La publication d’une circulaire (PDF) du ministère de l’intérieur ciblant expressément l’évacuation de campements « de Roms » a provoqué lundi 13 septembre une certaine confusion à droite. Le ministre de l’immigration, Eric Besson, a affirmé ne pas avoir eu connaissance de ce texte, tandis que le président de l’UMP, Xavier Bertand, l’« assume tout à fait ».
Afin de couper court à la polémique, le ministre de l’intérieur, Brice Hortefeux, auteur de la circulaire en question, a « tenu à signer personnellement » lundi une nouvelle circulaire (PDF) aux préfets relative aux évacuations de campements illicites pour « lever tout malentendu sur une éventuelle stigmatisation » des Roms. Cette nouvelle circulaire demande aux préfets de « poursuivre » les évacuations de camps illicites « quels qu’en soient les occupants ».
La circulaire du 5 août du directeur de cabinet de l’intérieur, Michel Bart, dont l’objet portait sur « l’évacuation des campements illicites », enjoignait aux préfets une « démarche systématique de démantèlement des camps illicites, en priorité ceux de Roms ». Le mot « priorité », explique le ministère, n’avait « qu’un contenu chronologique, opérationnel, par rapport aux gens du voyage », en raison des « multiples déplacements de ces derniers qui participent, l’été, à de nombreux pèlerinages ».
BESSON « PAS AU COURANT »
Quelques heures plus tôt sur France 2, Eric Besson avait expliqué qu’il n’avait pas eu connaissance de la précédente circulaire du ministère de l’intérieur datée du 5 août. « Je ne connaissais pas cette circulaire », a-t-il assuré, « le concept de minorités ethniques est un concept qui n’existe pas chez nous. » La Convention européenne des droits de l’Homme, dont Paris est signataire, interdit en effet toute distinction sur la base de l’origine ethnique.
Ce document plaçait de fait le ministre en porte-à-faux. Face aux critiques du Parlement européen sur les récentes reconduites à la frontière, M. Besson avait assuré, jeudi, que la France n’avait pris « aucune mesure spécifique à l’encontre des Roms ».
Selon lui, c’est une autre circulaire, datant celle-ci du 24 juillet et ne mentionnant pas explicitement les Roms, qui doit être prise en considération, ce qui fait donc trois circulaires portant sur les camps illégaux. « La seule circulaire valable est celle que nous avons signée le 24 juin, moi-même et Brice Hortefeux », affirme le ministre de l’immigration. « Je me sens en harmonie avec le cadre juridique » de la circulaire du 24 juin, « parfaitement républicaine », insiste-t-il.
XAVIER BERTRAND « ASSUME »
Est-ce à dire que la circulaire du 5 août ne serait pas « parfaitement républicaine » ? Eric Besson ne le dit pas explicitement. Quant au patron de l’UMP, Xavier Bertrand, l’idée ne l’effleure même pas. Cette circulaire « est la traduction de notre politique et je l’assume tout à fait », a-t-il lancé sur RMC, avant de dénoncer une fois de plus « l’hypocrisie » du Parti socialiste et des « associations de bien-pensants » sur cette question.
Parmi ces associations, le Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti) a annoncé, dimanche, préparer un recours devant le Conseil d’Etat. « Vous imaginez une circulaire nommant expressément les juifs ou les Arabes ? » s’est indigné son président, Stéphane Maugendre, sur France Info. Jean-Bernard Auby, professeur de droit public à Sciences Po, a de son côté expliqué au Monde.fr que « cette circulaire est très probablement illégale ».
« PAS DE COUAC »
Un ministre qui n’est « pas au courant », un porte-parole du parti qui « assume ». Pour Dominique Paillé, porte-parole adjoint de l’UMP, « il n’y a pas de ‘couac’ gouvernemental ». « Puisqu’il s’agit de démantèlements de camps illégaux, il appartient au seul ministre de l’intérieur de donner ses directives aux préfets à travers une circulaire qui n’a pas de raison d’être interministérielle », explique-t-il.
La circulaire du 5 août, signée par Michel Bart, directeur de cabinet du ministre de l’intérieur, rappelle aux préfets les « objectifs précis » fixés par le président Nicolas Sarkozy : « Trois cents campements ou implantations illicites devront avoir été évacués d’ici à trois mois, en priorité ceux des Roms. » « Il revient donc, dans chaque département, aux préfets d’engager (…) une démarche systématique de démantèlement des camps illicites, en priorité ceux de Roms », selon le texte.