Émilie Rive , 28/09/2006
En 2003, un jeune Éthiopien est décédé lors de son embarquement forcé à Roissy. Trois policiers de l’air et des frontières répondent de sa mort.
Mariame Getu Hagos a vingt-quatre ans quand il arrive à Roissy, le 11 janvier 2003, en provenance d’Afrique du Sud. Le refus du ministère de l’Intérieur d’accepter le dépôt d’une demande d’asile intervient le 15. Qu’il soit présenté, ensuite, comme somalien alors qu’il est éthiopien en dit long sur l’attention portée à son cas. Le lendemain, il est conduit par la police de l’air et des frontières dans un vol d’Air France pour Johannesbourg à 23 h 55. Perte de connaissance, arrêt cardio-respiratoire, réanimation, transfert à l’hôpital Robert-Ballanger de Villepinte (Seine-Saint-Denis). Il y meurt le 18 janvier.
Le rapport d’autopsie est net. La mort est « consécutive à un arrêt cardio-respiratoire, dû à un appui marqué cervical, avec compression bilatérale des carotides par flexion forcée de la tête sur le cou par appui droit du sommet du crâne… » Outre les lésions « traumatiques de contention et de maintien aux poignets et aux avant-bras », l’examen externe du corps fait apparaître d’autres lésions, à l’abdomen, sur les cervicales et l’arrière du crâne.
Autant dire que la mort de ce jeune homme qui refusait d’embarquer n’était pas naturelle. Plié en deux sur son siège, il a été maintenu le visage écrasé contre ses genoux beaucoup trop longtemps. Sans doute une vingtaine de minutes. Les médecins du SAMU de l’aéroport avaient fait état dans leur rapport d’un jeune homme « très excité » qui avait simulé des malaises. La Direction générale de la police expliquait que les policiers étaient souvent confrontés « à des attitudes violentes de la part de personnes récalcitrantes ».
Le 22 janvier, les trois gardiens de la PAF, dont le plus haut gradé et plus ancien dans le service avait vingt-deux ans, et qui assuraient « l’escorte » étaient suspendus, une enquête de l’inspection générale de la police et une enquête judiciaire diligentées. Des associations, dont l’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers (ANAFE), portaient plainte et se constituaient partie civile. Le 23, Nicole Borvo, sénatrice communiste, saisissait la Commission nationale de déontologie de la sécurité. Mariame Getu Hagos était le deuxième mort au cours d’un refus d’embarquement en quinze jours. Le procès des trois policiers s’ouvre, cet après-midi, devant la 14e chambre du tribunal de Bobigny à 13 heures.