Réforme de la rétention des sans-papiers : les associations dénoncent un « régime d’exception »

indexFrançois Béguin

Le ministère de l’intérieur doit présenter, vendredi 28 septembre, en conseil des ministres un projet de loi permettant de retenir jusqu’à seize heures les sans-papiers, un dispositif destiné à remplacer la garde à vue désormais illégale, a indiqué une source proche du dossier. Le projet de loi place ce dispositif « sous le contrôle de l’autorité judiciaire » et abroge « le délit de solidarité » pour les personnes aidant de manière désintéressée un clandestin, a-t-on indiqué de même source.

Depuis une décision de la Cour de cassation le 5 juillet interdisant de placer en garde à vue les sans-papiers, les policiers ne pouvaient retenir les étrangers plus de quatre heures, délai maximal prévu par la procédure de vérification d’identité. Ils estimaient ce temps insuffisant pour engager une éventuelle procédure d’expulsion.

Conscient de ce « vide juridique », le ministre de l’intérieur, Manuel Valls, avait annoncé fin juillet au Sénat qu’il proposerait à l’automne un nouveau « dispositif » garantissant « un équilibre entre le respect des libertés individuelles et les exigences de maîtrise des flux migratoires ». Il avait initialement évoqué une retenue de douze heures au maximum. L’an dernier, sur près de 100 000 étrangers ayant fait l’objet d’une procédure pour séjour illégal, 60 000 avaient été placés en garde à vue, selon les associations.

« RÉGIME D’EXCEPTION »

Stéphane Maugendre, avocat et président du Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti), une association spécialisée dans le conseil juridique aux étrangers, estime qu’il est « inquiétant et scandaleux de mettre en place un régime d’exception à l’égard des étrangers, quelles que soient les garanties qu’il y a derrière. Le régime de droit commun doit être appliqué à tous. »

Il rappelle que les quatre heures de retenue pour vérification d’identité possibles en vertu de l’article 78-2 du Code pénal peuvent déjà être prolongées par le procureur de la République si la personne refuse de donner son identité. Dans l’attente du contenu exact du projet de loi, le président du Gisti considère donc pour l’instant qu’il ne s’agit que d’une garde à vue « dont on aurait changé le nom ».

A la Cimade, association œcuménique d’entraide, on voit dans ce projet de loi « un mauvais signe qui ne paraît pas correspondre aux engagements de François Hollande ». « Il nous semblait que le gouvernement voulait aller vers la fin de l’enfermement des étrangers et il crée un régime supplémentaire de privation de liberté des étrangers », déplore David Rohi, responsable de la commission éloignement de la Cimade. Pour lui, il s’agit d’une mesure « disproportionnée ».

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