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Mariage sans visa : le procureur dit oui

logoParisien-292x75 09/11/1990

La Sénégalaise se mariera finalement demain à la mairie. Elle est autorisée à rester en France jusqu ’en avril.

La jeune femme de vingt-six ans est depuis quelques jours au centre d’une polémique. Son avocat, Maître Maugendre, vient d’assigner le maire (P.S.) du Pré-Saint-Gervais en justice pour « refus de mariage ». L’affaire se complique lorsqu’on apprend que la Sénégalaise en question est en situation illégale sur le territoire français. Un maire doit-il accepter de marier une personne qui n’est pas en règle ?

L’avocat de la jeune Africaine s’insurge contre cette «confusion des genres». « Sous prétexte de lutte contre l’immigration clandestine, on bafoue un droit fondamental: le droit au mariage», affirme- t-il.« Le Parquet exige illégalement des autorisations afin de diligenter des procédures d’expulsion des étrangers, poursuit Maître Stéphane Maugendre. On a dépassé les bornes démocratiques. » Selon lui, aucun texte ne permet à un maire de vérifier la régularité du séjour d’un candidat étranger au mariage.

« Il n’y a pas eu refus de mariage, assure- t-on à la mairie du Pré. D’ailleurs, celui-ci se tiendra le 10 novembre. » La Sénégalaise épousera un réfugié politique guinéen. La mairie explique qu’elle attendait seulement le feu vert du procureur de la République. « Le 22 juin dernier, explique une collaboratrice de Marcel Debarge, les responsables de l’état-civil en Seine-Saint- Denis ont reçu une consigne du procureur. Ils devaient lui signaler toute anomalie relevée dans les papiers des étrangers. » « La jeune Sénégalaise n’avait pas de visa sur son passeport, explique-t-on à la mairie du Pré. Le Parquet a été saisi par téléphone. Il a finalement donné son feu vert au mariage le 30 octobre. » Entre temps, le jeune femme, enceinte de sept mois, avait été convoquée au commissariat des Lilas, menacée de reconduite à la frontière et finalement autorisée par le tribunal correctionnel à demeurer en France jusqu’en avril.

Pour son avocat, la régularité du séjour ne doit influer sur la célébration d’un mariage. Il souligne, en outre, que l’autorisation préalable au mariage des étrangers est abrogée depuis 1981. Le mariage de la Sénégalaise se fera donc et les juristes seront à la fête.

Au Pré-Saint-Gervais (Seine-Saint-Denis) Le maire refuse de marier une jeune Sénégalaise

index 09/11/1990

Le maire du Pré-Saint-Gervais (Seine-Saint-Denis), M. Marcel Debarge (PS), est assigné en justice devant le tribunal de grande instance de Bobigny, vendredi 9 novembre, pour avoir refusé de marier une jeune Sénégalaise de vingt-six ans en situation irrégulière en France. La jeune femme, enceinte de sept mois, qui souhaite épouser le père de l’enfant, réfugié politique originaire de Guinée-Bissau, avait déposé le 7 septembre à la mairie l’ensemble des papiers exigés pour cette cérémonie.

Dix jours plus tard, elle a eu la surprise de recevoir une convocation au commissariat. Invoquant un texte ancien abrogé en 1981, la mairie avait demandé au procureur de la République une autorisation préalable. Après avoir constaté la situation illégale de la jeune femme, le commissariat a, en vain, demandé au préfet un arrêté de reconduite immédiate à la frontière. Fin septembre, elle passait cette fois devant le tribunal correctionnel, pour séjour irrégulier.

Pour son avocat, Me Stéphane Maugendre, il y a là voie de fait de la part de la mairie, qui ne respecte pas le droit au mariage, d’où sa décision d’assigner le maire en référé : «Il est inadmissible, dit-il, de voir encore aujourd’hui des maires demander des autorisations préalables au parquet avant de prononcer des mariages. Or la pratique est courante». A la mairie du Pré-Saint-Gervais, on laissait toutefois entendre, jeudi matin, que ce mariage pourrait finalement être bientôt célébré.

⇒ Voir l’article

Marcel Debarge au Tribunal

evenement_jeudi  08/11/1990

N’en déplaise aux partisans de la lutte contre l’immigration clandestine, il existe des droits fondamentaux que l’on ne bafoue pas: celui de se marier, par exemple (Convention européenne des droits de l’homme). Vendredi 6 novembre, Marcel Debarge, sénateur-maire du Pré-saint-gervais, numéro deux du PS, sera assigné par Me Stéphane Maugendre (avocat) pour avoir refusé d’unir une jeune Sénégalaise en situation irrégulière à l’élu de son cœur.

Les services de sa municipalité avaient transmis au parquet de Bobigny le dossier de la jeune fille, qui a été convoqué par la police et condamnée devant une chambre correctionnelle pour séjour irrégulier. Le 24 octobre, sommée par voie d’huissier de fixer la date du mariage dans les quarante-huit heures, la mairie a répondu qu’elle attendait l’autorisation du procureur de la République pour célébrer la cérémonie.

Mauvaise volonté et mauvaise foi patentes : une circulaire du ministère de l’intérieur (1982) précise que l’officier d’état civil peut célébrer le mariage sans avoir à vérifier la régularité la régularité du séjour.