Ali Ziri, Me Stéphane Maugendre, « Le non-lieu est incompréhensible. Le juge n’a pas tenu compte de l’ensemble des expertises qui ont été ordonnées dans ce dossier », a réagi mercredi l’avocat, qui a fait appel de cette décision auprès de la Chambre de l’instruction.
Les associations se sont en revanche réjouies de l’abrogation prévue du « délit de solidarité » pour les personnes aidant de manière désintéressée un étranger en situation irrégulière. Ce délit était passible de 5 ans de prison et 30 000 euros d’amende. « Il n’y avait pas forcément de condamnations à ce titre, mais dans les pratiques policières, ça permettait de mettre la pression » sur les militants, a relevé Stéphane Maugendre, président du Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti).
Un projet de loi, présenté hier en Conseil des ministres, prévoit de remplacer la garde à vue des sans-papiers, devenue illégale, par une « retenue » pouvant aller jusqu’à seize heures.
Le nouveau système de « retenue » en commissariat ou gendarmerie sera mis en œuvre – une fois le projet adopté, idéalement avant la fin de l’année – par un officier de police judiciaire (OPJ) sous contrôle du procureur de la République, qui peut y mettre un terme à tout moment.
Pendant les seize heures, l’étranger aura droit à un avocat, à un médecin, à l’aide juridictionnelle et pourra contacter une personne de son choix, selon le texte.
« Ce n’est pas un outil de punition mais d’efficacité », a déclaré le ministre de l’Intérieur Manuel Valls. Selon lui, il s’agit de pallier un « vide juridique ». Car depuis une décision de la Cour de cassation le 5 juillet interdisant de placer en garde à vue les sans-papiers, les forces de l’ordre ne pouvaient retenir les étrangers plus de quatre heures, délai maximal prévu par la procédure de vérification d’identité. « C’est tout à fait insuffisant », notamment « pour que les préfectures puissent prendre des décisions solides et argumentées avant de lancer des procédures d’éloignement du territoire », a jugé M. Valls.
La décision de la Cour de cassation découlait d’un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) de décembre 2011, affirmant qu’un étranger en séjour irrégulier ne pouvait être emprisonné sur ce seul motif. Or, la réforme de la garde à vue, au printemps 2011, a limité son recours aux personnes soupçonnées d’infraction passibles d’une peine d’emprisonnement.
L’an dernier, sur près de 100 000 étrangers ayant fait l’objet d’une procédure pour séjour illégal, 60 000 avaient été placés en garde à vue, selon les associations.
Les association dénoncent un «régime d’exception»
Celles-ci déploraient hier la mise en place d’un « régime d’exception ». « Le gouvernement est en train de créer un nouveau système privatif de liberté spécifique aux migrants… On sort du droit commun. Au lieu d’effectuer un changement de cap vers moins d’enfermement, on retient une volonté de rafistoler le dispositif existant », a regretté David Rohi, membre de la Cimade.
Le Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti) a également critiqué la durée de cette retenue. « Qu’on ne vienne pas me dire qu’avec les moyens modernes, dont les fichiers, il n’y a pas moyen de faire des vérifications d’identité en 4 heures ? », a estimé son président Stéphane Maugendre. « En fait, 16 heures, c’est du confort pour pallier les carences de l’État en terme de moyens », a-t-il jugé.
Le délai a été arrêté après un arbitrage de Matignon cet été, a rétorqué le ministre de l’Intérieur. « C’est un plafond » rendu nécessaire par des « difficultés objectives », a-t-il ajouté, en citant les temps de transport ou la nécessité de pouvoir retenir les étrangers en cas d’interpellation le soir ou le week-end. « Je ne veux pas prendre le risque d’un travail bâclé », a-t-il encore justifié.
Un projet de loi, présenté vendredi en Conseil des ministres, prévoit de remplacer la garde à vue des sans-papiers, devenue illégale, par une « retenue » pouvant aller jusqu’à seize heures, un « régime d’exception » vivement décrié par les associations.
Le texte abroge par ailleurs « le délit de solidarité » pour les personnes aidant de manière désintéressée un étranger en situation irrégulière, une mesure essentiellement symbolique qui a, elle, été saluée par les militants des droits de l’Homme.
Le projet de loi sera présenté à la commission des Lois au Sénat vers la mi-octobre pour une adoption idéalement avant la fin de l’année.
Le nouveau système de « retenue » en commissariat ou gendarmerie sera mis en oeuvre par un officier de police judiciaire (OPJ) sous contrôle du procureur de la République, qui peut y mettre un terme à tout moment.
Pendant les seize heures, l’étranger aura droit à un avocat, à un médecin, à l’aide juridictionnelle et peut contacter une personne de son choix, selon le texte.
« Ce n’est pas un outil de punition mais d’efficacité », a déclaré le ministre de l’Intérieur Manuel Valls à la presse. Selon lui, il s’agit de pallier un « vide juridique ».
Depuis une décision de la Cour de cassation le 5 juillet interdisant de placer en garde à vue les sans-papiers, les forces de l’ordre ne pouvaient retenir les étrangers plus de quatre heures, délai maximal prévu par la procédure de vérification d’identité.
« C’est tout à fait insuffisant », notamment « pour que les préfectures puissent prendre des décisions solides et argumentées avant de lancer des procédures d’éloignement du territoire », a jugé M. Valls.
La décision de la Cour de cassation découlait d’un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) de décembre 2011, affirmant qu’un étranger en séjour irrégulier ne pouvait être emprisonné sur ce seul motif.
Or, la réforme de la garde à vue au printemps 2011 a limité son recours aux personnes soupçonnées d’infraction passibles d’une peine d’emprisonnement.
« Régime d’exception »
Celles-ci déploraient vendredi la mise en place d’un « régime d’exception ».
« Le gouvernement est en train de créer un nouveau système privatif de liberté spécifique aux migrants… On sort du droit commun », a regretté David Rohi, membre de la Cimade. « Au lieu d’effectuer un changement de cap vers moins d’enfermement, on retient une volonté de rafistoler le dispositif existant », a-t-il ajouté.
Le Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti) a également critiqué la durée de cette retenue. « Qu’on ne vienne pas me dire qu’avec les moyens modernes, dont les fichiers, il n’y a pas moyen de faire des vérifications d’identité en 4 heures ? », a estimé son président Stéphane Maugendre. « En fait, 16 heures, c’est du confort pour pallier les carences de l’Etat en terme de moyens », a-t-il jugé.
Le délai a été arrêté après un arbitrage de Matignon cet été, a rétorqué le ministre de l’Intérieur.
« C’est un plafond » rendu nécessaire par des « difficultés objectives », a-t-il ajouté, en citant les temps de transport ou la nécessité de pouvoir retenir les étrangers en cas d’interpellation le soir ou le week-end. « Je ne veux pas prendre le risque d’un travail bâclé », a-t-il encore justifié.
Les associations se sont en revanche réjouies de l’abrogation du délit d’aide à l’entrée ou au séjour irrégulier, passible de 5 ans de prison et 30.000 euros d’amendes, quand l’aide fournie est désintéressée.
« Il n’y avait pas forcément de condamnations à ce titre, mais dans les pratiques policières, ça permettait de mettre la pression » sur les militants, a relevé Stéphane Maugendre.
Les étrangers en situation irrégulière pourront être retenus 16 heures afin de procéder aux vérifications d’identité.
C’est ce vendredi que sera proposé le nouveau projet le loi en Conseil des ministres. Pour remplacer la garde à vue devenue illégale, Manuel Valls souhaite instaurer un système de « retenues » pour les sans papiers dans les commissariats.
Au lieu des 24 heures potentielles de garde à vue, les sans papiers ne pourront plus être retenus que 16 heures, laps de temps au cours duquel il devra être possible de vérifier leur identité. Après son passage ce vendredi en Conseil des ministres le texte sera présenté vers la mi-octobre au Sénat, à la commission des Lois.
Ce nouveau système vise à combler le vide juridique existant actuellement, depuis l’arrêt de la Cour de cassation interdisant la garde à vue des étrangers en situation irrégulière. Depuis, les policiers doivent s’en tenir au délai maximal dédié à la procédure de vérification d’identité, jugé insuffisant, puisque se limitant à 4 heures.
Sur RFI, Stéphane Maugendre, avocat et président du Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti), se dit inquiet de ce nouveau système : « On est en train de créer une sorte de ‘garde à vue de confort’ qui ne portera pas le nom de garde à vue. On change ‘garde à vue’ par ‘système de retenue’, on change 24 heures en 16 heures et c’est tout », détaille-t-il.
Le texte abroge par ailleurs «le délit de solidarité» pour les personnes aidant de manière désintéressée un étranger en situation irrégulière, une mesure essentiellement symbolique qui a, elle, été saluée par les militants des droits de l’Homme.
Le projet de loi sera présenté à la commission des Lois au Sénat vers la mi-octobre pour une adoption idéalement avant la fin de l’année.
Le nouveau système de «retenue» en commissariat ou gendarmerie sera mis en oeuvre par un officier de police judiciaire (OPJ) sous contrôle du procureur de la République, qui peut y mettre un terme à tout moment.
Pendant les seize heures, l’étranger aura droit à un avocat, à un médecin, à l’aide juridictionnelle et peut contacter une personne de son choix, selon le texte.
«Ce n’est pas un outil de punition mais d’efficacité», a déclaré le ministre de l’Intérieur Manuel Valls à la presse. Selon lui, il s’agit de pallier un «vide juridique».
Depuis une décision de la Cour de cassation le 5 juillet interdisant de placer en garde à vue les sans-papiers, les forces de l’ordre ne pouvaient retenir les étrangers plus de quatre heures, délai maximal prévu par la procédure de vérification d’identité.
«C’est tout à fait insuffisant», notamment «pour que les préfectures puissent prendre des décisions solides et argumentées avant de lancer des procédures d’éloignement du territoire», a jugé Manuel Valls.
La décision de la Cour de cassation découlait d’un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) de décembre 2011, affirmant qu’un étranger en séjour irrégulier ne pouvait être emprisonné sur ce seul motif.
Or, la réforme de la garde à vue au printemps 2011 a limité son recours aux personnes soupçonnées d’infraction passibles d’une peine d’emprisonnement.
«Régime d’exception»
Celles-ci déploraient vendredi la mise en place d’un «régime d’exception». «Le gouvernement est en train de créer un nouveau système privatif de liberté spécifique aux migrants… On sort du droit commun», a regretté David Rohi, membre de la Cimade. «Au lieu d’effectuer un changement de cap vers moins d’enfermement, on retient une volonté de rafistoler le dispositif existant», a-t-il ajouté.
Le Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti) a également critiqué la durée de cette retenue. «Qu’on ne vienne pas me dire qu’avec les moyens modernes, dont les fichiers, il n’y a pas moyen de faire des vérifications d’identité en 4 heures?», a estimé son président Stéphane Maugendre. «En fait, 16 heures, c’est du confort pour pallier les carences de l’Etat en terme de moyens», a-t-il jugé.
Le délai a été arrêté après un arbitrage de Matignon cet été, a rétorqué le ministre de l’Intérieur. «C’est un plafond » rendu nécessaire par des « difficultés objectives», a-t-il ajouté, en citant les temps de transport ou la nécessité de pouvoir retenir les étrangers en cas d’interpellation le soir ou le week-end. «Je ne veux pas prendre le risque d’un travail bâclé», a-t-il encore justifié.
Les associations se sont en revanche réjouies de l’abrogation du délit d’aide à l’entrée ou au séjour irrégulier, passible de 5 ans de prison et 30.000 euros d’amendes, quand l’aide fournie est désintéressée.
«Il n’y avait pas forcément de condamnations à ce titre, mais dans les pratiques policières, ça permettait de mettre la pression» sur les militants, a relevé Stéphane Maugendre.
Le ministre de l’Intérieur Manuel Valls a déposé un projet de loi instaurant la possibilité d’une « retenue » de personnes sans papiers dans un commissariat. Une mesure visant à remplacer la garde à vue, dont l’illégalité a été confirmée le 5 juillet par la Cour de cassation, la plus haute instance judiciaire française. Le texte est soumis ce vendredi matin au Conseil des ministres. Mais ce nouveau dispositif inquiète déjà les associations d’aide aux immigrés.
Le changement est pour le moins ténu, d’après ce qu’on peut lire de ce que le ministère de l’Intérieur a bien voulu laisser filtrer. Des mots en ont remplacé d’autres – la garde à vue étant illégale pour un simple contrôle d’identité – et le laps de temps durant lequel un étranger sans papiers peut être privé de liberté dans un commissariat a été quelque peu raccourci.
Pour Stéphane Maugendre, avocat et président du Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti), ce nouveau dispositif n’a rien de rassurant. « On est en train de créer une sorte de ‘garde à vue de confort’ qui ne portera pas le nom de garde à vue. On change ‘garde à vue’ par ‘système de retenue’, on change 24 heures en 16 heures et c’est tout », déplore-t-il.
Surtout, insiste encore Stéphane Maugendre, il n’y a là aucun vide juridique qu’il aurait fallu combler depuis l’interdiction de la garde à vue, contrairement à ce qu’affirme Manuel Valls. « Il y a un régime de droit commun qui s’appelle la vérification d’identité qui est applicable à tout à chacun », rappelle le président du Gisti.
Jusqu’à 16 heures de privation de liberté au lieu de quatre pour un simple contrôle d’identité : les étrangers non communautaires resteront donc soumis à un dispositif spécial d’exception, qui déçoit les associations. Le délit de solidarité avec des sans-papiers, en revanche, va être supprimé.
Mais pour Pierre Henry, directeur général de l’association France terre d’asile, cette proposition devra s’inscrire dans un projet de loi plus global.
Garde à vue. Le projet de loi abroge aussi le délit de solidarité.
«Hum… C’est une garde à vue avec huit heures en moins, en somme.» On aurait pu s’attendre à un peu plus d’enthousiasme du côté de Stéphane Maugendre, avocat et président du Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti), en apprenant hier le contenu du projet de loi que présentera Manuel Valls demain en Conseil des ministres : le texte prévoit un dispositif de retenue des sans-papiers pendant seize heures, qui remplace la garde à vue désormais illégale, et l’abrogation du délit de solidarité qui a fait tant de bruit au début des années 2000.
Les deux axes du projet ne sont sur le fond pas surprenants. Le premier découle d’une décision de la Cour de cassation du 5 juillet qui avait rendu impossible le placement en garde à vue d’un étranger sur ce seul défaut de présentation des papiers. Etre sans-papiers ne devenait plus en soi un délit. En 2011 sur près de 100 000 étrangers ayant fait l’objet d’une procédure pour séjour illégal, 60 000 avaient été placés en garde à vue, selon les associations. Cette décision découlait elle-même de la réforme de la garde à vue en France, en juin 2011, qui liait cette restriction de liberté à la commission d’un délit puni d’une peine d’emprisonnement. Une décision de la Cour européenne de justice en Italie était allée dans le même sens.
«Dispositif». Depuis juillet, les étrangers ne pouvaient donc pas être retenus plus de quatre heures, le délai maximal pour une vérification d’identité. Le projet de loi leur confère à nouveau un statut spécial, avec la possibilité de les retenir seize heures au maximum, temps jugé suffisant pour engager une éventuelle procédure d’expulsion. En juillet, Valls avait expliqué chercher «un dispositif» garantissant «un équilibre entre le respect des libertés individuelles et les exigences des maîtrises des flux migratoires.» «Mais pourquoi n’applique-t-on pas aux étrangers le droit commun ? s’insurge Stéphane Maugendre. Seize heures, c’est une retenue de confort pour la police et la préfecture pour vérifier l’identité de la personne interpellée. Or, sur le terrain, la police effectue des descentes dans des endroits spécifiques en sachant qu’elle n’aura pas besoin de seize heures pour vérifier les identités.»
Dans l’entourage de Manuel Valls, on maintient que«quatre heures est un délai insuffisant pour vérifier les identités.» Pierre Henry, le directeur général de France Terre d’Asile, regrette «qu’il s’agisse d’un dispositif spécifique qui sorte du droit commun» et espère des garanties à travers la présence des avocats et des associations pendant les seize heures de retenue, ce que confirme le ministère de l’Intérieur. Le directeur de France Terre d’Asile s’inquiète aussi «de la vraie question, celle qui suit le chiffon rouge de la garde à vue : y aura-t-il une réforme globale de la politique d’éloignement des étrangers ?»
Fronde. L’autre principale annonce du projet de loi est plus consensuelle car plus symbolique : l’abrogation du délit de solidarité. Il avait déjà provoqué une fronde monstre en 1997 et un défilé de 150 000 personnes à Paris. Ce délit a connu un durcissement en juin 2003, sous l’impulsion de Sarkozy, la loi prévoyant une peine de prison de dix ans et une amende de 750 000 euros (!).
«C’est une mesure symbolique importante, relève Pierre Henry, mais, dans les faits, ce délit n’était pas appliqué depuis deux ans.» En fait, assez peu de condamnations ont été prononcées par des tribunaux. En 2009, le Gisti avait produit une liste d’une trentaine de condamnations mais très peu concernaient des bénévoles, plutôt des personnes d’origine étrangère ayant hébergé ou aidé un parent en situation irrégulière. En revanche, de nombreuses actions de pression ont été déclenchées, n’allant pas forcément jusqu’aux poursuites pénales mais créant un climat de suspicion parmi les aidants. Une ambiance traduite par le succès du film Welcome. La Fédération internationale des droits de l’homme avait recensé de très nombreuses histoires de citoyens ayant connu l’interpellation au petit jour, le menottage, la garde à vue et les fouilles au corps. Les opérations contre les filières d’immigration clandestine ont, elles, globalement fait chou blanc.
Le ministère de l’intérieur doit présenter, vendredi 28 septembre, en conseil des ministres un projet de loi permettant de retenir jusqu’à seize heures les sans-papiers, un dispositif destiné à remplacer la garde à vue désormais illégale, a indiqué une source proche du dossier. Le projet de loi place ce dispositif « sous le contrôle de l’autorité judiciaire » et abroge « le délit de solidarité » pour les personnes aidant de manière désintéressée un clandestin, a-t-on indiqué de même source.
Depuis une décision de la Cour de cassation le 5 juillet interdisant de placer en garde à vue les sans-papiers, les policiers ne pouvaient retenir les étrangers plus de quatre heures, délai maximal prévu par la procédure de vérification d’identité. Ils estimaient ce temps insuffisant pour engager une éventuelle procédure d’expulsion.
Conscient de ce « vide juridique », le ministre de l’intérieur, Manuel Valls, avait annoncé fin juillet au Sénat qu’il proposerait à l’automne un nouveau « dispositif » garantissant « un équilibre entre le respect des libertés individuelles et les exigences de maîtrise des flux migratoires ». Il avait initialement évoqué une retenue de douze heures au maximum. L’an dernier, sur près de 100 000 étrangers ayant fait l’objet d’une procédure pour séjour illégal, 60 000 avaient été placés en garde à vue, selon les associations.
« RÉGIME D’EXCEPTION »
Stéphane Maugendre, avocat et président du Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti), une association spécialisée dans le conseil juridique aux étrangers, estime qu’il est « inquiétant et scandaleux de mettre en place un régime d’exception à l’égard des étrangers, quelles que soient les garanties qu’il y a derrière. Le régime de droit commun doit être appliqué à tous. »
Il rappelle que les quatre heures de retenue pour vérification d’identité possibles en vertu de l’article 78-2 du Code pénal peuvent déjà être prolongées par le procureur de la République si la personne refuse de donner son identité. Dans l’attente du contenu exact du projet de loi, le président du Gisti considère donc pour l’instant qu’il ne s’agit que d’une garde à vue « dont on aurait changé le nom ».
A la Cimade, association œcuménique d’entraide, on voit dans ce projet de loi « un mauvais signe qui ne paraît pas correspondre aux engagements de François Hollande ». « Il nous semblait que le gouvernement voulait aller vers la fin de l’enfermement des étrangers et il crée un régime supplémentaire de privation de liberté des étrangers », déplore David Rohi, responsable de la commission éloignement de la Cimade. Pour lui, il s’agit d’une mesure « disproportionnée ».