Archives de catégorie : Double peine

Nicolas Sarkozy veut expulser les étrangers impliqués dans les violences urbaines

index,  Laetitia Van Eeckhout,  11/11/2005

Selon le ministère de l’intérieur, cette mesure ne signifie pas le retour de la double peine puisque des étrangers pourront être renvoyés même sans condamnation.

Le ministre de l’intérieur, Nicolas Sarkozy, a adressé, mercredi 9 novembre, dans la soirée, un télégramme aux préfets pour leur demander d’expulser tous les étrangers interpellés dans le cadre des violences urbaines des treize derniers jours, même ceux titulaires d’un titre de séjour. « Quand on a l’honneur d’avoir un titre de séjour, le moins que l’on puisse dire c’est que l’on n’a pas à se faire arrêter en train de provoquer des violences urbaines ! », a-t-il lancé aux députés lors des questions d’actualité à l’Assemblée nationale en leur annonçant vouloir expulser les étrangers fauteurs de troubles.

Sur les 1 800 personnes  interpellées depuis le 27 octobre, 120 jeunes étrangers, dont la majorité sont en situation régulière sont directement concernés. Si l’administration peut reconduire à la frontière les personnes en situation irrégulière, elle peut aussi « engager une procédure d’expulsion sur la base d ‘arrêtés préfectoraux ou ministériels en fonction de la gravité de la menace représentée par le comportement des ressortissants étrangers », comme le rappelle le télégramme adressé par le ministre de l’intérieur aux préfets, mercredi soir.

Les associations des droits de l’hom­me ont aussitôt réagi et dénoncé unani­mement un retour de la double peine. Au-delà de l’illégalité manifeste de cette démarche, M. Sarkozy continue à s’en prendre aux étrangers et à en faire des boucs émissaires. Il avoue que, loin d’être abolie, la double peine est toujours d’actualité , dénoncent dans un communiqué commun une vingtaine d’organisations associatives et syndicales, auxquelles se sont joints le Parti communiste français, les Verts et la ligue communiste révolu­tionnaire (LCR).

Mais Place Beauvau, on ne cesse depuis hier soir de marteler le message : « On ne revient pas sur la double peine. »

Ce qu’on appelle communément « double peine », c’est l’expulsion d’un étranger condamné par les tribunaux. Or là, dans l’entourage du ministre, on assure qu’il s’agit d’une expulsion sim­ple ». Le ministère ne s’interdit ainsi pas d’expulser des personnes sans qu’elles aient été condamnées.

En fait, après avoir parlé devant les députés de personnes « condamnées », c’est-à-dire jugées par la justice, le ministre de l’intérieur semble avoir ajus­té son discours et dans la soirée on ne parlait plus que d’« interpellés », place Beauvau.

Reste que si dans le cas d’une « mena­ce grave à l’ordre public », la loi autorise le préfet ou le ministre de l’intérieur lui-même à prononcer un arrêté d’expul­sion. l’application de cette mesure est juridiquement et politiquement délica­te.

En 1994, Charles Pasqua qui était ministre de l’intérieur à l’époque, s’est heurté à la difficulté. Au lendemain des grandes manifestations contre le contrat d’insertion professionnelle (CIP), il avait renvoyé « en urgence absolue » deux manifestants algériens soupçonnés d’avoir jeté des pier­res sur des policiers à Lyon.

Mais le tribunal adminis­tratif, puis le Conseil d’État l’avaient désavoué. Et les deux Algériens renvoyés dans leur pays étaient reve­nus en France.

Depuis 1994, l’exercice est encore plus délicat. Dans sa loi du 26 novembre 2003 sur l’immigration, Nicolas Sarkozy a prévu des protec­tions particulières, contre ce type d’expulsion, pour certai­nes catégories de personnes. Ainsi notamment, les jeunes arrivés en France avant l’âge de treize ans ou ceux ayant des attaches familiales fortes bénéfi­cient d’une protection très élevée qui tend désormais quasiment impossible leur expulsion.

« Elle n’est cependant pas absolue », souligne-t-on dans l’entourage du minis­tre où l’on rappelle que la loi prévoit que cette protection peut être remise en cause par un comportement «consti­tuant des actes de provocation explicite et ‘délibérée (…) à la violence contre une per­sonne déterminée ou un groupe de personnes ». « Il s’agira d’apprécier, au cas pas cas, la gravité de l’atteinte à l’ordre publique. C’est une question d’appréciation juridique des faits », explique-t-on au cabinet du ministre.

« Le ministre de l’inté­rieur joue sur l’effet d’annonce. Nicolas Sarkozy va prendre des arrêtés d’expulsion pour montrer sa fermeté, et puis il verra si dans quelques mois les tribunaux administratifs jugent injustifiés ces mesu­res », dénonce Stéphane Maugendre, vice président du Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti).

Mercredi 9 novembre, le député UMP Jean-Paul Garaud a annoncé qu’il allait déposer une proposition de loi don­nant aux tribunaux la possibilité de « déchoir de la nationalité française » les étrangers naturalisés « qui participent à la guérilla urbaine ». Selon l’élu, les fau­teurs de troubles cherchent à « détruire la nation française » et expriment « leur rejet de la France ».

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Sarkozy veut expulser les étrangers

logo-liberation-311x113 , Charlotte Rotman

Le ministère peut reconduire à la frontière les irréguliers. C’est même l’une de ses missions. Mais comment faire avec les étrangers protégés par la loi Sarkozy de 2003 en raison de l’ancienneté de leur présence en France ou de leurs liens familiaux ? L’une des modalités juridiques envisagées est de faire sauter cette protection, remise en cause par un comportement «constituant des actes de provocation explicite et délibérée (…) à la violence contre une personne déterminée ou un groupe de personnes». En langage clair, ces protections ne valent que si «le comportement ne dépasse pas le plafond». Et les «meneurs d’émeute peuvent se retrouver dans ce champ». Place Beauvau, on martèle le message : «On ne revient pas sur la double peine.» Et pourtant… la porte est désormais ouverte. «Sarkozy ne va pas s’encombrer de ses déclarations passées, il va piocher dans les notions qui l’arrangent, sans que cela colle à la réalité du texte», réagit Stéphane Maugendre, du Gisti (1).

Hier dans la soirée, le député UMP Jean-Paul Garraud a annoncé qu’il allait déposer une proposition de loi donnant aux tribunaux la possibilité de «déchoir de la nationalité française» les étrangers naturalisés «qui participent à la guérilla urbaine». Selon l’élu, ils cherchent «à détruire la nation française» et expriment «leur rejet de la France».

(1) Groupe d’information et de soutien des immigrés.

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Les associations dressent un bilan « décevant » de la réforme de la double peine adoptée en 2003

index, Sylvia Zappi, 22/01/2005

Les étrangers condamnés à l’expulsion après la prison avaient jusqu’au 31 décembre 2004 pour réclamer le réexamen de leur dossier. Le ministère de l’intérieur a traité 421 des 1 458 demandes.

La réforme de la double peine connaît des hoquets dans son application. Délais de réponse trop longs et refus nombreux : l’inquiétude monte depuis quelques semaines dans les cabinets d’avocat et les associations de défense des étrangers. Le ministère de l’intérieur assure que ses services suivent à la lettre les dispositions prévues par la loi Sarkozy du 26 novembre 2003.

Présentée comme un texte d’abrogation de la double peine – peine complémentaire qui conduit un condamné étranger à être expulsé du territoire une fois purgée sa peine de prison -, la loi Sarkozy a consacré certaines catégories comme « protégées »: les personnes étrangères nées ou entrées en France avant l’âge de 13 ans, les conjoints de Français ou de résidents, les parents d’enfants français et les étrangers résidant en France depuis plus de vingt ans.

Ces « quasi-Français » comme les appellent les associations, avaient la possibilité de demander l’abrogation de leur arrêté ministériel d’expulsion ou de leur interdiction du territoire français (ITF) jusqu’au 31 décembre 2004. Une seule condition était exigée : la preuve d’une résidence « habituelle » sur le territoire français depuis le 30 avril 2003 ; à défaut, il leur était possible de demander une assignation à résidence. Quant aux étrangers déjà expulsés, ils pouvaient prétendre à revenir sur le territoire en demandant un visa d’entrée.

Selon un premier bilan de la place Beauvau, les services – ministériels et préfectoraux – auraient reçu 1 458 demandes de relèvement. 319 abrogations auraient été prononcées et 102 dossiers refusés. Quelque 780 demandes seraient en cours d’instruction et 250 n’ont pas encore été traitées. « Sur le fond, nos services acceptent trois dossiers pour un refus », assure le cabinet de Dominique de Villepin, qui espère « écluser le stock d’ici à juin ».

Le bilan est tout autre chez les associations, avocats ou personnalités qui suivent le dossier. Étienne Pinte, député UMP des Yvelines, estime que « les dispositifs concernant les catégories protégées sont difficilement appliqués ». Sur les 300 dossiers sur lesquels il est intervenu, il n’a reçu que 200 réponses : « Vingt-cinq sont des dossiers résolus, les autres se sont vu opposer un refus ou ne sont pas réglés.  » Le député relève que les tribunaux chargés du relèvement des ITF ne sont pas plus rapides ; sur 70 dossiers, 45 sont en instance. « Le garde des sceaux m’a assuré en décembre qu’une circulaire allait être envoyée aux parquets pour accélérer les audiences d’ITF », ajoute-t-il.

Les associations n’ont pas plus de succès. La Cimade de Paris a déposé :40 dossiers en avril 2004. Seuls 9 ont eu un avis favorable. « Le niveau de réponse est très faible et le bilan, un an après la loi, est plutôt décevant », souligne le responsable de ces dossiers, Luis Rétamal. Le collectif Lorraine contre la double peine, qui soutient une quarantaine de demandes, concernant essentiellement des Turcs, n’a obtenu qu’un tiers de réponses positives, le reste se partageant entre rejets et absences de réponse. Les proportions sont identiques chez les avocats spécialisés – Jacques Debré, au barreau de Lyon, ou Stéphane Maugendre, à Bobigny. Seul le pasteur Jean Costil, de la Cimade de Lyon, peut s’enorgueillir d’avoir obtenu une cinquantaine d’abrogations sur 60 dossiers déposés.

.Certaines dispositions de la loi semblent mal prises en compte. Les services préfectoraux seraient particulièrement tatillons sur la notion de résidence habituelle, en considérant la période durant laquelle les étrangers ont été expulsés comme une rupture de continuité de séjour. « Près de 200 dossiers sont en litige », remarque le pasteur Costil. Le ministère admet « 220 demandes renvoyées pour défaut de preuves ».

Les mêmes réticences existent concernant les demandes de visas pour entrer en France et pouvoir déposer un dossier d’abrogation. M. Pinte souligne que, sur les onze dossiers qu’il a appuyés, seuls trois ont un feu vert. « Ces refus sont désastreux par l’effet psychologique créé dans les banlieues. On est en train de dire aux familles touchées par la double peine qu’elles n’ont pas leur place dans la République”, soutient le cinéaste Jean-Pierre Thorn, un des piliers de la campagne contre la double peine.

Enfin, le faible taux de demandes inquiète les associations. Rappelant que le nombre des « double-peine » depuis dix ans est évalué entre 5 000 à 10 000 personnes, Me Maugendre, vice-président du Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti), s’interroge : « Que vont devenir tous ces étrangers qui n’ont pas été informés des procédures et de la date butoir ? Il faut rouvrir le débat et le solder définitivement. « 

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Des exceptions à l’absolu par Florence Miettaux

1 ère partie : Des exceptions à l’absolu par Florence Miettaux

 

2 ème partie : Des exceptions à l’absolu par Florence Miettaux

3 ème partie : Des exceptions à l’absolu par Florence Miettaux

4 ème partie : Des exceptions à l’absolu par Florence Miettaux

5 ème partie : Des exceptions à l’absolu par Florence Miettaux

6 ème partie : Des exceptions à l’absolu par Florence Miettaux

7 ème partie : Des exceptions à l’absolu par Florence Miettaux

 

Les oubliés de la réforme

P.E.,  29/11/2004

EXPULSIONS de personnes pourtant « protégées », « extrême lenteur » des réponses, interprétation « restrictive voire erronée » de la nouvelle loi… Un an après la réforme de la « double peine » censée limiter le nombre d’expulsions d’étrangers à la suite de leur condamnation en France, rien n’aurait vraiment changé : « La loi est mal appliquée, dans sa lettre comme dans son esprit », martèle le député (UMP) des Yvelines Etienne Pinte.

L’élu, qui a mis en place un comité de suivi et multiplié les interventions auprès des ministres concernés (Intérieur, Justice, Affaires étrangères), défend près de 200 dossiers, dont seuls 18 ont reçu une réponse. « Les délais sont beaucoup trop longs, aussi bien pour les arrêtés préfectoraux ou ministériels d’expulsion que pour les requêtes en relèvement d’interdiction du territoire », constate-t-il, en s’étonnant notamment « de la fermeture d’état d’esprit » du successeur de Sarkozy place Beauvau, Dominique de Villepin, à qui il s’est opposé publiquement sur le sujet le 2 novembre à l’Assemblée nationale.

Récusant les critiques, l’Intérieur et la Justice défendent à l’inverse « une application équilibrée de la loi ». « Les deux tiers des 1 161 demandes d’abrogation d’expulsion reçues ont été traitées, dont la moitié de façon favorable », assure-t-on Place Beauvau. « On est loin des 90 % de régularisations promis il y a un an ! » fustige Me Stéphane Maugendre, vice-président du Gisti. « La loi a expressément prévu une régularisation rapide, insiste Etienne Pinte. Or des dizaines de personnes qui ne peuvent ni travailler ni faire vivre leurs familles attendent et vivent dans l’angoisse. »

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La réforme de la double peine peine à s’imposer

   Charlotte Rotman

Bouda, c’est ce danseur hip-hop, né en Tunisie, grandi à Dugny en Seine-Saint-Denis. L’une des victimes de la double peine qui a donné un visage à ce phénomène (condamnation pénale plus expulsion du territoire). Il a été l’un de ceux que Nicolas Sarkozy a choisi d’assigner à résidence, suspendant ainsi la menace d’éloignement. Bouda ­ dont le père, aujourd’hui français, est arrivé de Tunisie en 1958 et dont toute la famille, excepté une grand-mère, est en France ­ a maintenant un enfant. Un an après la loi Sarkozy sur l’immigration, malgré l’espoir que la réforme de la double peine votée à l’unanimité avait soulevé, Bouda se trouve dans la même situation. Il n’est hélas pas le seul.

L’adoucissement de la double peine est censé protéger de l’expulsion les étrangers qui ont des attaches en France : soit familiales, soit dues à l’ancienneté de leur présence (lire ci-contre). Ceux que Nicolas Sarkozy appellent les Français de facto. Mercredi, à l’Assemblée nationale, avocats et associations ­ réunis pour la projection d’un documentaire (1) à l’initiative du député UMP Etienne Pinte ­ ont dressé le premier bilan de cette réforme. Faible. Son application, lente et stricte, demeure décevante. Un comité de suivi devrait être mis en place.

Lenteur. Dans les couloirs, les avocats échangent les dernières nouvelles. «Tu sais ce que j’ai eu comme cas ? Un type à qui la préfecture reproche d’être revenu en France irrégulièrement…» «Et alors ?», demande l’autre. «Ben oui, et alors ?» Ou : «Dès qu’il s’agit d’une affaire de stup’, on sent que ça va être non.» «Je n’en suis pas sûr», conteste l’autre, mais le ministère joue la montre.» Flottements, incertitudes. Pourtant, la loi ne demande pas aux étrangers qui ont des attaches en France de faire la preuve de leur bonne conduite pour bénéficier de la protection imaginée par Sarkozy (2). Et contrairement à ce que croient certains juges et préfets, une condamnation dans une affaire de stupéfiants ne retire pas ce droit. Le député-maire de Versailles, Etienne Pinte a dû le rappeler lors d’une récente entrevue avec le directeur de cabinet de Dominique de Villepin. Chantre du combat contre la double peine au sein de la majorité, ce député admet des difficultés: lenteur, traitement trop tatillon, interprétation trop stricte de la loi. Sans parler des cas limites: «Que faire quand un étranger est arrivé à 13 ans et demi (et non avant 13 ans, comme l’exige la loi) ? Il faut alors trouver une solution (…), l’administration doit faire preuve de discernement.»

Et que dire des étrangers entrant dans les catégories protégées mais qui se trouvent hors de France ? Ils devraient bénéficier d’un visa pour retrouver leur famille ici. «J’ai réussi à obtenir un visa de retour, poursuit le député UMP, mais j’ai dû interpeller Villepin à l’Assemblée, pour lui dire qu’il ne respectait pas la loi. Si à chaque litige il faut monter à la tribune et fustiger le ministre…»

Etienne Pinte a dressé des statistiques : sur 125 dossiers qu’il parraine, 11 sont résolus. Sur 70 arrêtés d’expulsion, 21 ont été abrogés, 3 refusés, les cas restant sont en cours de traitement ou sans information. Sur 61 demandes de relèvement d’interdiction du territoire, 10 seulement ont été acceptées.

Minceur. A Lyon, la Cimade compte une moitié de réponses positives sur 50 demandes d’abrogation. En région parisienne, l’association a recensé 5 réponses favorables sur 39. Un «bilan plus que mitigé» selon Luis Rétamal, de la Cimade. Pris de découragement, des militants venus de Moselle demandent de l’aide : «Qu’est-ce qu’on fait avec les dossiers qu’on a ?» «Vous me les envoyez», répond Etienne Pinte, inquiet, car les recours ne pourront se faire au-delà du 31 décembre.

Pourquoi les demandes sont-elles peu nombreuses ? Selon Stéphane Maugendre, vice-président du Gisti, «la minceur des chiffres est à la hauteur de ce qu’est le texte : peu de gens sont concernés». Pas assez. «On en sauve quelques-uns, dit-il, mais la majorité ne rentre pas dans les catégories protégées.» Bernard Bolze, animateur de la campagne contre la double peine, nuance : «Je connais plein de gens à Lyon dont les situations sont réglées, mais ils ne sont pas passés par nous.» Autrement dit : les heureux, on n’en entend pas parler. Selon le ministère de l’Intérieur, au moins 204 d’entre eux ont obtenu l’abrogation de leur mesure d’expulsion.

(1) Des exceptions à l’absolu, de Florence Miettaux, JFR Productions.

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La réforme de la double peine mal appliquée

16/09/2004

BEAUCOUP de « lenteur », de « non-réponses » et un désarroi palpable. Près d’un an après l’adoption de la réforme de la double peine, inscrite dans la loi Sarkozy sur l’immigration de novembre 2003, militants associatifs et avocats réunis hier à l’Assemblée nationale à l’invitation du député UMP Etienne Pinte et à l’occasion de la projection d’un documentaire* ont fait part de leurs inquiétudes.

L’application de ce texte revendiquée pour des milliers d’étrangers condamnés par la justice et menacés d’une expulsion se heurte à une foule d’obstacles. Pour tous ceux qui entraient dans les quatre « catégories protégées » créées par la nouvelle loi, l’espoir d’échapper à un retour dans leur pays d’origine était réel. En pratique, très peu ont obtenu gain de cause.

Et les exemples affluent. Me Alain Mikovski, qui défend une centaine de dossiers, n’en a vu qu’un seul « réglé en huit jours ». « On a le sentiment que les préfectures et les tribunaux jouent la montre ! » s’indigne-t-il.

Cinéaste militant, engagé auprès de Bouda, un danseur hip-hop de Seine-Saint-Denis dont il avait fait le symbole des double peine, Jean-Pierre Thorn s’étonne : « Sarkozy avait vu le film, il avait promis… Depuis, rien n’a bougé. Bouda est toujours assigné à résidence ! » Me Stéphane Maugendre relève pour sa part que le faible nombre de cas résolus « est à la hauteur de ce que le texte est ». A ses yeux : « un acte manqué ». « On arrive à en sauver quelques-uns, mais la grande majorité ne rentre pas dans les catégories, déplore-t-il. Or ces personnes peuvent être interpellées à n’importe quel moment, et elles le sont. »

« Une interprétation trop tatillonne»

Infatigable défenseur de cette cause, le parlementaire Etienne Pinte, qui « parraine » près de 300 dossiers, dont la moitié « restent à ce jour sans réponse », se fait plus précis. Outre « la lenteur du traitement », en particulier « pour les relèvements d’interdiction du territoire auprès des tribunaux », il regrette « une interprétation trop tatillonne de la loi ». « Ces personnes sont privées du droit au travail, nombre d’entre elles sont en grande précarité… Quelle solution pour celui qui se voit exclu du bénéfice de la réforme parce qu’il est arrivé en France à 13 ans et demi au lieu de 13 ? » interroge-t-il. Après « un point » avec le ministère de l’Intérieur lundi dernier, le député s’apprête à solliciter le ministère de la Justice sur le sujet. « Des décisions prises par les juges vont à l’encontre de la lettre mais aussi de l’esprit de la loi », souligne-t-il.

Du côté des associations, certains s’étonnent aussi du faible nombre de dossiers dont ils ont été saisis jusque-là. Complexité du texte ? Manque d’information ? Toujours est-il que le terme du délai fixé pour ceux qui souhaitent solliciter l’abrogation d’un arrêté d’expulsion ou d’une peine d’interdiction du territoire français (ITF) les concernant approche. « La date fatidique est le 31 décembre prochain », souligne Etienne Pinte.

D’ores et déjà décidé à solliciter « un moratoire » sur ce délai, il a appelé à la création d’un « comité de suivi de la réforme » qui devrait être mis en place très prochainement.

* « Des exceptions à l’absolu », Florence Miettaux, JFR production 2004.

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Un projet de loi pour faciliter les expulsions

17/06/2004

UN « RETOUR EN ARRIÈRE » élaboré « en catimini » doublé d’une volonté de « mise au pas des juges administratifs ». C’est en ces termes que plusieurs associations et syndicats (Gisti, Cimade, LDH, Syndicat des avocats de France et Syndicat de la magistrature) ont protesté, hier, contre une proposition de loi sur l’expulsion des étrangers qui doit être débattue aujourd’hui à l’Assemblée nationale.

Présenté par deux députés UMP, ce court texte vise en effet à exclure des catégories d’étrangers protégés de l’expulsion ceux qui – comme l’imam de Vénissieux à l’encontre des femmes – ont eu un comportement « constituant des actes de provocation explicite à la discrimination, à la haine ou à la violence contre une personne déterminée ou un groupe de personnes ».

Fin avril, au grand dam du ministre de l’Intérieur, Dominique de Villepin, le tribunal administratif de Lyon avait suspendu l’arrêté ministériel d’expulsion (AME) d’Abdelkader Bouziane. L’Elysée était alors venu à la rescousse du ministre en estimant qu’il y avait « un vide juridique à combler ». « Nicolas Sarkozy avait déjà regretté que la justice ne facilite pas le travail de la police. Son successeur va encore plus loin ! Le politique ne peut faire de la loi un outil modulable à sa volonté ! », s’indigne le président du Syndicat des avocats de France, Daniel Joseph.

« Des critères très flous »

Par-delà son caractère opportuniste, les cinq organisations estiment que cette proposition de loi porte atteinte à la réforme de la « double peine » adoptée il y a huit mois. Cette dernière, qui modifiait l’article 26 de l’ordonnance de 1945 sur l’entrée et le séjour des étrangers, excluait certaines catégories d’étrangers des mesures d’éloignement du territoire à trois exceptions près (terrorisme, espionnage, provocation à la haine en raison de l’origine ou de la religion).

« Alors même que les étrangers concernés par la réforme se heurtent à une foule de difficultés, la nouvelle exception ouvre un champ beaucoup plus large sur des critères très flous », dénonce Stéphane Maugendre, vice-président du Gisti. « Elle ouvre la voie à d’autres futures dérogations », souligne Gérard Tcholakian, du Syndicat des avocats de France (SAF).

Les associations s’inquiètent aussi d’un projet de décret en cours de rédaction au ministère de l’Intérieur. Il viserait, selon les propos tenus par Dominique de Villepin dans une interview récente au « Figaro », à faire du Conseil d’Etat « le juge en première et dernière instance des questions d’expulsion pour motif terroriste ». Là encore, à leurs yeux, un projet qui marque l’« intrusion croissante du pouvoir exécutif
dans la justice ».

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La double peine est morte, Vive la double peine !

, Stéphane Maugendre, Mouvements, 2004/5 no35,

Est-il politiquement correct d’analyser un acte manqué politique commis par le monde associatif ? De toute évidence une réponse positive s’impose, notamment lorsque cet acte manqué participe à la construction d’une croyance ou d’une certitude populaire, à savoir que la double peine a été abolie. D’autant plus, lorsqu’au cours d’une émission télé, un ancien ministre de « gauche », prétendu abolitionniste de cette double peine, affirme sa satisfaction de ce que la droite l’ait abolie, ou, lorsque dans les colonnes d’un quotidien du soir, un très sérieux journaliste politique cite l’abolition de cette peine, afin d’illustrer le dépassement à gauche du PS par la droite parlementaire. Et plus encore, lorsque l’on croise dans le milieu judiciaire, militant ou humanitaire, des personnes qui estiment ce combat, d’arrière garde. Cet acte manqué se fonde d’abord sur l’ignorance quasi-générale de la consistance de cette peine, qu’il faut définir. Mais cet acte manqué bien préparé, politiquement instrumentalisé par la suite, ne doit pas faire oublier que la lutte pour l’abolition de cette peine doit continuer.

La double peine, c’est d’abord un slogan politique qui correspond à plusieurs réalités juridiques matinées de réalité sociologique.

Juridiquement, c’est être banni du territoire français, en plus et après avoir exécuté une peine d’emprisonnement à laquelle on a été condamné. Cette relégation n’est applicable qu’à la seule raison de l’extranéité du condamné.

Pratiquement, les lois de la république prévoient deux formes de double peine.

On la nomme « expulsion » lorsqu’elle est administrative. Elle est alors arrêtée par le ministère de l’Intérieur sans débat préalable et contradictoire, toujours au mépris de la situation personnelle ou familiale de l’individu, jamais au regard de véritables preuves de risque pour la sécurité publique et toujours sur le seul fondement d’une condamnation pénale. Historiquement, l’Arrêté ministériel d’expulsion (AME) a toujours existé, il ressort du pouvoir régalien de l’État qui doit pouvoir se protéger ou prémunir la France des risques avérés de troubles particulièrement graves à l’ordre public. L’arrêté ministériel d’expulsion est donc préventif. Le présent propos n’est pas de remettre en cause ce pouvoir notamment lorsqu’il a un but préventif, toutefois, au fil des dernières années, un nombre croissant d’arrêtés ont été prononcés sur le seul fondement de la condamnation pénale de l’étranger.

La seconde est l’Interdiction du territoire français (ITF) que le juge pénal peut infliger, à titre de peine complémentaire d’une peine de prison, au mépris du principe d’égalité dans le traitement pénal de la délinquance. En effet, l’ITF est la seule peine du code pénal fondée sur l’extranéité d’une personne déclarée coupable. L’interdiction du territoire a été créée par le législateur pour rétablir l’égalité entre Français et étrangers devant la loi pénale. En effet, seuls les Français pouvaient se voir condamnés en plus d’une peine d’emprisonnement à une interdiction de droits civiques, civils et familiaux, les étrangers n’ayant ou n’étant pas titulaires de ces droits. Ce rééquilibrage se transforme un siècle plus tard en un dérapage. Les étrangers ont acquis quasiment tous les droits civiques, civils et familiaux et pourraient donc s’en voir interdire. Le nombre d’infractions pour lesquelles ITF peut être prononcée a considérablement augmenté puisqu’à ce jour on en compte environ 270 dans le code pénal et c’est l’une des peines les plus prononcées par les tribunaux correctionnels (10 000 à 17 000 par an).

  • Un acte manqué bien préparé

C’est dans ce contexte qu’à l’initiative de la CIMADE naît, en septembre 2001, la campagne contre la double peine « une peine . / » [une peine point barre]. Il n’a pas été facile de réunir autour d’une même plateforme (1) plus d’une centaine d’associations nationales et régionales (à noter l’absence de S.O.S. Racisme), mais il était également indispensable que cette campagne obtienne le soutien de l’ensemble du monde associatif. Certaines organisations cherchaient à obtenir une protection contre la double peine pour des catégories limitées d’étrangers (conjoints de Français, parents d’enfant français…) ou privilégiaient le cas par cas.

D’autres insistaient pour que le juge judiciaire n’ait plus le pouvoir de prononcer une quelconque ITF et que l’expulsion administrative ne puisse être prononcée que dans des cas exceptionnels.

Le consensus fut trouvé. Les buts de cette campagne consistaient d’une part, à faire connaître et à expliquer la double peine et, d’autre part, à convaincre la gauche, et notamment le PS, avant les élections du 21 avril, de la nécessité d’une réforme, persuadés que nous étions qu’elle serait victorieuse. Tout se passait comme prévu, sauf les élections. Au lendemain de celles-ci les associations ayant participé à la campagne choisissaient, malgré tout, de reprendre le lobbying, mais dirigé davantage, cette fois-ci, vers la droite parlementaire (2).

  • Une campagne et une double peine instrumentalisées

Octobre 2002 : Sarkozy annonce la mise en place d’une commission de réflexion sur la double peine (dite commission Mignon) qui, après auditions, rendrait un rapport afin de préparer un projet de réforme. Notons que cette commission a choisi, sans explication du ministère, les organisations et les personnalités à auditionner et a décidé d’écarter la LDH. Les organisations ne réagiront pas mais surtout leurs représentants (dont je faisais partie) répondront présents à chaque convocation de dernière minute de cette commission, sans recul politique, un peu le doigt sur la couture du pantalon ne voulant pas que quelque chose puisse leur échapper. Rétrospectivement, je pense que nous sommes allés « à la soupe ».

Sarkozy mettait en scène son courage à réformer la double peine face à sa majorité hostile (et à une gauche qui n’avait rien fait) et affirmait que nous ne devions pas être « extrémistes » au risque de voir cette réforme échouer. Le rapport de la dite commission était rendu et les animateurs de la campagne étaient conviés, toujours dans l’urgence, pour en prendre connaissance, injonction leur étant faite de faire des observations sans communication préalable.

Polis nous fûmes, et nous avons décidé que seul le représentant de la campagne se rendrait au ministère de l’Intérieur pour recevoir ce rapport mais que les organisations de la campagne attendraient dans un bistro proche de la place Beauvau pour prendre connaissance de celui-ci. En effet, il était hors de question de réagir à ce rapport sans une étude sérieuse. Quelques jours plus tard, encore une fois, le ministère convoquait en urgence les associations de la campagne pour qu’elles puissent faire leurs observations.

L’objectif était évident : prendre de vitesse les plus radicaux, charmer les autres pour qu’ils accompagnent le projet de loi, tout était organisé pour annoncer l’abolition de la double peine, sans véritable opposition immédiate. Complètement relayée par des médias ne se donnant pas la peine de vérifier (mis à part quelques rares d’entre eux), ou vérifiant partiellement, sans recul politique ou pratique juridique, relayée également par certaines associations ou syndicats (parfois membres de la campagne contre la double peine), cette annonce devenait réalité pour tous, y compris pour les étrangers frappés par la double peine, avant même que la loi ne soit adoptée.

Or, il y avait là matière à développer nos revendications et à pousser les politiques, nos élus, à relayer la plate-forme de la campagne.

En effet, les propositions de la mission Mignon, reprises en très grande partie par le projet de loi, écartaient toute idée d’abrogation de l’ITF aux motifs d’une part, que l’on ne peut « soutenir que la peine complémentaire d’interdiction du territoire français est la seule peine discriminatoire du droit français en ce qu’elle touche uniquement les étrangers et ne vise pas les Français » et d’autre part que « la peine d’ITF n’est pas contraire au principe d’égalité: même lorsqu’ils ont des attaches importantes avec le territoire français, les étrangers ne sont pas juridiquement dans la même situation que les Français. La nationalité les en sépare irrésistiblement et cette distinction est de nature à fonder en droit l’existence d’une peine spécifique qui ne s’applique qu’aux étrangers ».

Concernant l’arrêté ministériel d’expulsion, rien de véritablement concret n’était prévu, pas de caractère exceptionnel de l’expulsion, pas de débat contradictoire préalable, pas de recours suspensif… Seul était proposé de créer des catégories d’étrangers protégés de la double peine.

  • Une réforme cosmétique

Dès lors, certaines organisations de la campagne (comme la Ligue des droits de l’homme ou le GISTI) dénonçaient la fausseté de l’annonce sarkozienne. À leurs yeux, le projet de loi impose tellement de restrictions et de conditions que le principe annoncé d’inexpulsabilité des catégories protégées deviendrait exception.

Le projet laissait entier le problème de la double peine et replongerait ainsi dans la clandestinité des milliers de personnes qui ont toute leur vie privée ou familiale en France. Ces associations accusaient le ministère de l’Intérieur de ne s’attaquer que très superficiellement à la double peine, afin de se débarrasser de certains dossiers qui encombraient les bureaux de la rue des Saussaies et pour lesquels l’éloignement des personnes était pratiquement et réellement impossible. Elles ont donc refusé de soutenir une réforme cosmétique de la double peine dans le cadre générale de la réforme de l’immigration, l’une des plus répressives en matière de droit des étrangers depuis 1945 (4).

D’autres, sous prétexte que cette réforme venait de la droite, affirmaient qu’il fallait en accepter l’augure, clamer haut et fort qu’une brèche était percée et participer au travail législatif par la rédaction d’amendements pour certains députés sur la base du projet de loi du ministère de l’Intérieur. Si cette réforme pouvait sauver quelques centaines d’étrangers touchés par la double peine, il fallait la soutenir. Un argument non négligeable.

Convaincues que ne pas se placer clairement en opposition à cette réformette, c’était déjà enterrer la double peine, certaines organisations, dont la LDH et le GISTI, ont quitté discrètement la campagne. Cet abandon se devait discret par respect, d’une part pour le fantastique travail accompli lors de la campagne, et d’autre part pour les partenaires qui restaient. Néanmoins, on peut se poser la question de savoir si cet abandon discret n’était pas aussi une façon de consacrer la victoire du ministère de l’Intérieur.

Par ailleurs, l’instrumentalisation de ceux qui restaient ne s’arrêta pas là puisque cités à de nombreuses reprises durant les débats parle parlementaires, ils servaient de caution humanitaire à la réforme générale de la politique d’immigration particulièrement répressive du gouvernement.

La réussite politique du ministre de l’Intérieur allait jusqu’à obtenir à l’Assemblée nationale un vote à l’unanimité sur les dispositions concernant la double peine. L’abolition de la double peine était consacrée.

En désespoir de cause et parce qu’il était impossible de laisser croire à un tel mensonge, il était organisé, à l’initiative de Jean-Pierre Thorn, un débat autour de la diffusion de son film On n’est pas des marques de vélo, entre ceux qui avaient quitté la campagne et les sénateurs de gauche, afin que ces derniers déposent des amendements reprenant une partie des revendications de la plateforme. Une fois ces amendements rejetés, le débat sur la double peine tombait dans l’oubli.

  • Lutte contre l’oubli

Le bilan n’est pas brillant. Que l’on ait la satisfaction d’avoir ouvert une brèche et sauvé de la double peine quelques dizaines voire centaines de personnes ou celle de ne pas avoir voulu cautionner une telle loi, il n’en reste pas moins que le monde associatif, partie prenante dans la campagne contre la double peine doit prendre conscience de la responsabilité qu’il a en sollicitant une réforme de cette ampleur.

Ainsi, il n’a, non seulement, pas obtenu l’abolition de la double peine, mais il a participé, directement ou indirectement, à ce que le débat ne soit plus abordé avant de nombreuses années. Il a donc la charge morale de dizaines de milliers de personnes condamnées à la double peine et laissées sur le carreau de l’oubli et de la clandestinité, ainsi que de ceux qui y sont enfoncés par les effets pervers ou couperets de la loi. Déjà, après six mois d’applications de la réforme de la double peine, on peut lire sous la plume de préfets ou de procureurs, concernant des personnes de trente/trente-cinq ans vivant en France depuis l’age de trois ou quatre ans, qu’ils ne justifient pas d’une résidence habituelle depuis l’age de treize ans et que par voie de conséquence, ils ne font pas partie d’une des catégories protégées contre la double peine. De même, on a pu entendre de la bouche d’un président de tribunal correctionnel, « ah ! Monsieur vous n’êtes entré en France qu’à treize ans – vous n’entrez pas dans les catégories protégées et on va vous condamner à une interdiction du territoire français ».

Face à ces échecs prévus ou réalisés, il semble inconcevable de ne pas faire au plus vite un état des lieux (combien de doubles peines ont été prononcées, combien de condamnés entrent ou n’entrent pas dans les catégories protégées, les chiffres de non application de la loi et pourquoi ?). Par ailleurs, un devoir de suite s’impose à la représentation nationale et le législateur, dans le cadre d’un comité de suivi, devra prendre connaissance des conséquences pratiques de la loi qu’il a votée. Enfin, un droit de suite sur la campagne s’impose indéfectiblement aux organisations anciennement membres de la campagne contre la double peine avec les obligations afférentes.


  1. « La suspension de l’exécution de toutes les mesures d’éloignement prises à l’encontre des catégories protégées et plus précisément leur assignation à résidence avec droit au travail tant pour les personnes condamnées à une peine d’interdiction du territoire français, afin de leur permettre d’obtenir un relèvement de cette mesure devant les tribunaux, que pour les personnes frappées par une mesure d’expulsion dans l’attente de l’abrogation de celle-ci.

La modification de l’article 26 de l’ordonnance du 2 novembre 1945 de telle sorte que ne puissent être expulsés les étrangers ayant en France leurs attaches personnelles ou familiales.

La modification de l’article 23 de l’ordonnance du 02/11/1945 de façon à rendre l’expulsion exceptionnelle.

La modification de l’article 24 de l’ordonnance du 2/11/1945 : l’avis défavorable de la Commission d’expulsion de l’étranger, qui doit être consultée dans tous les cas, doit rendre l’expulsion impossible.

Un débat parlementaire, sur la base des constatations de la commission Chanet, qui devrait déboucher sur la suppression de la peine d’interdiction du territoire français. Étrangers et Français doivent encourir strictement les mêmes peines, pour respecter le principe d’égalité dans le traitement pénal de la délinquance ».

  1. Mais aussi de programmer un meeting à la Villette au mois d’octobre 2002 et de publier un ouvrage collectif « En finir avec la double peine ». Il convient ici de rendre hommage à Monsieur Étienne Pinte, Député-maire UMP des Yvelines (mais aussi Madame Delphine Bonjour, son assistante parlementaire), véritable humaniste, qui, comme après pour la lutte des intermittents du spectacle, a porté à bout de bras la plate-forme sur les bureaux de tous les intervenants politiques possibles.
  1. http://www.gisti.org/doc/actions/2003/unepeine/intervention.html

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La double-peine loin d’être abolie

Les associations dénoncent des règles extrêmement strictes permettant d’échapper à la double-peine, qui ne concerneraient que « quelques centaines de cas ».

Des associations ont affirmé mardi que le projet de loi sur l’immigration défendu par le ministre de l’Intérieur Nicolas Sarkozy n’avait pas « aboli la double peine », car les conditions imposées pour être protégé de l’éloignement du territoire restent difficiles à remplir.

« Il y a des éléments positifs dans le projet, mais il ne faut pas le monter aux nues », a affirmé Stéphane Maugendre, vice-président du Gisti (Groupe d’information et de soutien aux travailleurs immigrés), à l’issue d’une projection au Sénat du film de Jean-Pierre Thorn « On n’est pas des marques de vélo », sur Bouda, un jeune danseur victime de la double peine.

« Quelques centaines de cas »

Le Gisti, le MRAP et la Ligue des droits de l’Homme (LDH) ont affirmé qu’un grand nombre d’étrangers, qui entreront dans les catégories dites « protégées » ne pourront remplir des conditions telles que la preuve d’une résidence en France depuis l’âge de 13 ans, ou celle de subvenir aux besoins de son enfant.

« Même pour Bouda, il ne sera pas évident d’apporter la preuve administrative année après année de sa présence en France depuis l’âge de 13 ans », souligne Stéphane Maugendre.

« Le texte va régler les problèmes de quelques centaines de cas qui sont les plus ingérables pour le ministre de l’Intérieur, et Bouda fera sans doute partie des ces dossiers acceptés », dit-il, « mais pour beaucoup d’autres, cela va coincer ».

Depuis l’âge de 13 ans.

Aux termes du projet Sarkozy, l’éloignement du territoire ne pourra plus être prononcé contre l’étranger « qui justifie par tous les moyens résider en France habituellement depuis qu’il a atteint au plus l’âge de 13 ans, qui réside régulièrement en France depuis plus de vingt ans, ou depuis plus de dix ans s’il a fondé une famille, « à condition qu’il subvienne effectivement aux besoins » des enfants.

Deux exceptions seulement ont été retenues: les actes de terrorisme et les atteintes aux intérêts de l’État.

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Avocat