Xavier Darcos menace les entreprises employant des sans-papiers

images 2 avec Reuters,

Le gouvernement français menace de fermer les entreprises employant des étrangers en situation irrégulière, dont l’opposition socialiste demande une large régularisation.

Cette mesure annoncée par le ministre du Travail, Xavier Darcos, fera l’objet d’un projet de loi présenté dans les prochaines semaines, a dit le ministre de l’Immigration, Eric Besson.

Elle viserait notamment les secteurs de la restauration, du bâtiment et du nettoyage où travaillent souvent les étrangers en situation irrégulière, au nombre de plusieurs centaines de milliers en France, selon des estimations officielles.

L’annonce intervient alors que se prolonge depuis plusieurs semaines une grève de travailleurs sans papiers qui demandent leur régularisation. Des négociations sont en cours entre les syndicats et le ministère de l’Immigration, et une régularisation est en vue, selon le Gisti (Groupe d’information et de soutien aux immigrés).

« S’il est avéré que l’activité de l’entreprise est construite autour du travail illégal ou de l’emploi de travailleurs étrangers sans titre de travail, on pourra fermer administrativement cette entreprise. Les préfets auront ce nouveau pouvoir », dit le ministre du Travail dans un entretien publié dimanche dans Le Parisien-Aujourd’hui en France.

Il ajoute que dans le cas d’une fermeture, les indemnités dues aux employés seront néanmoins versées, et assure même qu’elles le seraient aux travailleurs étrangers rapatriés.

Xavier Darcos annonce aussi des sanctions contre les donneurs d’ordre acceptant que certains de leurs sous-traitants travaillent avec des étrangers sans papiers. Il évoque la suppression des exonérations de charges sociales.

Le coût du travail illégal est évalué par le ministre à 4% du PIB, soit 60 milliards d’euros, mais Xavier Darcos ne définit pas précisément la notion.

AUBRY DEMANDE UNE LARGE RÉGULARISATION

Les dispositions évoquées par le ministre du Travail feront l’objet d’un projet de loi, a pour sa part annoncé Eric Besson, qui entend doter les autorités « d’un arsenal complet de lutte contre les abus en la matière ».

« Je vais proposer l’inéligibilité à tout appel d’offres privé ou public de toute entreprise qui aurait employé des étrangers en situation irrégulière. Je vais demander à ce que les amendes soient majorées et je vais demander le remboursement des aides publiques », a-t-il énuméré dans C Politique, sur France 5.

Face à ces développements, Martine Aubry a déclaré dimanche que le PS était favorable à une « large » régularisation des étrangers qui revendiquent actuellement des papiers.

« Les Français ont compris que ces milliers de sans-papiers qui sont aujourd’hui exploités dans les entreprises et qui font grève doivent avoir leurs papiers », a dit le Premier secrétaire du PS devant les jeunes socialistes réunis à Grenoble.

Interrogé par Reuters, Stéphane Maugendre, président du Gisti, a estimé que la déclaration de Xavier Darcos visait à donner une image de fermeté artificielle pour compenser l’effet d’une régularisation que le gouvernement, selon lui, prépare.

« Cela fait des années qu’on sait que des pans entiers de l’économie, la restauration, le textile, la construction, s’effondreraient du jour au lendemain si on fermait les entreprises employant des sans-papiers », a-t-il dit.

Le dossier est récurrent dans la société française depuis une vingtaine d’années, le travail des sans-papiers se généralisant dans les secteurs de main d’oeuvre à bas salaires.

Plusieurs faits divers ont illustré le phénomène, comme en 2007, lorsque la police a découvert des personnes dans cette situation sur le chantier de rénovation du Pavillon de la Lanterne, résidence de l’Etat utilisée par le président Nicolas Sarkozy.

Les gouvernements se sont toujours refusés à une régularisation globale demandée par les associations, mais acceptent des régularisations au cas par cas.

A l’automne 2008, le ministre de l’Immigration d’alors, Brice Hortefeux, y avait consenti après une grève de sans-papiers salariés dans la restauration parisienne, soutenue par le patronat.

Des organisations patronales avaient alors défendu leurs salariés en estimant que, vivant en France depuis très longtemps et payant pour certains des impôts sur le revenu, étant même déclarés par leurs employeurs, ils n’avaient pratiquement plus rien de clandestins.

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