Pas de prison pour les sans-papiers qui refusent d’être expulsés

12/05/2011

Photo Richard Mouillaud

La France n’incarcèrera plus les étrangers sans papiers au seul motif qu’ils refuseraient d’être expulsés, en application d’une décision de la justice européenne, mais Paris maintiendra le dispositif de garde à vue et de rétention administrative en cas de séjour irrégulier.

Deux semaines après un arrêt de la cour de justice européenne de Luxembourg jugeant illégale la détention en Italie d’un migrant en situation irrégulière qui a refusé de quitter ce pays, la Chancellerie a diffusé aux cours d’appel et aux parquets une circulaire précisant la «portée» de cette décision.

La Chancellerie demande aux parquets de «se conformer à la décision du 28 avril» en plaçant en garde à vue et en ne poursuivant un étranger qu’en cas d’infractions «détachables du séjour irrégulier ou de soustraction à une mesure d’éloignement».
En clair, un délit autre que le refus d’être expulsé.

Le ministère cite des «comportements de violences envers les personnes dépositaires de l’autorité publique ou de fraudes avérées (faux documents administratifs)» et ceux «visant à faire échec à l’exécution forcée de la mesure d’éloignement par l’autorité administrative lorsque a été préalablement mis en oeuvre le placement en rétention».

«Il conviendra désormais, avant toute poursuite… de s’attacher à caractériser un défaut manifeste de coopération dans la phase d’identification se déroulant pendant la rétention administrative ou de résistance à l’exécution de la procédure forcée d’éloignement», recommande la circulaire.

L’arrêt de la CJUE découle de la «directive retour» européenne de 2008 sur les modalités de reconduite à la frontière qui considère l’emprisonnement incompatible avec l’objectif d’éloigner un étranger.

Cet arrêt, estime en revanche la Chancellerie, ne fait pas obstacle au placement en garde à vue des étrangers sur la base de l’article 621-1 du Ceseda, ni aux mesures de rétention administrative qui peuvent en découler.

Dans ce cas, la chancellerie recommande de formuler des appels, voire des pourvois en cassation contre les décisions des juges de ne pas prolonger la rétention.

«C’est une interprétation erronée de l’arrêt européen», a dit Stéphane Maugendre du Groupe de Soutien et d’information des travailleurs immigrés (Gisti) qui envisage de faire un recours devant le Conseil d’Etat. En revanche, analyse-t-il, la circulaire ministérielle «a ouvert la voie à une modification de la législation française».

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