Le Gisti, le SM et la LDH en procès pour avoir critiqué une décision de justice

AFP, 06/01/2016

Les responsables de l’association de soutien aux immigrés Gisti, du Syndicat de la magistrature (SM) et de la Ligue des droits de l’Homme (LDH) ont été renvoyés en procès par le parquet de Paris pour avoir critiqué une décision de justice visant un mineur étranger, a appris mardi l’AFP de sources concordantes.

« Les dieux sont tombés sur la tête ! Ce délit n’est absolument jamais poursuivi », a dénoncé le président du Gisti, Stéphane Maugendre, à l’AFP.

Le procès est prévu le 6 mai.

A l’origine de l’affaire, un arrêt de mars 2015 de la cour d’appel de Paris refusant une mesure d’assistance éducative à un jeune Malien au motif que sa minorité « n’ (était) pas établie », selon l’arrêt rendu public par les organisations.

Selon l’arrêt, l’extrait d’acte de naissance et la carte d’identité attestant de sa minorité étaient « considérés comme authentiques par le bureau de la fraude documentaire », mais des interrogations subsistaient aux yeux des magistrats.

Les magistrats avaient demandé en vain des tests osseux, très critiqués par les associations. Ils estimaient que des « éléments extérieurs » comme « son allure et son attitude » venaient contredire les documents du jeune homme.

Dans un communiqué, les trois organisations avaient dénoncé « le raisonnement (…) doublement fallacieux » des magistrats. « Pour rendre cette invraisemblable décision, la cour n’a pas seulement renié toute humanité, elle a dû aussi, tordre le droit », dénonçaient la LDH, le SM et le Gisti.

Un magistrat du parquet général de Paris avait signalé le texte et une enquête avait été ouverte. Le parquet de Paris a finalement cité à comparaître les responsables de l’association, estimant que les auteurs du texte avaient « cherché à jeter le discrédit sur une décision juridictionnelle dans des conditions de nature à porter atteinte à l’autorité de la justice ou à son indépendance », a indiqué à l’AFP une source judiciaire. Ce délit est puni de six mois de prison et 7.500 euros d’amende.

« On veut faire taire un certain nombre d’associations qui pointent du doigt la manière dont le milieu judiciaire et l’aide sociale à l’enfance traitent les mineurs isolés étrangers », a dénoncé M. Maugendre.
Selon le président du Gisti, la décision du parquet n’aura paradoxalement pour effet que de « donner de l’écho à un communiqué qu’aucune agence de presse, ni radio, ni télé n’avait repris ».