Le débat français sur le « délit de solidarité » gagne l’Assemblée

index capitalThierry Lévêque, avec Emile Picy 30/04/09

Le débat en France sur le délit d’aide à l’entrée et au séjour d’étrangers en situation irrégulière gagne l’Assemblée nationale où doit être débattue ce jeudi une proposition de loi socialiste pour le réformer.

L’UMP pourrait en éviter l’examen par une motion de procédure, dit-on à l’Assemblée. S’il est examiné malgré tout, un vote est prévu mardi prochain, avec des chances quasi nulles d’adoption, la droite étant largement majoritaire.

Le ministre de l’Immigration, Eric Besson, et le Gisti (Groupe d’information et de soutien aux immigrés) se livrent depuis des semaines une bataille médiatique sur ce sujet.

Le Gisti soutient que ce délit, passible de cinq ans de prison et 30.000 euros d’amende, peut constituer un délit de « solidarité » car il est utilisé contre des personnes aidant pour raisons humanitaires ou amicales des étrangers.

Après la sortie d’un film défendant cette thèse, « Welcome », l’organisation a publié une liste de 32 arrêts de cour d’appel rendus depuis 1986 qui démontrent selon lui ces affirmations.

Eric Besson estime que le « délit de solidarité » n’existe pas car la loi n’a jamais été utilisée dans ce sens et ne sert à ses yeux que pour les « passeurs » et les délinquants réels profitant lucrativement des étrangers.

Il a publié sur le site internet de son ministère une analyse de ces condamnations. Il relève qu’il y est fait mention de comportements tels que l’hébergement en échange d’argent ou de faveurs sexuelles. D’autres délits comme l’escroquerie sont visés dans les arrêts, dit-il.

Stéphane Maugendre, président du Gisti, conteste cette interprétation et estime que l’analyse de cette liste de condamnations, loin d’être exhaustive selon lui, n’est pas pertinente car le délit est souvent utilisé par la police comme arme d’intimidation.

« Il permet (…), dans l’ambiance générale, de faire pression sur des militants, bénévoles ou sur les particuliers, par des perquisitions et des pressions administratives pour isoler encore plus les sans-papiers », a-t-il dit à Reuters.

Le délit en question permet de poursuivre toute personne qui « par aide directe ou indirecte aura facilité ou tenté de faciliter l’entrée, la circulation ou le séjour d’étrangers en situation irrégulière ».

Le PS propose dans son initiative de le limiter aux initiatives à but lucratif, ce qui circonscrirait clairement selon lui les poursuites aux « passeurs » et autres criminels.

Eric Besson a rejeté cette idée. Interrogé sur France Info, il a fait valoir que l’on pouvait avoir une activité délinquante sans forcément être motivé par l’argent.

Dans sa lettre de mission envoyée par Matignon et l’Elysée le 31 mars, Eric Besson s’est vu fixer les objectifs de 27.000 reconduites à la frontière pour 2009 et 5.000 arrestations au titre du délit contesté.

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