Archives de catégorie : Avocat

Les avocats dénoncent une «opération politique»

Accueil 01/12/1993

«Nos clients étaient poursuivis pour délit de solidarité, maintenant, on peut carrément parler de délit d’opinion.» C’est Me Maugendre qui parle. Il vient d’apprendre que le Conseil des ministres a décidé d’interdire le Comité du Kurdistan et les vingt-trois associations kurdes regroupées dans la Fédération des associations culturelles des travailleurs du Kurdistan. La nouvelle est tombée au beau milieu de la conférence de presse donnée hier par les avocats des vingt-quatre Kurdes mis en examen après la rafle policière de la semaine dernière. Vingt sont incarcérés, deux font l’objet d’un arrêté d’expulsion, dont une, Rojine Ayaz, est assignée à résidence dans les Deux-Sèvres.

D’entrée de jeu, Me Jacoby, président de la Fédération internationale des ligues de droit de l’homme, donnait le ton: «Nous sommes en présence d’une affaire politico-juridique. Une fois de plus, le pouvoir se sert de la justice pour réaliser une opération politique.» Selon lui, la principale raison de la rafle est à chercher dans le fait que la France est aujourd’hui le premier exportateur vers la Turquie. «Il y a trois semaines, le ministre de la Défense, M. Léotard, a réalisé un fructueux contrat de vente d’armes à Ankara. Dans cette affaire, la France était en concurrence avec d’autres pays. La rafle des Kurdes a été la cerise sur le gâteau.»

Me Jacoby s’indigne du «cynisme» de la France, qui recommence «avec la Turquie ce qu’elle a fait autrefois avec l’Irak de Saddam Hussein». Il dénonce les méthodes utilisées: «Des journalistes avaient été prévenus avant l’opération. Le journal turc «Hurriyt» du 20 novembre publiait des extraits du rapport de la DST qui avait servi de base à toute l’opération. Un rapport qualifié d’ultra-secret, qui annonçait que le PKK s’apprêtait à assassiner un diplomate turc et à enlever un journaliste en France. Le 27 novembre, le même journal annonçait que la France allait remettre six membres du PKK à la Turquie et publiait leurs noms. On a aussi photocopié des «preuves» qu’on a remises à certains journaux: «France-Soir» a ainsi publié une facture censée prouver qu’il y avait eu un racket, mais c’était en réalité une note de blanchisserie.»

A son tour, Me Martineau révèle que des documents concernant des personnes protégées par la Convention de Genève sur les réfugiés ont été livrées à la police turque et souligne la gravité d’une telle violation. Me Voituriez insiste sur le fait que les dossiers sont vides. Le seul chef d’inculpation qu’on ait trouvé est «association de malfaiteurs pour collecte de fonds au bénéfice d’une organisation terroriste». Mais, s’indignent les avocats, au regard des atrocités commises par l’armée turque au Kurdistan et qui n’ont fait que s’aggraver ces derniers temps, n’est-il pas naturel que la communauté kurde de France manifeste sa solidarité en versant aux collectes? «On vient de créer le délit de solidarité!», s’exclame Me Mangin.

En conclusion, Me Jacoby se déclare consterné par la décision du Conseil des ministres: «Tout cela est triste pour l’avenir des libertés en France. Mais nous ne laisserons pas faire. Et nous espérons que les magistrats nous suivront et refuseront de servir de bras à une telle opération politique.»

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Le gouvernement dissout deux associations kurdes

logo-liberation-311x113 01/12/1993

«Ces façades légales du PKK» se livreraient «à des actions de caractère terroriste ou délictuel».

Deux semaines après la rafle touchant les membres présumés en France du Parti des travailleurs du Kurdistan, ce mardi, Charles Pasqua a voulu à sa manière boucler le dossier policier de l’affaire. A sa demande, le Conseil des ministres d’hier matin a dissous par décret deux importantes associations présentées par le ministre de ’ Intérieur comme «des façades légales du PKK qui, en France comme dans d’autres pays d’Europe, se livre à des actions de caractère terroriste ou délictuel». Il s’agit du Comité du Kurdistan et de la Fédération des associations culturelles et des travailleurs patriotes du Kurdistan en France, Yekkom-Kurdistan, ainsi que de sept comités appartenant à cette dernière, qui rentreraient sous les coups de la loi de janvier 1936 sur les groupes de combat et les milices privées.

Dans une conférence de presse tenue hier après-midi, et sans rentrer dans les détails des charges retenues contre les deux associations (mais énumérant plusieurs actes commis contre des intérêts turcs en France et attribués au PKK), Charles Pasqua a défini pour l’avenir les limites des activités qui seront permises aux 60 000 Kurdes résidant sur le territoire. «L’immense majorité d’entre eux n’aspirent qu’à s’ intégrer à la communauté française, et c’est aussi notre vœu. De multiples associations kurdes existent qui ont un objet culturel. Il n ’ est pas question de les interdire ».  Charles Pasqua a refusé tout lien entre les décisions françaises et les interdictions «anti-PKK» annoncées vendredi par les autorités allemandes. Il a déclaré que le sujet avait été abordé lundi, lors d’une rencontre à huis clos entre ministres de l’Intérieur européens, où l’on s’est penché entre autres sur « les menaces de terrorisme» et où le ministre français a «proposé à bref délai un programme  opérationnel».

Cinq avocats des 24 Kurdes mis en examen après la rafle du 18 novembre ont manifesté hier leur étonnement en apprenant l’interdiction des deux associations. «On est passé d’un délit de solidarité à un délit d’opinion ». s’est exclamé Me Stéphane Maugendre. Avec ses collègues, Daniel Jacoby. Christine Martineau, William Bourdon, Christophe Voituriez, ils ont voulu exprimer leur désarroi devant une affaire judiciaire où, selon eux, «il n’y a rien individuellement dans les dossiers qui justifie l’incrimination d’association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste».

Ezzat Dere, responsable du Comité du Kurdistan à Paris, s’est insurgé contre la dissolution d’associations qui n’auraient jamais mené «des activités qui violent la Constitution et la loi françaises». Cette décision ne serait qu « un ordre du gouvernement turc aux gouvernements européens». Les deux associations devraient se pourvoir devant le tribunal administratif.

Mission presque impossible pour les avocats

logo-liberation-311x113 propos recueillis par Dominique Simonnot, 28/10/1993

La tâche des avocats chargés de défendre les candidats au droit d’asile devient «de plus en plus compliquée». Même pour les cas qui semblent irréfutables.

Spécialistes du droit d’asile, les avocats que nous avons interrogés parlent ici des difficultés qu’ils rencontrent dans l’exercice de leur métier.

FRANÇOIS DANTEC. Je considère que l’asile politique n’est pas un droit C’était une philosophie. C’était accepter un petit désordre chez nous pour éviter une injustice chez les autres. La conception française du demandeur d’asile a évolué pour des raisons purement économiques. Mon but c’est de faire comprendre qu’un fonctionnaire zaïrois, un paysan angolais – qui, pour l’un, perd son emploi s’il critique son gouvernement ou, pour l’autre, ne peut pas travailler sous les bombes – ne sont pas simplement des réfugiés économiques.

ALAIN MIKOWSKI. J’ai le sentiment d’une nasse qui se resserre. Au départ, on avait un texte généreux et, au fil des ans, avec de plus en plus de précision, les règlements, la jurisprudence, les textes se referment. L’objectif est atteint. Il y a quelques années, j’avais beaucoup de clients turcs et il n’y en a plus. Les gens ne demandent même plus le statut et restent en France comme clandestins. Quand je suis en forme, c’est la colère, et quand je suis fatigué, c’est la déprime.

STEPHANE MAUGENDRE. Le climat était déjà difficile sous les gouvernements précédents, mais il s’est considérablement durci avec les lois Pasqua. Le discours est passé chez les policiers mais aussi chez certains magistrats, je le constate quotidiennement. On sait qu’on a un bon dossier, que ça se tient et, face à nous, on a un mur. Mais le pire, c’est lorsqu’un client arrive avec un dossier mal préparé au départ. Rejeté par l’Ofpra, le requérant le sera aussi par la Commission des recours, et la demande de réouverture est quasi impossible car les conditions en sont extrêmement strictes: il faut des faits nouveaux et non des preuves nouvelles, sans relation avec ceux dont on a argué au début.

JEAN-JACQUES DE FELICE (avocat, vice-président de la LDH, membre du conseil d’administration de France- terre d’asile et de la Cimade). Le droit d’asile est un droit très particulier qui doit vivre et s’étendre, il porte en lui des valeurs de solidarité, d’accueil et de compréhension fraternelle devant d’extraordinaires détresses. Il est né et a été réglementé après la victoire sur le fascisme, son histoire n’est donc pas neutre. Il est désolant qu’une modification de la Constitution française soit engagée pour le restreindre, ce qui veut dire qu’on le restreint avec solennité. Les attaques qu’il subit ne me surprennent pas, un praticien de la défense des étrangers voit tous les jours et dans beaucoup de domaines – le logement, la prison, les expulsions- les conséquences d’un état d’esprit qui a peu à peu modifié nos textes.

SIMON FOREMAN. On est très loin de l’image «noble» du réfugié, les demandeurs d’asile sont absolument dé-considérés et leur défense se complique de plus en plus. Les juges de la Commission des recours ont intégré la notion de fraude et ont totalement inversé la charge de la preuve qu’ils laissent aux requérants. En ce qui concerne les déboutés, l’hypocrisie est énorme: ni statut ni reconduite à la frontière. Tous les trois mois, il y a une nouvelle nationalité dont on décide de ne plus reconduire les ressortissants à la frontière (Zaïrois, Tamouls, Guinéens, ex-Yougoslaves…), mais on refuse de rouvrir leur dossier, c’est-à-dire qu’on les I maintient dans l’illégalité.

SYLVIA LAUSSINOTTE. Je suis d’un pessimisme intégral déjà depuis  un certain temps. A la limite, il n’y a plus de défense possible, excepté pour une élite qui, de toute façon, serait assurée d’obtenir le statut Les derniers dossiers que j’ai traités concernaient des Cubains. Pour l’une, signalée par les ONG, il s’agissait de la faire sortir de son pays. Le ministère des Affaires étrangères avait assuré qu’il examine¬rait le dossier pour éventuellement l’aider ou lui donner un visa de la-bas. Mais rien. On se heurte à la raison d’État, aux relations politiques inter¬étatiques.

GILLES PIQUOIS. Il y a un fossé entre le discours politique, les textes et les applications pratiques qui en sont faites. On aboutit au traitement toujours plus rigoureux des dossiers. Comme avocat, on a une espèce de sentiment d’impuissance dans la me¬sure où la quasi-totalité des demandeurs d’asile proviennent de pays dont il est impossible de dire qu’ils respectent les standards minimaux des droits de l’homme. Les perspectives d’avenir dans le cadre de la prochaine application des accords de Schengen font qu’on s’oriente vers des dossiers échappant à tout contrôle judiciaire pour dépendre davantage d’autorités administratives sans réelle défense possible.

Les prisons mal armées face aux délinquants sexuels

KdI9khBXPMWc33xfCxduK-fCc2MLzAp7jQ_15LyD1S4gOeointmcTAHR52beutqD4l_qMww=s170 Stéphane Rak et Isabelle Berdoll, 09/10/1993

Peut-on enfermer les délinquants sexuels pendant trente ans de manière incompressible? Les juristes et les personnels pénitentiaires sont réservés tant sur la mise en œuvre de cette mesure que son utilité.

L’affaire de la petite Karine aura marqué les esprits. Violée et tuée par un multirécidiviste. Comme à chacun de ces drames, la question est posée de savoir s’il ne faudrait | pas réintégrer dans le droit français la peine de mort pour les meurtriers d’enfants. Sans aller jusqu’à cette extrémité, une solution consiste à augmenter la durée de la sanction infligée et s’assurer que celle-ci soit rendue effective. C’est en tout cas l’intention affichée par le ministre de la Justice, Pierre Méhaignerie, qui envisage de faire passer la peine maximale à trente ans et de la rendre incompressible.

Finies les libérations conditionnelles, les remises de peine légales qui font de la perpétuité aujourd’hui une peine égale en moyenne à quinze ans d’emprisonnement. « On va enfin mettre un terme au système d’érosion des peines auquel la loi Chalandon de 1986 avait tenté de mettre un terme, en vain », souligne le secrétaire général de l’Association professionnelle des magistrats  (APM), Dominique Matagrin. Cela fait des années que ce magistrat de droite réclame une telle mesure.

Celle-ci n’a jamais vraiment recueilli l’unanimité parmi les professionnels de la justice, qui voient mal comment elle pourrait être mise en pratique. «Quand on enferme des gens pour trente ans sans espoir d’être libérés, ils deviennent de véritables fauves, difficilement gérables, car ils n’ont plus rien à perdre», estime le secrétaire général de l’Union des syndicats de magistrats (USM), Valéry Turcey.

« Absolument faux, rétorque Dominique Matagrin. Cette crainte d’en faire des fauves est légitime, mais infondée. Les délinquants sexuels sont loin d’être les plus dangereux. Par ailleurs, la grâce présidentielle, étant un droit constitutionnel, demeurera et restera un espoir pour les détenus condamnés à perpétuité. »

Le problème que soulèvent bien des juristes ne concerne pas la durée de la peine mais son utilité. « Qu’une personne soit enfermée 10, 20 ou 30, cela ne change rien s’il n’existe pas de structures à même de la soigner », indique Valéry Turcey. « Alors qu’on connaît des exemples étrangers sur lesquels on pourrait prendre modèle, les Etats-Unis ou le Canada, par exemple, où l’on applique des traitements psychiatriques aux détenus, en France, le débat n’a même jamais été soulevé. En général, le milieu médical est réticent à l’idée d’imposer de manière autoritaire des soins aux prisonniers. Une fois en prison, aucune thérapie n’est proposée aux délinquants sexuels. »

Me Stéphane Maugendre, responsable du syndicat des avocats de France, indique stupéfiait qu’à Fleury-Mérogis, « on ne compte que trois médecins pour quelque 15 000 détenus». Malgré cela, cet avocat ne remet pas en cause notre système judiciaire. « Le droit n’a pas à s’adapter à une rédaction épidermique à un moment donné », estime-t-il, soulignant que «ces individus ont certes commis des fautes très graves, mais ils sont malgré tout réinsérables. Il faut regarder les chiffres et on constate que le récidives dans ce domaine ne sont pas fréquentes. Pour un cas qui vaj faire scandale, on ne s’aperçoit pas que 150 autres ont pu reprendre! une vie normale ». ;

Et de conclure : « Ce débat revient presque à réintroduire la peine de mort. » « A la différence, explique le secrétaire général de l’Union des fédérations de l’administration  pénitentiaire (UFAP), Gilles Sicard que les délinquants sexuels restent en prison et que nous n’avons pas les moyens de les garder en toute sécurité. » Ce gardien de prison réclame, si le projet de loi venait à son terme, «davantage de moyens financiers et d’effectifs spécialisés, faute de quoi ce projet restera purement illusoire ».

Il n’est pas si facile de réaliser concrètement une demande, fut-elle majoritaire dans l’opinion publique.

Dans le droit fil de l’Inquisition

KdI9khBXPMWc33xfCxduK-fCc2MLzAp7jQ_15LyD1S4gOeointmcTAHR52beutqD4l_qMww=s170 Propos recueillis par S. B., 02/09/1993

Me Stéphane Maugendre est président de la commission pénale du Syndicat des avocats de France. La garde à vue, cet avocat sait ce que c’est. Depuis la mise en place de la réforme Vauzelle, en mars dernier, il est en effet obligé, à l’instar de ses confrères, d’assurer des permanences et la défense des gardés à vue qui le demandent.

Le QUOTIDIEN. – Quel bilan avez- vous tiré de ces huit mois passés en concubinage avec la réforme Vauzelle?

Me Stéphane MAUGENDRE. – Disons que deux mondes — les avocats et les policiers — qui ne se connaissaient pas, se sont rencontrés. Et ça c’est très bien passé. L’accueil dans les commissariats était en général très sympathique. Les policiers, à mon avis, pensaient que c’était plutôt bien. Ils nous l’ont dit : «Enfin, vous voyez dans quel monde on travaille!». Certains ont même dit que, grâce à nos visites, ils se montraient plus attentifs.

Q. – A la mise en place de cette loi, vous, les avocats, avez un peu rechigné… Maintenant, vous ne voulez plus revenir sur cet acquis de la défense.

Me Stéphane MAUGENDRE. – Les avocats ont tenu un pari, en dépit d’une loi imparfaite. Tous les barreaux se sont organisés et ont assuré gratuitement ce service public. Ils ne sont pas rémunérés pour cela, il faut le rappeler ! Ça n’a pas été facile, mais on l’a fait.

Q. – La garde à vue, qu’est-ce que ça signifie pour vous ?

Me Stéphane MAUGENDRE. – Pour moi, c’est un lieu, un espace-temps de non-droit, qui se place dans le droit fil de l’Inquisition. Le but, c’est l’aveu. Jusqu’à la loi du 4 janvier 1993 (loi Vauzelle), il n’y avait aucun contrôle. Cette réforme a permis ce contrôle par l’avocat et par l’obligation pour les policiers d’avertir immédiatement le procureur de la garde à vue. La loi allait instaurer la venue de l’avocat dès la première heure, pour coller à tout ce qui ce fait en matière de garde à vue en Europe. C’était bien. Maintenant on revient là-dessus. Pour moi, la «réforme de la réforme» est un véritable coup de poignard dans le dos. Un coup dur pour la défense. Je ne comprends par ce retour en arrière.

La garde-à-vue est-elle attentatoire aux libertés?

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_DSC0040La garde à vue appartient au système inquisitorial du Moyen Age: on y « pose la question ». Rien de plus. Son but unique est d’extorquer l’aveu, ce qui rejaillit inévitablement sur le futur procès. 90% des dossiers judiciaires sont traités par la seule police, et arrivent directement devant les tribunaux sans passer par le filtre du juge d’instruction: la loyauté du débat judiciaire s’en trouve donc affectée.

L’aveu prime, alors qu’un recours plus systématique aux investigations de la police scientifique permettrait d’en réduire l’importance. Au Canada, en Grande-Bretagne, les policiers ont pour seule mission de maintenir le « gardé à vue » à la disposition du juge, sans procéder à un quelconque interrogatoire. En Ecosse, la procédure ne dure pas plus de six heures, pour parfois deux jours chez nous. La pratique qui consiste à retenir de simples témoins dans des locaux de police est scandaleuse: elle constitue un moyen de pression intolérable sur des gens qui, le plus souvent, ne comprennent pas ce qui leur arrive. Avant de porter atteinte à la liberté d’une personne, on doit être sûr qu’elle détient des informations graves pouvant disparaître. Et si c’est le cas, du simple point de vue de la morale judiciaire, le juge se doit d’entendre lui-même ce témoin important.

Il faut réformer la garde à vue, en se mettant enfin en accord avec la Convention européenne des droits de l’homme, laquelle a fixé le principe d’une « arrestation en vue d’être conduit aussitôt devant le juge ». Ce dernier n’a pas le don d’ubiquité. Il doit être assisté par la police et lui déléguer certains de ses pouvoirs, mais point n’est besoin de priver un homme de sa liberté pour recevoir son témoignage. La France a déjà été condamnée par la Cour de Strasbourg pour mauvais traitement durant la garde à vue. Ceux qui soutiennent, malgré tout, que les garanties du droit suffisent à faire de la garde à vue une procédure parfaitement cadrée ne sont pas honnêtes. Je suis avocat et je sais de quoi je parle: j’affirme qu’on continue à y pratiquer, à l’occasion, le « tabassage ».

Stéphane Maugendre, Avocat, membre du bureau national du Syndicat des avocats de France.

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L’alibi

index  Alain Vogelweith  secrétaire général du Syndicat de la magistrature et Stéphane Maugendre, membre du bureau national du Syndicat des avocats de France., 07/07/1993

L’institution judiciaire n’a jamais véritablement assumé son rôle constitutionnel de gardienne des libertés. Mais, aujourd’hui, les projets du premier ministre, ou plus exactement de M. Pasqua, lui dénient totalement ce rôle pour la cantonner à celui de l’alibi, nous rappelant en cela une des périodes les plus sinistres de notre histoire. La magistrature et le barreau auront-ils le sursaut d’honneur qui leur fit alors défaut ? Les méprisables et dangereuses surenchères d’un certain Alain Marsaud, nouveau député et ancien magistrat, et le silence des avocats ne peuvent que nous en faire douter.

Justice alibi, d’abord parce qu’elle se trouve privée de la plupart de ses outils de contrôle de l’action policière, ensuite parce que ses moyens coercitifs ne sont renforcés que dans le but de servir une administration dont les désirs et besoins répressifs sont crois sants. La réforme des contrôles d’identité que l’on croyait impossible dans un sens plus répressif depuis que le législateur de 1986 avait repris mot pour mot les dispositions de la scélérate loi «sécurité et liberté» d’Alain Peyrefitte, que la gauche socialiste sans le moindre état d’âme avait maintenue, constitue une réponse à une des rares jurisprudences protectrices des libertés de la Cour de cassation. Loin de nous l’idée d’opposer le juge au législateur, mais il est légitime de penser qu’une liberté aussi fondamentale que celle d’aller et venir est pour toutes les institutions de l’État une référence intangible.

Les contrôles d’identité échapperont au droit, car ce n’est pas du droit que le législateur produit mais un outil incontrôlable, y compris pour tous ceux qui seront amenés à l’utiliser. Un outil dangereux pour la paix civile, par l’exacerbation qu’il va provoquer du sentiment d’exclusion dont souffre déjà la population de bon nombre de banlieues et quartiers.

Et ce ne sont pas les timides et tardives protestations de Pierre Méhaignerie et Simone Veil qui y changeront quelque chose… Surtout, lorsque celles-ci ne portent que sur un amendement qui, certes, incite Clairement à la discrimination raciale mais a au moins le «mérite» de faire apparaître au grand jour la vraie nature de toute cette réforme.

Enfin, précaution ultime, presque surabondante, du législateur : les contrôles d’identité, que quelques juges facétieux seraient encore tentés de déclarer illégaux, à la demande d’avocats perturbateurs, ne seront plus des causes de nullité des procédures subséquentes. L’illégalité sans sanction en quelque sorte. En matière de mariage, les officiers d’état civil neseront plus sous le contrôle du parquet et ce dernier plus sous celui d’un tribunal.

Exit le contrôle du tribunal, et les parquets se heurteront au nouveau pouvoir de certains maires qui s’arrogeront la faculté de surseoir à la célébration des mariages et disposeront des moyens de pression pour contraindre le procureur à effectuer des enquêtes.

Traquer l’étranger

La finalité de tout cela n’étant évidemment pas de faire obstacle au mariage de complaisance mais de traquer l’étranger et, par le biais de procédures administratives parallèles,d’obtenir à terme son expulsion, rendant ainsi impossible la célébration du mariage, et ce, malgré la sincérité des consentements.

Les commissions départementales de séjour des étrangers, composées de magistrats judiciaires et administratifs et devant lesquels les droits de la défense s’exercent contradictoirement, ne constitueront plus un filtre à des décisions arbitraires des préfectures, puisque leurs avis, devenus purement consultatifs, ne seront même plus sollicités pour les cas les plus délicats de délivrance ou de renouvellement des titres de séjour.

Bafouées les libertés d’aller et venir ou de se marier, bafoué le droit au respect de sa vie privée et familiale,impuissants tous ceux, magistrats et avocats, dont la mission – quoi qu’en pensent nos parlementaires – est dans un État de droit de garantir et faire respecter les libertés fondamentales. Non seulement la justice contrôlera moins que jamais l’action policière mais elle se voit assigner une nouvelle mission : relayer cette dernière.

Au sortir des dictatures de Franco et de Salazar, l’Espagne et le Portugal avaient permis et exigé la présence de l’avocat durant la garde à vue. Au sein de la CEE, la France, la dernière (à l’exception de la Belgique), sous la pression des condamnations de la Cour européenne des droits de l’homme et de l’état du droit européen, a fini, le 4 janvier 1993, par permettre la venue de la défense dans les commissariats. Demain, cette garantie, ce droit pour une partie accusée ne s’exercera qu’avec l’autorisation de la partie adverse, l’accusation. Après-demain, les avocats ne seront-ils plus que des commissaires du gouvernement?

La création d’une mesure de rétention de trois mois que le tribunal correctionnel sera obligé de prononcer à l’encontre d’un étranger est aussi l’illustration la plus parfaite et la plus cynique de cette justice-relais. Il s’agit, ni plus ni moins, de valider la création de véritables camps d’internement où seront parqués, dans des conditions précaires, des étrangers, dans l’attente de leur trouver un avion ou un charter… ou plutôt, économie oblige, un train. Magistrats devenus des distributeurs automatiques de peines et avocats devenus les pantins de l’accusation.

Tous ces aspects de l’instrumentalisation du judiciaire comportent un point non seulement commun mais central, une volonté forcenée de répression. Le gouvernement Pasqua-Balladur la justifie par l’urgence, l’urgence de l’«immigration zéro», l’urgence de la lutte contre les clandestins et les toxicomanes.

Or, au-delà de l’immense responsabilité que prend le gouvernement d’une montée inéluctable du racisme, deux choses sont d’ores et déjà certaines : elles seront inefficaces et créeront des clandestins, ceux justement que l’on entend chasser.

Pour Charles Pasqua, la justice n’est qu’une empêcheuse de tourner en rond et les obligations nées de l’État de droit de sombres complots d’intellectuels ou de gauchistes. Il se trouve simplement que les  conceptions de ce ministre ne sont pas les nôtres, ni celles de tout démocrate.

Si de telles conceptions devaient l’emporter, nous ne pourrions qu’appeler à la désobéissance civique. Avocats et magistrats seraient évidemment les premiers concernés, mais notre appel s’adresserait à chaque citoyen pour qui la démocratie ne repose pas forcément sur les errements d’une majorité.

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Signes exterieurs de… l’étranger

logo-liberation-311x113 Dominique Simonnot, 23/06/1993

Le député RPR Alain Marsaud dit se baser sur la Cour de cassation pour expliquer que son amendement c’est le contraire du délit de faciès. Analyse de la jurisprudence.

Comment faire de la discrimination raciale sans trop le dire? C’est le problème auquel sont désormais confrontés l’Assemblée nationale et le gouvernement avec l’amendement dé-posé par Alain Marsaud: les policiers « peuvent se fonder sur tout élément permettant de présumer la qualité d’étranger autre que l’appartenance raciale». précise l’amendement, destiné. selon le député, à faciliter le contrôle d’identité des étrangers en situation irrégulière.

Un petit plus dans l’arsenal des lois s’appliquant aux étrangers. Y manquait selon Alain Marsaud. des critères clairs pour que les policiers puissent faire leur travail en matière de répression du séjour irrégulier. Et. ajoute le député de la Haute-Vienne pour faire taire ses détracteurs: «Mon amende- ment. c ‘est le contraire du délit de fa-dès. vous n’avez qu’à lire la jurisprudence de la Cour de cassation. Je la reprends.»

A lire les arrêts de la Cour de cassation sur le sujet, on sent que les hauts magistrats ont le sentiment de marcher sur des œufs. Et leur réponse semble souvent bien sibylline. Pourtant, la cour a réussi à tracer quelques contours de la légalité en la matière. En 1985. une première décision explique que, pour contrôler l’identité d’un étranger en dehors de tout délit commis. « il faut que des éléments objectifs déduits de circonstances extérieures à la personne même de l’intéressé soient de nature à faire apparaître sa qualité d’étranger». En l’espèce, il s’agissait de deux personnes roulant dans une voiture immatriculée à l’étranger critère extérieur, donc légal.

Mais comment distinguer ces signes extérieurs portés par l’étranger? Serait- ce le vêtement? Ça se discute. Un Français à la peau noire peut se promener en ne prévoit même pas de prendre en boubou. Serait-ce un tam-tam? Mais, là encore, on risque de demander son titre de séjour à un musicien français.

Quelques années plus tard, en 1992.un nouvel indice était donné, par l’annulation d’un contrôle d’identité. Les policiers avaient, en effet, noté dans leur PV d’interpellation que. «circulant aux abords de la gare de Ville-pinte, lieu propice aux vols à la roulotte, ils avaient remarqué deux individus s’exprimant en une langue étrangère». La langue parlée. Soit un critère intrinsèquement lié à la personne et qui ne peut être motif à interpellation. Malgré ses références au respect de la jurisprudence, c’est le contraire que dit Alain Marsaud. dans l’exposé de ses motifs: «Il s’agit de préciser les éléments permettant de présumer de l’extranéité. En effet, la jurisprudence de la Cour de cassation ne prévoit même pas de prendre en compte la langue parlée…» Pourtant, si la Cour de cassation avait repoussé l’argument de la langue parlée», c’est que. au même titre que la couleur de la peau, elle caractérise la personne bien plus que son statut.

« Ce texte ne veut rien dire », s’énerve Me Stéphane Maugendre (avocat). « on dit exclure la race mais on conserve tous les éléments qui disent qu’il s’agit de la race ». Ajoutant: «En introduisant cette disposition dans la loi, on empêche tout contrôle de la Cour de cassation.» Un contrôle déjà rarissime, souligne pour sa part Me Simon Foreman: «Mais, cette fois, ce sera une bénédiction donnée aux policiers. » Les tribunaux, eux. depuis longtemps ont choisi : «Dans la pratique, explique Me Simon Foreman. ils valident absolu ment tous les contrôles.»

L’avis de l’avocat

KdI9khBXPMWc33xfCxduK-fCc2MLzAp7jQ_15LyD1S4gOeointmcTAHR52beutqD4l_qMww=s170 propos recueillis par Stéphane Rak, 20/05/1993

« Il y a un risque de provocation »

Stéphane Maugendre, responsable du Syndicat des avocats de France (SAF), craint que le projet de loi ne soit la porte ouverte aux provocations entre policiers et jeunes des banlieues défavorisées. De plus, il conteste une « atteinte évidente aux droits de l’homme ».

LE QUOTIDIEN. – Les policiers vont pouvoir, sur instruction du procureur de lu République, procéder à tout contrôle d’identité sur un lieu et pendant un temps déterminé. Cela vous inquiète. Pourquoi?

Stéphane MAUGENDRE. – Les pratiques qui existaient avant ce projet de loi étaient déjà tellement attentatoires que je crains que les nouvelles mesures amènent à de graves débordements. Dans certaines banlieues, cela va rajouter, pire que de l’huile, de l’essence sur le feu. Les contrôles vont être considérés comme des provocations. Il suffit que les policiers ne soient pas doués en matière de psychologie et on peut courir tout droit à des catastrophes.

LE QUOTIDIEN. – Pourtant, comme le prévoit le projet de loi, ces mesures sont prises pour éviter les « troubles de l’ordre public »,

Stéphane MAUGENDRE. -Mais qu’est-ce que l’ordre public ? Je mets au défi quiconque du gouvernement de m’en donner une définition. Même nous juristes ne savons pas ce que c’est.

LE QUOTIDIEN. -Prenons à présent les arguments des partisans de cette réforme. Ils soulignent que tout cela se pressera sous contrôle judiciaire.

Stéphane MAUGENDRE. -Quel contrôle judiciaire? Pratiquement, ce qui va se passer, c’est qu’un procureur de la République va autoriser les contrôles tel jour sur tel secteur. Il y a, certes, un contrôle judiciaire a priori. Mais après, quel sera le contrôle ? Qu’allez-vous plaider si on vous dit que de toute manière les policiers agissaient sous couvert d’un ordre du procureur ?

LE QUOTIDIEN. -Les policiers s’étonnent que les contrôles d’identité par les caissières de supermarché ne choquent personne alors que des contrôles faits par les forces de l’ordre surprennent. Est-ce un bon argument?

Stéphane MAUGENDRE. -Absolument pas. Dans un cas, on est dans un rapport commercial, dans l’autre, dans un rapport qui concerne la liberté d’aller et venir.

LE QUOTIDIEN. -Certaines personnes disent que les contrôles ne les dérangent pas, dans la mesure où elles n’ont rien à se reprocher…

Stéphane MAUGENDRE. -J’ai hâte de réentendre ces personnes le jour où, et ça arrive à tout le monde, elles sortiront se promener en oubliant simplement leurs papiers. Ou bien le jour où elles perdront de précieuses minutes alors qu’elles ont un rendez-vous urgent, parce que dans le métro, le procureur a autorisé un contrôle d’identité et qu’un bouchon s’est formé dans les couloirs, parce que ça prend du temps de contrôler tout le monde. Et de toute manière, j’aimerais qu’on me dise en vertu de quoi nous sommes contraints d’avoir en permanence nos papiers sur nous.

Ce qu’ils en pensent

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« Attention ! »

Me Jean-Pierre Léon, président de la Fédération nationale des jeunes avocats :

« Je suis très réservé. Généraliser les contrôles d’identité préventifs est  inquiétant. Cela remettrait en cause la jurisprudence qui interprète la loi de façon restrictive afin de protéger le plus possible les droits des individus. On risquerait de retomber dans des contrôles uniquement motivés par la simple apparence physique. En fait, cela revient à toucher à la liberté d’aller et venir et aux droits de l’homme. Je comprends, bien sûr, la nécessité d’assurer la sécurité des personnes, mais si l’équilibre entre la loi et la jurisprudence est rompu, alors, je dis : attention ! »

« Au faciès »

Me Stéphane Maugendre, président de la commission pénale du Syndicat des avocats de France :

« C’est la porte ouverte au « contrôle au faciès ». Aujourd’hui, ces contrôles existent déjà dans les faits. Un exemple : une avocate arrive en audience de comparution immédiate pour défendre un étranger en situation irrégulière. Selon les policiers qui avaient interpellé celui-ci, il s’était dissimulé derrière un arbre à leur approche. Hasard : l’avocate habitait dans cette rue, elle la connaît bien. Il n’y a pas un seul arbre dans cette artère. »

«Indispensable»

Me Henri Garaud (Légitime défense) :

« Le contrôle préventif d’identité est indispensable. On contrôle les chèques, pourquoi pas les gens ? Pour éviter les débordements, il faut tout simplement un meilleur encadrement des policiers : les brigadiers-chefs doi¬vent être sur le terrain avec les officiers de police ».

POLICIERS

« tout à fait favorables »

Stéphane Folcher, secrétaire général de l’USC-Police :

« Nous sommes tout à fait favorables à la généralisation des contrôles d’identité. C’est une mesure qui s’impose en raison de la situation actuelle : délinquance et immigration clandestine. Les tribunaux interprètent de façon trop restrictive le cadre d’application de ces contrôles. Sans tomber dans le « délit de sale gueule”, il faut permettre que le travail des policiers, qui consiste à veiller à la sécurité des biens et des personnes, soit fait. Ces contrôles ne peuvent s’exercer que dans le cadre de la loi. S’ils se généralisent, ils constitueront un facteur de motivation pour les fonctionnaires de police ».

« Trouver un équilibre »

Jean-Pierre Bordier secrétaire adjoint de la FASP :

« La loi actuelle permet largement aux forces de police d’exercer les contrôles d’identité préventifs. Évidemment, les tribunaux ont tendance à interpréter cette loi en établissant des critères objectifs : deux personnes qui parlent une langue étrangère ne sont pas forcément des étrangers. Élargir les contrôles reviendrait à attenter aux libertés individuelles, notamment celle de circuler. De plus, la police ne peut pas régler à elle seule les problèmes de société. Si nous n’avons plus que cette solution, c’est un pan de la démocratie qui s’en va. Il faut trouver l’équilibre entre le droit et les moyens efficaces permettant de mettre à la disposition de la justice ceux qui sont allés à l’encontre de la loi républicaine ».

MAGISTRATS

« Assouplir, mais… »

Claude Pernollet, président de l’Union des syndicats de la magistrature :

« A cause de l’interprétation restrictive des tribunaux, pour justifier les contrôles d’identité préventifs, les policiers ont aujourd’hui recours à des procédures hypocrites: dire par exemple que telle personne traversait en dehors des passages protégés ! Il faudrait donc assouplir le système actuel afin que les contrôles puissent s’effectuer sans pour autant tomber dans un État policier. Par exemple, ces contrôles devraient être facilités dans les lieux de délinquance connus, comme le métro ou certains quartiers à risque transformer la France en un  « camp géant » ou laisser le pays à l’anarchie : aucune de ces deux solutions n’est acceptable ».

« Vers des abus »

Jean-Claude Bouvier, président du bureau du Syndicat
de la magistrature :

« Nous restons très vigilants. En s’affranchissant de toute contrainte juridique, on permet des abus. Avec la généralisation de ces contrôles, on pourrait ainsi arrêter n’importe qui n’importe quand Les premiers vises sont, bien évidemment, les étrangère, avec à la clef le – délit de faciès ». C’est là une attitude complètement attentatoire aux libertés fondamentales. Dans la loi actuelle, il existe un cadre juridique d’application. Si on libéralisé, il n’y aura plus de garde-fou. Les policiers doivent pourtant comprendre qu’ils ne peuvent pas faire tout et n’importe quoi. Sinon, c’est la porte ouverte à tous, les abus et la création d’un véritable État policier ».