«De la circulaire ou de la libre circulation ?»

« De la circulaire ou de la libre circulation » entretien in les mauvais traitements in N° 26 de la revue penser/rêver, Les mauvais traitements, édition de l’Olivier, automne 2014.

ENTRETIEN AVEC STÉPHANE MAUGENDRE[1]

Michel Gribinski : Stéphane, tu es avocat au barreau de Bobigny (Seine-Saint-Denis), et tu es le président du Gisti depuis un peu plus de quatre ans. Le groupe a été créé en 1971. Gisti veut dire « groupe d’information et de soutien des immigré(e)s ». Le « t » est resté, mais pas le « travailleurs », devenu, je suppose, trop restrictif…

Stéphane Maugendre : C’est un choix qui date d’une quinzaine d’années. On a considéré que « travailleurs immigrés » ne regroupait pas,toutes les personnes dont on s’occupait.

Michel Gribinski : À l’époque de la création du Gisti, les intellectuels s’engageaient ; dans un article de l’historien Philippe Arrières [2], il est rappelé que, au début des années 1970, Michel Foucault, Jean-Marie Domenach et Pierre Vidal-Naquet créent le GIP, groupe d’infor­mation sur les prisons, qui accueillait ce que Foucault appelait des « intellectuels spécifiques » des intellectuels qui – au contraire de la définition que Sartre en donne – s’occupaient de ce qui les regardait, de ce sur quoi ils avaient des choses à dire, spécifiques. On se souvient d’Édith Rose, ou peut-être l’a-t-on oubliée, qui était la psychiatre du centre pénitentiaire de Toul, où les mutineries de prisonniers se succédaient, et qui avait raconté ce qui se passait dans les prisons en utilisant son « savoir » et son « pouvoir », comme on disait à l’époque. Non pas au service de l’« ordre établi » mais pour le « mettre en question » (le vocabulaire, lui aussi, spécifique, parle de la période). À la suite du Gip sont venus le Gis, groupe d’information sur la santé (qui militait en faveur de la légalisation de l’avortement) et le Gia, groupe d’information sur les asiles. Le Gisti, ai-je compris, a été créé si ce n’est dans cette filiation, du moins dans une proximité avec le Gip, dans le but non de répondre au cas par cas à des problèmes de personnes mais de tenter de modifier lé droit là où on pensait qu’il fallait le faire. D’où mes premières questions : est-ce toujours le cas ? Le Gisti cherche-t-il toujours à modifier le droit, a-t-il toujours pour but de faire rendre par les tribunaux de « grands arrêts Gisti » ? Dirais-tu qu’il y a encore des « intellectuels spécifiques » au Gisti, et, de toi, que tu en es un ?

Michela Gribinski : La définition du Gisti, qu’on trouve en ligne[3], aide à compléter la question : « Le Gisti, pour mettre son savoir à la disposition de ceux qui en ont besoin, tient des permanences juri­diques gratuites, édite des publications et organise des formations. » Il y a, programmatiquement, une articulation entre le traitement intellectuel des phénomènes et le besoin – moral, social, juridique – que d’aucuns en ont.

Stéphane Maugendre : Je reviens d’abord sur la création du Gisti : une filiation existe avec le gip , puisque, parmi les fondateurs, il y avait un visi­teur de prisons, le père jésuite André Legouy, engagé auprès des nationalistes algériens. C’était aussi une réunion d’Énarques d’après 1968, qui avaient la volonté politique de continuer à faire quelque chose, de curés (en exercices ou défroqués) comme Bernard Retten- bach, dominicain, devenu par la suite avocat, de gauchistes, de gens qui avaient fortement milité contre la guerre d’Algérie. Donc un mélange, dans une création totalement clandestine au début. Encore maintenant, nous nous appelons par nos prénoms… Bien que nous communiquions nos noms, parce que nous travaillons dans la trans­parence et qu’il n’y a plus de craintes à avoir -quoique certains magistrats administratifs demandent encore à ce que leurs noms n’apparaissent pas. Parmi les énarques, Jean-Marc Sauvé- actuel­lement vice-président du Conseil d’État – et le couple Moreau (Yan nick et Gérard[4])- Il y avait aussi Simone Pacot et Jean-Jacques de Félice, avocats, Louis Joinet, l’un des fondateurs du Syndicat de la magistrature, Madeleine Babinet, assistante sociale au SSAE.

L’idée était, d’un côté, d’analyser techniquement et politiquement le droit, puisque le droit est politique, et, dé l’autre, de le mettre à la hauteur des gens qui ont besoin.

Michel Gribinski : C’est un principe de fonctionnement du Gisti ?

Stéphane Maugendre : Ni l’idée ni le fonctionnement n’ont fondamentalement changé, même si nous nous posons régulièrement la question de l’équilibre entre le technique et le politique.

Je disais que le droit est politique. Nous restons attachés à cette idée et donc à la réflexion politique du droit. C’est-à-dire que le droit n’est pas neutre : quand la droite est au gouvernement, elle crée du droit répressif, et quand c’est la gauche – mais pas actuellement -, du droit moins répressif. Et cela joue. Il y a donc des périodes où l’on est plus politique et d’autres où l’on est plus juridique, mais c’est un couple que l’on respecte. Aujourd’hui, parmi tous ceux qui nous ont soutenus pendant les dix dernières années, un certain nombre de gens trouve que l’on est trop critique à l’égard de la gauche.

De même nous tenons beaucoup à notre indépendance, notam­ment vis-à-vis des institutions. Indépendance politique vis-à-vis des partis, mais aussi financière, puisque le Gisti s’autofinance à plus de 50 % grâce à ses formations (auprès des travailleurs sociaux, dans les prisons, auprès d’autres associations, d’avocats, etc.) et ses publications. Tout en respectant l’idée de mettre notre savoir à la disposition de ceux qui en ont besoin.

Ce qui a le plus changé, c’est la transparence. Nous sommes dans la transparence la plus totale, et plus dans la semi-clandestinité – nous publions nos bilans, ils sont téléchargeables sur le site[5], la Cour des comptes est venue nous contrôler et son rapport a été publié.

Michel Gribinski : Vous avez une fonction d’observatoire ?

Stéphane Maugendre. : Le Gisti est devenu l’association incontournable sur l’ana­lyse juridique des textes qui touchent les étrangers.

Michel Gribinski : Une Cour dès comptes des textes ?

Stéphane Maugendre : Je n’irais pas jusque-là. Mais dès qu’il y a un projet de loi, ou un groupe de réflexion sur le droit des étrangers, on est invité, même par la droite (hors FN, évidemment).

Si l’association est extrêmement respectée, elle fait aussi l’objet d’attaques violentes. Je me souviens que Chevènement, alors qu’il était ministre de l’Intérieur, nous avait traités de « trotskistes anglais » (!), et que Besson, au moment du débat sur le « délit de solidarité » avait affirmé que la crédibilité du Gisti était proche de zéro, et qu’on ferait mieux de prendre des vacances[6].

On nous considère par ailleurs comme de doux rêveurs puisque nous sommes pour la liberté de circulation. C’est une des évolu­tions politiques du Gisti : depuis plusieurs années, nous travaillons avec des économistes, des démographes et des sociologues sur ce sujet[7].

Je reprends tes questions. Y a-t-il encore de « grands arrêts » ? Oui. On vient encore d’en obtenir un, le 19 novembre 2013, sur la question des enseignants étrangers, puisqu’il a été sursis à l’exé­cution de certains articles d’un décret du 23 août 2013, qui empê­chaient les ressortissants extracommunautaires de se présenter aux concours relatifs à l’enseignement privé sous contrat.

Le 15 novembre 2008, lors d’un colloque que nous avions organisé à la Maison du barreau de Paris, « Défendre la cause des étrangers en justice[8] », auquel étaient invités tous les présidents de tribunaux et de cours, judiciaires ou administratifs, le président de la section du contentieux du Conseil d’État a indiqué que, dans ce que l’on appelle les « grands arrêts » du Conseil d’État, il n’y avait qu’un seul requérant dont le nom apparaissait deux fois : le Gisti.

Michel Gribinski : Vous êtes une institution.

Stéphane Maugendre ; Dans le sens où le Gisti est devenu une référence, et que tous les juristes disent que nous sommes devenus indispensables, y compris lorsqu’on nous demande d’aller au contentieux, c’est-à-dire devant les tribunaux.

Ce que je viens d’exposer du Gisti me permet de répondre qu’il y a encore des « intellectuels spécifiques » au Gisti. En ce qui me concerne, je ne sais pas.

Michel Gribinski : Justement : que se passe-t-il dans la tête d’un avocat – et d’un intellectuel – pour qu’il décide de franchir le pas, d’aller au-delà de ce que son travail quotidien implique – être au service du droit, défendre le droit -, pour, ce droit, essayer de le modifier. Comment l’avocat passe-t-il de l’usage des ressorts ordinaires de la loi à sa réforme active ?

Stéphane Maugendre : il y a une histoire personnelle, évidemment. Fils de soixante- huitards, j’ai fait mes premières armes d’élève-avocat avec Henri Leclerc, dans un cabinet militant, le cabinet Ornano. Ma mère et une de ses amies, Madeleine Terrasson, une associée de Leclerc, étaient membres du Gisti. Voilà. Je suis au Gisti parce que je suis avocat, et je suis avocat parce que je suis au Gisti. Et il y a un choix politique, celui d’avoir installé mon cabinet en Seine-Saint-Denis, il y a vingt- cinq ans, quand peu d’avocats faisaient du droit des étrangers. Avant, c’était l’histoire familiale, et là il y a eu un choix politique personnel.

Pourquoi est-ce toujours présent ? Je pense qu’il y a quand même une certaine jouissance à cette activité, il ne faut pas le nier. Quand on arrive à faire plier ou condamner le ministère de l’Intérieur pour le forcer à proposer une loi au Parlement de manière à éviter que des étrangers soient confrontés à des zones de non-droit[9], ou, comme, en ce moment, à propos des tribunaux qui se montent sur les tarmacs, on arrive à modifier ce qui se passe[10], il y a une jouissance, on ne peut pas l’ignorer. Il y a aussi la défense des principes. À chaque fois que le droit recule pour une catégorie de personnes, derrière, c’est pour tout le monde qu’il recule. Un exemple, qui ne concerne pas le droit des étran­gers mais les contrôles routiers. Avant, il fallait que ce soit le procureur de la République qui dise aux services de police : « Vous allez procéder à des contrôles routiers à tel endroit sur telle période. » Maintenant, il n’y a plus besoin de ça. Donc il n’y a plus aucun contrôle du procureur de la République sur les services de police. C’est peut-être nécessaire pour la délinquance routière, mais c’est une régression du droit.

Aujourd’hui, créer des tribunaux, spécifiques pour des étrangers, à la sortie de l’avion, ou – ce qui arrive tous les jours – voir des gens jugés par téléconférence, sans être présents à leur procès, sans être aux côtés de leur avocat, c’est une régression. Cela a peut-être des avantages, mais c’est une régression : des juges vont juger une image. Comment s’empêcher de lutter contre ?

Miguel de Azambuja : L’institutionnalisation du Gisti et le fait que le groupe soit devenu actuellement incontournable étant donné qu’il travaille « sous les projecteurs » soulèvent-il des problèmes que la version clandestine des premiers temps cherchait à éviter ? Autre­ment dit, la sortie de la clandestinité a-t-elle aussi ses handicaps ?

Stéphane Maugendre : Le handicap, c’est que l’on est beaucoup sollicité : comme l’association est toute petite, elle n’a pas assez de bras et de cerveaux pour répondre à toutes les sollicitations. Mais c’est aussi un choix que d’être une petite association – deux cents à trois cents membres selon les années, admis avec précaution, parce qu’on n’a pas envie que les Renseignements généraux y mettent leur nez, ou que des avocats y viennent pour le logo.

Michela Gribinski : C’est votre côté « trotskistes anglais », le club fermé ?

Stéphane Maugendre : C’est surtout le fait d’être une « institution »… Cela nous oblige à plus de rigueur, parce qu’on nous surveille davantage, et que le droit des étrangers se complexifie.

Michela Gribinski : Dans l’argument du numéro, nous avons essayé de mettre en avant les rapports entre le « maltraité » et le « mal traité ». Tu as publié dans Médiapart, le 27 novembre dernier, une [11] tribune cosignée avec Françoise Martres, présidente du Syndicat de la magistrature, intitulée « Migrants morts en Méditerranée. Le parquet de Paris à la dérive », qui se clôt sur la considération suivante : « Chaque minute compte pour sauver des vies. Chaque jour compte pour comprendre pourquoi certaines ne l’ont pas été et comment elles pourraient l’être à l’avenir. » En différant l’ouverture de l’enquête sur la question particulière de soixante-douze migrants, qui fuient la guerre en Libye dans l’espoir de rejoindre l’Italie à bord d’une embarcation depuis Tripoli, et qui meurent parce que rien n’est fait pour les secourir, en particulier de la part des militaires français qui patrouillent pourtant dans les parages, le parquet de Paris semble s’employer à ne pas comprendre : c’est un déni de savoir ?

Stéphane Maugendre : Je vais être honnête : ce n’est pas moi qui ai écrit le papier mais deux membres du Gisti, l’une est professeur de droit, et l’autre avocat général à la cour d’appel de Paris. Je n’ai rien à redire au texte, je pense seulement qu’il aurait été plus normal que les signa­taires soient effectivement les personnes qui l’ont rédigé – bien que signer fasse partie du rôle de président (il en est allé de même pour une tribune dans Libération sur la xénophobie du: PS [12]).

La question de ce dossier est compliquée. On est en pleine guerre de Libye. On a I’otan, les États-Unis, la France, l’Espagne, l’Italie, la Grande-Bretagne, la Belgique, qui envoient des centaines de bateaux et d’avions, pour bombarder le pays et s’assurer que des armes n’y entrent pas, vérifier qu’il n’y a pas – Kadhafi l’avait pro­mis – de gens qui quittent la Libye pour envahir l’Europe. Jamais sur cette mer il n’y a eu autant de bateaux et de radars. Un gros Zodiac part avec quatre-vingt-dix personnes à son bord, dont des bébés et des femmes enceintes. Il est photographié, à un moment où il file vers Lampedusa, par un avion militaire français. Le Zodiac tombe en panne. Il y a un téléphone portable sur le bateau, on appelle un prêtre à Rome. Le prêtre prévient les garde-côtes italiens. Un premier [13] appel de détresse est lancé sur toute la région, et un hélicoptère vient survoler l’embarcation. Il repart, revient, lui ou un autre, donne des bouteilles d’eau et ne revient pas. Quelques jours plus tard, alors que le Zodiac est à la dérive, que des gens sont morts, ont bu de l’eau salée, sont tombés à l’eau dans la nuit, un navire militaire, dont on ne connaît pas la nationalité, fait le tour de l’embarcation (les sur­vivants racontent que des gens ont même pris des photos). On sait qu’avant que le navire militaire ne fasse ce tour, il y a eu un second appel de détresse – émis toutes les quatre heures sur, grosso modo, toute la Méditerranée. Rien n’a été fait pour sauver les gens à bord.

Nous ne mettons pas en cause tel bateau de l’armée française ni ne disons que le bateau qui est venu aux abords du Zodiac sans intervenir était un bateau français. Nous mettons en cause l’armée française parce qu’elle n’a pas détourné ses navires pour sauver ces migrants. Comment dire ? Si la voisine du premier crie au secours, et que tu l’entends du cinquième, tu ne te dis pas : « Bon, le voisin du second va aller voir. » Tu descends.

C’est ça la question. Donc nous déposons une première plainte – cinq professeurs de droit y ont travaillé, des experts ont travaillé, et fait travailler d’autres experts, notamment celui qui avait calculé la dérive de l’avion du vol Paris-Rio (grâce à qui ont été retrouvées les fameuses boîtes noires) pour qu’il reconstitue la dérive du Zodiac et les positions des bateaux qui étaient autour, etc. Ce n’est pas juste une plainte de dénonciation des « méchants », c’est un très très gros et consistant dossier.

La plainte est déposée[13], le procureur de la République étudie évi­demment le dossier, sollicite le ministère de la Défense – deux fois -, dont la réponse est : la France n’était pas là. Elle était ailleurs, autre part en Méditerranée. Donc le procureur de la République classe sans suite. Là, c’est le deuxième coup, on a la possibilité de déposer plainte avec constitution de partie civile auprès du doyen des juges d’instruc­tion. Sauf que, pour que le juge d’instruction puisse démarrer, il faut qu’il y ait un réquisitoire du procureur de la République. Le même. Il connaît le dossier, il l’a étudié. Et la question est que, depuis tous ces mois, il ne réagit pas. Une plainte vient d’être déposée en Belgique. Une autre en Espagne. Deux en Italie. Dans les pays anglo-saxons, il y a eu des demandes de communication de documents. La question n’est pas d’accuser l’armée française, mais de savoir ce qui s’est passé.

Michela Gribinski : De comprendre. Comment expliques-tu que le procureur attende, étant donné que l’affaire, telle que tu la décris, semble absolument linéaire ?

Stéphane Maugendre : Un argument – non convaincant – serait de dire qu’il n’y a qu’un seul « procureur de la République » pour toutes les affaires militaires. Mais c’est en fait une « affaire sensible » et, comme pour toutes les affaires sensibles, il y a la peur, les peurs, y compris celle de savoir – au détriment de la conservation des preuves et des informations. Dans le dossier en question, des choses publiées sur Internet, des reportages, carnets de bord, blogs, etc., disparaissent. Entre le moment où l’on dépose la plainte auprès du procureur de la République et le moment où le dossier arrive au juge d’instruction[14], il y a déjà deux ou trois liens qui sont « corrompus ».

Michel Gribinski : En t’écoutant parler des soixante-douze personnes qui ont péri en mer dans ces conditions, quelque chose me frappe, à l’inverse de ton propos : il me semble magnifique, du point de vue du droit, que, au début du XXIème siècle, l’on s’occupe ainsi de leur disparition et du déni – du délit – d’humanité dont, au bout du compte, elles sont mortes. J’allais te questionner au moment où tu rappelais les pays, les instances qui ont déposé des plaintes. Je trouve cela étonnant, optimiste, après le naufrage – l’expression est bienvenue – des Lumières, après qu’au siècle dernier le droit a été si souvent et explicitement bafoué.

Stéphane Maugendre : Je ne s’en rend pas bien compte, mais il y a quand même un réseau de gens…

Michel Gribinski : Je t’interromps pour compléter ce que j’essaie de dire. Une autre question va avec ce que nous évoquons, qui est le droit de se déplacer. L’émotion suscitée par cette affaire, et qui a pris des proportions internationales, n’est-elle pas soulevée aussi par l’atteinte portée à la liberté de se déplacer ? Un droit fondamental.

Stéphane Maugendre : Eh bien non, justement ! Il faut lire le livre[15] publié par les « gauchistes extrêmement dangereux » de l’institution appelée Unesco. C’est un travail sur la question de la liberté de circulation. La liberté de circuler, c’est en fait la liberté d’aller et venir. Or on a le droit de quitter son pays – c’est un droit fondamental -, mais on n’a pas le droit d’aller là où l’on veut. Finalement, ce droit-là n’est pas complet – il y a des juristes qui analysent cela. Le Gisti estime que le dossier des soixante-douze est emblématique des politiques de fermeture des frontières mises en place en Europe, On en arrive à négliger la vie des gens, à faire que la Méditerranée soit non plus le cimetière mais le charnier de l’Europe. On parle de quinze mille noyés, et on ne parle pas des familles qui cherchent ces noyés depuis des années. Plus les frontières seront fermées, plus il y aura de morts, en Méditerranée, mais aussi dans le désert. Les « remparts » ne sont plus à nos frontières, mais déjà depuis des années en Libye, en Algérie, en Tunisie, où l’on enferme des gens dans des camps pour les empêcher de venir en Europe, Ce dossier est la démonstration que l’on vit quelque chose de complètement fou autour de la question de la fermeture des frontières, et que Ton est prêt à laisser mourir des femmes, des enfants, des personnes, sans qu’on sache très bien pourquoi. L’argent sans doute. Il faut lire Xénophobie Business[16].

Quand, au Gisti, on apprend cela, ces morts, on fait un commu­niqué de presse, assez violent, où l’on dit qu’on va déposer plainte contre tout le monde [17]. En l’occurrence, le communiqué de presse a eu un effet dans le monde entier, des gens sont venus nous dire qu’en effet il fallait déposer plainte : des professeurs de droit qu’on ne connaissait pas, des étudiants anglais, des experts, etc. C’est comme ça que ça se passe. On déclenche quelque chose.

Michel Gribinski  : Mais quelque chose continue de me manquer dans un tel déclenchement : je ne crois pas que ce soit la sentimentalité qui joue – les bébés et les femmes enceintes, d’autres événements et des représentations où tout, en effet, peut faire appel à l’émotion et donner l’envie de « porter » plainte comme on porte un poids ou une pancarte. Mais ce n’est pas cela, le moteur. Plutôt l’évidence du déni de la liberté de circuler ?

Stéphane Maugendre : Le Gisti, avec Migreurop [18], dénonce l’état de fait de telles morts depuis de nombreuses années, mais ici il y a des survivants, des survivants qui racontent – c’est donc un cas emblématique.

Miguel de Azambuja : C’est le traitement des déchets. Les déchets ne peuvent plus être des déchets parce que des survivants racontent. Sinon, tout le monde contribue au traitement des…

Stéphane Maugendre : Mais on a des témoins. Cela s’ajoute aux circonstances – la guerre, et le fait que c’était la deuxième fois que certains tra­versaient la Méditerranée. Empêcher la liberté de circulation amène des choses comme ça.

Michel Gribinski : Le mot déchet est très fort…

Stéphane Maugendre : On a la Méditerranée pour ça, et des gens crispés sur la fermeture des frontières. La liberté de circulation, on la vit depuis environ soixante ans. La création de l’Europe s’est faite à cinq ou sept, je ne sais plus[19], et on est vingt-huit. Avec des positions de Mitterrand contré l’entrée de la Grèce, ou du Portugal (un écho anticipé de l’invasion par le fameux « plombier polonais »), etc. Une crispation des politiques européennes. Quand on rencontre des députés et qu’on leur dit : « Je ne vous demande pas d’adhérer à la liberté de circulation, mais d’organiser à l’Assemblée nationale une commission pour savoir au moins ce que les gens qui ont réfléchi là-dessus ont dit et pensé, pour connaître ce qui se dit et s’étudie en Europe, en Afrique, aux USA… » – « Impossible » est la réponse…

Michela Gribinski : Je reviens à ma marotte, la question du « désir de ne pas comprendre ». Objurgation d’autant plus intéressante à observer qu’elle s’accompagne, on pourrait dire systématiquement, de l’appel au «jugement » des acteurs. Ici encore un exemple spectaculairement parlant, rapporté, sur le site du Gisti, dans un texte cosigné par Resf et intitulé « La circulaire Valls, un an et tant d’actes odieux après[20] ». Ladite circulaire Valls du 28 novembre 2012 « relative aux condi­tions d’examen des demandes d’admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile », qui se donne pour objectif de « clarifier » et d’uniformiser les « conditions de régularisation des familles sans papiers, des tra­vailleurs et des jeunes majeurs scolarisés », se contente de renvoyer in fine chacun des individus censés l’appliquer, en l’occurrence policiers et préfets, à son propre « discernement ». Ce qui revient à la meilleure façon de ne pas statuer – ou à l’effort pour rendre l’autre fou.

Stéphane Maugendre : Un rapide cours de droit. Il y a la Constitution, la loi, les décrets, les arrêtés et puis les circulaires. Jusqu’aux arrêtés, c’est du droit qui s’impose à tous. Une circulaire, ça ne s’impose pas. Ce n’est pas du droit, c’est de P infra-droit. Si le préfet ne respecte pas la circulaire Valls, le tribunal administratif ne sanctionnera pas le préfet. Régir le droit des personnes, régulariser la situation des gens, leur permettre de passer de la clandestinité à la vie civile, par une circulaire, ça, c’est de la maltraitance.

Miguel de Azambuja : Cela laisse à qui va juger toutes les marges; de manœuvre. La circulaire : le lieu où la loi en tant que telle n’existe pas, sinon dans le jugement de celui qui l’applique.

Stéphane Maugendre : Exactement. Liberté totale d’appréciation. Dans ce gouvernement comme dans les précédents, on fait des choix : pour certaines choses, on procédera par circulaires. Dans d’autres domaines, on fera voter des lois. Ce n’est pas un défaut de vision, au contraire, c’est en quelque sorte très bien vu, et ce sont des choix politiques. On va soi-disant abolir le délit de solidarité pour faire plaisir par exemple à Emmaüs, c’est un acte politique bien posé et on sait à qui on s’adresse. Mais on va faire une circulaire pour la régularisation. C’est tout à fait calculé.

De la même manière, sur la question des naturalisations. Mais là où il sait très bien ce qu’il fait, c’est que l’acte vraiment fort en réalité serait de modifier, même a minime la loi sur les naturalisations (or, « ce n’est pas le moment », etc. : c’est toujours le même discours).

Je prends l’exemple des Roms, ou. le placement en rétention des familles. Il ne s’agit pas de lois mais de circulaires : la première affirme qu’il faut un traitement humain et social, le relogement, etc,, de ces personnes, la deuxième interdit, en principe, de mettre des familles en rétention administrative. Ces circulaires permettent, en réalité, de maltraiter les gens.

Michel Gribinski : En disant que le droit est politique, est-ce que le gisu ne fabrique pas davantage d’injustice, en légitimant le principe de la modification politique du droit ? Ne faudrait-il pas œuvrer pour séparer le droit du politique ?

Stéphane Maugendre : Impossible : qui vote la loi ? Les députés – donc les poli­tiques. Et quand on étudie l’évolution du droit… Par exemple, la « préférence nationale », La préférence nationale existe en droit des étrangers. C’est inscrit dans la loi, depuis très longtemps, mais évi­demment pas comme ça. Tu veux engager un étudiant étranger, qu’il quitte son statut d’étudiant pour celui de salarié. Avant de t’autoriser à l’engager, ou avant de lui donner sa carte de séjour, on va vérifier si, pour le poste que tu offres, il y a trop de demandeurs d’emploi français ou pas. Si tu veux faire venir un travailleur étranger, avant de lui donner son visa, on va étudier la situation du marché. Danièle Lochak[22] décrit très bien ce glissement du discours.

Miguel de Azambuja : Cela ne s’appelle pas « préférence nationale », mais c’est une discrimination au nom de la nationalité ?

Stéphane Maugendre : C’est plus nuancé que ça, mais ça n’est pas loin : on; va vérifier le nombre de chômeurs inscrits, y compris étrangers, et le nombre d’offres d’emploi. Le droit est fait par les politiques, il est la retranscription d’un discours.

Michel Gribinski : Au Gisti vous luttez donc contre la transformation poli­tique de l’étranger en déchet, dans les faits ou les discours.

Stéphane Maugendre : Nous luttons en discours, en fait et en droit: Nous en sommes même, au sein du Gisti, à nous retrouver « défavorables » au droit de vote des étrangers aux seules élections locales, s’ils n’ont pas le droit d’y être éligibles. Ce serait un « mauvais traitement » que de créer des demi-citoyens. Cela dit, nous avons participé aux campagnes en faveur de ce droit de vote, parce que cela nous sem­blait quand même une avancée.

Michela Gribinski : On serait face à deux procédés : faire du déchet, du « moins, que rien » et de l’allégé, de la « demi-portion ». Une extemaiité radicale et des demi-mesures à l’infini.

Miguel de Azambuja : On va t?amputer pour t’intégrer.

Michela Gribinski : Ou te gommer.

Stéphane Maugendre : Déchets ; ceux qui ne sont pas en France et veulent y venir ou qui y sont mais clandestinement. Demi- : ceux qui sont là. Dans le cas de la politique dite d’« immigration choisie », mise en place sous Sarkozy (Avec d’autres associations, le Gisti a créé, à ce propos, un collectif : l’ucij – Unies contre l’immigration jetable. Logo : une poubelle), parmi ceux qui ne sont pas là (ou sont clandestins), on éjecte qui Ton estime inutile à l’économie : par exemple, les membres de familles consommatrices d’allocations familiales ou de logements (les critères de tri sont politiques) ; pour les autres, ceux qui sont là, on ampute les droits au séjour.

Tant que l’on verra l’immigration comme un danger, on ne pourra que se crisper, et aller vers la généralisation de la maltraitance. Valls satisfait la vox populi quand il tient, sur France Inter, ses propos sur les Roms — au sujet de leur prétendue « non-intégration culturelle ».

À ce sujet, nous avons choisi, pour la couverture du numéro de Plein Droit sur les Roms[23], un renard avec une poule dans la gueule, afin de dénoncer et la fausseté* des images qui stigmatisent et la fausseté du danger. La France a connu un temps où tous les délinquants étaient italiens. Chaque vague d’immigration apporte son lot de peurs.

Je pense à une maltraitance « circulaire » particulière : les queues dans les préfectures. La gauche au pouvoir invente, dans les débuts des années 1980, la carte de séjour de dix ans, avec comme prin­cipe l’idée que la stabilité de la vie facilitera l’intégration. À force de rogner, la carte de dix ans est devenue une carte… d’un an. Aujourd’hui, les conjoints étrangers de Français ne touchent pas de carte de dix ans. Bref, on retourne désormais dans les préfectures tous les ans, et souvent deux ou trois fois. Le manque de gens pour traiter les dossiers, le soupçon que les actes d’état civil présentés sont faux, même s’ils ont déjà été acceptés quinze fois, la queue elle-même qui est naturellement extrêmement longue, etc,, tout cela fait que les gens doivent revenir plusieurs fois. Donc la queue augmente. Et quand la carte est obtenue, elle a déjà deux ou trois mois d’existence.

À Bobigny, la queue commence vers minuit ou une heure du matin. Quand il a fait tellement froid, il y a quelques années, les gens avaient apporté de la paille. Et des jeunes femmes, notamment gha­néennes, se proposaient, aussi, de réchauffer ceux qui attendaient…

Des gens, quand ils sont hospitalisés, viennent sur des brancards faire la queue. Une décision politique qui vise à réduire des droits amène peu à peu à des choses d’un autre monde.

Miguel de Azambuja : Ces queues immenses ont également quelque chose de « circulaire » : soit on ne voit pas les étrangers du tout, soit on-les voit trop. L’étranger trop vu, avec son côté excédentaire, n’est accepté que s’il devient transparent, s’il gomme les signés de l’excès et tout ce qui est dit « inassimilable » : c’est l’intégration à la française.

Stéphane Maugendre : Le pouvoir ne veut pas simplifier la question – par exemple en permettant des démarches par Internet – parce que tous ces étrangers produisent de faux actes d’état civil. Un rapport du Sénat est ici intéressant : il met des pourcentages sur les nationalités, décerne des bons et des mauvais points à l’authenticité moyenne des actes en fonction du pays. Aucun acte d’état civil comorien ne doit être accepté. On ne sait pas d’où ça vient. Oh n’a jamais compris sur quoi reposait cette étude. La note est presque pire pour les Zaïrois. La validité des actes d’état civil est devenue une bataille juridique. On les remet systématiquement en cause.

*

Michel Gribinski : Qui est l’ennemi ?

Stéphane Maugendre : L’autre, l’étranger.

Michel Gribinski : Je veux dire : qui est l’ennemi pour le Gisti. Qui sont vos ennemis ? [24]

Stéphane Maugendre : On n’est pas sur ce terrain. Dans nos communiqués dé presse, nous essayons la plupart du temps de ne pas nommer, de ne pas dénoncer nommément. Une fois, c’est vrai, on a fait un communiqué intitulé « Besson ment »… Et nous ne luttons pas contre des gens. Nous luttons pour. Au Gisti, pour que le droit s’améliore, et moi, dans ma robe, pour que les droits de mon client s’améliorent.

Michela Gribinski : Alors la question n’est peut-être pas « Qui est ton ennemi ? » ou « Qui sont vos ennemis ? » mais « Qui est l’ennemi ? ».

Stéphane Maugendre : La loi. L’ennemi, c’est peut-être la loi. Telle qu’elle est à un moment donné, quand elle n’est pas bonne, ou qu’elle est absente. L’absence de loi, ou de droit aussi.

Miguel de Azambuja : L’ennemi est à l’intérieur. C’est la zone de non-droit dans le droit.

Stéphane Maugendre : Oui, ou du mauvais droit. À l’époque de Pasqua, je me souviens avoir assigné le ministère de l’Intérieur parce que les étrangers qui arrivaient en France à Roissy pouvaient être stoppés ~ « Vous n’avez pas le droit d’entrer » – par la simple volonté de la police de l’air et des frontières. Les gens erraient dans la zone internationale, là où il y avait les boutiques free tax, mais ne pou­vaient pas entrer. À un certain moment, on leur disait : « Il y a un avion, vous pouvez repartir. » Mais il n’y avait pas de droit. Donc on a assigné le ministère de l’Intérieur pendant des mois et des mois, et cela a poussé à ce qu’il y ait une loi qui encadre ça. Nous luttons maintenant pour qu’elle change, mais elle existe. Donc l’ennemi, c’est soit le non-droit (ou le mauvais droit) dans le droit, soit l’absence de droit. Lorsqu’on fait des « mémoires » devant le Conseil constitutionnel, quand la loi est déférée à sa censure, on vient dénoncer ce qui ne va pas, dans le droit.

D’un point de vue politique, l’ennemi, c’est la bêtise. Mais ça…

Stéphane Maugendre

[1]   Ont participé à l’entretien Miguel de Azambuja, Michel Gribinski et Michela Gribinski.

[2]   P. Artiéres, « 1972 : naissance de l’intellectuel spécifique », Plein Droit n° 53-54, la revue du Gisti, Immigration. Trente ans de combats par le droit, juin 2002 .

[3] Le Gisti ?

[4] Sur les débuts du gisti, nous renvoyons à un échange entre Gérard Moreau, Bruno Erhmann et André Legouy, paru en 2002 dans le numéro 53-54 de Plein Droit, la revue du Gisti, ainsi qu’à l’étude de Liora Israël, « Faire émerger le droit des étrangers en le contestant, ou l’histoire paradoxale des premières années du gisti ». On consultera également la page Wikipédia du gisti

[5] Bilan d’activité du Gisti

[6]   Les délits de la solidarité

[7]   « . Liberté de circulation : un droit, quelles politiques ? » janvier 2011, 164 pages, Collection Penser l’immigration autrement, Gisti

[8]   On trouvera les actes de ce colloque dans Défendre la cause des étrangers en justice (Dalloz/Gisti, 2009) et sur Youtube

[9]   Cf. B. Philippe, «L' »amendement Marchand” à nouveau devant les parlemen­taires. Des demandeurs d’asile contestent la “zone Internationale” prévue par le ministère de l’Intérieur », Le Monde du 21 janvier 1992. Voir aussi D. Llger, « De l’affaire du dépôt et de quelques autres »

[10] Voir F. Johannès, « Christiane Taubira gèle l’ouverture du tribunal des étrangers à Roissy», Le Monde du 18 décembre 2013

[11] Migrants morts en Méditerranée : le parquet de Paris à la dérive.

[12] S. Maugendre, « Au Parti socialiste, un zeste de xénophobie ? », Libération du 18 janvier 2013

[13] Pour lire la plainte : http://www.fidh.org/IMG/pdf/plainte.pdf

[14] Depuis que cet entretien a eu lieu, la plainte auprès du Juge d’instruction a fait l’objet d’un non-lieu « ab Initio ». Cf. F. Johannès, « Drame de l’Immigra­tion : colère d’associations après un non-lieu qui blanchit l’armée », Le Monde du 7 décembre 2013,

[15] A. Pécoud, P. de Guchteneire, Migrations sons frontières. Essais sur la libre circu­lation des personnes, Éditions UNESCO, 2007

[16] C. Rodier, Xénophobie business. À quoi servent les contrôles: migratoires ?, La Découverte, 2012.

[17]  Le gisti va déposer plainte contre I’otan, l’Union européenne et les pays de la coalition en opération en Libye

[18] Migreurop réunit quarante-cinq associations dans un réseau européen et africain de militants et chercheurs dont l’objectif est de faire connaître ia généralisation de l’enfermement des étrangers et la multiplication des camps et de lutter contre un tel dispositif au cœur de la politique d’externalisation de l’Union européenne (www.migreurop.org).

[19] À partir du début des années 1950, la Communauté européenne du charbon et de l’acier unit progressivement les pays européens sur le plan économique et politique afin de garantir une paix durable. Les six pays fondateurs de cette Communauté sont Ea Belgique, la France, l’Allemagne, l’Italie, le Luxembourg et les Pays-Bas.

[20]  La circulaire Valls un an et tant d’actes odieux après

[22] Professeur émérite de droit public à l’université Paris Ouest-Nanterre La Défense, docteur en droit avec une thèse sur Le Râle politique du juge adminis­tratif français, agrégée des facultés de droit, cofondatrice du credof (Centre de recherches et d’études sur les droits fondamentaux), directrice de l’École doctorale de sciences juridiques et politiques de Paris X jusqu’à sa retraite universitaire, présidente du gisti de 1985 à 2000, Danièle Lochak, dont la mère est originaire d’Istanbul et le père de Bessarabie, devient française en 1947 par l’effet collectif de la naturalisation de ses parents (extrait de sa biographie sur Wikipédia, ndr).

[23] Voir le n° 99 de décembre 2013 de la revue du gisti, Plein Droit, « « Rom”, n. et adj. : infra-étranger »