Le tribunal correctionnel de Bobigny a condamné, jeudi 23 novembre, à six mois de prison avec sursis pour « homicide involontaire » un agent de la police aux frontières (PAF), pour la mort d’un Ethiopien qu’il était chargé d’escorter lors de son expulsion en janvier 2003 à Roissy (Val-d’Oise). Le 18 janvier, Getu Hagos Mariame, un Ethiopien de 24 ans, devait être reconduit à bord d’un avion en direction de l’Afrique du Sud. Ses protestations ont incité les policiers à utiliser ce qu’ils nomment les « gestes techniques d’intervention », afin de le maîtriser et de le réduire au silence : ils l’ont maintenu compressé, assis, le visage contre les genoux. Trop longtemps. M. Hagos Mariame a fait un malaise. Hospitalisé dans le coma, il est mort le lendemain. Pour le tenir plié sur son siège, M. Dallier s’était assis sur lui, selon des témoins, ce qu’il a toujours nié.
« MANQUEMENT À UNE OBLIGATION DE PRUDENCE ET DE SÉCURITÉ »
Le tribunal a reconnu la culpabilité d’Axel Dallier, 26 ans, le chef d’escorte, pour « homicide involontaire » en raison d’un « manquement à une obligation de prudence et de sécurité ». Dans ses motivations, le tribunal a considéré que le « pliage » prolongé, qui avait entraîné le malaise du jeune homme, « ne correspondait pas à un usage nécessaire et strictement proportionné de la violence », ainsi que le préconise le code de déontologie de la police. Les deux collègues d’Axel Dallier ont été relaxés, le tribunal estimant que dans leur cas, la causalité entre les gestes exercés sur la victime avant le décollage de l’avion, dans la nuit du 16 au 17 janvier 2003, et la mort, n’était pas clairement établie.
Lors de l’audience, le 28 septembre, la procureure, Nadine Perrin, avait demandé la condamnation de principe d’Axel Dallier et de son collègue Merwan Khelladi, 32 ans, sans demander de peine précise. Elle avait estimé toutefois « qu’ils n’avaient pas transgressé le règlement » et n’avait pas demandé la condamnation de David Tarbouriech, 28 ans, le dernier agent.
Depuis ce drame, la commission nationale de déontologie de la sécurité a recommandé l’abandon du geste technique de compression qui était alors enseigné à l’école de police. Et la formation des policiers d’escorte, qualifiée de « lacunaire » par la procureure, a été améliorée. Me Stéphane Maugendre, l’avocat de la famille de la victime, a estimé ce jugement « motivé et clair », réaffirmant que « le désir de la famille et des associations était d’obtenir une condamnation forte de certaines pratiques d’éloignement des étrangers, et notamment de la technique du pliage ». Suspendus pendant dix mois, les trois policiers avaient ensuite été réintégrés dans un autre service de la PAF.