Des dizaines de sans-papiers libérés par le tribunal

  Carole Sterlé, 13/12/2007

RAREMENT on aura vu autant de sourires dans la salle d’audience des étrangers au tribunal de grande instance de Bobigny. C’est dans cette petite salle surchauffée, à l’entrée du palais de justice, que sont convoqués les étrangers en situation irrégulière, interpellés en France, ou à leur descente d’avion à Roissy.

« Vous n’êtes pas maintenue en zone d’attente, explique le juge des libertés et de la détention à une jeune femme qui réclamait l’asile politique. Sous réserve de l’appel du parquet, dans quatre heures, vous serez remise en liberté. »

Les dossiers étaient si nombreux hier – quarante-quatre au total – qu’une seconde salle a été réservée aux jugements. Là encore, le scénario se répète. « Vous êtes en situation parfaitement irrégulière, précise le juge à une jeune Syrienne, qui s’est vue déboutée de sa demande d’asile. Ce n’est pas parce que je porte une robe noire que je régularise la situation. » La jeune femme, et les quarante-trois autres étrangers convoqués hier, sont ressortis libres, et heureux.

Les avocats ont trouvé une faille dans la procédure

Depuis qu’un avocat a ouvert la brèche, il y a au moins un peu plus d’une semaine, les avocats ont compris qu’en faisant valoir l’article 552-5 du Ceseda (Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile), ils pouvaient obtenir la libération de leur client, au motif qu’il n’existe aucune trace tangible que les étrangers convoqués ont été régulièrement avisés de la date et de l’heure de l’audience afin de préparer leur défense. La plupart des juges des libertés et de la détention leur donnent raison.

« Si on ne restreignait pas autant le droit des étrangers dans la pratique, on n’en serait pas là. Ce sont des batailles comme celles-ci qui font avancer la jurisprudence », estime Stéphane Maugendre, avocat au barreau de Seine-Saint-Denis et vice-président du Gisti (Groupe d’information et de soutien des immigrés).

Quelques appels ont été formés, mais selon nos informations, tous les arrêts rendus confirment les décisions de libération. De son côté, le parquet de Bobigny n’a encore jamais fait appel de telles libérations, appel suspensif s’il est formé dans un délai de quatre heures. « Le parquet n’exclut pas de faire des appels suspensifs et le parquet général (NDLR : de la cour d’appel) n’exclut pas l’éventualité d’un pourvoi en cassation », indiquait-on hier soir à la cour d’appel de Paris, dont relève le tribunal de Bobigny. En attendant cet éventuel pourvoi, les étrangers sans papiers ressortent libres et souriants du tribunal de Bobigny.

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