Une circulaire du ministère de l’Intérieur français publiée par plusieurs médias montre que les Roms ont bien été explicitement et directement visés par la politique de démantèlement des camps illégaux commencée cet été et très critiquée. Des organisations de défense des droits de l’homme estiment donc que l’action du gouvernement français est juridiquement illégale, puisqu’est visée directement une catégorie de population en tant que telle et non des individus qu’on incriminerait pour certains faits.
On peut lire dans cette circulaire du 5 août 2010 signée par Michel Bart, le directeur de cabinet du ministre de l’Intérieur : « 300 campements ou implantations illicites devront avoir été évacués d’ici trois mois, en priorité ceux des Roms. Il revient donc, dans chaque département, aux préfets d’engager (…) une démarche systématique de démantèlement des camps illicites, en priorité ceux de Roms. »
« Le droit européen a été respecté » (Éric Besson)
Le ministre de l’Immigration Éric Besson avait contesté la semaine dernière que les Roms avaient été spécialement visés par ce que le gouvernement présente comme une politique d’aide aux retours volontaires. La France, qui a expulsé 9.000 Roms depuis le début de l’année, dont un millier en août, dit ne procéder qu’à des expulsions individuelles, même si les personnes refoulées sont embarquées sur des vols spécialement affrétés.
L’ONU, le Parlement européen, le Vatican, la Roumanie et dernièrement l’ancien maître de Cuba, Fidel Castro, qui a parlé « d’holocauste racial », ont critiqué la politique de la France en matière d’expulsions des Roms. De son côté, la Commission européenne a demandé des « informations » à Paris pour évaluer si les expulsés avaient bénéficié de tous les droits qui leur sont garantis en matière notamment d’intégration. Elle devrait rendre prochainement ses conclusions. « Le droit européen a été respecté. Il n’y a pas eu d’expulsion collective », a affirmé Éric Besson la semaine dernière à Bucarest.
Des associations demandent la suspension de la circulaire
Le Parti socialiste français a estimé, dimanche, que la circulaire était le « symbole d’une politique xénophobe ». Le PS demande le retrait de la circulaire et appelle la Commission européenne à poursuivre la France. « Je demande à la Commission européenne et à son président José Manuel Barroso d’engager une procédure d’infraction à l’encontre du gouvernement français pour que cessent le traitement indigne et la stigmatisation inacceptable des citoyens européens que sont les Roms », a déclaré Harlem Désir, député européen et secrétaire national, dans un communiqué.
Plusieurs associations vont demander la suspension de la circulaire sur le fondement de la discrimination qu’elle met en œuvre selon elle, a dit à Reuters Stéphane Maugendre, président de l’association d’aide aux immigrés Gisti. Une plainte pénale pour « provocation à la haine raciale » est aussi à l’étude, a-t-il ajouté.