Archives de catégorie : Régularisation

Dénoncez, vous aurez des papiers !

 Accueil  Marie Barbier avec S.Homer, 5 Février, 2009

Reuters/Pascal Rossignol
Reuters/Pascal Rossignol

Immigration . Éric Besson propose d’accorder des titres de séjour provisoires aux sans-papiers qui dénonceront leurs passeurs.

Nicolas Sarkozy l’avait rêvé en 2003, Éric Besson l’a fait : un titre de séjour pour une délation. Lors d’une « vaste opération de démantèlement d’une filière clandestine » hier matin, le nouveau ministre de l’Immigration a annoncé qu’il signerait ce matin une circulaire pour « donner aux préfets la possibilité d’accorder des titres de séjour provisoires aux clandestins victimes de filières clandestines qui décideraient de les dénoncer ». Considérant que les « immigrés illégaux » sont dans un « statut qui ne leur permet pas de dénoncer leurs tristes conditions », l’ex-socialiste assure qu’avec ce système, « ils peuvent obtenir instantanément un titre de séjour provisoire ».

Les associations de soutiens aux sans-papiers se montraient hier atterrées par cette proposition. France Terre d’asile dénonce une « proposition spectaculairement inefficace ». Son président, Pierre Henry, rappelle dans un communiqué que l’idée proposée en 2003 par Nicolas Sarkozy pour protéger les victimes des réseaux de prostitution n’a abouti, six ans plus tard, qu’à rendre moins visibles les prostituées, qui « travaillent dans des conditions nettement plus dangereuses ».

Stéphane Maugendre, président du Groupe d’information et de soutien des immigrés (GISTI), se dit « stupéfait par ce type d’annonce » qu’il juge « irréaliste et irréalisable » : « À partir de quels critères auront-ils droit à un titre de séjour ? Pour avoir dénoncé un passeur ou la filière tout entière ? Et ceux qui sont arrivés il y a longtemps ? » Pour l’avocat, cette mesure traduit une méconnaissance des filières clandestines de la part du ministère : « Les trafics organisés sont extrêmement parcellisés. Entre le départ du pays d’origine et l’arrivée en France, les intervenants ne se connaissent pas les uns les autres. La plupart du temps, les gens qui passent n’ont qu’un numéro de téléphone. Jamais ils n’ont affaire aux responsables. »

Autre sujet de colère : les titres de séjours provisoires promis en échange de la délation. « C’est profondément choquant », juge Richard Moyon, du Réseau éducation sans frontières, qui dénonce par ailleurs le « terreau d’injustice nourri par Sarkozy, Hortefeux et maintenant Besson qui condamnent les gens à recourir aux passeurs».

Les associations s’inquiètent aussi des pressions que pourraient subir les sans-papiers du fait de cette nouvelle circulaire. Pour Stéphane Maugendre, les « pressions sur les familles dans les pays d’origine » pourraient s’accentuer. Richard Moyon confirme : « La mafia a des moyens de coercition, je ne suis pas sûr que cette circulaire suscite des vocations massives de délateurs. »

Même son de cloche chez Frank Fievez, de l’UNSA Police, ancien de la police de l’air et des frontières (PAF) : « Vu le peu de contact avec les intermédiaires et les pressions qui pèsent sur les familles restées au pays, demander aux sans-papiers de dénoncer les passeurs, c’est totalement irréaliste. Si l’on veut démanteler les filières, il serait plus utile de donner des moyens d’investigation à la PAF. À qui l’on ne demande pour l’instant qu’une seule chose : multiplier les reconduites à la frontière. »

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Immigration : appel à la dénonciation des passeurs

  Pascale Egré, 05/02/2009

Eric Besson déclenche « la guerre aux passeurs ». Le nouveau ministre de l’Immigration l’avait martelé le 27 janvier lors de son déplacement à Calais : « Il faut traquer ces exploiteurs, ces menteurs, ces tricheurs qui font fortune sur le dos des miséreux.»

Pour cela, il entend fournir aux préfets un « nouvel outil ». Signée ce jeudi matin à Paris, une circulaire leur permettra de délivrer des titres de séjour « aux étrangers victimes de la traite des êtres humains qui coopèrent avec les autorités judiciaires ».

Ce titre de séjour conditionné à une dénonciation serait, selon nos informations, d’une durée initiale de six mois, renouvelable « jusqu’à la fin de la procédure judiciaire ». Il serait assorti de « mesures d’accompagnement social et de soutien financier » et concernerait aussi bien les victimes d’exploitation sexuelle que d’exploitation par le travail.

Délation contre papiers ? « Non. Mon objectif premier est de démanteler les filières », s’est défendu Eric Besson hier sur Europe 1. « L’idée est d’encourager les clandestins à témoigner en leur garantissant qu’ils n’en seront pas pénalisés », insiste-t-on dans son entourage. « Une proposition spectaculairement inefficace sur le fond ! », a rétorqué l’association France Terre d’asile. « On demandait déjà aux patrons de dénoncer leurs salariés sans papiers. On demande maintenant aux salariés de dénoncer leurs patrons », s’emporte Stéphane Maugendre, président du Gisti. « Si tu me dénonces, je me venge sur ta famille, dira le passeur. Le risque de représailles sur les proches restés au pays est évident », estime-t-il.

Une difficulté d’application

La circulaire, dont le contenu sera dévoilé ce matin lors d’une visite d’Eric Besson à la préfecture de police de Paris, s’appuie sur une directive européenne et sur la loi du 18 mars 2003, qui introduisait l’infraction de traite des êtres humains dans le Code pénal français. Voulue à l’époque par Nicolas Sarkozy pour lutter contre les réseaux de prostitution, la possibilité de décrocher un titre de séjour s’adressait surtout à leurs victimes, des jeunes femmes originaires des pays de l’Est ou d’Afrique.  En pratique, selon les rares chiffres disponibles, seules 92 autorisations ont été accordées à Paris en 2008. « Toute la difficulté tient à l’application inégale de cette disposition selon les préfectures, décrypte Patrick Hauvuy, directeur de l’ALC-Nice, association de lutte contre la traite. »

A l’appui de son annonce, le ministre de l’Immigration s’est félicité hier du récent démantèlement, par les services de la police de l’air et des frontières, de deux réseaux. Hier, onze personnes dont huit organisateurs d’une filière chinoise de faux papiers ont été interpellées en région parisienne et à Paris. Le 27 janvier, huit employeurs et onze travailleurs sans papiers étaient arrêtés lors d’une opération visant 44 établissements de restauration indo-pakistanais.

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Sans-papiers: la prime à la délation

A l’avenir, les étrangers entrés illégalement en France pourront se voir délivrer un titre de séjour… s’ils dénoncent leur passeur. Hier (mercredi 4 février), Eric Besson, le ministre de l’Immigration a annoncé sur  Europe 1 qu’il allait signer aujourd’hui (jeudi 5), une circulaire par laquelle «nous allons donner aux préfets la possibilité d’accorder des titres de séjour provisoire aux clandestins victimes de filières clandestines qui décideraient de les dénoncer». «Mettez-vous à la place de ces immigrés illégaux, explique le ministre, ils sont aujourd’hui dans un statut qui ne leur permet pas de dénoncer leurs tristes conditions puisque, justement, ils n’ont aucune titre de séjour. Ils peuvent avoir peur d’aller voir la police ou la gendarmerie». «Avec le système que nous allons mettre en place, ajoute Besson, ils savent que s’ils dénoncent ceux qui les ont mis dans cette situation, ils peuvent obtenir instantanément un titre de séjour provisoire et coopérer avec la police». Une bonne idée? Les association France terre d’asile (voir le communiqué) et SOS racisme en doutent (voir le communiqué). Stéphane Maugendre, le président du Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti) aussi. Interview.

Pourquoi contestez-vous cette mesure?

La délation, par principe, est toujours sujette à caution. Sur un plan moral, c’est moralement condamnable. Et je pense que c’est aussi assez irréalisable. Un passeur c’est quoi? Ça va de celui qui fait inscrire sur son passeport comme son fiston quelqu’un qui ne l’est pas, au membre de la famille qui fait passer la frontière clandestinement à un cousin, à des trafiquants internationaux avec une organisation extrêmement perfectionnée comprenant la traversée de plusieurs pays jusqu’à l’arrivée en France dans un hôtel, la fourniture de faux papiers, le boulot, etc. Et tout ça est parcellisé, sécurisé. Les gens ne se connaissent pas les uns les autres. Le seul intérêt serait que l’étranger dénonce tout le réseau, mais comme il ne connaît que le petit passeur en bout de chaîne, quel intérêt? Et puis il risque d’y avoir des dérives, des mesures de rétorsion sur la famille restée au pays, des réglements de compte intra-familiaux. Le type qui dénonce va mettre en péril sa vie et celle de ses proches.

Pour l’étranger, quel est le poids juridique d’une circulaire?

C’est juste une instruction. En clair, la personne ayant dénoncé son passeur et qui se verrait refuser un titre de séjour par la préfecture serait démunie. Une circulaire n’a pas force de loi. Si elle porte l’affaire devant le tribunal administratif, c’est ce que lui dira le juge. Il faut arrêter de gouverner avec des circulaires. Sarkozy y a eu recours pour la régularisation des parents sans-papiers d’enfants scolarisés, Hortefeux pour la régularisation des salariés. Qu’au moins Besson fasse une loi disant: s’il y a dénonciation, il y aura un titre de séjour.

Besson dit que «son objectif premier était de démanteler les filières», est-ce que cette mesure peut au moins avoir cet intérêt?

Les filières sont d’autant plus puissantes, gagnent d’autant plus d’argent que c’est difficile d’obtenir un visa. Plus les procédures sont longues, plus les gens entrent clandestinement en France. Besson arrive à son ministère, il faut bien qu’il annonce quelque chose. Mais cette mesure ne résoudra rien, c’est juste de l’affichage.

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Eric Besson propose des titres de séjours provisoires

Sans-papiers : le fiasco des régularisations par le travail

Carine Fouteau

Extrait : Les salariés sans papiers poursuivent leur grève «illimitée» en Ile-de-France. Malgré l’ampleur du mouvement, leur demande de régularisation collective adressée au ministre du Travail, Xavier Bertrand, reste sans réponse. La CGT menace d’élargir la grève à d’autres régions. Du côté des préfectures, chargées d’instruire les dossiers, on observe un certain cafouillage. Seules quelques dizaines de personnes munies d’un contrat de travail ont obtenu un titre de séjour depuis le début de l’année.

Couvertures, sandwiches et sonos: les quelque 300 salariés sans papiers d’Ile-de-France en «grève illimitée» se préparaient, ce mercredi dans la soirée, à une deuxième nuit d’occupation de leurs entreprises. Malgré le rassemblement organisé dans l’après-midi rue de Grenelle à Paris, le ministre du Travail ne les a pas reçus. C’est en effet Xavier Bertrand que les grévistes ont choisi d’interpeller pour demander leur régularisation, plutôt que le ministre de l’Immigration, Brice Hortefeux, car ils se considèrent avant tout comme des salariés dont les droits ne sont pas respectés.

A Villejuif, dans le Val-de-Marne, la centaine d’Africains occupant la Maison du nettoyage ont été rejoints par des femmes, notamment des Moldaves, …

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Des patrons en lutte

rue89-logo Chloé Leprince 17/04/2008

En pleine grève des sans-papiers, un chef d’entreprise veut fédérer les patrons pour faire régulariser leurs salariés.

Johann Le Goff a 32 ans et pas la moindre carte d’électeur. Même si « ça commence à le titiller ». Pourtant, en moins de 24 heures, ce patron d’une PME de câblage informatique a débarqué dans l’actualité comme une icône chez les patrons citoyens.

Depuis un mois, il tentait de fédérer des chefs d’entreprise pour réclamer d’une même voix la régularisation de leurs salariés sans-papiers, dans des secteurs où ils affirment peiner à trouver de la main-d’œuvre.

La grève de plusieurs centaines de travailleurs sans papiers, qui a démarré hier en Ile-de-France sous les hospices de la CGT et de l’association « Droits devant ! “ lui offre une tribune toute trouvée.

Difficile de recruter depuis le durcissement de la loi

En quelques semaines, Johann Le Goff a réussi à mobiliser une trentaine d’entreprises qui sont dans son cas. Depuis qu’il a lancé sa première société, il y a sept ans, le patron de Seine-Saint-Denis affirme en effet avoir ‘de plus en plus de mal à recruter des employés’, sachant qu’il tourne avec ‘une dizaine de salariés par an’.

La première fois que ce ‘non militant’ s’est posé cette question, c’était il y a quatre ans, avec un premier salarié sans papiers. Depuis, Konex, l’entreprise de Johann Le Goff, a eu recours à de nombreux intérimaires. Le jeune patron de PME n’exclue pas que certains d’entre eux aient pu travailler sous une fausse identité.

Mais la loi s’est durcie, en juillet 2007, et les entreprises sont désormais obligées d’apporter la preuve que leurs salariés sont en règle. A l’automne, Johann Le Goff a proposé à plusieurs reprises à l’un de ses hommes, un Algérien, de le titulariser. Impossible : son salarié n’avait pas de papiers.

Pour pouvoir embaucher dans les règles cet employé, le patron de Konex est allé jusqu’à prendre un avocat qu’il paye de sa poche pour faire les démarches. Son témoignage illustre l’impasse actuelle de la régularisation par le travail, pourtant vantée par le gouvernement.

Il y a quelques mois, le câbleur informatique a contacté Jean-Claude Amara et son association ‘Droits devant ! . Alors que ce dernier manifestait sous les fenêtres du ministère du Travail ce mercredi après-midi pour médiatiser la grève de travailleurs sans-papiers, il soutient l’initiative du patron de PME. Mais garde ses distances : pour lui, c’est maintenant aux patrons de prendre leurs responsabilités’ pour obtenir que le gouvernement change de braquet :

S’il ne réclame pas qu’on régularise tout le monde, Johann Le Goff, lui, souligne que la main-d’œuvre sans papiers est souvent formée et efficace. Il dit volontiers qu’il joue sur deux tableaux :

‘Il y a la question des droits de l’homme, de la dignité de nos employés ; et puis le problème économique à une époque où nous n’arrivons plus à embaucher. Les hommes politiques ne se rendent pas compte du manque à gagner que ça représente pour nous. On est dans la vraie vie.’

‘Ca n’avance plus sur les chantiers !

A ses côtés, Djamila Sarrar rebondit. Johann Le Goff ne la connaissait pas avant de lui proposer de rejoindre le réseau Patrons solidaires’ mais la jeune femme, à la tête d’une entreprise familiale de nettoyage de façades, dresse le même constat :

‘On a perdu 40% de notre chiffre d’affaires depuis décembre, parce que ça n’avance plus sur les chantiers. Depuis la nouvelle loi, trois de nos salariés ont disparu du jour au lendemain. Pour le quatrième, nous avons découvert après avoir envoyé son dossier en préfecture qu’il n’était pas du tout en règle. Nous avons été obligés de le licencier.’

La jeune patronne et sa mère soulignent que, faute de main-d’œuvre, elles assurent elles-mêmes le nettoyage sur le chantier ‘alors que c’est un métier d’homme, en hauteur, et que nous sommes censées chercher des clients, plutôt’.

Djamila Sarrar confie qu’elle rejoint le réseau parce qu’elle en a ‘ras le bol’ :

La patronne de Netexpress, l’entreprise de nettoyage, n’a pas coupé les ponts avec le salarié qu’elle a dû licencier ‘alors qu’il payait ses impôts comme tout le monde’. Ce mercredi après-midi, il est présent dans les locaux de l’entreprise familiale, à Montreuil (Seine-Saint-Denis). Il veut bien parler si on l’appelle Bouba. Il a 33 ans, était cultivateur dans son pays d’origine, la Guinée-Conakry, avant de gagner la France en 2001.

Ayant perdu deux ans plus tard son statut de réfugié, il a travaillé quatre ans chez Netexpress avec de faux papiers, ‘sans avoir prévenu ses patronnes’. Depuis son licenciement, il ne travaille plus :

‘Même le travail, tu ne peux plus trouver. Avant, c’était plus simple. Aujourd’hui, c’est devenu très difficile. Beaucoup de salariés sont licenciés. Mais, si je ne travaille pas, qu’est ce que je vais faire ? Il faut payer le loyer, manger… Il faut qu’on travaille… Sinon, on va où ?

Chez les sans-papiers, le bouche à oreille va bon train : dans certains quartiers, des sociétés d’interim se seraient spécialisées dans le placement de travailleurs sans-papiers. Par exemple, dit-on, des enseignes qui ont pignon sur rue à Paris, aux abords de la gare de l’Est ou de la gare du Nord. Maryline et Djamila Sarrar ont même entendu parler d’un tarif hors compétition, à 3,80 euros de l’heure.

Vers un nouvel esclavage’

Au Gisti, Me Stéphane Maugendre confirme qu’un des effets pervers de la nouvelle législation aura été de laisser des patrons peu scrupuleux seuls employeurs de main-d’œuvre sans papiers. L’avocat y voit carrément l’émergence d’un ‘nouvel esclavage’ :

Chez Netexpress, on termine la journée de mercredi en espérant que la médiatisation permettra de ‘faire bouger les dossiers’, à commencer par celui de Bouba. Même si Maryline s’étonne, d’un sourire ironique :

‘TF1 devait passer faire un reportage. Ils ont annulé parce qu’on ne les intéressait pas : on n’emploie plus de sans papiers. Il faut savoir ce qu’on veut ! Nous, on respecte la loi, mais on ne demande pas mieux !

Double langage et espoirs déçus

DNA_Logo 15/04/2008

Les possibilités de régularisation par le travail mises en avant par le gouvernement ont suscité chez de nombreux travailleurs sans papiers des espoirs souvent déçus, dénoncent des associations de défense des étrangers.

La loi du 20 novembre 2007 permet des régularisations sur présentation d’un contrat de travail, à condition que le recrutement se fasse dans un des « métiers en tension » dont les listes diffèrent pour les ressortissants des 10 pays nouveaux membres de l’Union européenne et pour ceux des pays tiers. Deux mois et demi après l’entrée en vigueur de ces mesures, le ministère de l’immigration a affirmé ne pas tenir à ce stade de comptabilité nationale et n’a pas souhaité faire de commentaire. « Il est impensable que les chiffres ne soient pas connus par le ministère », assure Stéphane Maugendre, avocat du Gisti, « puisque l’un des buts des mesures de régularisation annoncées est de faire sortir les sans-papiers de l’ombre pour les ficher et éventuellement les expulser comme cela a déjà été pratiqué avec la circulaire Sarkozy » de juin 2006 sur les parents d’enfants scolarisés (moins de 7 000 régularisations sur 30 000 dossiers déposés).

«Arrêté au guichet»

« Des travailleurs sans papiers se précipitent dans mon cabinet tous les jours et veulent aller à la préfecture pour se faire régulariser, nous les mettons en garde », poursuit Me Maugendre, « en leur disant qu’ils peuvent même se faire arrêter au guichet ». C’est ce qui est arrivé le 14 mars à la préfecture de Meaux (Seine-et-Marne), à un travailleur turc venu déposer une demande de régularisation, soutenu par son employeur et par un avis favorable de la Direction départementale du travail. Placé en rétention, ce sans-papiers a finalement été élargi par un juge des Libertés.

Pour Didier Inowlocki, intervenant au centre de rétention de Bobigny (Seine-Saint-Denis) pour la Cimade, cette affaire est « révélatrice du double langage du gouvernement et de la dimension de piège de ces mesures. On fait venir des dizaines de milliers de gens en préfecture mais le nombre de dossiers acceptés est dérisoire ». Dans sa circulaire du 7 janvier, le ministre de l’immigration, Brice Hortefeux, demandait aux préfets une « diligence particulière » pour les demandes de régularisation déposées par un employeur dans des secteurs « tendus » tout en écrivant que « ce dispositif couvre par définition un nombre très limité de bénéficiaires », les sans-papiers ayant, selon lui, « vocation à regagner leur pays d’origine ». La préfecture de Seine-Saint-Denis a communiqué le bilan des deux premiers mois d’application :  sur 1 600 demandes de régularisation déposées depuis janvier, pour les ressortissants européens, 285 contrats de travail sont considérés comme entrant dans le champ des dernières mesures et 257 ont été acceptés. Pour les étrangers des pays tiers, 16 contrats de travail ont été enregistrés et seuls quatre ont abouti à la délivrance de cartes de séjour d’un an.

Les régularisations par le travail suscitent des espoirs souvent déçus, selon des associations

AFP, Isabelle Ligner, 04/04/2008

Les possibilités de régularisation par le travail mises en avant par le gouvernement ont suscité chez de nombreux travailleurs sans papiers des espoirs souvent déçus, dénoncent des associations de défense des étrangers et des employeurs, parlant de « double langage » voire de « piège ».

La loi du 20 novembre 2007 permet des régularisations sur présentation d’un contrat de travail, à condition que le recrutement se fasse dans un des « métiers en tension » dont les listes diffèrent pour les ressortissants des 10 pays nouveaux membres de l’Union européenne et pour ceux des pays tiers (listes déclinées par région).

Deux mois et demi après l’entrée en vigueur de ces mesures, le ministère de l’immigration, questionné jeudi à la mi-journée par l’AFP sur un premier bilan de cette loi, a affirmé ne pas tenir à ce stade de comptabilité nationale et n’a pas souhaité faire de commentaire.

« Il est impensable que les chiffres ne soient pas connus par le ministère », assure Stéphane Maugendre, avocat du Gisti, « puisque l’un des buts des mesures de régularisation annoncées est de faire sortir les sans-papiers de l’ombre pour les ficher et éventuellement les expulser comme cela a déjà été pratiqué avec la circulaire Sarkozy » de juin 2006 sur les parents d’enfants scolarisés (moins de 7.000 régularisations sur 30.000 dossiers déposés).

« Des travailleurs sans papiers se précipitent dans mon cabinet tous les jours et veulent aller à la préfecture pour se faire régulariser, nous les mettons en garde », poursuit Me Maugendre, « en leur disant qu’ils peuvent même se faire arrêter au guichet ».

C’est ce qui est arrivé le 14 mars à la préfecture de Meaux (Seine-et-Marne), à un travailleur turc venu déposer une demande de régularisation, soutenu par son employeur et par un avis favorable de la Direction départementale du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle (DDTEFP). Placé en rétention, ce sans-papiers avait été libéré par un juge des Libertés.

Mais pour Didier Inowlocki, intervenant au centre de rétention de Bobigny (Seine-Saint-Denis) pour la Cimade, cette affaire est « révélatrice du double langage du gouvernement et de la dimension de piège de ces mesures ». « On fait venir des dizaines de milliers de gens en préfecture mais le nombre de dossiers acceptés est dérisoire », assure-t-il.

Dans sa circulaire du 7 janvier, le ministre de l’immigration, Brice Hortefeux, demandait aux préfets une « diligence particulière » pour les demandes de régularisation déposées par un employeur dans des secteurs « tendus » tout en écrivant que « ce dispositif couvre par définition un nombre très limité de bénéficiaires », les sans-papiers ayant selon lui « vocation à regagner leur pays d’origine ».

La préfecture de Seine-Saint-Denis a communiqué à l’AFP le bilan des deux premiers mois d’application: sur 1.600 demandes de régularisation déposées depuis janvier, pour les ressortissants européens, 285 contrats de travail sont considérés comme entrant dans le champ des dernières mesures et 257 ont été acceptés. Pour les étrangers des pays tiers, 16 contrats de travail ont été enregistrés et seuls quatre ont abouti à la délivrance de cartes de séjour d’un an.

« Le gouvernement ne semble pas se soucier de la survie des PME ou de la croissance puisque depuis deux mois, on oblige au contraire à licencier dans des secteurs comme le BTP où la main-d’oeuvre est déjà très difficile à trouver et nos demandes de régularisation pour des ouvriers bosniaques par exemple, sont délivrés au compte-goutte au gré des pulsions politiques », témoigne sous couvert d’anonymat un recruteur pour un groupement d’employeurs du bâtiment.

«Si un gars travaille bien, peu importe qu’il soit noir, blanc ou jaune»

 N.P., 27/03/2008

«LA CIRCULAIRE du 7 janvier ? Connaît pas. Les patrons sont perdus face à cette avalanche de textes. Par contre, dans le BTP, il y a un problème de recrutement. Alors, quand j’ai un gars qui travaille bien, peu m’importe qu’il soit noir, blanc ou jaune. Je veux juste qu’il soit compétent.»

Pour ce patron d’une entreprise du bâtiment, la législation relative à l’immigration choisie relève du casse-tête chinois. Confrontée à une demande croissante des chefs d’entreprise, la société Migration Conseil, installée à Montreuil depuis un an, organise aujourd’hui un séminaire à leur intention sur l’emploi des ressortissants étrangers. Objectif : informer les patrons des législations en cours.
Depuis juillet, les dirigeants sont tenus de vérifier l’authenticité du titre de séjour de leurs employés. Parallèlement, l’inspection du travail a renforcé ses contrôles et la menace de sanctions pénales pèse sur les contrevenants. « Un jour, la police m’a appelé sur mon portable en me disant : Vous avez un salarié clandestin caché sur le toit d’un de vos chantiers . Le ciel m’est tombé sur la tête. Pour moi, ce gars avait des papiers ! Je ne savais pas qu’il me fallait les vérifier en préfecture. J’avais le choix entre le licencier ou risquer la prison. Je m’en suis séparé. C’était pourtant un mec sympa qui bossait bien », témoigne ce patron. Depuis la circulaire du 7 janvier 2008 qui permet aux patrons de faire une demande de régularisation pour leurs employés, les demandes affluent sur les bureaux des avocats. « Beaucoup sont prêts à garder leurs employés. Mais ils ne savent pas comment s’y prendre », témoigne l’avocat Stéphane Maugendre. Reste que les chances de régularisation sont minces. Pour les recalés de la circulaire et tous ceux qui ont été licenciés, la clandestinité est souvent au bout du chemin. « Chez moi, ce gars avait des feuilles de paie. Il cotisait à la retraite, avait la Sécurité sociale, poursuit ce patron. Je l’ai croisé il y a quelque temps chez un fournisseur. Il bossait au black, sans feuille de paie, sans rien. »

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Les salariés sans papiers affluent à la préfecture

Nathalie Perrier, 27/03/2008

De nombreux étrangers ayant un emploi espèrent être régularisés. Mais bien peu pourront profiter de la nouvelle loi qui privilégie les Européens.

DES PAPIERS contre une promesse d’embauche ou un CDI. La proposition a de quoi faire rêver les milliers de sans-papiers qui travaillent en Seine-Saint-Denis, parfois avec de vraies feuilles de paie. Depuis la publication de la circulaire du 7 janvier 2008 sur la régularisation des salariés sans papiers, les demandes affluent à la préfecture de Seine-Saint-Denis.

Chaque jour, une quarantaine de dossiers sont déposés à la direction des étrangers de la préfecture de Bobigny et au bureau des étrangers de la sous-préfecture du Raincy, comme autant de bouteilles à la mer. Avec quel résultat ? Sur les 1 600 demandes effectuées, moins de 300 entrent dans le cadre de la nouvelle disposition législative.

 

Des associations s’alarment

« Deux cent cinquante-sept titres de séjour ont été accordés à des ressortissants des nouveaux Etats membres de l’Union européenne ; 4 cartes de séjour d’un an, comprenant la mention « travailleur salarié », à des salariés de pays tiers. Les 1 300 autres demandes feront l’objet d’un examen au cas par cas », précise la préfecture.

En clair, mieux vaut être « néo-européen » qu’africain… Les non-Européens ne peuvent en effet espérer être régularisés que s’ils exercent l’un des 29 métiers répertoriés dans la circulaire du 20 décembre .

Autrement dit, il leur faut être géomètre, chef de chantier, dessinateur en électricité et électronique ou encore informaticien expert. Les métiers du BTP, de la restauration, de l’hôtellerie sont par contre réservés aux Roumains, Bulgares, Polonais, Slovènes, etc.

« Ces listes sont irréalistes ! Les métiers accessibles aux salariés non européens sont des métiers qualifiés qui ne correspondent nullement aux postes non qualifiés qu’ils occupent dans la réalité. On remplace une main-d’oeuvre par une autre, en fonction de son origine », résume Violène Carrère, du Gisti (Groupement d’information et de soutien des immigrés).

Dès la promulgation de ce texte, des associations avaient mis en garde les salariés en situation irrégulière, tentés de se ruer vers les préfectures. « Nous soupçonnions un piège et nous avions raison, dénonce Stéphane Maugendre, avocat et vice-président du Gisti. Les sans-papiers qui se sont précipités en préfecture ne seront, pour la plupart, pas régularisés parce qu’ils ne rentrent pas dans la bonne case. Par contre, ils sont désormais fichés. » Une situation qui rappelle celle des milliers de familles déboutées dans le cadre de la circulaire de juin 2006 sur les parents d’enfants scolarisés.

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