Le site de la site de la LDH Toulon et Combats pour les droits de l’homme avaient publié l’avis de recherche de Stéphane Maugendre suite à la lettre adressée par Éric Besson le 7 avril aux présidents des associations ayant relancé le mouvement des délinquants de la solidarité.Le président du Gisti avait appelé à la collecte des différentes condamnations sur le fondement de l’article L.622-1 du CESEDA à l’encontre de personnes aidants les étrangers sans but lucratif, bien loin de l’image des “passeurs” véhiculés par le ministre de l’Immigration ou le président de la République.Le 8 avril, sur France Inter et dans d’autres médias, le ministre de l’Immigration affirmait pourtant que « le délit de solidarité n’existe pas. C’est un mythe« .Déjà dans son courrier du 7 avril aux associations, le ministre affirmait :
« Toute personne, particulier, bénévole, association, qui s’est limitée à accueillir, accompagner, héberger des clandestins en situation de détresse, n’est donc pas concernée par ce délit ».
Ces déclarations sont fausses – comme lui disait déjà Danièle Lochak, dans le premier débat sur la question “A ce soir ou jamais” sur France 3, le 2 mars 2009.Les preuves du contraire ont été apportées par Combats pour les droits de l’homme (l’origine du délit de solidarité, CPDH, 8 avril) puis, de manière talentueuse, par Maître Eolas (Du délit de solidarité et du mensonge des politiques”, Journal d’un avocat, 13 avril 2009; Eolas, “Haussons le niveau de Besson”, Journal d’un avocat, 16 avril 2009) produisant en quelques minutes de recherche plusieurs décisions falsifiant les allégations du ministre.Conformément à son expérience en matière (le premier appel des « délinquants de la solidarité » a été lancé en 1995 par le Gisti), le Gisti vient de publier sur son site un « inventaire des condamnations prononcées, depuis 1986, contre des personnes qui ont apporté une aide à des étrangers, la plupart du temps en les hébergeant ».Cette liste, déjà forte d’une trentaine de cas, n’est pas exhaustive et ne tient compte que des poursuites ayant entraîné condamnation, même si elle intégre les condamnations avec dispense de peine.Elle recoupe partiellement – mais pas entièrement – des cas relevés par Eolas.Elle démontre de manière manifeste que ce ne sont pas seuls passeurs et réseaux qui sont concernés par la pénalisation de l’aide aux migrants. Ces condamnations n’ont donc rien d’un mythe.Il est donc grand temps d’abroger l’article L.622-1 du CESEDA qui n’est pas conforme à la directive communautaire et de modifier une autre disposition (L.622-5) pour ne rendre ce délit qu’applicable aux passeurs et aux filières.
I. Condamnations d’« aidants »
Cette liste est en cours d’élaboration, donc non exhaustive…
- 16/12/2008, TGI de LILLE
hébergement ponctuels d’un amis sans-papier
1.000€ d’amende avec sursis (décision)
- 04/11/2008, TGI de LIMOGES
hébergement d’un étranger en situation irrégulière
(2 condamnés) 100€ d’amende avec sursis (décision)
- 17/06/2008, Cour d’appel de MONTPELLIER
hébergement de membres de la famille en situation irrégulière
500 € d’amende (décision)
- 18/09/2007, Cour d’appel d’ANGERS
hébergement d’un étranger en situation irrégulière
1 mois avec sursis (décision)
- 11/04/2007, Cour d’appel de BASTIA
hébergement d’un gendre en situation irrégulière
dispense de peine (décision)
- 23/08/2005, Cour d’appel de NIMES
hébergement d’un concubin
1000€ d’amende (décision)
- 09/08/2004, TGI de DOUAI
membres d’une association ayant à plusieurs reprises hébergé des étrangers en situation irrégulière
dispense de peine
- 17/12/2002, Cour d’appel de DOUAI
transport en taxi de clients connus pour être en situation irrégulière. Le chauffeur ne faisait partie d’aucun réseau et facturait le tarif normal.
2 ans avec sursis + 2 ans d’interdiction d’exercice de la profession de taxi
(Confirmé par Cour de cassation le 21/01/2004)
- 14/11/2001, Cour d’appel de DOUAI
hébergement d’un concubin
dispense de peine
- 27/03/2000, Cour d’appel d’ORLEANS
aide bénévole à un sans-papier dans le cadre de démarches administratives.
deux mois de prison avec sursis (décision)
- 12/10/1998, Cour d’appel de FORT DE FRANCE
hébergement de plusieurs étrangers
6 mois avec sursis + 20 000 F d’amende + interdiction du territoire 1 an
- 17/12/1997, Cour d’appel de DOUAI
hébergement d’un concubin en situation irrégulière
dispense de peine (décision)
- 20/11/1996, Cour d’appel de GRENOBLE
hébergement d’une concubine
dispense de peine (décision)
- 16/10/1996, Cour de cassation
2 prévenus ayant hébergés leur frère
Rejet du pourvoi : 5000 F d’amende avec sursis pour chacun (décision)
- 23/05/1996, Cour d’appel de TOULOUSE
aide à un concubin
3000F d’amende
- 29/02/1996, Cour d’Appel de POITIERS
hébergement d’une concubine
6 mois avec sursis (décision)
- 08/01/1996, TGI de SAINT ETIENNE
hébergement de son épouse
dispense de peine (décision)
- 17/11/1995, Cour d’appel de METZ
transport d’un étranger en situation irrégulière entre le centre ville et le supermarché le plus proche
15 jours avec sursis (décision)
- 12/10/1995, TGI de NANTERRE
hébergement d’un concubin
3 mois de prison avec sursis
- 04/05/1995, Cour d’appel de CHAMBERY
hébergement de 3 jours et 1 jour de deux étrangers en situation irrégulière
2 mois et 5 ans d’interdication du territoire français
(Confirmé par Cour de cassation le 22/11/1995)
- 08/03/1995, Cour d’appel de GRENOBLE
hébergement d’un frère
5000 francs d’amende et sursis (décision)
- 13/01/1995, TGI de DOUAI
hébergement d’un sans-papier par un prêtre
6 mois avec sursis
- 13/10/1994, Cour d’appel d’AGEN
hébergement d’un étranger en situation irrégulière
2 condamnés, 1 mois avec sursis (décision)
- 01/06/1994, TGI de THONON LES BAINS
hébergement d’une concubine
2000F d’amende
- 27/04/1994, Cour d’appel de PAU
hébergement d’une concubine
dispense de peine (décision)
- 04/10/1989, Cour d’appel de METZ
hébergement de sa belle mère gravement malade
2000 Francs d’amende avec sursis (décision)
- 17/03/1988, Cour d’appel d’AIX EN PROVENCE
accueil d’un frère
4 mois ferme (décision)
- 12/11/1986, Cour d’appel de NANCY
Facilitation de déplacement d’un étranger en situation irrégulière
3 mois avec sursis (décision)
NB. De la liste initialement mise en ligne, nous avons ôté trois décisions dans lesquelles la condamnation visait, à côté du délit de solidarité, d’autres délits (respectivement escroquerie, recel, hébergement lucratif – Cour d’appel de NANCY 09/04/2003 ; Cour d’appel de GRENOBLE 17/05/2002; Cour d’appel de LIMOGES 03/11/1993,).Des manifestants venus demander la suppression du délit de solidarité concernant l’aide aux sans-papiers devant la Cour d’appel de Marseille, le 8 avril 2009.
(Jean-Paul Pelissier / Reuters)—-
“Le Gisti a commencé à dresser et à publier sur son site un inventaire des condamnations prononcées, depuis 1986, contre des personnes qui ont apporté une aide à des étrangers, la plupart du temps en les hébergeant. Cette liste ne tient compte que des poursuites ayant entraîné condamnation (y compris avec dispense de peine). Ne sont donc pas recensées ici les poursuites ayant abouti à un non lieu ou à une relaxe. Elles ont pourtant donné lieu, à chaque fois, à leur lot d’intimidations, de convocations au commissariat ou à la gendarmerie, de gardes à vue, de mises en examen, de perquisitions à domicile pendant plusieurs semaines, voire plusieurs mois. Ne sont pas mentionnées non plus les rappels à la loi, ni les poursuites en cours. Ce recensement des condamnations d’« aidants » est donc loin de refléter l’ampleur du harcèlement dont font l’objet ceux qui apportent un soutien aux sans-papiers. Car, condamnation ou pas, la criminalisation de l’aide au séjour a bien vocation dissuasive.Telle qu’elle est, la liste est déjà édifiante et met en pièces la rhétorique d’Eric Besson qui voudrait faire croire que la loi ne vise pas les actes de solidarité. Mais elle est loin d’être exhaustive. Le Gisti continuera, avec l’aide de tous ceux qui refusent le délit de solidarité, à alimenter cette page au fur et à mesure que les informations lui parviendront. N’hésitez pas à lui signaler toutes les affaires dont vous auriez connaissance (solidarite AROBASE gisti.org)”.
Et voici le communiqué du Ministère de l’immigration, de la mauvaise foi et de l’amnésie partielle:
« Eric Besson a pris connaissance avec intérêt de cette liste, et s’engage à apporter une réponse circonstanciée, permettant d’apprécier l’étendue des actes reprochés.
Il ressort d’ores et déjà qu’aucune de ces 32 personnes n’apparaît comme un bénévole appartenant à une association humanitaire, ayant été poursuivi ou condamné dans le cadre de cette activité. Aucun des étrangers en situation irrégulière visés n’est d’ailleurs présenté comme relevant d’une situation de détresse.L’affirmation selon laquelle en 65 ans d’application de l’article L.622-1, seuls 2 bénévoles d’associations humanitaires ont été condamnés sur cette base, pour avoir dépassé les limites fixées par la loi, n’est donc pas démentie par la publication de cette liste.« Allez on se la refait, voici ses propos sur France inter: »“Il n’y a pas de délit de solidarité en France, et (…) toutes celles et ceux qui de bonne foi aident un étranger en situation irrégulière ne risquent rien. Ce ne sont pas des mots, ce sont des faits. En 65 ans, depuis qu’existe ce fameux article L.622-1 désormais célèbre, personne en France, personne en 65 ans, n’a jamais été condamné pour avoir simplement comme je le lis hébergé, donné à manger, transporté en auto-stop, un étranger en situation irrégulière. »
« Le ministre de l’Immigration, Eric Besson, a remis en cause mercredi la « crédibilité » du Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti), qui a recensé 32 cas d’individus condamnés pour avoir aidé des étrangers en situation irrégulière.
« La crédibilité du Gisti en la matière est quasiment nulle« , a estimé M. Besson, mercredi sur RMC.
« Chaque fois que je me suis penché avec détail et avec mes services sur les affirmations du Gisti, elles se sont quasiment systématiquement révélées fausses« , a-t-il affirmé.
La publication de cette liste « non exhaustive », selon l’association de juristes, se veut une réponse à une lettre du ministre de l’Immigration aux associations qui ont organisé le 8 avril des rassemblements dans 90 villes de France pour protester contre « le délit de solidarité » instauré par l’article L622-1 du Ceseda (Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile), une appellation contestée par M. Besson.
Dans cette lettre, M. Besson réaffirmait qu' »en 65 années d’application de la loi, personne en France n’a jamais été condamné pour avoir seulement accueilli, accompagné ou hébergé un étranger en situation irrégulière« .« Le Gisti n’a pas à faire la preuve de sa crédibilité en matière de droit des étrangers, je crois que la réputation du Gisti se suffit à elle-même« , a déclaré le président de l’association Stéphane Maugendre, interrogé par l’AFP, ajoutant: « A la limite, ça ne vaut même pas une réponse« .
- Pétition Siné Hebdo piquée par Charlie Hedbo: En 1971, le manifeste des 343 Salopes. En 2009, à l’initiative de Guy Bedos et Michel Onfray. L’appel du L622.
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