Entretien réalisé par Émilie Rive, 14/09/2010
Pour Stéphane Maugendre (Gisti), «un nouveau pas dans le déni du droit» a été franchi.
Vous jugez la circulaire du 5 août discriminatoire. Pourquoi ?
Stéphane Maugendre. Ce texte demande aux préfets de procéder à une discrimination en raison de l’appartenance à une ethnie ou à une communauté. C’est complètement illégal. C’est comme si on donnait ordre à la police d’arrêter des gens en raison de leur appartenance religieuse ou de leur couleur de peau. Ce qui ne veut pas dire, pour le dernier cas, qu’ils ne le font pas. Mais ce n’est pas écrit.
Éric Besson dit qu’il n’était pas au courant…
Stéphane Maugendre. J’ai du mal à le croire, même si je n’ai aucune certitude sur le sujet. Nous aurions un ministre de l’Intérieur qui intervient dans le domaine de son collègue sans le lui dire ? La circulaire est adressée aux préfets, qui doivent rendre compte au ministre de l’Immigration des mesures d’éloignement et de leur nombre. La défense d’Éric Besson, qui dit qu’on ne lui parle que des Roumains, est un peu simpliste. Tous ces indices font penser qu’il ne pouvait l’ignorer.
Vous déposez un recours devant le Conseil d’État. N’est-ce pas un peu lent ?
Stéphane Maugendre. Nous déposons une demande d’annulation de la circulaire. Mais celle-ci est tellement attentatoire au droit que nous déposons aussi un référé suspension qui permettra au Conseil d’État de suspendre son application avant de statuer sur le fond. Nous envisageons aussi de saisir la Halde, voire une juridiction pénale. Nous ne voulons pas nous précipiter. Mais nous sommes atterrés. Le texte de cette circulaire organise une véritable traque. Ce gouvernement est tellement décomplexé qu’il est capable d’écrire d’aller faire la chasse aux Roms ! Il a franchi là un nouveau pas dans le déni du droit.