Double appel contre les brutalités policières.

logo-liberation-311x113  Béatrice Bantman

Les signataires demandent la libération de Momar Diop.

Le temps des pétitions est revenu. Thème imposé: la violence policière. Exemples choisis: l’évacuation brutale, dimanche 18 mai, d’un immeuble parisien investi par des militants et des sans-logis et l’arrestation musclée d’un sans-papiers, mercredi 14 mai, lors d’une manifestation au Grand Stade de Saint-Denis (93). Conséquence judiciaires: des manifestants molestés par les forces de l’ordre se retrouvent condamnés ou mis en examen.

Deux appels ont déjà été signés par plus de 300 personnalités, associations ou syndicats pour protester contre les brutalités policières et réclamer la libération de Hel Hadj Momar Diop, interpellé au Grand Stade et condamné à quatre mois de prison pour, entre autres délits, «violences à agent». Tous les témoins affirment pourtant qu’il a été roué de coups par les policiers. Parmi les signataires, «indignés par la violence et les insultes racistes» subies par ce Sénégalais, qui vit en France depuis plus de vingt ans, figurent des cinéastes dont Manuel Poirier (prix du Jury au Festival de Cannes), Jacques Audiard ou Enki Bilal, des écrivains comme Dan Franck ou Jean Vautrin, des comédiens, dont Annie Duperey, ainsi que des chercheurs, des universitaires tels Léon Schwartzenberg, des élus dont le sénateur-maire (PCF) d’Aubervilliers, l’ancien ministre Jack Ralite. Tous demandent la libération immédiate et la régularisation de Diop «pour que la justice ne devienne pas une annexe du ministère de l’Intérieur».
Parallèlement, un appel unitaire contre la répression et les violences policières circule depuis hier pour dénoncer l’attitude brutale des forces de police, dimanche, lors de la tentative d’occupation d’un immeuble place d’Iéna, inoccupé depuis six ans et appartenant au Crédit Lyonnais. «Trois militants, qui protégeaient pacifiquement des matraques les familles et leurs enfants, ont été victimes de violences, arrêtés, placés en garde à vue et mis en examen pour rébellion à agent avec arme par destination», rappelle le texte, qui souligne que de nombreux témoignages et images filmées confirment que cette accusation est dénuée de tout fondement et n’est qu’un «montage policier».
Une manipulation du même style est évoquée à propos de l’arrestation et de la condamnation de Diop. Lors de la manifestation devant le Grand Stade, un photographe de l’agence Associated Press a été molesté et une de ses pellicules a été saisie, tandis que la caméra d’un jeune homme qui avait filmé la scène a été confisquée. «Si la version de la police est aussi claire, pourquoi a-t-on fait disparaître les preuves?», interroge Stéphane Maugendre, l’avocat d’El Hadj Momar Diop. Le Syndicat national des journalistes dénonce pour sa part ces violences qui empêchent l’exercice de la profession. Pourtant, deux jours plus tard, au procès de Diop, les versions contradictoires des policiers et un certificat médical qui relevait que la déviation de la cloison nasale dont se plaignait un des policiers était un traumatisme ancien, n’ont pas empêché le président du tribunal de condamner le prévenu pour violence à agent. «Ces violences s’attaquent à des mouvements de chômeurs, de « sans droits et d’exclus, qui s’expriment par les seuls moyens en leur possession: les manifestations, les marches et les occupations. Ils visent aussi les militants associatifs, les citoyens qui leur apportent leur soutien et les journalistes qui font leur travail d’information», conclut l’appel.