03/10/2013
Huit jeunes de 17 à 20 ans, qui l’avaient roué de coups il y a deux ans à la gare RER, sont jugés aujourd’hui à Bobigny.
Plus de deux ans après avoir été lynché, Haroun va recroiser ses agresseurs. Ceux qui, à Noisy-le-Sec, un soir d’avril 2011, l’ont roué de coups de poing et de coups de pied à la gare RER pour une « histoire de fille ». Une histoire de grand frère, plutôt, se mêlant de l’intimité de sa sœur cadette, et qui vaut aujourd’hui à huit jeunes hommes d’être jugés.
Ces adolescents des Marnaudes, à Rosny-sous-Bois, étaient mineurs au moment des faits. Ils seront donc jugés à huis clos par un tribunal pour enfants. Un autre, majeur, est renvoyé devant le tribunal correctionnel.
Ce soir du samedi 2 avril, les secours émettaient un avis plus que réservé sur la survie d’Haroun. Ce jeune habitant de Sartrouville (Yvelines) souffrait d’une hémorragie crânienne et abdominale. La jeune femme avec qui il se trouvait racontait la scène de violence à laquelle elle avait assisté : une quinzaine de jeunes s’en étaient pris à lui pour le punir d’une relation qu’il entretenait avec une habitante de Rosny-sous-Bois.
Les agresseurs, sans casier judiciaire, ont pu être retrouvés grâce à ce témoignage. L’enquête, conduite par la sûreté territoriale, a montré que, dans le lot, certains auraient suivi les copains sans savoir pourquoi ils frappaient ni qui était celui qui était battu, couché au sol.
« L’affaire avait pris une tournure politique scandaleuse », déplore aujourd’hui Stéphane Maugendre, l’avocat du principal mis en cause, qui se rappelle du ministre de l’Intérieur de l’époque, Claude Guéant, s’emparant du fait divers. « Même si les faits reprochés sont graves, c’est scandaleux d’en rajouter. Il s’agit d’un grand frère qui a voulu peser sur les relations de sa petite sœur, il a voulu avoir des explications et ça a mal tourné. »
« Ils se sont trompés de cible », déclarait dix jours plus tard au « Parisien », Haroun, miraculeusement sorti du coma et en apparence indemne. Mauvaise cible, car le jeune homme, de 19 ans à l’époque, ne sortait pas avec la petite sœur d’un des agresseurs, mais en fait avec celle qui l’accompagnait le jour du drame. « Cette agression a tout changé pour Haroun, il ne sort plus, n’a plus de copains, ni de copine, il a pris du poids, il dort mal et fait des cauchemars », relate Me Alain Barbier, l’avocat d’Haroun, qui compte sur une nouvelle expertise pour évaluer précisément les séquelles psychologiques de son client. Selon l’avocat, « ce passage à tabac était destiné à tuer ». Le principal agresseur s’en est toujours défendu, et l’instruction n’a pas établi cette volonté de tuer.
La tentative de meurtre, d’abord retenue par le parquet, a été écartée. Les faits ont été requalifiés en violences volontaires avec incapacité totale de travail de plus de huit jours, dix-sept en l’occurrence, violences commises en réunion et dans une gare, si bien que l’affaire a été renvoyée devant le tribunal correctionnel et non devant la cour d’assises. Deux sont poursuivis pour n’avoir pas empêché les autres de frapper. Les faits sont passibles de sept années d’emprisonnement. La moitié des prévenus a déjà effectué entre trois et sept mois de détention provisoire.