Premières reconductions de Roms en Roumanie depuis le discours de Sarkozy

 

Les Roms dont les camps ont été démantelés après le « discours de Grenoble » du président Nicolas Sarkozy vont commencer à être reconduits jeudi en Roumanie sur la base du volontariat, à bord d’avions « affrétés », le gouvernement refusant de parler de « vols spéciaux » ou de « charters ».

Soixante-dix-neuf personnes ayant accepté l’aide au retour humanitaire de 300 euros et de 100 euros par enfant mineur seront reconduites jeudi à Bucarest à bord d’un vol qui n’a « rien d’exceptionnel », a annoncé à l’AFP le ministre de l’Immigration, Eric Besson.

« Il n’y a pas de vols spéciaux vers la Roumanie. Nous sommes dans le cadre de procédures classiques de reconduite de ressortissants étrangers en situation irrégulière dans leur pays d’origine », a ajouté le ministre, en soulignant qu’il s’agissait du 25e vol de ce type organisé par le ministère de l’Immigration et l’Ofii (Office français de l’Immigration et de l’Intégration) depuis le début de l’année en direction de la Roumanie et de la Bulgarie.

En 2009, 44 vols ont été organisés et 10.000 Roumains et Bulgares ont été reconduits dans leur pays, selon le ministère.

Une demi-douzaine de vols ont été effectués à partir de Marseille-Marignane avec des centaines d’enfants et d’adultes embarqués.

Le ministre de l’Intérieur, Brice Hortefeux, a indiqué de son côté que 51 camps avaient déjà été démantelés et que « quelque 700 Roms seront raccompagnés dans leurs pays d’ici la fin du mois », en avion.

Il a précisé que les vols, à destination de la Roumanie et la Bulgarie, seront effectués par des « compagnies privées depuis des aéroports publics » et auront lieu les 19 et 26 août, un troisième étant prévu pour « fin septembre ».

MM. Besson et Hortefeux refusent de parler de « vols spéciaux » ou de « charters », une expression qui rappellerait le renvoi de 101 Maliens dans leur pays par la France en 1986, ou d’Afghans, l’automne dernier, vers Kaboul.

Ces vols « spéciaux » sont destinés au transport d’étrangers en situation irrégulière expulsés contre leur volonté. Les personnes expulsées sont alors escortées par des policiers. Ce type de vols a été à plusieurs reprises émaillé d’incidents.

Sur les vols « affrétés » comme celui de jeudi vers Bucarest, les autorités transportent des étrangers ayant accepté de retourner volontairement dans leur pays.

Lorsque le nombre de personnes reconduites se résume à quelques unes, elles sont embarquées à bord de vols réguliers. S’il est important, le ministère de l’Immigration et l’Ofii affrètent des avions.

Pour le président du Groupe d’information et de soutien aux travailleurs immigrés (Gisti), Stéphane Maugendre, « ce sont des charters déguisés ».

« La subtilité linguistique m’échappe », a également commenté Mouloud Aounit du Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (Mrap), selon lequel « les Roms sont devenus une variable d’ajustement statistique » de la politique d’immigration du gouvernement qui s’est fixé un objectif de 30.000 expulsions par an.

Pour Laurent El Ghozi du collectif Roms Europe, « c’est un mensonge de dire que vont être expulsés les 700 Roms dont les camps ont été démantelés » puisque la plupart d’entre eux se « sont installés ailleurs » ou « se sont évanouis dans la nature ».

Pour lui, seulement 10% de personnes acceptent l’aide au retour humanitaire mais reviennent ensuite en France.

Eric Besson a lui-même reconnu que les personnes reconduites, membres de l’Union européenne, « pourront revenir en France ».

La Roumanie et la Bulgarie ont rejoint l’UE en 2007. En vertu d’un régime transitoire, leurs ressortissants peuvent entrer en France sans formalité particulière et y rester durant trois mois sans avoir à justifier d’une activité.

Au-delà des trois mois, ils doivent avoir un emploi, suivre des études ou justifier de ressources suffisantes. Ces Roms sont estimés à 15.000 en France.

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