31/07/2012
Douze heures de rétention pour remplacer la garde à vue des sans-papiers: Manuel Valls a annoncé mardi un projet de loi pour l’automne, destiné à préserver « l’efficacité de la politique d’éloignement » des clandestins.
Le ministre de l’Intérieur avait très vite dit son intention de légiférer après l’arrêt du 5 juillet de la Cour de Cassation: conformément à la législation européenne, la haute juridiction avait déclaré illégale la garde à vue des étrangers (24 heures renouvelables une fois) pour le seul motif qu’ils étaient en situation irrégulière.
Cette décision concernait 60.000 personnes par an.
Les policiers ne disposaient donc plus que des quatre heures d’un contrôle d’identité pour engager une éventuelle procédure d’expulsion. Un délai qu’ils jugent impossible à tenir.
Devant les préfets mardi, Manuel Valls a annoncé qu' »un projet de loi (serait) proposé au Parlement avant la fin du mois d’octobre qui créera un régime spécifique de retenue administrative portant à douze heures le délai pour vérifier la situation d’un étranger ».
« C’est essentiel pour l’efficacité de notre politique d’éloignement », a-t-il insisté. Début juillet, il avait rappelé que « l’éloignement des étrangers en situation irrégulière (devait) rester la règle ».
Alors que son prédécesseur Claude Guéant avait prévu 40.000 reconduites à la frontière en 2012, après un record de 33.000 en 2011, Manuel Valls n’a pas avancé de chiffres.
Le député UMP Eric Ciotti s’est inquiété lundi « d’un effondrement de près de la moitié des reconduites à la frontière » depuis mai. « Polémique », avait répondu l’Intérieur expliquant cette chute par « la nouvelle donne sur les gardes à vue ».
Douze heures, c’est « un premier pas », a souligné Alain de Tonquelec, directeur de l’Ordre de Malte France, association d’aide aux sans-papiers.
« Régime d’exception »
Il a rappelé que plusieurs associations avaient émis le voeu que la rétention s’établisse « dans des délais qui ne soient pas aberrants », quelque part entre quatre et 48 heures. Début juillet, l’avocat de la Cimade, Me Patrice Spinosi, avait souhaité « une nouvelle mesure de pré-rétention administrative », « pendant une durée de huit à dix heures maximum », avant une éventuelle « procédure de retour ».
Mais pour le président du Groupe d’information et de soutien des travailleurs immigrés (Gisti) Stéphane Maugendre, il s’agit de « la mise en place d’un régime d’exception à l’égard des étrangers. C’est regrettable ».
« Doit-on nourrir un droit spécifique pour les étrangers? », s’est également interrogé Pierre Henry, président de France Terre d’Asile, jugeant que les législateurs devront « trouver le délicat équilibre entre la préservation d’un droit fondamental pour les étrangers et le droit de l’Etat à une politique migratoire ».
Pour Bruno Beschizza, secrétaire national de l’UMP, l’annonce de Manuel Valls « reste de l’ordre de la déclaration d’intention. Il est affligeant de s’apercevoir que la France va rester au moins trois mois dans une zone de flou juridique absolu ».
Manuel Valls, qui veut se démarquer de la politique de son prédécesseur, a répété devant les préfets les grands axes de sa politique sur l’immigration, Jean-Marc Ayrault affirmant lui la volonté du gouvernement de créer un nouveau « titre de séjour pluriannuel » qui pourrait être de trois ans, dans le but de favoriser l’intégration.
Outre « une action résolue contre la fraude documentaire et les filières de travail clandestin », Manuel Valls a annoncé une circulaire sur les critères de régularisation pour la rentrée, et une simplification de la naturalisation, « terme logique d’un parcours d’intégration réussi ». Un chemin qui, a-t-il rappelé à l’Assemblée, fut aussi le sien.
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