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Quatre Maliens condamnés en appel pour avoir refusé d’être expulsés.
La Ligue des droits de l’homme «très choquée», le Syndicat de la magistrature «indigné», les Verts dénonçant «des peines sans précédent» et le Mrap «une déclaration de guerre contre les sans-papiers et une provocation». La polémique sur les sans-papiers s’est déplacée sur le terrain juridique après les peines très lourdes infligées jeudi par la cour d’appel de Paris à quatre Maliens qui avaient refusé d’embarquer sur un vol Paris-Bamako. L’un d’entre eux, Sirine Diawara, condamné à un an de prison ferme, a été arrêté à l’audience et incarcéré dans l’heure. Et la 12e chambre de la cour d’appel a dû être évacuée devant le raffut provoqué par ce jugement dans le public. Le 28 mars, douze Maliens, qui avaient occupé l’église Saint-Jean-de- Montmartre, étaient expulsés vers Bamako. Par la méthode ultraforte. Plus tard, (Libération du 2 octobre), ils racontaient les coussins placés devant leur bouche pour les empêcher de crier, les coups au ventre et au sexe. D’autres, qui acceptaient de partir, n’auraient pas été autorisés à aller chercher leurs bagages. Des procédés que la Diccilec, l’ex-Police de l’air et des frontières, avait affirmé ne jamais utiliser depuis le scandale belge de Semira Adamu, morte il y a deux mois, étouffée par un coussin dans l’avion qui la ramenait au Niger. Finalement, devant l’indignation des passagers, les douze hommes étaient débarqués de l’avion. En juin, le tribunal correctionnel de Bobigny avait annulé la procédure et relaxé les douze hommes, considérant qu’il n’existait pas de procès-verbal constatant formellement les infractions retenues contre eux. En condamnant quatre de ces hommes à des peines de trois mois à un an de prison ferme et cinq ans d’interdiction du territoire français, la cour d’appel a dépassé les réquisitions de l’avocat général qui, le 29 octobre, réclamait quatre mois de prison et cinq ans d’interdiction du territoire. «Des peines exorbitantes au regard de la jurisprudence», pour leur avocat Stéphane Maugendre, vice-président du Gisti, et «une logique d’exemplarité où la sévérité le dispute à la démesure», pour le Syndicat de la magistrature. Ils critiquent notamment la prise en compte par la cour d’un rapport des Renseignement généraux établi par un fonctionnaire qui n’a pas assisté aux incidents de l’embarquement, mais a seulement interrogé les policiers chargés de l’expulsion. Ce rapport indique que les prévenus «avaient reçu les conseils détaillés d’associations et de groupuscules d’extrême gauche [« ] de porter des coups aux fonctionnaires d’escorte pour tenter de les blesser». Ce que les douze hommes ont toujours contesté.
L’affaire se situe dans un contexte symbolique qui explique peut-être la lourdeur des peines. Car au lendemain des faits, le 29 mars, un incident similaire s’était reproduit à Roissy. Le ministre de l’Intérieur avait alors dénoncé «l’incivisme fondamental» des organisations de soutien aux sans- papiers. «Ce jugement est un avertissement à ces organisations», estime ainsi Stéphane Maugendre. «Une répression accrue à l’encontre des sans-papiers ne saurait tenir lieu de politique d’immigration», ont indiqué les Verts dans un communiqué.