Jean-François Copé assure « ne pas vouloir remettre en cause le droit du sol ». Pourtant, la proposition de loi que l’UMP compte présenter d’ici la fin de l’année prévoit bel et bien une réforme du droit du sol et, comme l’a annoncé son président, la fin de l’acquisition automatique de la nationalité pour les enfants nés en France de parents étrangers.
« Quand on est né en France de parents étrangers en situation irrégulière, on n’a pas vocation à y rester et il n’est pas possible d’obtenir la nationalité française. Les enfants nés de parents étrangers en situation régulière ne peuvent pas obtenir la nationalité française de manière automatique. Ils doivent en faire la demande », estime notamment Jean-François Copé. En s’attaquant ainsi au droit du sol, il remet en cause l’un des fondements du pacte républicain et de la législation française sur la nationalité. A quelles conditions un enfant né en France de parents étrangers peut-il demander la nationalité française ? « Le Nouvel Observateur » fait le point.
- Pas de « droit du sol simple »
La loi Guigou du 16 mars 1998 relative à la nationalité a rétabli l’automaticité de l’obtention de la nationalité française aux enfants nés en France de parents étrangers. Elle ne précise pas si les parents doivent ou non être en situation régulière au moment de la demande de l’enfant. Avant cela, la loi Méhaignerie du 22 juillet 1993, qui avait réformé le code de la nationalité, avait supprimé cette automaticité : les jeunes nés en France de parents étrangers devaient explicitement faire une demande entre 16 et 21 ans.
Pour autant aujourd’hui, « il n’y a pas en France de droit du sol simple », insiste Marie Henocq, coordinatrice de la commission migrants pour la Cimade (association de solidarité avec les migrants, les réfugiés et les demandeurs d’asile), puisqu' »un enfant naissant en France de parents étrangers n’est pas Français du seul et simple fait d’être né en France ». Le président du Gisti (Groupe d’informations et de soutien des immigrés), Stéphane Maugendre (avocat), confirme : « Le bon sens populaire voudrait que né en France, on est automatiquement Français. Ce n’est pas vrai ».
- A 18 ans : Français « automatiquement » et de plein droit si…
Aujourd’hui, en vertu du droit du sol, tout enfant né en France de parents étrangers acquiert la nationalité française automatiquement quand il atteint ses 18 ans, s’il réside en France à cette date et s’il y a vécu pendant au moins cinq ans (de façon continue ou discontinue) depuis l’âge de 11 ans.
« En pratique, une instruction détaillée et poussée est réalisée pour vérifier la réalité de la présence de l’enfant et ses conditions de séjour » commente l’avocat spécialisé dans la défense des droits des étrangers Bruno Vinay. « Un seul voyage dans le pays d’origine au-delà des vacances scolaires peut être de nature à compromettre cette présence. »
Sinon, la personne pourra faire une demande de naturalisation à l’âge de 18 ans.
« En théorie. Rarissime en pratique, dès lors que toute naturalisation suppose que soit satisfait le critère incontournable de l’autonomie financière au cours des trois dernières années ainsi qu’une intégration professionnelle » poursuit Bruno Vinay.
- Avant 18 ans : Français sur demande si…
Tout enfant né en France de parents étrangers peut aussi acquérir la nationalité française avant sa majorité. Ses parents peuvent la demander quand l’enfant atteint 13 ans, s’il vit en France depuis ses 8 ans. A 16 ans, l’adolescent peut réclamer seul la nationalité française s’il a vécu en France (de façon continue ou discontinue) pendant au moins cinq ans depuis l’âge de 11 ans.
- Le « double droit du sol »
Le droit du sol ne s’applique qu’aux enfants nés de deux parents étrangers. Selon le Code civil, si l’un des deux est Français, c’est le droit du sang qui s’applique, ou l’obtention de la nationalité via la filiation, qui domine en France. L’enfant obtient automatiquement la nationalité française à sa naissance, quel que soit son lieu de naissance, que ses parents soient mariés ou non, dès lors que le parent français apparaît sur l’acte de naissance.
« On ne peut parler d’automaticité que dans deux cas : quand un des parents est Français ou qu’il est né sur un territoire français, dans le cadre du ‘double droit du sol' » explique aussi Stéphane Maugendre. Tout enfant né en France d’au moins un parent étranger naît français si ce parent est lui-même né en France. Ce qui concerne notamment les enfants dont les parents sont nés en Algérie avant 1962. « C’est ce qu’on appelle le ‘double droit du sol‘ » précise Bruno Vinay. « Il signifie : ‘je suis né en France de parents nés sur un territoire qui était français à l’époque de leur naissance' ».
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