La cour d’assises de la Seine-Saint-Denis évoque actuellement la spécialité de Laurent Cazorla et de sa bande : le vol au domicile d’homosexuels (« le Parisien » d’hier). Les jurés se penchent plus précisément sur le soir où cet homme de 31 ans s’est rendu chez Pierre-Olivier Mazeau, un cuisinier habitant Noisy-le-Grand, que l’on retrouvera mort allongé sur son lit en mars 1995. Également dans le box, Pascale Leprêtre, 35 ans, est jugée pour complicité.
Deux jours de débats, un acteur principal qui reconnaît les faits, mais une question, capitale, qui reste en suspens : l’intention homicide était- elle là ? Cazorla affirme n’être venu que pour voler, selon un procédé déjà rodé : lui et ses compères contactaient leur future victime par le biais de réseaux téléphoniques de rencontres. Une fois décroché un rendez- vous, une « chèvre » tentait de faire absorber un mélange à base de sédatif à l’homosexuel en quête d’aventure. Cazorla, quand il jouait ce rôle, se munissait d’une petite fiole contenant le produit ou préparait à l’avance des pièges à déguster. « Je lui disais, explique Cazorla, j’ai un fantasme, c’est de te faire manger de la crème Mont-Blanc à la petite cuillère. Quand ça ne marchait pas, je glissais le produit dans son verre » « Combien de temps fallait-il pour endormir votre victime ? », lui demande le président « Environ une heure et demie », répond sans hésiter l’accusé.
Des fils électriques dans le bac de douche
Une fois dans les bras de Morphée, la victime adepte des services de type 36 65 avait son logement pillé par la « chèvre » et ses complices. Ce scénario était celui prévu dans le cas de Pierre-Olivier Mazeau. Arrivé chez lui, Laurent Cazorla commence par le faire boire en instillant à petites doses, quand il a le dos tourné, du contenu de sa fiole. «Je lui ai demandé s’il était ouvert à tous les plans, raconte-t-il. Il a accepté que je l’attache. » Pieds et mains lié, Mazeau s’endort Cazorla et sa complice commencent à fouiller l’appartement. Mais, à un moment, on frappe à la porte. Cazorla plaque la tête de la victime contre un oreiller pour l’empêcher de crier. On le retrouvera mort par asphyxie. « Je l’ai juste maintenu sans chercher à l’étouffer », se défend Cazorla pour qui Mazeau ne décédera qu’après leur départ. Une possibilité que ne peut exclure le médecin expert Pierre-Olivier Mazeau a-t-il été torturé ? Sans que le mot soit prononcé, cette question s’est posée lors de l’instruction. De nombreux fils électriques coupés, retrouvés trempant dans le bac de douche rempli d’eau, ont fait penser le pire aux enquêteurs. Une lésion sur l’avant-bras de Mazeau a été analysée par un expert qui a déclaré hier : « Cette lésion est compatible avec une brûlure électrique. » Le médecin légiste a aussi relevé des griffures sur le dos de la victime Selon les accusés, ces marques ont pu être provoquées par le chien de race boxer de Pascale Leprêtre qui aurait sauté sur le dos du cuisinier alors que les deux malfaiteurs raflaient ses objets personnels.
Maître Stéphane Maugendre, avocat des parties civiles, a fini hier sa plaidoirie par ces mots : « La famille de Pierre-Olivier Mazeau n’a qu’une certitude, c’est que les accusés ont laissé leur frère pour mort II aurait eu 47 ans aujourd’hui. » Verdict attendu aujourd’hui.