Deux Haïtiens sous le coup d’un arrêté de reconduite à la frontière

index avec AFP, 26.01.2010

La préfecture du Val-de-Marne a émis, vendredi 22 janvier, un arrêté de reconduite à la frontière à l’encontre de deux Haïtiens sans papiers, selon une information révélée, lundi 25 janvier, par le site Internet Bakchich Info. Cette décision a été prise alors que le ministère de l’immigration avait annoncé, mercredi 13 janvier, la suspension des procédures de reconduite vers Haïti, frappé par un violent séisme.

Les deux ressortissants haïtiens ont été interpellés jeudi à leur arrivée à l’aéroport parisien d’Orly, alors qu’ils étaient en possession de passeports falsifiés, a précisé une source judiciaire. Aucune poursuite n’a été engagée, le parquet de Créteil ayant préféré classer l’affaire sans suite. Sur le plan administratif, un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière a en revanche été signé, « sans toutefois être exécuté », selon la préfecture du Val-de-Marne.

BESSON : « RIEN QUI NOUS SURPRENNE »

« Il s’agit d’une simple formalité administrative, pour clore la procédure. Nous avons décidé, bien entendu, de ne pas la mettre en application », a assuré le directeur de cabinet du préfet du Val-de-Marne, Patrick Dallennes. « Ces deux personnes ont été prises en charge par le SAMU social, puis par le comité Urgence Haïti. Pour le moment, il n’est pas question de les renvoyer dans leur pays », a poursuivi M. Dallennes. « Pour l’avenir, je ne sais pas ce qui peut arriver », a-t-il néanmoins reconnu.

Interrogé sur cette affaire lundi après-midi sur France Info, Eric Besson a assuré ne pas être au courant de cet arrêté. « Si l’information est étayée, cela veut dire que la personne était en situation irrégulière, mais que, compte tenu des directives que j’ai données sur la situation en Haïti, il a été décidé que la personne ne serait pas reconduite dans son pays d’origine. Il n’y a là, si c’est avéré, rien qui nous surprenne », a-t-il déclaré.

UNE FORMALITÉ ADMINISTRATIVE « QUI N’A RIEN D’ANODIN »

« C’est le cynisme habituel du ministère. Mais en vérité, cette ‘formalité administrative’ n’a rien d’anodin. Le préfet n’était absolument pas obligé d’émettre cet arrêt », s’emporte Stéphane Maugendre, président du Gisti (Groupe d’information et de soutien aux immigrés) et avocat au barreau de la Seine-Saint-Denis. D’abord, dès lors qu’un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière (APRF) est émis, les personnes concernées sont immédiatement inscrites au fichier des personnes recherchées. Valable un an, c’est un document qui a une valeur exécutoire. « S’ils sont arrêtés par la police et que le procureur constate qu’ils sont en infraction parce qu’ils n’ont pas exécuté l’APRF, ils peuvent être condamnés à la prison », explique Stéphane Maugendre.

Par ailleurs, l’existence de cet arrêté est un frein à une éventuelle régularisation. « Il faut d’abord que l’arrêté soit abrogé par le préfet qui l’a émis avant qu’un autre préfet statue. C’est un blocage », note le président du Gisti. « Et si le préfet avait vraiment voulu tenir compte de la décision d’Eric Besson de suspendre les procédures de reconduite, il n’aurait pas notifiée d’APRF », conclut-il.

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