« Attention ! »
Me Jean-Pierre Léon, président de la Fédération nationale des jeunes avocats :
« Je suis très réservé. Généraliser les contrôles d’identité préventifs est inquiétant. Cela remettrait en cause la jurisprudence qui interprète la loi de façon restrictive afin de protéger le plus possible les droits des individus. On risquerait de retomber dans des contrôles uniquement motivés par la simple apparence physique. En fait, cela revient à toucher à la liberté d’aller et venir et aux droits de l’homme. Je comprends, bien sûr, la nécessité d’assurer la sécurité des personnes, mais si l’équilibre entre la loi et la jurisprudence est rompu, alors, je dis : attention ! »
« Au faciès »
Me Stéphane Maugendre, président de la commission pénale du Syndicat des avocats de France :
« C’est la porte ouverte au « contrôle au faciès ». Aujourd’hui, ces contrôles existent déjà dans les faits. Un exemple : une avocate arrive en audience de comparution immédiate pour défendre un étranger en situation irrégulière. Selon les policiers qui avaient interpellé celui-ci, il s’était dissimulé derrière un arbre à leur approche. Hasard : l’avocate habitait dans cette rue, elle la connaît bien. Il n’y a pas un seul arbre dans cette artère. »
«Indispensable»
Me Henri Garaud (Légitime défense) :
« Le contrôle préventif d’identité est indispensable. On contrôle les chèques, pourquoi pas les gens ? Pour éviter les débordements, il faut tout simplement un meilleur encadrement des policiers : les brigadiers-chefs doi¬vent être sur le terrain avec les officiers de police ».
POLICIERS
« tout à fait favorables »
Stéphane Folcher, secrétaire général de l’USC-Police :
« Nous sommes tout à fait favorables à la généralisation des contrôles d’identité. C’est une mesure qui s’impose en raison de la situation actuelle : délinquance et immigration clandestine. Les tribunaux interprètent de façon trop restrictive le cadre d’application de ces contrôles. Sans tomber dans le « délit de sale gueule”, il faut permettre que le travail des policiers, qui consiste à veiller à la sécurité des biens et des personnes, soit fait. Ces contrôles ne peuvent s’exercer que dans le cadre de la loi. S’ils se généralisent, ils constitueront un facteur de motivation pour les fonctionnaires de police ».
« Trouver un équilibre »
Jean-Pierre Bordier secrétaire adjoint de la FASP :
« La loi actuelle permet largement aux forces de police d’exercer les contrôles d’identité préventifs. Évidemment, les tribunaux ont tendance à interpréter cette loi en établissant des critères objectifs : deux personnes qui parlent une langue étrangère ne sont pas forcément des étrangers. Élargir les contrôles reviendrait à attenter aux libertés individuelles, notamment celle de circuler. De plus, la police ne peut pas régler à elle seule les problèmes de société. Si nous n’avons plus que cette solution, c’est un pan de la démocratie qui s’en va. Il faut trouver l’équilibre entre le droit et les moyens efficaces permettant de mettre à la disposition de la justice ceux qui sont allés à l’encontre de la loi républicaine ».
MAGISTRATS
« Assouplir, mais… »
Claude Pernollet, président de l’Union des syndicats de la magistrature :
« A cause de l’interprétation restrictive des tribunaux, pour justifier les contrôles d’identité préventifs, les policiers ont aujourd’hui recours à des procédures hypocrites: dire par exemple que telle personne traversait en dehors des passages protégés ! Il faudrait donc assouplir le système actuel afin que les contrôles puissent s’effectuer sans pour autant tomber dans un État policier. Par exemple, ces contrôles devraient être facilités dans les lieux de délinquance connus, comme le métro ou certains quartiers à risque transformer la France en un « camp géant » ou laisser le pays à l’anarchie : aucune de ces deux solutions n’est acceptable ».
« Vers des abus »
Jean-Claude Bouvier, président du bureau du Syndicat
de la magistrature :
« Nous restons très vigilants. En s’affranchissant de toute contrainte juridique, on permet des abus. Avec la généralisation de ces contrôles, on pourrait ainsi arrêter n’importe qui n’importe quand Les premiers vises sont, bien évidemment, les étrangère, avec à la clef le – délit de faciès ». C’est là une attitude complètement attentatoire aux libertés fondamentales. Dans la loi actuelle, il existe un cadre juridique d’application. Si on libéralisé, il n’y aura plus de garde-fou. Les policiers doivent pourtant comprendre qu’ils ne peuvent pas faire tout et n’importe quoi. Sinon, c’est la porte ouverte à tous, les abus et la création d’un véritable État policier ».