L’incendie du bus de Montreuil au tribunal

13/01/2009

Des peines allant jusqu’à quatre ans de prison ont été requises hier soir contre les cinq jeunes jugés pour avoir détourné un bus et y avoir mis le feu en octobre 2006.

L’incendie du bus 122 à Montreuil, fin 2006, avait-il pour but de ne pas « passer pour des tapettes ou des dégonflés » par rapport à l’Essonne, comme certains l’ont dit au cours de l’enquête ? De commémorer le premier anniversaire des violences urbaines ? Ou bien de s’« approprier le quartier », comme l’estime Haffide Boulakras, procureur de la République, qui a requis hier jusqu’à quatre ans d’emprisonnement contre les cinq prévenus jugés hier pour « l’affaire du bus de Montreuil ».

Les cinq prévenus, âgés de 20, 21 et 22 ans, avec un passé judiciaire et presque tous employés ou en formation aujourd’hui, n’ont pas fourni de réponses. Leurs témoignages n’ont d’ailleurs pas permis d’être certain de leur rôle précis ce soir du 26 octobre.

Trois personnes cagoulées s’engouffrent dans le bus

Il était 0 h 45, lorsque le chauffeur du dernier bus, presque étonné de voir un passager à la station Delpèche, à La Noue, s’est arrêté. Un traquenard, en fait, puisque trois personnes cagoulées se sont engouffrées dans le bus, l’une braquant le conducteur en lui disant : « Surtout, ne touche à rien et dégage ! » Il a ouvert les portes arrière pour faire descendre les passagers, tandis que de l’essence était aspergée dans le bus, d’une valeur de plus de 136 000 €. Il s’est enfui, paniqué, « poursuivi par deux personnes armées », réclamant de l’aide à deux automobilistes. En vain. Le bus a fini incendié dans la cité après avoir percuté une barrière que certains auraient été chargés d’ouvrir. La seule passagère retrouvée n’a pas voulu venir au procès, « par peur », a expliqué le procureur. C’est un renseignement anonyme qui a mis les policiers sur la piste de cinq suspects. Trois individus ont été mis hors de cause. Pas Ameur D., ni Ayoub H. Ils ont reconnu leur participation et mis en cause d’autres connaissances, Karim G., Ludovic G., Johan F., ces deux derniers présentés comme instigateurs présumés de cette attaque d’un bus, première d’une série de trois en Seine-Saint-Denis et quatrième d’une liste noire en Ile-de-France. A la barre, dans un huis clos partiel*, ils reviennent sur leurs déclarations, disculpant Ludovic et Johan, dont les noms auraient été livrés sur « pression des policiers ». « Je ne peux pas vous dire qui m’a demandé d’ouvrir la barrière mais si on me le demande et que je le fais pas ? J’habite dans une cité », se défend Karim, qui assure qu’il n’y avait pas de meneurs. Rien sur la préparation non plus. Seuls Ludovic et Johan continuent à nier leur implication et provoquent des incidents de séance conduisant la présidente à les exclure provisoirement.

Le procureur a requis quatre ans de prison dont deux avec sursis contre Ayoub, Johan et Ludovic et trois ans dont un avec sursis contre Amer et Karim, eux qui ont « reconnu leur participation et fait avancer les choses ».

« Le problème est que l’on prend les détails qui nous arrangent », a plaidé Me Stéphane Maugendre, l’avocat d’Ayoub, démontrant qu’avec d’autres morceaux de témoignage son client ne pouvait être celui qui avait braqué le chauffeur. Présent à l’audience, le conducteur avait repris son travail après cinq mois d’arrêt, choqué et angoissé. Avant cette affaire, suivie d’une grève, il travaillait de nuit depuis six ans et n’avait connu « aucun problème dans ce quartier ». Depuis, il travaille de jour. Le jugement sera rendu le 9 février.

* Seules les familles et la presse étaient autorisées sur les bancs du public.

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