Archives de catégorie : droit des étrangers

Désordres policiers

index édito, 23/05/1997

UN photographe de presse et un journaliste qui affirment avoir été matraqués par des policiers, avant que le premier se voie confisquer des films. Un cameraman, au même moment, empêché de filmer, les conditions d’intervention des forces de l’ordre, le 14 mai, au Stade de France, occupé par deux cents étrangers sans papiers, sont vivement contestées. Violences, passage à tabac, « Injures racistes », selon plusieurs témoins, auraient accompagné cette évacuation musclée. Une nouvelle fois, en quelques mois, se trouve mise en cause la façon dont sont conduites des opérations de maintien de l’ordre,

Cela avait déjà été le cas à Marseille, le 11 mars, à l’issue d’une importante manifestation contre le Front national, la po¬lice était alors violemment inter¬venue, utilisant matraques et grenades lacrymogènes pour disperser le cortège. Les affrontements avalent duré deux heures. Plus de deux cents plaintes de particuliers ont par la suite été déposées, un comité de soutien aux manifestants dénonçant la mise en place par la police, ce soir-là, « d’une souricière, d’une nasse à manifestants ». Devant l’émoi provoqué dans la ville, une enquête était confiée à l’Inspection générale de la police nationale, chargée d’établir d’« éventuelles responsabilités policières ». Sans attendre ses résultats, le préfet délégué pour la sécurité et la défense, Michel Sappin, devait reconnaître, le 29 avril, « une erreur opérationnelle de commandement » dans la façon dont avait été encadrée la manifestation.

Une polémique semblable a suivi la manifestation qui s’est tenue à Strasbourg au moment du congrès du front national, le 29 mars, les forces de l’ordre sont, cette fols, mises en cause pour avoir levé trop tôt certain dispositifs de sécurité, la nuit s’étant achevée par de violents incidents provoqués en centre-ville par quelques dizaines de mystérieux casseurs.

Cette multiplication d’incidents, ces accusations répétées de violences policières – des militants de Droit au logement ont également protesté contre la façon dont ils ont été évacués, dimanche 18 mai, d’un Immeuble occupé à Paris – laissent planer de graves soupçons sur des opérations conduites sous la responsabilité des préfets et des directeurs départementaux de la sécurité publique. Jean-louis Debré, ministre de l’Intérieur, toujours prompt à soutenir sans réserve ses fonctionnaires, n’a pas eu un mot pour rappeler les exigences des lois de la République, ni même pour réaffirmer que les opérations de maintien de l’ordre ne sauraient supporter un manque de rigueur et de professionnalisme.

Les années 70 avaient été rythmées de ces débordements policiers empreints de violence. A l’époque, le ministre de l’intérieur Raymond Marcellin s’était forgé en la matière une solide réputation. Il serait déplorable qu’un tel climat puisse renaître, alors même qu’en haut lieu on redoute la multiplication des conflits sociaux.

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La police accusée de violences lors d’une intervention au stade de France

index, Nathaniel Herzberg, 

Extrait : L’AFFAIRE semble tristement classique : une occupation, une échauffourée, un manifestant poursuivi pour « rébellion » et « coups et blessures à agent », et un procès. Témoignage contre témoignage, certificat médical contre certificat médical. La justice donne raison aux policiers et condamne le militant.

Pourtant, cette aventure, qui vient de conduire El Hadj Moumar Diop à la prison de Fleury-Mérogis, pourrait bien se transformer en cas d’école. Depuis sa condamnation, vendredi 16 mai, par le tribunal de Bobigny à quatre mois de prison ferme et dix ans d’interdiction du territoire, sa situation sert désormais d’emblème aux soutiens des sans-papiers. Plus une déclaration sans une mention de son cas.

Sa demande de libération devrait figurer en tête des revendications de la manifestation nocturne des sans-papiers, jeudi 22 mai, à Paris. Enfin une pétition, signée par près de 300 personnalités (cinéastes, comédiens, universitaires), associations ou syndicats, dénonce « la violence et les insultes racistes qu’il a dû subir » en espérant « que la justice ne devienne pas une annexe du ministère de l’intérieur ».

Il y a d’abord le déroulement des faits qui sont reprochés…

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Double appel contre les brutalités policières.

logo-liberation-311x113  Béatrice Bantman

Les signataires demandent la libération de Momar Diop.

Le temps des pétitions est revenu. Thème imposé: la violence policière. Exemples choisis: l’évacuation brutale, dimanche 18 mai, d’un immeuble parisien investi par des militants et des sans-logis et l’arrestation musclée d’un sans-papiers, mercredi 14 mai, lors d’une manifestation au Grand Stade de Saint-Denis (93). Conséquence judiciaires: des manifestants molestés par les forces de l’ordre se retrouvent condamnés ou mis en examen.

Deux appels ont déjà été signés par plus de 300 personnalités, associations ou syndicats pour protester contre les brutalités policières et réclamer la libération de Hel Hadj Momar Diop, interpellé au Grand Stade et condamné à quatre mois de prison pour, entre autres délits, «violences à agent». Tous les témoins affirment pourtant qu’il a été roué de coups par les policiers. Parmi les signataires, «indignés par la violence et les insultes racistes» subies par ce Sénégalais, qui vit en France depuis plus de vingt ans, figurent des cinéastes dont Manuel Poirier (prix du Jury au Festival de Cannes), Jacques Audiard ou Enki Bilal, des écrivains comme Dan Franck ou Jean Vautrin, des comédiens, dont Annie Duperey, ainsi que des chercheurs, des universitaires tels Léon Schwartzenberg, des élus dont le sénateur-maire (PCF) d’Aubervilliers, l’ancien ministre Jack Ralite. Tous demandent la libération immédiate et la régularisation de Diop «pour que la justice ne devienne pas une annexe du ministère de l’Intérieur».
Parallèlement, un appel unitaire contre la répression et les violences policières circule depuis hier pour dénoncer l’attitude brutale des forces de police, dimanche, lors de la tentative d’occupation d’un immeuble place d’Iéna, inoccupé depuis six ans et appartenant au Crédit Lyonnais. «Trois militants, qui protégeaient pacifiquement des matraques les familles et leurs enfants, ont été victimes de violences, arrêtés, placés en garde à vue et mis en examen pour rébellion à agent avec arme par destination», rappelle le texte, qui souligne que de nombreux témoignages et images filmées confirment que cette accusation est dénuée de tout fondement et n’est qu’un «montage policier».
Une manipulation du même style est évoquée à propos de l’arrestation et de la condamnation de Diop. Lors de la manifestation devant le Grand Stade, un photographe de l’agence Associated Press a été molesté et une de ses pellicules a été saisie, tandis que la caméra d’un jeune homme qui avait filmé la scène a été confisquée. «Si la version de la police est aussi claire, pourquoi a-t-on fait disparaître les preuves?», interroge Stéphane Maugendre, l’avocat d’El Hadj Momar Diop. Le Syndicat national des journalistes dénonce pour sa part ces violences qui empêchent l’exercice de la profession. Pourtant, deux jours plus tard, au procès de Diop, les versions contradictoires des policiers et un certificat médical qui relevait que la déviation de la cloison nasale dont se plaignait un des policiers était un traumatisme ancien, n’ont pas empêché le président du tribunal de condamner le prévenu pour violence à agent. «Ces violences s’attaquent à des mouvements de chômeurs, de « sans droits et d’exclus, qui s’expriment par les seuls moyens en leur possession: les manifestations, les marches et les occupations. Ils visent aussi les militants associatifs, les citoyens qui leur apportent leur soutien et les journalistes qui font leur travail d’information», conclut l’appel.

Un sans-papiers au tribunal après une interpellation musclée

logo-liberation-311x113 16/05/1997

El Hadj Momar Diop, Délégué de la coordination nationale des «sans-papiers, interpellé mercredi soir après l’occupation du stade de France de Saint-Denis, a été déféré hier soir au tribunal de grande instance de Bobigny (Seine-Saint-Denis). Il doit être présenté aujourd’hui en comparution immédiate pour «coups et blessures sur agent de la force publique» et «infraction à la législation sur les étrangers». Selon la police, il aurait, en se débattant dans le car, blessé un fonctionnaire appartenant a une brigade anticriminalité qui a eu un arrêt de travail de cinq jours. Mais, selon des témoins, ce sont au contraire les policiers qui auraient très brutalement interpellé. La coordination des sans-papiers parte même de “passage à tabac», Un photographe travaillant pour l’agence Associated Press, qui prenait des clichés de la scène, avait été aussi interpellé mercredi soir et relâché quelques heures plus tard. Il envisageait hier de porter plainte contre la police, qui avait jeté à terre son matériel photographique.

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Sénat : séance du 6 février 1997

M. le président « Art. 5. – La section 3 du chapitre II de la même ordonnance est abrogée. »

Sur l’article, la parole est à M. Robert Badinter.

M. Robert Badinter. Cet article prévoit la suppression de la commission départementale du séjour des étrangers, qui joue, dans le déroulement des procédures, un rôle extrêmement utile. Cette commission, composée de trois magistrats spécialisés, notamment d’un membre des juridictions administratives, rend son avis lorsqu’il s’agit de la délivrance ou du renouvellement des cartes de séjour.

Je souligne l’importance de cet avis parce que, lors des auditions auxquelles M. le rapporteur a procédé, les représentants des barreaux ont eu l’occasion de souligner ce que signifiait pour les étrangers la possibilité de se faire entendre par des magistrats à l’occasion d’un débat contradictoire.

Il n’est jamais indifférent pour quiconque de présenter devant des magistrats en occurrence ses moyens de défense en public. Cela permet de sentir que l’on est écouté, ce qui, à tous égards, est indispensable.

Jadis, cette commission rendait des décisions puis, à partir de 1993, elle est devenue une simple instance de consultation. Cependant, d’après les renseignements très précis qui nous ont été fournis par M. Maugendre, membre du Conseil de l’ordre, qui s’occupe beaucoup de telles affaires au barreau de la Seine-Saint-Denis – c’est-à-dire dans une préfecture où ces questions se posent avec acuité – plus de 90 % des avis rendus par la commission sont suivis par la préfecture.

Par ailleurs, à Paris, toujours selon ce praticien, compétent en la matière, il n’y a jamais eu de refus de délivrance de carte de séjour après un avis favorable de la commission.
La raison en est simple : nous sommes en présence de magistrats très compétents, notamment de magistrats du tribunal administratif, et je n’ai pas besoin de rappeler que ce n’est pas la simplicité qui caractérise cette législation, et ce ne sont pas les votes qui sont intervenus qui vont simplifier les choses.

Cette commission est utile, elle permet de donner à ceux qui font valoir leurs droits le sentiment qu’ils sont entendus et d’éviter des contentieux, parce que le préfet statue en parfaite connaissance de cause grâce à l’avis qu’elle rend.

Toutes ces raisons commandent son maintien et non sa suppression.

ML Michel Dreyfus-Schmidt Très bien !

M. Jean-Louis Debré, ministre de l’intérieur. Je demande la parole.

M. le président La parole est à M. le ministre.

ML Jean-Louis Debré, ministre de l’intérieur. Jusqu’à maintenant, la commission départementale du séjour des étrangers est essentiellement saisie du cas des conjoints de Français ou des parents d’enfants français……

Les lois Pasqua réformées sans « humanité ».

logo-liberation-311x113  Béatrice Bantman

Juristes et associations estiment que le projet Debré pénalise encore plus les étrangers.

«Un bout de gras donné à l’extrême droite et aux sans-papiers», «un projet qui ne tient pas compte des événements.» Les spécialistes, familiers des arcanes du droit des étrangers, qui ont analysé l’avant-projet de loi sur l’immigration du gouvernement (Libération du 9 octobre) sont sévères et parlent de durcissement et de répression. «Les dispositions les plus répressives sont à la fois innovantes et liberticides, et tout ce qui peut sembler libéral n’est en fait que l’application de textes actuellement en vigueur, ou de la jurisprudence appliquée depuis longtemps par les tribunaux administratifs», estime l’avocat Stéphane Maugendre. Défenseurs de nombreux étrangers, il regrette que ni les propositions des médiateurs, ni le travail de ceux qui ont réfléchi depuis des années sur l’immigration, n’ait jamais été pris en considération. «Le projet, dans sa forme actuelle, aggrave les conditions de traitement des étrangers à l’entrée et à la sortie», note de son côté Jean-Pierre Alaux pour le Gisti (Groupe d’information et de soutien des travailleurs immigrés). Pour lui, l’avant-projet Debré «ne tient pas compte des événements récents et ne régularise qu’une petite frange des immigrés. Ainsi, les parents d’enfants nés en France, qui sont déjà inexpulsables, sont absents du projet». Les juristes notent aussi que le texte fait preuve d’une grande méfiance envers la justice, puisqu’il fait passer de vingt-quatre à quarante-huit heures le délai de présentation au juge d’un étranger placé en rétention administrative. La déception est d’autant plus forte que la disposition la plus libérale inscrite dans l’avant-dernière mouture, qui interdisait d’expulser les étrangers dont l’éloignement aurait des conséquences «d’une gravité exceptionnelle», a disparu de l’avant-projet définitif. Et que les déboutés du droit d’asile voient leurs possibilités de recours encore un peu plus limitées. D’autres critiques portent sur les pouvoirs ­jugés excessifs­ accordés aux maires pour contrôler la réalité des certificats d’hébergement. «Pour réprimer les étrangers, on porte atteinte à la liberté des Français», déplore-t-on au Gisti.

«On en profite pour resserrer les verrous», résume, au PS, Martine Aubry. Une intention dont se défendent, à droite, ceux qui ont travaillé au projet: bien que des concessions ont été faites en direction des plus répressifs sur la rétention administrative et les certificats d’hébergement, ils soutiennent, que la loi autorise un maximum de régularisation et tire, sans équivoque, les leçons de la crise estivale des sans-papiers. Mais sera-t-elle suffisante pour éviter d’autres Saint-Bernard?. – 24 membres d’un collectif de sans-papiers, dont une militante du MRAP et 2 sans-papiers ont été arrêtés et conduits dans les locaux de la police. Ils participaient à une manifestation qui n’avait pas été déclarée auprès de la préfecture.

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Nuit policière pour dix enfants de Chinois sans papiers.

index Philippe Bernard, 08/10/1996

DIX ENFANTS viennent de passer une journée et une nuit entière au commissariat de police de Bobigny (Seine-Saint-Denis). Adolescents au couteau ? Voleurs de supermarché ? Non, enfants de Chinois sans papiers. Le plus jeune, un bébé de six mois, se prénomme Geneviève. La plus âgée va sur ses quatorze ans. Ils sont nés en France ou y sont scolarisés. L’affaire commence par l’une de ces rumeurs de régularisation qui précipitent «dans la gueule du loup», c’est-à-dire dans les préfectures, des étrangers en situation irrégulière. Ces temps-ci, la rumeur veut que les parents d’enfants nés en France puissent bénéficier des largesses de l’administration. Elle est née en juin, d’un communiqué du ministère de l’intérieur justifiant par ce motif la régularisation de certains Africains de l’église Saint-Ambroise.

« UN PIÈGE »

Lundi 3O septembre, M. et Mme Lim, Mme Huang et Mme Luo se présentent donc à la préfecture de Bobigny. Là, affirment ces personnes, un employé leur remet une note manuscrite leur proposant de revenir afin de « prendre rendez-vous pour un examen de situation ». Le lendemain matin dès 5 heures, les voilà à nouveau dans la file d’attente, accompagnées cette fois de leurs trois enfants. Le guichetier constate leur situation illégale et appelle la police.

Au début de l’après-midi, parents et enfants, bébé compris, se retrouvent au centre de rétention situé dans le commissariat. Ils ne retrouveront la liberté que le lendemain, lorsque, sur intervention de leur avocat, Stéphane Maugendre, le juge les assignera à résidence à leur domicile (Le Monde des 3-4 octobre). Un scénario identique se reproduit le mardi 1er octobre devant la préfecture, où quatre autres couples chinois se présentent dès 22 heures et passent la nuit pour être certains d’être reçus le lendemain. Ils le sont effectivement mais un fonctionnaire, assurent-ils, exige la présence des enfants. Ils connaîtront le même sort que leurs prédécesseurs.

«On a voulu attirer les étrangers dans un piège ! », dénonce le Syndicat des avocats de France. «Ces personnes n’ont jamais été convoquées, dément-on formellement au cabinet du préfet. Elles se sont présentées volontairement. Comme elles avaient déjà fait l’objet d’un arrêté de reconduite à la frontière, elles ont été interpellées». Mais la préfecture ne donne aucune précision sur la présence dans un centre de rétention de dix enfants, que la loi ne permet pas d’expulser. « Les enfants n’ont pas fait l’objet d’une mesure de rétention : ils y ont accompagné leurs parents, nuance subtilement un représentant de l’État On ne peut pas séparer les familles : éloigner les parents et mettre les enfants à la Ddass. » Ainsi, sous couvert de «ne pas séparer les familles», on tente de reconduire illégalement à la frontière des enfants.

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Mineurs sans papiers en rétention. Les avocats parlent de «séquestration arbitraire» à Bobigny.

logo-liberation-311x113, Béatrice Bantman

A la suite de la mise en rétention à Bobigny de plusieurs enfants de sans-papiers chinois (lire Libération du 3 octobre), le Syndicat des avocats de France rappelle que le placement et la reconduite à la frontière des enfants mineurs sont interdits et que ces pratiques sont assimilables à une séquestration arbitraire. Le syndicat condamne ces rétentions «qui mettent en danger la santé des enfants et ont pour but de prendre des familles et des enfants en otages pour inciter les étrangers à ne plus se présenter aux guichets de la préfecture». Depuis lundi, une dizaine d’arrestations se sont en effet produites à la préfecture de Bobigny, où les parents, abusés par des rumeurs, espéraient pouvoir faire régulariser leur situation. Sur les lieux, il leur a été précisé qu’aucune régularisation ne pourrait avoir lieu si les enfants n’étaient pas présents. Des enfants de 1 mois à 13 ans, dont une petite fille malade, ont passé la nuit en rétention, tandis qu’un enfant de 5 ans, en situation régulière, a été retenu avec sa tante qui n’avait pas de papiers. Lorsque la mère est allée le chercher, les policiers lui ont indiqué qu’il était trop tard et qu’elle ne pourrait récupérer son enfant que le lendemain, à l’audience du tribunal où devait comparaître sa tante. A la suite de l’audience, les familles ont été relâchées ou assignées à résidence .

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Communiqué du SAF, 04/10/1996

Le Syndicat des Avocats de France (section Bobigny) est particulièrement indigné par les méthodes employés par la Préfecture de la Seine-Saint-Denis. En effet, après le com­muniqué du ministère de l’Intérieur en date du 26 juin 1996 et les annonces gouverne­mentales faisant suite à la publication de la circulaire du 9 juin 1996 (Journal officiel du 4 août 1996, relative à la mise en œuvre des circulaires sur les parents d’enfant français), nombre d’étrangers, parents d’enfants nés en France, se sont présentés auprès de la Préfecture de Bobigny.

C’est ainsi que le 30 septembre 1996 ont été remis à un couple et deux femmes de natio­nalité chinoise les notes manuscrites sui­vantes : « Du lundi au vendredi de 9 heures à Il heures 30 prendre rendez-vous pour ré­examen de situation. » Le lendemain, ces quatre personnes se sont présentées auprès de la Préfecture avec leurs enfants. C’est alors que le couple LIM et leur enfant (17 mois), Mademoiselle LUO et son enfant (6 mois) et Madame HUANG, mère d’un en­fant (4 ans), ont été placés en rétention ad­ministrative. Le 2 octobre 1996, le juge délégué du tribunal de Bobigny ordonnait leur assignation à résidence. La veille, soit le 1er octobre 1996, vers 22 heures, 5 couples de nationalités chinoises commençaient leur attente devant la Préfecture de Bobigny. Le matin du 2 octobre, ils étaient reçus par les  services compétents et il leur aurait été indiqué qu’ils ne seraient régularisés qu’en pré­sence de leurs enfants.

Se sont alors présentés :

Monsieur et Madame LIM avec leurs deux enfants (13 ans et 2 ans 1/2) ; Monsieur et Madame SAN avec leurs 2 enfants ; Mon­sieur et Madame REN avec leurs deus filles née en France, Maijolaine (5 ans) et Elodie (1 mois) ; Monsieur et Madame SHI avec leur fille Geneviève (6 mois) née en France.

Ils ont tous été interpellés et placés en ré­tention administrative. Le jeune Steve (5 ans), neveu d’un des couples interpellés, a lui aussi été placé en rétention, et sa mère (en situation régulière) n’a pu le récupérer auprès des services de police. Ceux-ci lui au rait indiqué que cela était trop tard et qu’elle pourrait reprendre son enfant que le lende­main matin. Ce matin là, Steve et Marjolaine présentaient des signes de maladie, mais aucun médecin n ‘était requis par les services de police. Selon nos informations, à midi, aucun des enfants n’avaient pu boire d’eau depuis le matin. En début d’après-midi, lors de l’audience du juge délégué au tribunal de Grande Instance de Bobigny, le jeune Steve a été remis à sa mère. Il s’est évanoui dans les bras de sa mère. Le juge délégué a libéré l’ensemble de ces personnes en les assignants à résidence.

La section de Bobigny du S.A.F. rappelle que l’Ordonnance du 2 novembre 1945 interdit le placement en rétention et la reconduite à la frontière des enfants mineurs et que de telles pratiques sont assimilables à de la sé­questration arbitraire réprimée par le Code pénal. Outre les pièges mis en place pour in­terpeller des étrangers qui se sont présentés spontanément pour que soit réexaminée leur situation (réexamen considéré comme un droit par le Conseil d’État dans son avis du mois d’août dernier), le S.AF. de Bobigny condamne très fermement ces pratiques qui :

  • ont pour but de prendre des familles et des enfants en otage pour inciter les étrangers à ne plus se présenter auprès des guichets de la Préfecture ;
  • mettent en danger la santé des enfants ;
  • sont indignes d’institutions chargées de faire respecter non seulement les lois de la République mais aussi et surtout les prin­cipes de notre démocratie.

Stéphane Maugendre Président de la Section de Bobigny du S.A.F.

contact Stéphane Maugendre :

Tél : 01 48 94 34 21 – Fax :01 48 94 00 07