Des assises contre l’expulsion

La_République_du_Centre_Logo,15/03/1988

Le M.R.A.P. a permis à de multiples associations de se rassembler pour une large concertation. Des témoignages vécus en présence d’un public nombreux.

CHARTRES. — Les première « assises départementales » organisées par le M.R.A.P. (mouvement contre le racisme et pour l’amitié des peuples) se tenaient samedi dernier au Forum de la Madeleine, en présence d’un auditoire composé d’associations et de représentants de divers organismes, ainsi que d’individuels, dont certains étaient venus directement témoigner de leur cas.

La thème abordé tout au long de cet après-midi devant la menace d’expulsion, quels sont les droits des étrangers en France ? aura permis aux parties prenantes de confronter expérience et témoignages tout en répondant en direct aux questions du public grâce aux juristes présents pour la circonstance. (La loi Pasqua s’est trouvée très souvent au cœur des problèmes).

Patrice Alliot, président de la fédération du M.R.A.P. d’Eure- et-Loir, avait réuni autour de lui Stéphane Meyer, avocat et membre du secrétariat national du M.R.A.P. ; Fadila Amrani, membre du secrétariat national Terre d’asile ; Abderazah Bouazizi, avocat et membre du C.A.I.F. ; Stéphane Maugendre, avocat et membre du G.I.S.T.I., ainsi que Jean-Marie Boutiflat, membre du collectif A leurs côtés, diverses associations (association des travailleurs turcs. Ligue des droits de l’homme, représentants du syndicat de la magistrature ; l’évéque de Dreux, les prêtres de Rechèvre étaient venues entendre ou témoigner de la situation actuelle en France en matière d’expulsions ou reconductions a la frontière.

Car la notion de situation régulière couvre des réalités bien différentes. Comme le montre le cas de Nzolani N’ Dofunsu, étudiant zaïrois, menacé d’expulsion pour le 24 mars prochain. Son changement d’adresse ne lui a pas permis de recevoir la copie du jugement de l’O.F.P.R.A, (Office français de protection des réfugiés et apatride qui est chargé d’instruire les dossiers de demande d’asile et d’y répondre.

Nzolani est en France depuis6 ans comme étudiant et ce statut ne lui permet pas de terminer sa dernière d’étude ni d’obtenir le statut de réfugié politique. En opposition avec la politique actuelle du Zaïre, quelle liberté de choix lui reste-t-il ? M. Charleston est Haïtien d’origine et s’est enfui des prisons des tontons Macoutes. En France, il rencontre une femme, ils ont un enfant et il trouve du travail. Sa demande d’asile est rejeté, ainsi que sa demande de recours. Il n’a plus de papiers donc plus de travail bien que son avis d’expulsion n’ait pas été prononcé.

Autant de témoignages qui ont par la suite débouché sur un projet de concertation communal et la mise en place dans le département d’un collectif qui recenserait toutes les personnes, pouvant Intervenir rapidement! dès qu’un cas d’expulsion ou de| menace expulsion est signalé.

Les juristes, à ce titre, seront un atout très précieux au côté de tous tes bénévoles qui consacrent la majeure partie de leur temps à défendre «l’indéfendable». A suivre donc…

Assises départementales du MRAP Vers la création d’un réseau d’alerte en cas d’expulsions

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Inquiétudes au MRAP. La multiplication des expulsions d’étrangers et les nombreuses reconduites à la frontière ont poussé les responsables du mouvement à créer une nouvelle structure de riposte.

« NOUS souhaitons mettre sur pieds un réseau d’alerte et de solidarité. Notamment au départ des aéroports. Il faut que nous puissions agir rapidement et secourir les gens qui fuit l’objet d’une expulsion. Il y a toujours des brèches… Il faut s’y engouffrer ». Pour Me Stéphane Meyer, dirigeant national du MRAP, cette priorité était à l’ordre du jour samedi au forum de la Madeleine à Chartres où se tenaient les assises départementales du MRAP contre les expulsions. Plusieurs intervenants (MRAP. G.I.S.T.I, France Terre d’Asile, Cimade. C.A.I.F, F.A.S.TI et A.S.T.I) ont animé cette journée d’études et le début suivi par un bon nombre d’associations de défense des droits, des syndicats, des représentants de partis politique. Mgr Gaillot, évêque de d’Evreux, avait tenu a faire le déplacement et a assisté à une partie de ses assises.

Un point de départ sous forme de constat d abord : la multiplication rapide des expulsions et des reconduites à la frontière «visant notamment de nombreux jeunes » . Une mise en cause ensuite par les intervenants de la loi du 9 septembre 1986, dite loi Pasqua-Pandraud. Un texte dont les termes ont été décortiqués samedi, les conséquences analysées. Les intervenants ont critiqué le fait qu’en matière de reconduite à la frontière, la loi ait donné  tout pouvoir aux préfets et non plus aux «seuls tribunaux judiciaires». Une donnée lourde de conséquence en matière de garantie de procédure.

Exemples à l’appui, les participants n’ont pas manqué non plus de mettre en avant la présence de plus en plus importante de vices de procédure.
Voilà pour le constat. Reste que ces assises avaient aussi une finalité : celle d’élaborer, voire préciser des ripostes possibles. L’une d’elle a fait l’unanimité : il s’agit de constituer un «réseau d’information et de solidarité ayant pour but de résister aux expulsions d’immigrés». La “création » d’un réseau d’hébergement a également été abordée. Cette hypothèse a fait l’objet de discussions : en offrant leur toit, en abritant un étranger faisant l’objet d’une mesure d’expulsion, les personnes agiraient illégalement Un point qui n’a pas manqué de diviser les participants.