Stéphane Maugendre, avocat, décrypte les conditions de la régularisation.
Un grand nombre de familles sans papiers semblent entrer dans le cadre de la circulaire. Existe-il un quota ?
L’annonce de Sarkozy fait naître beaucoup d’espoirs chez les familles de sans-papiers. Or, ces critères sont cumulatifs et la plupart en induisent d’autres, implicites. C’est un entonnoir. On y entre volontiers, mais on en sort au compte-gouttes. Le nombre de régularisations est marginal ! C’est surtout de la poudre aux yeux. Une loi hyper répressive sur l’immigration est votée, puis une circulaire est publiée, qui vise à montrer que Sarkozy est humain.
Les familles doivent-elles se dépêcher de déposer un dossier en préfecture ?
Je leur déconseille. Il faut qu’elles prennent le temps de le bétonner et de le faire relire par une des associations faisant partie de RESF ou par un avocat spécialiste.
Le sixième critère évoque «la réelle volonté d’intégration de ces familles, caractérisée notamment par leur maîtrise du français, le suivi éducatif des enfants». Que signifie «maîtriser» une langue ?
Chaque préfet se posera la question ! Est-ce savoir la parler, la lire et l’écrire, ou seulement la parler ? Dans certaines préfectures, il y aura des entretiens individuels avec les deux parents, je leur conseille de mettre dans leur dossier un certificat d’inscription à un cours de français. Ce critère est excluant pour les familles originaires d’un pays dont la langue est éloignée du français.
Qu’appelle-t-on «le suivi éducatif» des enfants ?
Avant le 7 juillet [date de la fermeture des classes, ndlr], il faudrait que les directeurs d’établissements fassent des attestations d’assiduité, non pas pour l’année écoulée, mais pour les trois dernières années. Mais il faudrait aussi qu’il y ait des lettres de parents d’élèves et d’enseignants qui témoignent de l’accompagnement de sortie par l’un des parents sans papiers. Les médecins généralistes doivent également écrire des lettres témoignant que les enfants sont soignés.
Il semble facile de prouver que l’on a «un enfant né en France ou qui y réside habituellement depuis qu’il a atteint au plus l’âge de 13 ans»…
Ce qui exclut les familles dont les enfants sont arrivés quand ils avaient plus de treize ans. Comment les bacheliers et les étudiants sans papiers vont-ils être régularisés ?
Quels recours ont les familles ?
Aucun, car il s’agit d’une circulaire, et non d’une loi ou d’un décret.
Les parents en situation irrégulière sont souvent persuadés qu’ils seront protégés à la rentrée de septembre…
En vertu de quoi ? En août, la loi sur l’immigration est applicable. Les préfectures auront tous les moyens de reconduire les familles à la frontière. Si Nicolas Sarkozy avait eu envie de «protéger» les familles dont l’un des enfants est scolarisé, il aurait pris un décret qui aurait permis de faire des recours devant les tribunaux.