Juristes et associations estiment que le projet Debré pénalise encore plus les étrangers.
«Un bout de gras donné à l’extrême droite et aux sans-papiers», «un projet qui ne tient pas compte des événements.» Les spécialistes, familiers des arcanes du droit des étrangers, qui ont analysé l’avant-projet de loi sur l’immigration du gouvernement (Libération du 9 octobre) sont sévères et parlent de durcissement et de répression. «Les dispositions les plus répressives sont à la fois innovantes et liberticides, et tout ce qui peut sembler libéral n’est en fait que l’application de textes actuellement en vigueur, ou de la jurisprudence appliquée depuis longtemps par les tribunaux administratifs», estime l’avocat Stéphane Maugendre. Défenseurs de nombreux étrangers, il regrette que ni les propositions des médiateurs, ni le travail de ceux qui ont réfléchi depuis des années sur l’immigration, n’ait jamais été pris en considération. «Le projet, dans sa forme actuelle, aggrave les conditions de traitement des étrangers à l’entrée et à la sortie», note de son côté Jean-Pierre Alaux pour le Gisti (Groupe d’information et de soutien des travailleurs immigrés). Pour lui, l’avant-projet Debré «ne tient pas compte des événements récents et ne régularise qu’une petite frange des immigrés. Ainsi, les parents d’enfants nés en France, qui sont déjà inexpulsables, sont absents du projet». Les juristes notent aussi que le texte fait preuve d’une grande méfiance envers la justice, puisqu’il fait passer de vingt-quatre à quarante-huit heures le délai de présentation au juge d’un étranger placé en rétention administrative. La déception est d’autant plus forte que la disposition la plus libérale inscrite dans l’avant-dernière mouture, qui interdisait d’expulser les étrangers dont l’éloignement aurait des conséquences «d’une gravité exceptionnelle», a disparu de l’avant-projet définitif. Et que les déboutés du droit d’asile voient leurs possibilités de recours encore un peu plus limitées. D’autres critiques portent sur les pouvoirs jugés excessifs accordés aux maires pour contrôler la réalité des certificats d’hébergement. «Pour réprimer les étrangers, on porte atteinte à la liberté des Français», déplore-t-on au Gisti.
«On en profite pour resserrer les verrous», résume, au PS, Martine Aubry. Une intention dont se défendent, à droite, ceux qui ont travaillé au projet: bien que des concessions ont été faites en direction des plus répressifs sur la rétention administrative et les certificats d’hébergement, ils soutiennent, que la loi autorise un maximum de régularisation et tire, sans équivoque, les leçons de la crise estivale des sans-papiers. Mais sera-t-elle suffisante pour éviter d’autres Saint-Bernard?. – 24 membres d’un collectif de sans-papiers, dont une militante du MRAP et 2 sans-papiers ont été arrêtés et conduits dans les locaux de la police. Ils participaient à une manifestation qui n’avait pas été déclarée auprès de la préfecture.