Les étrangers sans papiers jugés dans une annexe près de Roissy

Les premiers sans-papiers du centre de rétention administrative (CRA) du Mesnil-Amelot ont commencé à comparaître lundi dans une salle d’audience très controversée car située hors d’un tribunal, à deux pas de l’aéroport de Roissy, d’où ils sont censés être expulsés.

Les premières audiences ont débuté vers 10h15 dans la nouvelle annexe, un bâtiment construit dans la même enceinte que le plus grand CRA de France, entre champs et pistes d’aéroport.

Deux salles sont prévues, aux vitres de verre dépoli, de la taille d’une salle de classe chacune. L’étranger en rétention administrative, ni pénalement condamné, ni détenu, se tient derrière une grille noire d’un mètre de hauteur, qui le sépare de la douzaine de sièges prévus pour sa famille et le public.

« On va juger loin de tout, loin de la cité, là où la publicité des débats n’existe pas de fait », a regretté l’avocat et président du Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti) Stéphane Maugendre, juste avant l’ouverture des débats.

Les associations comme la Cimade, la Ligue des droits de l’homme, les syndicats de magistrats ou le Conseil national des barreaux dénoncent une « justice d’exception » et contestent la légalité du tribunal. Selon eux, l’indépendance de la justice est menacée en siégeant si près de la police, dans la même enceinte qu’un cantonnement de CRS.

Pour les pouvoirs publics, l’annexe du TGI de Meaux évite à la Police aux frontières (PAF) et aux étrangers en situation irrégulière de fastidieux transferts jusqu’au tribunal de grande instance de Meaux à 30 km de là.

Deux juges des libertés et de la détention (JLD) devraient statuer au Mesnil-Amelot sur la poursuite de la rétention d’environ 3.000 étrangers par an.

Au-delà, les opposants remettent en cause l’ensemble du projet de « délocalisation » de la justice des étrangers autour de Roissy, lancé par les majorités précédentes.

Le gouvernement a hérité d’une seconde annexe au coeur de la zone aéroportuaire, censée ouvrir à la fin de l’année. Elle est destinée aux étrangers qui débarquent d’un vol international et ne sont pas admis à entrer sur le territoire français. Près de 6.000 d’entre eux pourraient y comparaître chaque année.

Le sujet divise au sein de la majorité : la ministre de la Justice Christiane Taubira a fait part de ses réticences, et plusieurs parlementaires, dont des députés PS, ont appelé ces dernières semaines à renoncer à utiliser ces annexes bien que l’Etat ait déjà investi 2,7 millions d’euros pour les construire.

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