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Il demande «la vérité» sur le décès survenu lors de l’expulsion.
Ce sont les médias argentins qui lui ont appris son décès : son frère unique dont il était sans nouvelles depuis quatre ans, Ricardo, était mort le 30 décembre sur un aéroport parisien, avant le décollage d’un avion qui allait le ramener de force au pays (Libération du 7 janvier). Carlos Barrientos s’est alors mis à surfer sur les sites des quotidiens français pour en savoir plus sur les conditions de ce tragique embarquement sur le vol AF 416 Paris-Buenos Aires de la compagnie Air France. Depuis une semaine, Carlos Barrientos est à Paris. Avec réserve et émotion, il explique être venu accomplir son «devoir de frère».
Errance. «Je veux donner une sépulture digne à mon frère. Assister à son enterrement», dit-il. Un enterrement administratif est prévu au cimetière de Tremblay-en-France, mais sans date précise. Or Carlos doit rentrer ce lundi en Argentine, car ses ressources sont limitées. Il veut aussi reconstituer le parcours français de Ricardo, depuis son séjour à Aix jusqu’à ses errances de poète des rues à Paris. Et savoir pourquoi cet homme de 52 ans est mort. Sur ce point, il laisse la parole à ses deux avocats qui vont, en son nom et au nom des associations qu’ils représentent (1), porter plainte pour «coups mortels». Me Stéphane Maugendre et Me Sophie Thonon-Wesfreid vont déposer cette plainte contre X, la semaine prochaine, devant le doyen des juges de Bobigny.
A huis clos. Ricardo Barrientos avait été maintenu plié en deux par deux policiers qui appuyaient sur ses omoplates. La police a expliqué que c’était la procédure habituelle ; l’institut médico-légal a conclu à un infarctus ; et le juge a estimé que la mort était naturelle, avant de classer l’affaire. «Ricardo est mort à huis clos et l’enquête s’est déroulée à huis clos», constate Me Maugendre.
Il y a pourtant des contradictions entre la version officielle et les témoignages de passagers recueillis dans les différents médias. «Il y avait deux médecins parmi les passagers, dont une femme qui a constaté la mort. Aucun des passagers n’a été entendu par les enquêteurs, pas plus que les hôtesses et stewards», s’étonne Me Maugendre. Cet homme est mort entre les mains des policiers, et un minimum de transparence est nécessaire, selon les deux avocats. Ricardo a-t-il été tué ? «Je ne peux pas le présager. La justice française doit clarifier les choses, éclairer la vérité», répond Carlos. D’où l’intérêt de confier l’affaire à un juge d’instruction, comme c’est déjà le cas pour un Ethiopien décédé dans les mêmes conditions en janvier.
(1) Le Gisti, l’Anafé, le Mrap et l’Association France-Amérique latine.