Des sans-papiers jugés à deux pas des pistes d’aéroport de Roissy

index avec AFP ,

Ce n’est plus au tribunal de Meaux, mais dans son annexe ouverte lundi 14 octobre au centre de rétention administrative (CRA) du Mesnil-Amelot, à deux pas de l’aéroport de Roissy, que des sans-papiers vont désormais comparaître.

Destinée aux étrangers qui débarquent d’un vol international et ne sont pas admis sur le territoire français, cette salle d’audience devrait recevoir près de 6 000 personnes chaque année. Mais son ouverture est dénoncée aussi bien par des associations de défense des droits des migrants comme la Cimade et le Gisti, ou encore la Ligue des droits de l’homme, que par les syndicats de magistrats, le syndicat des avocats de France et le Conseil national des barreaux.

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UN JUGEMENT « LOIN DE LA CITÉ »

« On va juger loin de tout, loin de la cité, dans un coin où la publicité des débats n’existe pas de fait », dénonce l’avocat et président du Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti), Stéphane Maugendre.

Selon ses partisans, le nouvel emplacement, entre champs et tarmac, a pour intérêt d’éviter le transfert des étrangers jusqu’au tribunal de grande instance de Meaux, à 30 kilomètres de là.

Les étrangers comparaissent derrière une grille noire d’un mètre de hauteur, séparés de la douzaine de sièges prévus pour leur famille et le public. Le juge des libertés et de la détention (JLD) est chargé de se prononcer sur leur maintien en rétention. Deux dossiers ont déjà été examinés depuis lundi matin.

Pour les associations, l’indépendance de la justice est menacée en siégeant si près de la police, dans la même enceinte qu’un cantonnement de CRS. « Comment avoir confiance en l’impartialité d’une justice implantée dans le lieu même où l’on enferme ? », s’interrogeaient récemment ces dernières dans une tribune parue dans « Libération ». Elles vont même jusqu’à contester la légalité de ce tribunal lancé par les majorités précédentes.

RÉTICENCES DANS LA MAJORITÉ

Le gouvernement, qui va bientôt hériter d’une seconde annexe de ce type au cœur de la zone aéroportuaire, est divisé à ce sujet. La ministre de la justice, Christiane Taubira, a fait part de ses réticences, et plusieurs parlementaires, dont des députés PS, ont appelé ces dernières semaines à renoncer à utiliser ces annexes, bien que l’Etat ait déjà investi 2,7 millions d’euros pour les construire.

L’Observatoire de l’enfermement des étrangers (OEE) a déploré dans un communiqué que Manuel Valls et Christiane Taubira « n’aient pas pris en compte la forte mobilisation suscitée par les projets d’ouverture de cette annexe et de celle programmée dans la zone d’attente de l’aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle ».

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