Archives de catégorie : droit pénal

Des juges devancent la réforme de la garde à vue

 , 23/12/2010

Des magistrats de Créteil (Val-de-Marne) et de Bobigny (Seine-Saint-Denis) ont demandé aux policiers de rappeler aux gardés à vue leur droit au silence.

Des magistrats de Créteil (Val-de-Marne) ont décidé d’anticiper la réforme de la garde à vue (GAV) que le gouvernement doit rendre conforme à la Constitution et au droit européen avant le 1er juillet 2011. Dans un courrier du 6 décembre, les onze juges de Créteil demandent aux directions de la police, de la gendarmerie et des douanes de faire respecter, dès le 3 janvier, deux principes dans le cadre de leurs instructions : informer la personne en GAV de son droit à garder le silence, ce qui n’est actuellement pas obligatoire, et assurer la présence d’un avocat dès la première heure dans tous les types d’affaires, sauf décision contraire motivée du juge.

Magistrats et policiers en désaccord

La 17e chambre correctionnelle de Bobigny (Seine-Saint-Denis) a devancé elle aussi la réforme mardi soir en annulant les poursuites visant cinq personnes qui devaient être jugées en comparution immédiate. Motif : le droit au silence ne leur avait pas été notifié au cours de leur GAV.

Les trois juges de la 17e ont estimé que cette notification ne nécessite pas d’organisation particulière et peut être effective tout de suite. Les cinq prévenus ont été relâchés, mais le parquet de Bobigny a fait appel, estimant que « ni la loi ni la jurisprudence n’impose cela avant le 1er juillet ». « Soit c’est conforme, soit ça ne l’est pas, oppose Stéphane Maugendre, avocat qui a plaidé mardi avec succès à Bobigny cette nullité. Ce rappel au droit de se taire n’est pas anodin. C’est important de donner la possibilité à quelqu’un en situation de vulnérabilité de ne pas céder à une éventuelle pression psychologique. »
« Rappeler à un gardé à vue son droit au silence ne nous pose aucun souci », relève Michel-Antoine Thiers, responsable national du Snop, premier syndicat d’officiers de police. En revanche, il s’élève contre « l’injonction » des magistrats de Créteil au sujet de la présence d’un avocat dès la première heure, qui n’est aujourd’hui pas prévue par la loi dans les dossiers de trafic de stupéfiants ou de criminalité organisée par exemple. « Ces juges anticipent la loi future sans savoir ce qu’elle sera précisément. Nous, on respecte le droit tel qu’il est écrit aujourd’hui », explique Michel- Antoine Thiers, qui invite les officiers à demander à être dessaisis d’un dossier si les juges leur imposent une telle instruction.
A la chancellerie, on ne commente pas la décision de Bobigny ou l’initiative de Créteil. On rappelle simplement que les services du garde des Sceaux travaillent à la mise en conformité du régime de GAV dans les délais imposés. Cette année, ce régime a été sévèrement sanctionné par le Conseil constitutionnel, la Cour de cassation et la Cour européenne des droits de l’homme. Un dossier majeur, puisque au moins 800 000 personnes ont été placées en garde à vue l’an dernier.

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Réforme de la garde à vue : cinq procédures annulées par le tribunal de Bobigny

  Le Journal de Saône et Loire 22/12/2010

Cinq procédures ont été annulées par le tribunal de Bobigny, au motif que le droit de garder le silence n’avait pas été notifié par les policiers aux gardés à vue, a-t-on appris mercredi de sources concordantes.
Le parquet a fait appel dans les cinq dossiers, a-t-il indiqué.
«Depuis 15 jours, les avocats déposent des conclusions de nullité par rapport à la garde à vue dans les dossiers dans lesquels ils sont de permanence», a expliqué Me Stéphane Maugendre (avocat)à l’AFP.
«Elles étaient jusqu’ici rejetées, mais mardi, le tribunal a annulé cinq procédures sur le motif que le droit de garder le silence n’avait pas été notifié par les policiers aux gardés à vue», a poursuivi l’avocat, chargé de deux des cinq dossiers.
Il s’agissait d’affaires de vol, de violences légères ou de menaces, a indiqué Me Maugendre.
«Les plus hautes juridictions sont venues nous dire que le droit français était illégal, donc nous n’attendons pas la loi» pour demander que le droit de garder le silence soit notifié, a-t-il poursuivi.
Le projet de réforme de la garde à vue doit être examiné à l’Assemblée nationale à partir du 18 janvier.
Le 19 octobre, la Cour de Cassation, la plus haute juridiction judiciaire française, avait déclaré la garde à vue non conforme au droit européen, invoquant le «droit au silence» de la personne interpellée et la nécessaire «présence de l’avocat», y compris pour les infractions les plus graves, sauf «raisons impérieuses».
Elle a donné au gouvernement jusqu’au 1er juillet 2011 pour que de nouvelles règles entrent en vigueur, s’alignant sur le délai accordé par le Conseil constitutionnel, qui avait censuré cet été le régime de garde à vue de droit commun.

Garde à vue : 5 procédures annulées

Cinq procédures ont été annulées par le tribunal de Bobigny, au motif que le droit de garder le silence n’avait pas été notifié par les policiers aux gardés à vue.

Le parquet a fait appel dans les cinq dossiers, a-t-il indiqué. »Depuis 15 jours, les avocats déposent des conclusions de nullité par rapport à la garde à vue dans les dossiers dans lesquels ils sont de permanence », a expliqué Me Stéphane Maugendre.

« Elles étaient jusqu’ici rejetées, mais mardi, le tribunal a annulé cinq procédures sur le motif que le droit de garder le silence n’avait pas été notifié par les policiers aux gardés à vue », a poursuivi l’avocat, chargé de deux des cinq dossiers. Il s’agissait d’affaires de vol, de violences légères ou de menaces, a indiqué Me Maugendre.

« Les plus hautes juridictions sont venues nous dire que le droit français était illégal, donc nous n’attendons pas la loi » pour demander que le droit de garder le silence soit notifié, a-t-il poursuivi. Le projet de réforme de la garde à vue doit être examiné à l’Assemblée nationale à partir du 18 janvier.

Le 19 octobre, la Cour de Cassation, la plus haute juridiction judiciaire française, avait déclaré la garde à vue non conforme au droit européen, invoquant le « droit au silence » de la personne interpellée et la nécessaire « présence de l’avocat », y compris pour les infractions les plus graves, sauf « raisons impérieuses ».

Elle a donné au gouvernement jusqu’au 1er juillet 2011 pour que de nouvelles règles entrent en vigueur, s’alignant sur le délai accordé par le Conseil constitutionnel, qui avait censuré cet été le régime de garde à vue de droit commun.

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Réforme de la garde à vue : cinq procédures annulées par le tribunal de Bobigny

 Accueil, 22/12/2010

Cinq procédures ont été annulées par le tribunal de Bobigny, au motif que le droit de garder le silence n’avait pas été notifié par les policiers aux gardés à vue, a-t-on appris mercredi de sources concordantes. Le parquet a fait appel dans les cinq dossiers, a-t-il indiqué. « Depuis 15 jours, les avocats déposent des conclusions de nullité par rapport à la garde à vue dans les dossiers dans lesquels ils sont de permanence », a expliqué Me Stéphane Maugendre (avocat). « Elles étaient jusqu’ici rejetées, mais mardi, le tribunal a annulé cinq procédures sur le motif que le droit de garder le silence n’avait pas été notifié par les policiers aux gardés à vue », a poursuivi l’avocat, chargé de deux des cinq dossiers. Il s’agissait d’affaires de vol, de violences légères ou de menaces, a indiqué Me Maugendre. « Les plus hautes juridictions sont venues nous dire que le droit français était illégal, donc nous n’attendons pas la loi » pour demander que le droit de garder le silence soit notifié, a-t-il poursuivi. Le projet de réforme de la garde à vue doit être examiné à l’Assemblée nationale à partir du 18 janvier. Le 19 octobre, la Cour de Cassation, la plus haute juridiction judiciaire française, avait déclaré la garde à vue non conforme au droit européen, invoquant le « droit au silence » de la personne interpellée et la nécessaire « présence de l’avocat », y compris pour les infractions les plus graves, sauf « raisons impérieuses ». Elle a donné au gouvernement jusqu’au 1er juillet 2011 pour que de nouvelles règles entrent en vigueur, s’alignant sur le délai accordé par le Conseil constitutionnel, qui avait censuré cet été le régime de garde à vue de droit commun.

Maxime Tandonnet, la plume trempée dans l’extrême droite de Nicolas Sarkozy

Mathilde Mathieu

Extrait : D’où vient le conseiller «immigration» de l’Elysée, à qui on doit le discours de Grenoble? Enquête sur Maxime Tandonnet, pourfendeur du métissage, qui a fréquenté Chevènement, Pasqua, puis de Villiers. Et qui affirme que «la plupart des délinquants sont d’origine étrangère, relativement récente».

Jusqu’au discours de Grenoble, le 30 juillet dernier, personne n’avait entendu parler de Maxime Tandonnet, conseiller immigration de Nicolas Sarkozy depuis plus de cinq ans. Ce haut fonctionnaire de 52 ans, très «techno», vivait presque caché (en comparaison d’autres éminences élyséennes): pas un portrait dans les journaux, pas de passages télé.

Puis cet été, il a rédigé cette allocution présidentielle qui distinguait «les Français d’origine étrangère» du reste de la Nation, établissait un lien entre la délinquance et «cinquante ans années d’immigration insuffisamment régulée», décrétait sans ambages «l’échec de l’intégration»… Là, son téléphone a …

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Argenteuil: soupçon de bavure policière

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Un rapport de la commission nationale de déontologie de la sécurité relance la thèse de la bavure policière après la mort d’Ali Ziri en juin 2009, révèle France Info.

L’homme, âgé de 69 ans, avait été arrêté avec son ami Arezki Kerfali, 61 ans, le 9 juin à bord de leur véhicule, à Argenteuil. Selon le collectif de soutien « Vérité et justice », les deux hommes auraient subi des coups de la part des policiers. Ils avaient ensuite été transportés à l’hôpital d’Argenteuil, où M. Ziri était décédé. Vingt-sept hématomes avaient été relevés sur son corps, le plus long mesurait 17 centimètres.

Une première autopsie conclut à une crise cardiaque due à un fort taux d’alcoolémie, une conclusion que contredit un nouveau rapport de la commission nationale de déontologie de sécurité. Le traitement reçu par Ali Ziri après son arrestation a été particulièrement violent, rapporte le rapport, qui s’appuie sur des images de vidéo surveillance. On y voit en effet Ali Ziri être expulsé du véhicule de police, jeté au sol, menotté, allongé par terre la tête dans le vomi.

La commission de déontologie réclame des sanctions à l’encontre des policiers visibles sur les vidéos. Arezki Kerfali doit quant à lui comparaître devant le tribunal en 2011 pour outrage à agent.

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Soupçon de bavure policière au commissariat d’Argenteuil

  Pauline Fréour, 25/06/2010

Un sexagénaire, couvert d’hématomes, était mort deux jours après son arrestation en juin 2009. La commission nationale de déontologie de la sécurité réclame des sanctions contre les policiers présents ce soir-là.

Les images tournées par la caméra de surveillance de la cour du commissariat d’Argenteuil (Val d’Oise), visionnées par la commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS), montrent Ali Ziri se faire jeter à terre, menotté. Il serait ensuite resté une heure allongé par terre dans le commissariat, la tête dans son vomi, avant d’être conduit à l’hôpital. Cet homme de 69 ans, arrêté le 9 juin 2009 pour un contrôle routier en compagnie d’un ami, est mort deux jours plus tard. Sur son corps, 27 hématomes ont été relevés, dont un long de 17 cm.

La première autopsie conduite en juin après le décès avait écarté la possibilité qu’un traumatisme ait entraîné la mort. Mais un mois plus tard, un juge d’instruction est saisi de l’affaire et une seconde autopsie relève un plus grand nombre d’hématomes. Les conclusions évoquent «la mort par anoxie, c’est-à-dire manque d’oxygène», expliquait alors Me Sami Skander, l’avocat de la famille Ziri.

«La responsabilité d’un policier»

Près d’un an après les faits, la CNDS, autorité administrative indépendante chargée de veiller au respect de la déontologie des policiers et gendarmes, publie un rapport «accablant» sur le déroulement du drame, rapporte France Info, qui a pris connaissance du document. Au point de réclamer des sanctions contre les policiers visibles sur les vidéos et les agents présents au commissariat.

«C’est une bavure policière, affirme Me Stéphane Maugendre, avocat de la famille Ziri, au micro de la radio. Je pense très sincèrement qu’ils n’ont pas voulu la mort de monsieur Ali Ziri, mais je pense que l’ensemble des hématomes et le décès qui s’en est suivi est de la responsabilité des policiers ou d’un policier, et que c’est donc une bavure».

Une interpellation «un peu musclée»

Secrétaire du syndicat Alliance-police nationale du Val d’Oise, Ludovic Collignon rappelle de son côté qu’Ali Ziri «était très saoul» lors de son arrestation et qu’il a fallu le sortir du véhicule de force. «Ca a été un peu musclé. L’interpellation, déjà, ne s’est pas passée dans la douceur, puis, au commissariat, ils ont dû s’y mettre à plusieurs pour l’extraire du véhicule, explique-t-il au figaro.fr. Vous savez, quand vous tenez quelqu’un par le bras de manière un peu ferme, sa peau marque, ça fait un hématome. Mais mes collègues nient formellement avoir porté des coups à M. Ziri, et les vidéos ne montrent par qu’il a été frappé ! Quant à sa position allongée au sol, c’était pour éviter qu’il ne s’étouffe dans son vomi car il était trop saoul pour tenir sur une chaise». Ludovic Collignon souligne également que l’interpellé «était conscient quand il a été conduit à l’hôpital» où «l’infirmière n’a même pas jugé utile qu’il soit vu par un médecin tout de suite».

Samedi soir, une centaine de personnes se sont réunies à Argenteuil à l’initiative du collectif Vérité et justice en mémoire du défunt, rapporte Le Parisien daté du 21 juin. Arezki Kerfali, l’ami d’Ali Ziri arrêté en même temps que lui, doit quant à lui comparaître devant le tribunal en 2011 pour outrage à agent.

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« La réforme de la double peine n’a rien changé »

Actualités Politique, Monde, Economie et Culture - L'Express Laura Béheulière,

La double peine n’est pas abolie. Le cas de cette mère chinoise menacée d’expulsion en est le parfait exemple.

Rattrapée par le principe de la double peine. Le quotidien Libération révélait hier l’histoire d’une mère chinoise de deux enfants, nés en France, et menacée par la Préfecture de Paris pour avoir fait un séjour en prison. Celle-ci rendra sa décision dans la journée. La femme a derrière elle un parcours difficile. Son mari, français, la bat et accumule maîtresses et enfants. Un jour, Li rencontre une de ses rivales. La bagarre éclate et la maîtresse de son mari décède quelques heures plus tard. Li est condamnée en 2007 à 10 ans d’emprisonnement pour « violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner ».

Aujourd’hui en liberté conditionnelle, aux côtés de ses enfants âgés de 8 et 10 ans, elle retrouve un semblant de vie normale. Mais le principe de la double peine vient de la rattraper, alors qu’il était censé avoir été aboli. Bien qu’elle ait honoré sa dette envers la société en purgeant ses années de prison, elle doit en effet payer une seconde fois, puisque, en tant qu’étrangère dotée d’un casier judiciaire, elle est expulsable. Si la préfecture tranche en faveur de l’expulsion, au motif qu’elle constitue une menace pour l’ordre public, les deux jeunes enfants de Li seront privés de leur mère.

Décryptage avec Jérôme Martinez, délégué national de la Cimade, et Stéphane Maugendre, avocat et président du Gisti.

La double peine existe toujours?

rôme Martinez (Cimade): En 2003, à la suite des déclarations de Nicolas Sarkozy alors ministre de l’Intérieur, tout le monde a cru que la double peine avait été supprimée. De nombreuses associations dont la Cimade avaient milité en ce sens, mais la réforme de la loi n’a en réalité globalement rien changé, excepté pour quelques cas extrêmes. Elle a simplement créé des catégories de personnes protégées, c’est-à-dire non expulsables.

Qui sont ces personnes protégées de la double peine?

Jérôme Martinez (Cimade): Il y a une protection quasi absolue qui concerne les mineurs, les habitants du territoire de moins de 13 ans, les personnes résidant en France de façon régulière depuis 20 ans, et ceux ayant une résidence régulière depuis 10 ans avec des enfants. Il y a aussi, comme toujours, des exceptions à ces protections: elles concernent les terroristes et les personnes condamnées pour incitation à la haine par exemple. Il y a une deuxième catégorie de protection, que j’appelle protection relative. L’administration, pour certaines personnes, doit motiver sa décision, expliquer pourquoi elle veut l’expulser.

Stéphane Maugendre (Gisti): En réalité, seuls les mineurs sont complètement protégés. Pour ne pas être expulsé, il faut en effet remplir 7 à 8 conditions cumulatives. Elles sont si strictes qu’il est impossible de toutes les remplir. Le gouvernement fait donc ce qu’il veut. Il lui suffit de dire qu’une personne ne remplie pas une seule des conditions pour l’expulser.

A quoi peut-on donc s’attendre cette mère de deux enfants qui attend aujourd’hui l’avis de la Préfecture de Paris?

Stéphane Maugendre (Gisti): Normalement, une personne placée dans le cadre d’une libération conditionnelle voit son interdiction du territoire suspendue. C’est une disposition de la loi de Nicolas Sarkozy de 2003. Elle fait donc partie des personnes qui ne devraient pas se faire expulser.

De plus, il y a trois éléments importants qui jouent en sa faveur:

– Elle a été jugée en cours d’assises, et donc par un tribunal populaire. Si la Préfecture donne un arrêté d’expulsion, elle se substitut à ce jugement;

– Une commission d’expulsion, composée de trois magistrats (dont deux de l’ordre judiciaire et un de l’ordre administratif), a donné un avis défavorable à l’expulsion;

– Elle est sous libération conditionnelle, ce qui signifie qu’un juge d’application des peines, voire une commission d’application des peines, a décidé qu’elle pouvait bénéficier d’une mesure d’aménagement de peine, ce qui montre qu’elle ne représente pas nécessairement un trouble à l’ordre public.

Jérôme Martinez (Cimade): Une fois la mesure prise par la préfecture de Paris, s’il s’agit d’une expulsion, il sera possible pour elle d’aller jusqu’à la Cour Européenne des droits de l’homme, ou de saisir le tribunal en référé pour suspendre l’expulsion. Mais il faudra aller très vite car cette la femme constitue aux yeux de la préfecture « une menace pour l’ordre public », elle sera expulsée rapidement.

De nouvelles réformes de la loi sont-elles prévues?

Jérôme Martinez (Cimade): Ce qui est prévu est de remettre à zéro cette mini avancée de 2003. Le 27 septembre sera examiné à l’Assemblée le projet de loi sur l’immigration et l’asile. Ce que le ministre de l’Immigration Eric Besson propose, c’est la possibilité d’expulser une personne pendant 5 ans sans possibilité de retour. Cette fois, aucune protection n’est prévue par la loi. Sept ans après sa réforme, la double peine est en train de se généraliser. On revient 20 ans en arrière. Des cas comme celui là, on va en avoir des dizaines, et pas uniquement concernant des personnes ayant été condamnées par la justice.

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Le meurtrier d’Ali, l’épicier au grand cœur, prend 12 ans

 Didier Arnaud,

C’est un procès déroutant. Les règles y sont chamboulées, à cause de l’état de l’accusé. Fou ? Pas si dingue que ça ? Peut-il être jugé ? Dans le box des assises de Bobigny, depuis mardi matin, Eric Kokoszka, 45 ans, meurtrier présumé d’un épicier d’Epinay-sur-Seine, en Seine-Saint-Denis, se tient à l’écart. Pull gris, cheveux ras, menton crispé, qui avance et recule sans maîtrise apparente. Et une voix qui monte dans les aigus, lance parfois un borborygme-gargouillis incompréhensible, aggravé parce qu’il est édenté. Parfois, pourtant, il semble cohérent, Eric. Le jour des faits, décrit par l’homme qui l’hébergeait :«C’était une belle journée, on avait enfin du soleil, il était joyeux, je ne sais pas ce qui lui a pris de faire ça.» Ça ? Porter des coups de couteau, le 4 septembre 2007, dont un mortel, à son «copain» l’épicier, en lui disant : «Tu as vendu mon âme au diable, tu vas le regretter.» Quand on lui demande pourquoi il l’a assassiné, il répond avoir entendu des voix qui le «persécutent» et lui susurrent des choses obscènes, le traitent de «pute», l’encouragent à tuer Ali.

Ali Zebboudj, 54 ans, l’épicier du quartier de La Source à Epinay. Ali n’est pas n’importe qui. Personnage central du documentaire Alimentation générale, diffusé en novembre 2006 sur la chaîne Planète, il apparaît comme un type sensationnel, qui accueille tout le monde, conseille qui veut, fait crédit à qui a besoin. Ali, un carrefour du quartier, un lien social dont les banlieues manquent tant. A La Source, un endroit plutôt calme, il est connu comme le loup blanc. Bon homme. Qui aimait lire, chanter, philosopher. Un sage, Ali.

Famille seule.«Pour moi, c’était un résistant. Il faisait vivre un lieu devenu presque trop essentiel», a dit Chantal Briet, la documentariste, citée à la barre par la partie civile. Plus loin, Chantal cherche une raison : «Il portait trop tout tout seul. Il devait combler beaucoup de manques dans la cité.» Au tribunal, la cité qui s’était manifestée au moment du décès est curieusement absente. Sa famille est soudée, mais bien seule. L’épouse d’Ali, ses enfants, ne se sont toujours pas remis de sa disparition soudaine. Après la ronde des psychiatres à la barre, un de ses enfants a lancé dans la salle des pas perdus : «Et nous, on nous demande si on a besoin d’assistance ? Quelqu’un s’occupe de notre état psychologique ?» David, à la barre, n’arrive pas à dire le nom du meurtrier de son père. Il l’appelle «l’accusé».

Eric Kokoszka a-t-il quelque chose à faire devant une cour d’assises ? Avant même le début des débats, une source judiciaire confiait : «On va surtout essayer de savoir si le prévenu est responsable de ses actes.» N’est-il pas un accusé bien dans l’air du temps imposé par Nicolas Sarkozy, qui avait décrété, à l’occasion du meurtre de deux employées de l’hôpital de Pau en 2004, que les «fous» devaient être jugés. Pour que les victimes aient, aussi, «droit» à un procès ? Tout au long des débats cette semaine, la question de l’irresponsabilité taraude l’assistance, chacun guettant un geste de l’accusé pour étayer son jugement. Alors, dément ou pas ?

Les jurés affichent un air circonspect. Le président vacille sur ses suppositions : le premier matin du procès, il était convaincu de la «responsabilité» de l’auteur. Après le passage des psychiatres, il semble moins sûr. Les journalistes, eux, ne savent pas trop à quels saints se vouer.

«Variations». Pendant l’audience, les avocats de la défense ne se penchent pas, comme à leur habitude, vers leur client pour lui faire des remarques, lui glisser un conseil, lui demander de changer d’attitude. «Il a assisté à son procès en spectateur», glisse Karen Azria, avocate de la défense avec Me Stéphane Maugendre. Il ne comprend pas toujours les questions. Lorsque le procureur l’interroge sur ses «variations» dans ses déclarations, il «varie» aussi dans ses réponses. L’avocat général cherche un mobile, une préméditation. Avant de lui demander : comment vous vous définiriez ? «Malade. Mais ça va, vu que je prends mon traitement», répond Eric.

Le mobile ? «Ali me rabaissait, me traitait de clochard, me disait que j’étais indigne de ne pas travailler.» Eric n’aurait pas supporté. La préméditation ? Six mois avant les faits, il est allé acheter un couteau à dépecer le gibier chez un armurier près de la gare de l’Est à Paris. «Pour me défendre», assure-t-il. Pourtant, Eric passait beaucoup de temps dans la boutique d’Ali, qui lui offrait parfois un sandwich, lui proposait de travailler de temps en temps. Existait-il entre les deux un contentieux ? On a cherché une explication : Ali n’aurait pas payé Eric pour un boulot qu’il a effectué ; Eric a jalousé Ali, parce qu’il était devenu une «star», qu’il trouvait qu’il se la pétait depuis «le film». Tout est plausible mais le plus convaincant concerne les conseils amicaux d’Ali qui ont apparemment tourné la tête d’Eric. L’épicier lui disait qu’il fallait qu’il travaille et se proposait de l’aider. «Quelqu’un qui lui tend la main est pris pour un ennemi qu’il faut abattre. Prendre de l’aide pour un danger, c’est une interprétation délirante», souligne le psychiatre Bernard Lachaux, de l’unité des malades difficiles de l’hôpital Paul-Guiraud à Villejuif (Val-de-Marne). Ce médecin insiste sur l’état clinique d’Eric. Il souffre de psychose, est traité au Risperdal, un neuroleptique qui sert à stabiliser les gens. Le psychiatre démonte aussi l’argumentaire de son confrère, le Dr Frantz Prosper, qui suggère qu’Eric Kokoszka pouvait mentir sur son état pour minimiser sa responsabilité. La compagne de l’accusé, Gina, avec qui il a une petite fille de 7 ans, confirme avec ses mots la thèse du Dr Lachaux : «Il a pris ce que disait Ali plus fort que des conseils, il le prenait avec disproportion.»

Pourtant, il y avait eu des alertes précédentes, lorsqu’Eric ne prenait plus son traitement, qu’il remplaçait par un cocktail bière-cannabis. Quelques mois avant le meurtre, Gina avait alerté sur l’état de dangerosité de son compagnon. Le directeur général des services de la mairie d’Epinay : en vain. Le commissariat : en vain. «Il faut attendre qu’il y ait un mort pour faire quelque chose», lui aurait-on répondu. Son médecin a demandé une «hospitalisation d’office». En vain. Gina a eu l’impression de «taper à toutes les portes et de heurter des murs».

«Fossilisation». Eric est né à l’hôpital psychiatrique de Ville-Evrard (Val-de-Marne). Sa mère y était traitée pour schizophrénie. Elle était alcoolique. Comme son père. A l’adolescence, les quatre enfants se sont retrouvés «livrés à eux-mêmes». «C’était une vie avec des cris», a expliqué dans une déclaration Nadine, la sœur cadette, qui est graphiste dans la vie. «Eric est né quasiment en hôpital psychiatrique.» Nadine a décidé de ne pas avoir d’enfants par peur de «transmettre cette pathologie». Longtemps, elle a essayé de s’occuper de son frère, qui multipliait les petits boulots avant de toucher le RMI. Selon elle, son traitement médicamenteux le «fossilise». Le meurtre qu’il a commis, elle l’analyse comme ça : «Tuer quelqu’un et attendre la police, c’est une forme de suicide.»

Jeudi, le procureur, qui l’a jugé responsable de ses actes, a réclamé une peine de quinze ans de réclusion. Après trois heures de délibération, les jurés ont condamné Kokoszka à douze ans de prison et à une obligation de soins.

«Le problème, c’est qu’un acquittement par les jurés pour irresponsabilité au moment des faits risquerait de décevoir profondément les victimes», suggérait une source judiciaire à la veille du procès. On se rappelle aussi cette phrase prononcée par Nadine : «Selon moi, pour lui, la prison peut être un refuge. Mais il faut qu’il soit suivi psychiatriquement. Je pense qu’il pourrait se suicider en prison.»

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Le meurtrier d’Ali condamné à douze ans de réclusion

07/05/2010

Eric Kokoszka avait la conscience de son crime et du couteau de chasse qu’il tenait, le 4 septembre 2007 lorsqu’il a tué Ali Zebboudj, devant son épicerie du quartier de la Source, à Epinay-sur-Seine. La cour d’assises de Bobigny l’a confirmé, hier soir, dans son verdict de douze ans de réclusion criminelle, accompagné d’une injonction de soin de dix ans.

Trancher sur la question de l’état mental d’Eric Kokoszka s’est avéré moins difficile pour les jurés que pour la médecine légale, hier, dans la salle de délibération, où la cour a exprimé son « intime conviction » en moins de trois heures. Entre l’irresponsabilité d’Eric Kokoszka, invoquée par ses avocats, et sa responsabilité, même partiellement altérée, dont l’avocat général s’est montré convaincu, les jurés ont moins hésité que les six éminents psychiatres qui n’avaient pas réussi, depuis deux ans et demi, à le classer catégoriquement dans la nomenclature des troubles psychiatriques.
Tout l’avenir du meurtrier d’Ali reposait sur ce débat qui en ferait « un fou complet ou un demi-fou », comme l’a fustigé Me Maugendre, ouvertement désappointé.
Avant lui, l’avocat général s’était dit convaincu de la responsabilité de Kokoszka au moment de son crime. Convaincu mais avec prudence, en s’en remettant à « la question de la psychiatrie, qui fait la grande difficulté de ce dossier en apparence simple ». Elle avait déjà rendu perplexes tant d’experts qu’il fallait bien « l’aborder de manière modeste », avait reconnu Nicolas Péron, beaucoup plus assuré pour démontrer que Kokoszka avait l’intention de tuer Ali, ce matin de 2007.
« L’arme utilisée, le nombre de coups, leur localisation à la gorge, au thorax, au cœur… l’intention est évidente, il a frappé pour tuer! » avait lancé l’avocat général.
Quant à la préméditation, M. Péron n’en doutait guère plus : « Il avait déjà menacé Ali, huit mois plus tôt, et même lui avait annoncé qu’il le tuerait. Depuis, il mûrissait ce projet. » Enfin, s’il ne pouvait qu’admettre la réalité des troubles dont souffre Kokoszka, l’avocat général y voyait aussi « une ligne de défense », trop facilement brandie par le meurtrier d’Ali.
Des « voix » dans la tête de Kokoszka
Selon lui, « Kokoszka a des troubles du comportement mais il n’est pas classé dans la catégorie la plus grave […]. Il connaissait aussi son mal, le revendiquait presque, comme il avait choisi de fumer du cannabis, de boire de l’alcool, d’arrêter son traitement… Rien ne démontre qu’il ait été dans l’incompréhension et l’abandon ». Quant à l’avenir, M. Péron n’y a vu que danger, comparant Kokoszka à « un lac gelé en surface par les médicaments, mais dont le cocktail explosif doit être pris en compte ».
Après M. Péron, les deux avocats du meurtrier d’Ali ont eu du mal à rendre moins durs les regards portés sur Eric Kokoszka. « Il n’est pas un monstre qui a tué de sang-froid! » a protesté Me Karen Azria, qui contestait aussi la préméditation. « Il n’a jamais nié son crime, mais cet homme est malade. » Me Azria, comme ensuite son confrère Me Stéphane Maugendre, ont finalement échoué à convaincre les jurés que le meurtrier « n’était pas un homme libre, mais le prisonnier de sa lutte épuisante contre les voix ». Comme ils ont échoué à persuader le jury qu’aujourd’hui « il a compris le caractère indispensable de son traitement ». Pour la cour d’assises, le pari était trop risqué.

Avocat