Immigration . Les sans-papiers incités à coopérer avec la police.
A priori, cela peut sembler une bonne idée. A l’avenir, tout «immigré clandestin victime de proxénétisme ou d’exploitation» acceptant de coopérer avec la police pour l’aider à démanteler un réseau de passeurs se verra délivrer un titre de séjour de six mois. Hier, Eric Besson, ministre de l’Immigration et de l’Identité nationale, a signé une circulaire aux préfets en ce sens. Cette autorisation sera «renouvelable jusqu’à l’achèvement définitif de la procédure judiciaire». Et si une condamnation est prononcée, «la victime pourra obtenir une carte de résident de dix ans».
Cette initiative fait bondir les associations. SOS Racisme y voit une «officialisation des pratiques de délation». France terre d’asile la juge «spectaculairement inefficace». De fait l’article 16 de la loi Sarkozy de 2003 sur la «sécurité intérieure» stipule déjà qu’«une autorisation provisoire de séjour peut être délivrée à l’étranger qui dépose plainte contre une personne qu’il accuse d’avoir commis à son encontre les infractions» de traite des êtres humains ou proxénétisme, «ou témoigne dans une procédure pénale concernant une personne poursuivie pour ces mêmes infractions». Cette loi n’a donné que peu de résultats. Autre problème : une circulaire n’apporte aucune garantie juridique. «C’est juste une instruction, explique Stéphane Maugendre, président du Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti). Une personne ayant dénoncé son passeur et qui se verrait refuser un titre de séjour serait démunie. Si elle porte l’affaire devant le tribunal administratif, le juge lui dira qu’une circulaire n’a pas force de loi.»
Et quid des risques de représailles contre l’étranger ou sa famille, interroge SOS Racisme, «l’Etat français est-il en situation de garantir la sécurité physique dans les pays d’origine des personnes appartenant à la famille de celles et ceux qui auraient décidé de dénoncer tel ou tel passeur ?» Ironisant sur les «belles âmes qui ont parlé de « délation »», Eric Besson lance un appel aux clandestins : «Aujourd’hui, je leur dis « oui, sortez de vos ateliers, quittez vos caves […] et coopérez avec nous pour démanteler ces filières. Vous serez bien accueillis, nous vous aiderons ».»