,Geoffrey Bonnefoy ,16/04/2015
POLEMIQUE – Au lendemain du viol puis du meurtre de la petite Chloé, à Calais, le parti d’extrême droite s’en est pris vertement à la justice dans un argumentaire non dénué d’approximations. Metronews démêle le vrai du faux.
Le FN est monté au créneau, avec beaucoup d’imprécisions, après la mort de Chloé.
À l’émotion suscitée par le viol et le meurtre de la petite Chloé, mercredi, à Calais, les ténors du FN ont rajouté ce jeudi une opération de récupération politique. L’occasion pour Marine Le Pen de fustiger, à tort, l’abrogation de la « double peine » et pour Gilbert Collard d’entonner sa petite musique, récurrente, concernant les remises de peine prévues par la loi. Metronews fait le point sur ce double-argumentaire.
Marine Le Pen et la double peine
Sur Twitter, Marine Le Pen a fait d’une pierre deux coups en s’en prenant à la suppression de la double peine, décidée par son adversaire politique favori : Nicolas Sarkozy.
Pour rappel, la double peine consiste à sanctionner un délinquant étranger à de la prison, tout en l’interdisant de territoire à sa sortie. Sur ce point, et dans le cas du drame de Calais, la présidente du Front national, qui a commencé sa carrière comme avocate, fait de l’intox. « Nicolas Sarkozy n’a pas abrogé la ‘double peine’ mais a modifié certaines dispositions à la marge. On peut regretter que M. Sarkozy l’ait présentée ainsi à l’époque, ce qui est faux. On peut regretter aussi que Mme Le Pen rebondisse sur un mensonge sans le vérifier », grince Me Maugendre, auprès de metronews.
Concrètement, la double peine a seulement été aménagée sous la précédente mandature : la justice conserve la possibilité de prononcer des peines complémentaires d’expulsion pour les « criminels étrangers. C’est d’ailleurs ce qu’a fait le tribunal de Boulogne-sur-Mer concernant le principal suspect en prononçant une interdiction de territoire français. Sauf que, dans ce cas précis, la peine a été annulée. Et pour cause, les faits pour lesquels le suspect a été condamné ne permettent pas en effet, légalement, son expulsion.
Gilbert Collard et les remises de peine
Ce jeudi, au micro de Sud Radio, le député du Gard, élu avec le soutien du FN, a déploré, lui, que le principal suspect de ce meurtre sordide – un ouvrier polonais de 38 ans au passé judiciaire chargé – ait bénéficié d’une remise de peine, dans le cadre d’une précédente condamnation. Ce qui semble vrai, mais tout à fait conforme à la loi.
Condamné le 30 mars 2010 à six ans de prison pour extorsion avec violences et tentative de vol aggravé en état de récidive, le suspect a purgé sa peine entre le 29 juin 2009 et le 21 mars 2014, soit un peu moins de 5 ans, d’après les éléments communiqués jeudi en milieu de journée par le procureur de Boulogne-sur-Mer, Jean-Pierre Valensi.
Les remises de peine sont strictement encadrées par le Code pénal. Elles sont calculées en fonction de crédit attribués quasiment automatiquement en fonction de la durée de la détention (ils ne sont remis en question que s’il y mauvaise conduite). Le suspect ayant été condamné avant l’entrée en vigueur de la réforme pénale de Christiane Taubira, qui a harmonisé, au 1er janvier dernier, le calcul de ces crédits entre primo-délinquants et récidivistes, Gilbert Collard ne peut donc s’en prendre qu’à la loi. Et non à un quelconque dysfonctionnement dans cette affaire précise.